CASS. CIV. 1re, 16 février 1994
CERCLAB - DOCUMENT N° 2089
CASS. CIV. 1re, 16 février 1994 : pourvoi n° 91-10313 ; arrêt n° 295
Extrait : « Attendu que, pour statuer ainsi, le tribunal d’instance a relevé d’office le moyen pris du caractère abusif de la clause litigieuse sans recueillir au préalable les observations des parties ; que, ce faisant, le tribunal a violé » l’article 16 NCPC.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 16 FÉVRIER 1994
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 91-10313. Arrêt n° 295.
DEMANDEUR à la cassation : SARL TAC
DÉFENDEUR à la cassation : Monsieur X.
LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 7 janvier 2004.
Sur le premier moyen :
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu l’article 16 du nouveau Code de procédure civile ;
CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que, selon ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, observer le principe de la contradiction ;
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que Monsieur X. a accepté le devis proposé par la société TAC-KCP pour la réfection de la peinture de son véhicule automobile ; que, mécontent du résultat, il a assigné en paiement de dommages et intérêts la société qui lui a opposé une clause du devis stipulant un exclusion de garantie au cas où la peinture serait détériorée par la rouille ; qu’après avoir déclaré cette clause abusive, le jugement attaqué a accueilli la demande de Monsieur X. ;
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que, pour statuer ainsi, le tribunal d’instance a relevé d’office le moyen pris du caractère abusif de la clause litigieuse sans recueillir au préalable les observations des parties ; que, ce faisant, le tribunal a violé le texte susvisé ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le second moyen, CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 27 septembre 1990, entre les parties, par le tribunal d’instance de Dijon ; remet en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le Tribunal d’instance de Beaune.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyens produits par me Blondel, avocat aux conseils pour la société TAC.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
« Il est reproché au jugement attaqué d'avoir réputé non écrite la clause d'exclusion de garantie en cas de détérioration de la peinture par l'effet de la rouille figurant aux le devis et la facture respectivement établie par la société chargée des travaux de réfection des 21 et 25 août 1989 et d'avoir par voie de conséquence condamné ladite société à effectuer, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, les travaux de remise en état du véhicule litigieux, étant précisé que ceux-ci seront limités à a préparation de la carrosserie et à la remise en peinture, faute de quoi les travaux seront effectués par une entreprise choisie par M. RICHI, aux frais de la venderesse ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AU MOTIF QUE l'article 1134 du code civil dispose notamment que les conventions légalement formées tiennent Lieu de Loi à ceux qui Les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi ; que l'article 1135 du même code ajoutent qu'elles obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d' après sa nature ; que dans la description manuscrite des travaux à effectuer, le devis établi par la société LCP fait mention des postes : « reprisse carrosserie » et « peinture complète » ; qu'au verso du document figurent les conditions auxquelles la garantie est soumise et que « les détériorations de la peinture par l'effet de la rouille » sont expressément exclues de celle-ci.
ET AU MOTIF ENCORE QU'il est constant que la société LCP est un professionnel et que le demandeur est un consommateur ; qu'en l'état actuel de son évolution, la jurisprudence prohibe le refus des juges du fond de faire application d'une clause contractuelle claire et précise, sauf à caractériser en quoi elle serait constitutive d'un abus de nature à la priver d'effet ; qu'en l'espèce, la clause excluant la garantie en cas de détérioration de la peinture par l'effet de la rouille est imposée au défendeur, non professionnel ou consommateur, par un abus de la puissance économique de la société LCP et confère à cette dernière un avantage excessif qui constitue une violation des articles 1134 et 1135 du code si bien que la clause doit être dans la mesure où, en se voyant confier par Monsieur X. le soin de repeindre le véhicule litigieux, la Société LCP ne pouvait ignorer que le demandeur n'entendait pas voir recouvrir de peinture une carrosserie rouillée mais suffisamment préparée pour que la rouille ne réapparaisse pas dans un délai de cinq mois et après que le véhicule ait parcouru seulement 2.500 km ;
Violation des art. 16 et 843 du NCPC
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d' office le moyen tiré du caractère abusif d'une clause contractuelle claire et précise, sans provoquer de débat contradictoire, cependant qu’il ne résulte ni du jugement, ni du dossier de procédure qu’un tel moyen ait été invoqué ou soumis au feu de la contradiction, le Tribunal d'instance méconnaît les exigences de l'article 16 du nouveau code de procédure civile, ensemble viole l'article 843 du même code. »
SECOND MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
« Il est reproché au jugement attaqué d'avoir réputé non écrite la clause d'exécution de garantie en cas de détérioration de la peinture par l'effet de la rouille figurant sur le devis et la facture respectivement établis pan la société LCP les 21 et 25 août 1989 et d'avoir condamné ladite société à effectuer, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision, les travaux de remise en état du véhicule litigieux étant précisé que ceux-ci seront limités à la préparation de la carrosserie et à la remise en peinture et qu'en cas de refus opposé par la société LCP, les travaux seront effectués par une entreprise choisie par M. X. aux frais de la défenderesse ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE l'article 1134 du Code civil dispose notamment que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi que l'article 1135 du même Code ajoute qu'elles obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature ; que dans la description manuscrite des travaux à effectuer, le devis établi par la Société LCP fait mention des postes « reprise carrosserie » et « peinture complète » qu'au verso du document, figurent les conditions auxquelles la garantie est soumise et que « les détériorations de la peinture par l'effet de la rouille...» sont expressément exclues de celle-ci ;qu'il est constant que la Société LCP est un professionnel et que le demandeur est un consommateur ; qu'en l'état actuel de son évolution, la jurisprudence prohibe le refus des juges du fond de faire application d'une clause contractuelle claire et précise, sauf à caractériser en quoi elle serait constitutive d'un abus de nature à la priver d'effet ; qu'en l'espèce, la clause excluant la garantie en cas de détérioration de la peinture par l'effet de la rouille est imposée au défendeur, non-professionnel ou consommateur, par un abus de la puissance économique de la Société LCP et confère à cette dernière un avantage excessif qui constitue une violation des articles 1134 et 1135 du Code civil ; Que cette clause doit donc être réputée non écrite ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS QUE D'UNE PART la clause litigieuse n’est visée par aucun des articles du décret n° 78-464 du 24 mars 1978 pris en application du chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection de l'information du consommateur de produits et de services, si bien que le Tribunal s'est cru autorisé à tort à réputer non écrite une clause au seul prétexte qu'elle répondait en substance aux critères de l’article 35 alinéa 1 de la loi précitée ; qu' ainsi le Tribunat viole par fausse application ledit article, ensemble les articles 1134 et 1135 du code civil ;
ALORS QUE D'AUTRE PART et en toute hypothèse dans ses écritures, la société chargée des travaux de peinture énonçait très exactement qu'était exclu du champ contractuel le remplacement des éléments de carrosserie atteints par la rouille, seul procédé de nature à éviter la réapparition du phénomène de corrosion, ladite société ayant uniquement été chargée de la peinture après préparation de la carrosserie, le client faisant son affaire personnelle de la tôlerie, d'où la clause selon laquelle « la garantie ne couvre pas les détériorations de la peinture par l'effet de la rouille » ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce moyen central, le Tribunal : - méconnaît les exigences de l'article 455 du nouveau code de procédure civile ; - prive son jugement de base légale au regard des articles 1134 et 1135 du code civil ;
ET ALORS ENFIN QUE le Tribunal, pour mettre en relief le caractère abusif de la clause, se borne à énoncer qu'elle était imposée au non professionnel et consommateur par un abus de puissance économique du professionnel et qu'elle conférait à celui-ci un avantage excessif ; qu'en statuant ainsi par référence à une jurisprudence de la Cour de cassation et à la lettre de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sans préciser en quoi, eu égard aux circonstances de l'espèce, il y avait eu dans les faits abus de puissance économique et avantage excessif pour le professionnel, le Tribunal : - méconnaît derechef les exigences de l'article 455 du nouveau code de procédure civile en ne motivant pas sa décision en fait ; - prive son jugement de base légale au regard des articles 1134 et 1135 du code civil en ne mettant pas la Cour de cassation à même d' exercer son contrôle sur la légalité de la décision déférée à censure, décision réputant non écrite une clause prétendument abusive.
- 5726 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Office du juge - Relevé d’office - Régime - Mise en œuvre - Respect du contradictoire
- 6116 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du professionnel - Clauses limitatives et exonératoires - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 - Typologie selon la nature des obligations
- 6154 - Code civil et Droit commun - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Droit antérieur à l’ordonnance du 10 février 2016 - Ancien art. 1134 C. civ.
- 6155 - Code civil et Droit commun - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Droit antérieur à l’ordonnance du 10 février 2016 - Ancien art. 1135 C. civ.