CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 8 mars 2007
CERCLAB - DOCUMENT N° 1670
CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 8 mars 2007 : RG n° 05/03206
Publication : Juris-Data n° 339074
Extrait : « Par mention au dossier en date du 11 juillet 2005 reprise dans les visas de l'arrêt avant dire droit du 4 mai 2006, les parties ont été invitées à s'expliquer sur les stipulations d'intérêts et la forclusion consécutive à un éventuel dépassement du montant de l'ouverture de crédit. […]
Enfin, il convient de rappeler qu'aux termes des dispositions de l'article [L. 132-1] du code de la consommation est réputée non [écrite] comme étant abusive une clause qui a pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. A cet égard, une clause contractuelle dispensant le prêteur d'une nouvelle offre préalable lors d'augmentations du crédit initial, qui interviendrait donc sans acceptation préalable de l'emprunteur crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat et doit être réputée non écrite. L'offre préalable du 16 mars 1998 stipule que […]. Cette dernière clause constitue au sens des dispositions précitées de l'article L. 132-1 du code de la consommation une clause abusive en ce qu'elle confère un avantage exclusif au profit du prêteur et au détriment de l'emprunteur. Elle doit être réputée non écrite.
Il ne résulte d'aucune des pièces de la SA BANQUE ACCORD la preuve qu'un avenant à l'offre initiale ou qu'une nouvelle offre préalable soit intervenue prévoyant que le montant. initialement consenti ou le taux des intérêts pratiqués soit augmenté ou révisé. Or, si l'examen de « l’historique du compte trimestriel » révèle qu'entre le 13 mars 1998 et le 25 février 2001, l'utilisation du crédit s'est faite en conformité à l'offre préalable et est restée en deçà du plafond de 4.000 Francs, tel n'est plus le cas à compter du 11 mars 2001 où à la suite de deux achats les 11 et 12 mars de 2.477,22 Francs et 1.247,96 Francs le solde du crédit passe à la somme de 6.745,95 Francs le 25 mars 2001 pour ne plus jamais repasser en dessous du seuil de 4.000 Francs ou 609,80 €. Ce dépassement qui caractérise la défaillance de l'emprunteur constitue le premier incident de paiement non régularisé point de départ du délai biennal de forclusion de l'article L. 311-37 du code de la consommation précité. Or, la SA BANQUE ACCORD a saisi le tribunal d'instance de DUNKERQUE par assignation du 12 janvier 2005. Elle sera donc déclarée irrecevable en son action. »
COUR D’APPEL DE DOUAI
HUITIÈME CHAMBRE SECTION 1
ARRÊT DU 8 MARS 2007
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 05/03206. Jugement (N° 2005/49) rendu le 9 mars 2005 par le Tribunal d'Instance de DUNKERQUE.
APPELANT :
Monsieur X.
né le [date] à [ville] demeurant : [adresse]. Représenté par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour, Assisté de Maître Marc DEBEUGNY, avocat au barreau de DUNKERQUE
INTIMÉE :
BANQUE ACCORD
ayant son siège social : [adresse]. Représentée par la SCP COCHEME-KRAUT-LABADIE, avoués à la Cour, Assistée de Maître Xavier BRUNEVAL, avocat au barreau de DUNKERQUE
DÉBATS à l'audience publique du 5 décembre 2006, tenue par Mme PAOLI magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 NCPC). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme DESBUISSONS
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : M. SCHAFFHAUSER, Président de chambre, Mme PAOLI, Conseiller, M. BOUGON, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 8 mars 2007 après prorogation du délibéré du 15 février 2007 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par M. SCHAFFHAUSER, Président et Mme DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 16 NOVEMBRE 2006
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] Vu le jugement réputé contradictoire rendu par le Tribunal d'instance de Dunkerque le 9 mars 2005 ;
Vu l'appel formé le 24 mai 2005 par M. X. ;
Vu les conclusions déposées le 15 septembre 2006 pour M. X. ;
Vu les conclusions déposées le 16 octobre 2006 pour la société BANQUE ACCORD ;
Vu la mention au dossier du 11 juillet 2005 invitant les parties à présenter leurs observations sur la preuve littérale des intérêts conventionnels ainsi que sur les conséquences quant au point de départ du délai biennal de forclusion d'un éventuel dépassement du montant de l'ouverture de crédit ;
Vu l'arrêt avant dire droit de la Cour d'appel de DOUAI du 4 mai 2006 ;
Vu la comparution personnelle des parties en date du 14 juin 2006 ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 16 novembre 2006 ;
* * *
Selon offre préalable acceptée le 16 mars 1998 la société BANQUE ACCORD a consenti pour une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction à M. X. une ouverture de crédit, utilisable par fractions et assortie d'une carte de crédit, à taux d'intérêts stipulé révisable d'un montant de 4.000 Francs susceptible d'être porté à la somme de 140.000 Francs, remboursable par échéances mensuelles dont le montant n'est pas précisé, compte tenu des intérêts au taux effectif global de 15 %.
Il était également stipulé que le taux d'intérêt est révisable en fonction des variations en hausse ou en baisse du taux de base que la société BANQUE ACCORD applique aux opérations de même nature et qui figure dans les barèmes qu'elle diffuse auprès du public.
Par lettre recommandée en date du 5 février 2004, dont l'avis de réception a été signé le 17 février, la société BANQUE ACCORD a notifié à M. X. la déchéance du terme de cette ouverture de crédit, et l'a mis en demeure de lui payer sous huitaine la somme de 9.258,32 Euros.
Par assignation du 12 janvier 2005 la société BANQUE ACCORD a saisi le tribunal d'instance de Dunkerque d'une demande formée à l'encontre de M. X. en paiement de la somme de 9.801,02 Euros augmentée des intérêts au taux de 11,34 % l'an à compter du 5 février 2004.
[minute page 3] Le jugement visé ci-dessus condamne M. X. à payer à la Société Anonyme BANQUE ACCORD la somme de 9.194,61 Euros, dont 1.108,56 Euros au titre des intérêts échus, avec intérêts au taux légal à compter du 5 février 2004.
M. X. a interjeté appel du jugement faisant valoir qu'il n'était pas le signataire de l'offre préalable que lui oppose la société de crédit.
Une mesure de comparution personnelle des parties afin de vérifier l'écriture et la signature contestée a été ordonnée et a été effectuée le 14 juin 2006.
A l'issue de cette mesure d'instruction M. X. conclut le 15 septembre 2006 à l'infirmation du jugement et au rejet des demandes dirigées contre lui excipant d'un manquement de la banque à ses obligations et d'un vice du consentement, il sollicite donc à titre de dommages-intérêts la somme de 3.000 € outre 2.000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La SA BANQUE ACCORD conclut le 16 octobre 2006 à la confirmation du jugement en ce qu'il porte sur la somme en principal et à titre incident à sa réformation en ce qui concerne le taux d'intérêt à appliquer et le montant de l'indemnité conventionnelle pour lesquels elle sollicite un taux de 11,34 % et la somme de 606,41 €. Elle sollicite aussi 1.000 € à titre de dommages-intérêts et 1.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La SA BANQUE ACCORD rappelle que malgré les dénégations de M. X. l'expert graphologue est formel quand il lui impute la signature contestée.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
1. Pour s'opposer aux demandes formées contre lui M. X. soutient tout d'abord que la société de crédit a manqué à ses obligations de vérification tant des renseignements donnés lors de la souscription du contrat que de la signature apposée sur l'offre préalable eu égard à son mode de souscription.
Ces allégations de M. X. ne sont étayées sur aucun argument de droit précis ou éléments de fait mais, qui plus est, fussent-elles exactes ces fautes et manquements ne préjudicieraient qu'à la société de crédit qui ne pourrait plus se prévaloir de l'acte. Au surplus, au cas présent, l'offre préalable est conforme aux dispositions des articles L. 121-20-8 et suivants et L. 311-8 et suivants du code de la consommation. Par ailleurs, M. X. qui invoque les conditions de souscription du contrat ni ne soutient ni n'établit qu'ayant voulu se rétracter dans le délai de sept jours, il n'ait pu le faire. Enfin, s'agissant de la signature litigieuse, l'expert graphologue, après avoir analysé les signatures de question et de comparaison conclut que l'existence de similitudes sur 7 points caractéristiques d'une signature conclut de manière formelle que M. X. est bien le signataire de l'offre préalable litigieuse, elle précisait également lors de la comparution des parties sur interrogation du conseil de M. X. que la structure globale de cette signature rendait son imitation quasiment impossible.
[minute page 4] L'offre préalable est régulière en la forme et M. X. en est bien le signataire.
M. X., au visa de l'article 1109 du code civil, soutient ensuite que son consentement a été vicié sans argumenter précisément sur le dol, l'erreur ou la violence.
Si la teneur et la généralité de ses écritures excluent qu'il se réfère à la violence ou au dol mais plus probablement à l'erreur, il convient néanmoins de constater qu'il n'articule ce moyen autour d'aucun point ou élément précis de fait ou de droit de l'offre litigieuse sur lequel son erreur aurait portée ; en outre, une difficulté de lecture n'infère pas nécessairement l'incompréhension intellectuelle du mécanisme financier désormais commun dans nos sociétés, du crédit. De surcroît, M. X. qui ne soutient pas être incapable faisant l'objet d'une mesure de tutelle ou de curatelle, ne conteste pas avoir reçu et utilisé les fonds mis à sa disposition grâce à cette offre préalable.
M. X. sera débouté de ce moyen et de ses demandes en dommages-intérêts. M. X. et la société BANQUE ACCORD ont valablement contracté à l'occasion de l'offre préalable du 16 mars 1998.
2. Par mention au dossier en date du 11 juillet 2005 reprise dans les visas de l'arrêt avant dire droit du 4 mai 2006, les parties ont été invitées à s'expliquer sur les stipulations d'intérêts et la forclusion consécutive à un éventuel dépassement du montant de l'ouverture de crédit.
Aux termes de l'article L. 311-37 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable lors de la conclusion du contrat, les actions nées d'un contrat de crédit à la consommation doivent être engagée à peine de forclusion, dans les deux ans de l'événement que leur a donné naissance ; S'agissant d'une action en paiement, le point de départ du délai de forclusion est fixé à la date de l'exigibilité des sommes dont le recouvrement est poursuivi. Plus précisément dans le cas d'une ouverture de crédit d'un montant déterminé et reconstituable, assortie de l'obligation de remboursement à échéances convenues, le point de départ de ce délai se situe au moment où le montant du dépassement maximum est convenu n'est pas régularisé, cette situation constituant un incident caractérisant la défaillance de l'emprunteur.
Par ailleurs, en matière de crédits utilisables par fractions, l'article L. 311-9 du code de la consommation rappelle l’« obligation d'une offre préalable pour le contrat initial et pour toute augmentation du crédit consenti ». Si lors d'un renouvellement du contrat initial cet article dispense le prêteur de soumettre à l'acceptation de l'emprunteur une nouvelle offre préalable, cette dispense ne s'étend toutefois pas aux nouvelles ouvertures de crédits auxquelles doivent être assimilées toutes modification du montant du crédit ou du taux du crédit précédemment consenti, lesquelles doivent donc être conclues dans les termes d'une offre préalable répondant aux exigences des dispositions des articles L. 311-9-1 et L. 311-10 du même code.
[minute page 5] Enfin, il convient de rappeler qu'aux termes des dispositions de l'article L. 321-1 [N.B. cette première ligne est également présente en fin de page 4 sur la minute originale – lire plutôt L. 132-1] du code de la consommation est réputée non [écrite] comme étant abusive une clause qui a pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. A cet égard, une clause contractuelle dispensant le prêteur d'une nouvelle offre préalable lors d'augmentations du crédit initial, qui interviendrait donc sans acceptation préalable de l'emprunteur crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat et doit être réputée non écrite.
L'offre préalable du 16 mars 1998 stipule que le montant de l'ouverture de crédit initialement autorisée est de 4.000 Francs. Il était également stipulé au recto de l'offre préalable aux conditions générales d'utilisation à l'article 3 découvert autorisé : « l'emprunteur s’engage à ce que le découvert de son compte ne soit, à aucun moment, supérieur au découvert autorisé par SA BANQUE ACCORD. Dans un premier temps, ce montant est celui indiqué au recto de la présente offre. Ultérieurement, il pourra varier dans les conditions suivantes sans que cela constitue une nouvelle offre préalable ; être augmenté en une ou plusieurs fois, jusqu'à concurrence du montant maximum fixé à l'article L. 311-3 du code de la consommation (actuellement de 140.000 Francs) - sur demande écrite de l'emprunteur et acceptée par la SA BANQUE ACCORD, - sur décision de SA BANQUE ACCORD d'accorder une plus large facilité à l'emprunteur qui manifeste son acceptation expresse par l'utilisation de la faculté de découvert au delà du montant précédemment autorisé et si celui-ci ne la refuse pas être diminué sur demande écrite de 1’emprunteur et acceptée par SA BANQUE ACCORD ».
Cette dernière clause constitue au sens des dispositions précitées de l'article L. 132-1 du code de la consommation une clause abusive en ce qu'elle confère un avantage exclusif au profit du prêteur et au détriment de l'emprunteur. Elle doit être réputée non écrite.
Il ne résulte d'aucune des pièces de la SA BANQUE ACCORD la preuve qu'un avenant à l'offre initiale ou qu'une nouvelle offre préalable soit intervenue prévoyant que le montant. initialement consenti ou le taux des intérêts pratiqués soit augmenté ou révisé. Or, si l'examen de « l’historique du compte trimestriel » révèle qu'entre le 13 mars 1998 et le 25 février 2001, l'utilisation du crédit s'est faite en conformité à l'offre préalable et est restée en deçà du plafond de 4.000 Francs, tel n'est plus le cas à compter du 11 mars 2001 où à la suite de deux achats les 11 et 12 mars de 2.477,22 Francs et 1.247,96 Francs le solde du crédit passe à la somme de 6.745,95 Francs le 25 mars 2001 pour ne plus jamais repasser en dessous du seuil de 4.000 Francs ou 609,80 €.
Ce dépassement qui caractérise la défaillance de l'emprunteur constitue le premier incident de paiement non régularisé point de départ du délai biennal de forclusion de l'article L. 311-37 du code de la consommation précité.
Or, la SA BANQUE ACCORD a saisi le tribunal d'instance de DUNKERQUE par assignation du 12 janvier 2005. Elle sera donc déclarée irrecevable en son action.
Le jugement entrepris sera infirmé.
[minute page 6] La Société de crédit qui succombe dans ses prétentions supportera la charge des dépens de première instance et d'appel. Les circonstances de l'espèce justifient enfin que soient écartées l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
INFIRME le jugement ;
Statuant à nouveau :
DÉCLARE la SA BANQUE ACCORD irrecevable en son action ;
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;
CONDAMNE la SA BANQUE ACCORD aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
A. DESBUISSONS D. SCHAFFHAUSER
- 5727 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Office du juge - Relevé d’office - Régime - Mise en œuvre - Modalités
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- 6631 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 2 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Obligation de faire une offre
- 6633 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 4 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Clauses abusives