CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 15 janvier 2025

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 15 janvier 2025
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 6
Demande : 22/20588
Date : 15/01/2025
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 7/10/2022
Décision antérieure : T. com. Paris (6e ch.), 17 novembre 2022 : RG n° 2022015066
Décision antérieure :
  • T. com. Paris (6e ch.), 17 novembre 2022 : RG n° 2022015066
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 23710

CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 15 janvier 2025 : RG n° 22/20588

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « À hauteur d'appel, le tribunal ayant écarté bon nombre des moyens de M. X. et de la société MJS au motif que le code de la consommation n'est pas applicable en l'espèce (puisque le prêt a un caractère commercial en ce qu'il entre dans le champ d'activité de la société à responsabilité limitée MJS) M. X. et la société MJS relèvent qu'ils fondaient également leurs prétentions sur le droit commun, au visa de divers textes du code civil. »

2/ « Le tribunal énonce que la société MJS et M. X. entendent se prévaloir des articles L. 212-1, R. 212-1 et R. 212-2 du code de la consommation pour conclure que la clause de déchéance du terme prévue au contrat de prêt doit être qualifiée d'abusive, alors que le code de la consommation n'est pas applicable au cas d'espèce.

M. X. et la société MJS soulignent avoir invoqué également, et soutenir encore, l'application des dispositions du droit commun. Ils rappellent les termes de l'article 10 du contrat de prêt relatif à l'exigibilité anticipée qui stipule : « Ces sommes seront en outre exigibles si bon semble au prêteur dans un des cas suivants (…) en cas de non-paiement à son échéance d'une somme quelconque devenue exigible », pour soutenir qu'au regard des dispositions de l'article 1171 du code civil, cette clause crée un déséquilibre significatif en ce qu'elle ne contient pas de réciprocité, en ce qu'elle crée une soumission de l'emprunteur, et en ce qu'elle permet de solliciter un montant manifestement disproportionné, à savoir l'ensemble des échéances à échoir. C'est la raison pour laquelle la jurisprudence considère ce type de clause qui autorise de façon anticipée l'exigibilité des sommes abusive, en ce qu'elle est de nature à laisser croire que l'établissement de crédit dispose d'un pouvoir discrétionnaire et que l'emprunteur ne peut donc pas contester le bienfondé de la déchéance du terme. En outre, la clause ne prévoit pas l'envoi d'une mise en demeure avant l'exigibilité des échéances, ce qui établit son caractère abusif.

L'intimé répond qu'en application de l'article 1171 du code civil, une clause ne crée pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat si elle est claire, nécessaire et proportionnelle. En premier lieu, la mention « si bon semble au prêteur » signifie uniquement qu'il s'agit d'une simple faculté pour le prêteur d'appliquer la déchéance du terme. Les cas dans lesquels le prêteur peut se prévaloir de la clause de déchéance du terme sont strictement énumérés, ce qui est gage de sécurité pour l'emprunteur. Deuxièmement, sur l'absence de réciprocité et la soumission de l'emprunteur, un contrat de prêt est un contrat unilatéral au sens de l'article 1106 alinéa 2 du code civil - il n'impose d'obligation qu'à l'emprunteur, celle de rembourser la somme prêtée - dès lors on voit mal comment une clause de déchéance du terme prévue dans un contrat de prêt pourrait avoir une réciprocité, puisque le contrat de prêt lui-même est unilatéral. Troisièmement, s'agissant de la soumission de l'emprunteur, cet argument n'est nullement étayé, et parfaitement déconcertant, la possibilité de prévoir une clause de déchéance du terme est expressément prévue par la loi, le Crédit du Nord a ni plus ni moins fait application d'une faculté légale. Quatrièmement, sur le montant manifestement disproportionné - correspondant à l'ensemble des échéances à échoir - que l'emprunteur peut solliciter, tel est le principe d'une clause de déchéance du terme, dûment autorisée par la loi, et l'argument est dépourvu de toute pertinence. Enfin, cinquièmement, en ce qui concerne l'envoi d'une mise en demeure préalable, ni la loi, ni la jurisprudence ne sanctionnent par la nullité ou le non-écrit, une clause de déchéance du terme qui ne prévoirait pas l'envoi d'une mise en demeure préalable, la jurisprudence citée par les appelants concerne un particulier pouvant se prévaloir des dispositions protectrices du code de la consommation, et non une société commerciale telle que la société MJS.

Sur ce, L'article 1171 du code civil visé par les appelants, dans sa rédaction issue de la loi n°2018-287 du 20 avril 2018 et en vigueur au 1er octobre 2018, et applicable aux faits de l'espèce, le contrat de prêt étant en date du 11 avril 2019, dispose que : « Dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties, qui créé un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite. L'appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix à la prestation ».

L'article 1171 du code civil fait partie du droit commun des contrats et peut s'appliquer à ceux conclus entre professionnels, ce dont en l'espèce ne disconviennent pas les parties, lesquelles s'opposent uniquement sur la question de l'existence d'un déséquilibre significatif entre les parties qui serait né - ou pas - de la clause critiquée, précitée.

En l'espèce, l'intimé répond utilement à chacun des points de l'argumentation développée par les appelants, lesquels en définitive échouent à démontrer qu'un quelconque déséquilibre existerait entre les droits et obligations des parties au contrat comme résultant de la rédaction ou de l'application de la clause d'exigibilité anticipée. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 6

ARRÊT DU 15 JANVIER 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 22/20588 (19 pages). N° Portalis 35L7-V-B7G-CG2EU. Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 novembre 2022 - tribunal de commerce de Paris 6ème chambre - RG n° 2022015066.

 

APPELANTS :

Monsieur X.

[Adresse 4], [Localité 11]

SARL MJS

[Adresse 6], [Localité 9], N°SIREN : XXX, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentés par Maître Anthony LEREBOURG de la SELAS VERSUS & AVOCATS, avocat au barreau de Paris, toque : C0546

 

INTIMÉE :

La SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, venant aux droits et obligations de la société CRÉDIT DU NORD

aux termes d'un traité de fusion en date du 15 juin 2022, publié au BODACC et au BALO le 29 juin 2022, et avec effet au 1er janvier 2023. [Adresse 5], [Localité 10], N° SIRET : B YYY, agissant poursuites et diligences de son président du conseil d'administration domicilié en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Loren MAQUIN-JOFFRE de la SELARL A.K.P.R., avocat au barreau de Val-de-Marne

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 12 novembre 2024, en audience publique, devant la Cour composée de : M. Marc BAILLY, président de chambre, M. Vincent BRAUD, président de chambre, Mme Pascale SAPPEY-GUESDON, conseillère chargée du rapport, qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS

ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Marc BAILLY, président de chambre et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 7 décembre 2022, M. X. et la société MJS ont interjeté appel du jugement en date du 17 novembre 2022 par lequel le tribunal de commerce de Paris saisi par voie d'assignation en date du 14 décembre 2021 délivrée à la requête de la société Crédit du nord - aux droits de laquelle à présent vient la Société Générale, a statué ainsi :

« Déboute la SARL MJS et M. X. de toutes leurs demandes ;

Condamne la SARL MJS à payer à la SA CREDIT DU NORD la somme principale de 972,94 euros au titre du solde débiteur en compte courant, avec intérêts au taux légal à compter du 27 octobre 2020, date de clôture effective du compte, jusqu'à parfait paiement, avec capitalisation des intérêts ;

Condamne solidairement la SARL MJS et M. X., pris en sa qualité de caution, à payer à la SA CREDIT DU NORD au titre du prêt de 85.000 euros, la somme principale de 11 198,25 euros au titre des échéances impayées des termes de janvier à octobre 2020, avec intérêts au taux conventionnel majoré de 4,91 % sur chacune des échéances impayées à compter de leur exigibilité et jusqu'à parfait paiement avec capitalisation des intérêts et pour M. X. conformément à son engagement de caution ;

Condamne solidairement la SARL MJS et M. X., pris en sa qualité de caution, à payer à la SA CREDIT DU NORD :

- la somme principale de 68 701,64 euros au titre du capital restant dû au 26 novembre 2020, avec intérêts au taux conventionnel majoré de 4,91 % à compter du 27 novembre 2020 et jusqu'à parfait paiement,

- la somme de 2 061,05 euros au titre de l'indemnité d'exigibilité anticipée, avec intérêts au taux conventionnel majoré de 4,91 % à compter du 27 novembre 2020 et jusqu'à parfait paiement ;

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par l'article 1342-2 du code civil et pour M. X. dans la limite de son engagement de caution ;

Condamne in solidum la SARL MJS et M. X. à verser à la SA CREDIT DU NORD la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum la SARL MJS et M. X. aux dépens (...). »

***

À l'issue de la procédure d'appel clôturée le 8 octobre 2024 les prétentions des parties s'exposent de la manière suivante.

Au dispositif de leurs dernières conclusions, communiquées par voie électronique le 19 mai 2023, les appelants présentent, en ces termes, leurs demandes à la cour :

'Il est demandé à la Cour de :

Vu les articles 1171, 1225, 1231-5, 1344, L. 1112-1, 1343-5 & 1305-5 du Code civil,

Vu les pièces versées aux débats,

Vu la jurisprudence,

JUGER la société MJS et Monsieur X. bien fondés en leurs demandes ;

JUGER que la SA Crédit du Nord a manqué à son devoir d'information ;

JUGER que la SA Crédit du Nord a manqué à son obligation de vérifier la solvabilité de l'emprunteur et de la caution ;

JUGER abusive la clause prononçant la déchéance du terme ;

JUGER que la SA Crédit du Nord n'a pas régulièrement adressé de mise en demeure préalable à la société MJS et Monsieur X. ;

JUGER que la SA Crédit du Nord a abusivement clôturé le compte de la société MJS sans l'en avertir ;

JUGER que la SA Crédit du Nord a manqué à son obligation de conseil et de mise en garde ;

JUGER que la SA Crédit du Nord n'a pas adressé de lettre d'information annuelle ;

En conséquence, à titre principal,

INFIRMER le jugement du 17 novembre 2022 rendu par le Tribunal de Commerce de Paris en toutes ses dispositions ;

DEBOUTER la SA Société Générale de l'ensemble de ses demandes, fins, moyens et prétentions ;

JUGER non écrite la clause de déchéance du terme invoquée par la SA Société Générale ;

JUGER que la SA Société Générale ne prouve pas les impayés qu'elle impute à la société MJS ;

En conséquence, à titre reconventionnel,

INFIRMER le jugement du 17 novembre 2022 rendu par le Tribunal de Commerce de Paris en toutes ses dispositions ;

REDUIRE la clause d'indemnité d'exigibilité anticipée à 1 € ;

REDUIRE la clause de déchéance à 1 € ;

CONDAMNER la SA Société Générale à la somme de 82.680,94 € à titre de dommages et intérêts ;

En conséquence, à titre subsidiaire,

ORDONNER le report ou l'échelonnement du paiement des sommes dues ;

ORDONNER que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital ;

En conséquence, en tout état de cause,

DEBOUTER la SA Société Générale de l'ensemble de ses demandes, fins, moyens et prétentions ;

CONDAMNER la SA Société Générale à verser à Monsieur X. la somme de 3.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNER la SA Société Générale aux entiers dépens, y compris ceux de première instance.'

[*]

Au dispositif de ses dernières conclusions, communiquées par voie électronique le 1er juin 2023, l'intimé

présente, en ces termes, ses demandes à la cour :

« Vu l'article L. 236-3 du Code de commerce,

Vu les articles 4, 6, 1103, 1106, 1171, 1194, 1225, 1231-5, 1305-5, 1343-5 et 1344 du Code civil,

Vu l'article L. 332-1 ancien du Code de la consommation,

Vu l'article L. 313-12 du Code monétaire et financier,

Vu les articles 5, 514, 514-1 et 700 du Code de procédure civile,

Vu les motifs précités,

Il est demandé à la Cour de :

PRENDRE ACTE que la SOCIETE GENERALE vient aux droits du CREDIT DU NORD ;

Et par conséquent,

- DECLARER l'action de la SOCIETE GENERALE recevable et bien fondée ;

- DEBOUTER la SARL MJS et Monsieur X. de toutes leurs demandes, fins, moyens et prétentions ;

- CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de PARIS le 17 novembre 2022, en ce qu'il a

'CONDAMNE la SARL MJS à payer à la SA CREDIT DU NORD (devenu SOCIETE GENERALE) la somme principale de 972,94 euros au titre du solde débiteur en compte courant, avec intérêts au taux légal à compter du 27 octobre 2020, date de clôture effective du compte, jusqu'à parfait paiement avec capitalisation des intérêts ;

CONDAMNE solidairement la SARL MJS et Monsieur X., pris en qualité de caution, à payer à la SA CREDIT DU NORD (devenu SOCIETE GENERALE) au titre du prêt de 85.000 euros, la somme principale de 11.198,25 euros au titre des échéances impayées des termes de janvier à octobre 2020 avec intérêts au taux conventionnel majoré de 4,91% sur chacune des échéances impayées à compter de leur exigibilité et jusqu'à parfait paiement avec capitalisation des intérêts pour Monsieur X., conformément à son engagement de caution ;

CONDAMNE solidairement la SARL MJS et Monsieur X., pris en qualité de caution, à payer à la SA CREDIT DU NORD (devenu SOCIETE GENERALE) :

- la somme principale de 68.701,64 euros au titre du capital restant dû au 26 novembre 2020, avec intérêts au taux conventionnel majoré de 4,91% à compter du 27 novembre 2020 et jusqu'à parfait paiement ;

- la somme de 2.061,05 euros au titre de l'indemnité d'exigibilité anticipée, avec intérêts au taux conventionnel majoré de 4,91% à compter du 27 novembre 2020 et jusqu'à parfait paiement.

ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par l'article 1342-2 du code civil et pour Monsieur X. dans la limite de son engagement de caution ;

CONDAMNE in solidum la SARL MJS et Monsieur X. à verser à la SA CREDIT DU NORD (devenu la SOCIETE GENERALE) la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE in solidum la SARL MJS et Monsieur X. aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 90,93 € dont 14,94 € de TVA.

CONDAMNER in solidum la SARL MJS et Monsieur X. à verser à la SOCIETE GENERALE la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNER in solidum la SARL MJS et Monsieur X. aux entiers dépens. »

Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs conclusions précitées.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La société MJS, active dans le domaine de la restauration, a été titulaire d'un compte courant professionnel ouvert dans les livres de la banque Crédit du Nord par convention en date du 4 mars 2019.

Par acte sous seing privé du 11 avril 2019, le Crédit du Nord a accordé à la société MJS, un prêt d'un montant de 85.000 euros destiné à financer des travaux d'aménagement et d'installation, au taux d'intérêt annuel de 1,91%, remboursable en 84 mensualités de 1 099,58 euros à compter du 2 mai 2019.

Par acte sous seing privé du 28 mars 2019, M. X., gérant de la société MJS, en garantie du remboursement de ce prêt s'est porté caution solidaire de l'emprunteur à hauteur de la somme de 110 500 euros incluant principal, intérêts, commissions, frais et accessoires.

Les échéances du prêt n'étant plus remboursées depuis le 2 janvier 2020, à défaut de provision suffisante du compte, la société Crédit du Nord en a informé M. X. en sa qualité de caution, par courrier du 17 février 2020.

Le fonctionnement du compte courant ne donnant plus satisfaction à la banque, cette dernière a informé la société MJS, par courrier recommandé avec demande d'avis de réception daté du 29 juin 2020, de sa décision de dénoncer la convention de compte à l'expiration d'un préavis de 60 jours courant à compter de la réception de la présente. Le courrier adressé à la société à l'adresse de son siège social [Adresse 7], a été retourné à l'expéditeur avec la mention NPAI.

Par courrier recommandé avec demande d'avis de réception daté du 17 novembre 2020 adressé à la société MJS au [Adresse 3] à [Localité 12], la banque a indiqué qu'à défaut de provision suffisante du compte, l'échéance n'a pu être débitée, et qu'à défaut de régularisation de la situation sous huit jours, elle ferait jouer la clause de déchéance du terme rendant immédiatement exigible la totalité de sa créance, ce qu'elle a fait par courrier recommandé avec demande d'accusé de réception daté du 26 novembre 2020, réceptionné le 3 décembre 2020, mettant en demeure la société MJS de lui régler la somme de 81 960,93 euros.

La banque a réitéré sa mise en demeure tant auprès de la caution qu'auprès de la socité MJS, par courriers recommandés avec demande d'avis de réception, datés du 17 août 2021, la somme réclamée étant à présent de 84 072,98 euros.

Par exploit d'huissier daté du 14 décembre 2021, la société Crédit du Nord a fait assigner en paiement M. X. et la société MJS devant le tribunal de commerce de Créteil, qui s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris, lequel a rendu le jugement dont appel, faisant droit à l'ensemble des demandes de la banque.

* * *

À hauteur d'appel, le tribunal ayant écarté bon nombre des moyens de M. X. et de la société MJS au motif que le code de la consommation n'est pas applicable en l'espèce (puisque le prêt a un caractère commercial en ce qu'il entre dans le champ d'activité de la société à responsabilité limitée MJS) M. X. et la société MJS relèvent qu'ils fondaient également leurs prétentions sur le droit commun, au visa de divers textes du code civil.

 

Sur l'absence de mise en demeure régulière préalable :

M. X. et la société MJS font valoir, sur le fondement des articles 1344 et 1225 du code civil, que les établissements bancaires ont l'obligation d'adresser au débiteur une mise en demeure préalable qui vise expressément la clause résolutoire. À défaut, la banque ne peut se prévaloir de la déchéance conventionnelle. Or en l'espèce, aucune clause n'est visée dans les courriers de mise en demeure ni même dans les écritures adverses. Dans ces conditions, la cour n'est pas en mesure de s'assurer que la société MJS et M. X. ont régulièrement été mis en demeure et ont compris l'ampleur des sanctions qu'ils encouraient puisqu'ils n'ont pas pu prendre connaissance de la clause dont la banque entend se prévaloir. La banque ne peut solliciter le bénéfice de la déchéance du terme puisqu'elle n'a pas précisé quel est le fondement au soutien de son action. Par ailleurs, la clause « exigibilité anticipée » visée par la banque indique également que le prêteur mentionnera son intention de se prévaloir de la présente clause, ce qui n'a pas été le cas.

Le tribunal, après avoir rappelé les dispositions de l'article 10 du contrat de prêt, note que la société Crédit du Nord par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 29 juin 2020 a prononcé la clôture du compte courant avec un préavis de 60 jours ; puis par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 17 novembre 2020, a informé la société MJS du non-paiement d'une échéance du prêt, lui demandant de régulariser la situation sous peine de mettre en jeu 'la clause de déchéance du terme rendant immédiatement exigible la totalité de [notre] créance’; enfin, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 26 novembre 2020, la société Crédit du Nord a avisé la société MJS en ces termes : « Nous nous voyons dans l'obligation d'appliquer la clause de déchéance du terme figurant au contrat qui nous autorise à exiger le remboursement immédiat de la totalité du prêt en cas de non-paiement à terme d'un seul des amortissements prévus ». Le tribunal relève ensuite que dans ses courriers échelonnés sur cinq mois, la banque a fait référence au contrat de prêt et à sa clause d'exigibilité anticipée, qui indique clairement l'exigibilité du prêt et sa résiliation avec un préavis de huit jours et en conséquence à défaut la déchéance du terme, ceci de façon claire et explicite, de telle sorte qu'un professionnel ne saurait prétendre ne pas en comprendre les termes et les conséquences. Le tribunal en a déduit que l'argument selon lequel la mise en demeure est irrégulière puisque le contrat de prêt ne mentionne aucune clause de déchéance du terme est « inopérante », et doit être rejeté.

L'intimé expose que la clause de déchéance du terme s'analyse en une clause résolutoire au sens de l'article 1225 du code civil. L'appréciation du caractère suffisant de l'interpellation valant mise en demeure, prévue à l'article 1344 du même code, relève du pouvoir souverain des juges du fond. En l'espèce, le contrat de prêt comporte une clause « exigibilité anticipée » claire, compréhensible et proportionnée au but poursuivi en ce que, d'une part, elle stipule bien qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité, l'intégralité des sommes dues deviendra exigible et, d'autre part, elle met à la charge du prêteur une obligation d'informer l'emprunteur de sa volonté de se prévaloir de l'exigibilité anticipée de son concours. Le Crédit du Nord s'est conformé aux stipulations contractuelles en informant tout d'abord la société MJS, avant même le prononcé de l'exigibilité anticipée, de l'existence d'impayés et de la nécessité de régulariser sa situation, faute de quoi il serait « dans l'obligation de faire jouer la clause de déchéance du terme rendant immédiatement exigible « la totalité de sa créance » ». S'agissant de la prétendue irrégularité de la mise en demeure, aucun texte de loi ni aucune jurisprudence n'impose au créancier adressant une mise en demeure à son débiteur de mentionner de manière précise les termes mêmes de la clause de déchéance du terme. Il sera d'ailleurs relevé qu'en l'espèce la clause de déchéance est expressément visée, un délai de huit jours est octroyé, et les conséquences de la déchéance sont explicitées. Au surplus, en signant le contrat de prêt, la société MJS a pris connaissance de la clause de déchéance du terme et savait parfaitement à quoi faisait référence le Crédit du Nord dans sa lettre de mise en demeure. Enfin, les décisions de jurisprudence que les appelants mettent en exergue ne sont pas transposables au cas d'espèce, comme concernant des situations impliquant des particuliers, et non une société commerciale comme l'est la société MJS.

Sur ce,

L'article 1344 du code civil visé par les appelants, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 et en vigueur au 1er octobre 2016, et applicable aux faits de l'espèce le contrat de prêt étant en date du 11 avril 2019, dispose que : « Le débiteur est mis en demeure de payer soit par une sommation ou un acte portant interpellation suffisante, soit si le contrat le prévoit, par la seule exigibilité de l'obligation ».

Selon l'article 1225 du même code, également visé par les appelants - issu du même texte et applicable dans les mêmes conditions – « La clause résolutoire précise les engagements dont l'inexécution entraînera la résolution du contrat - La résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse, s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution. La mise en demeure ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire. »

L'article 10 du contrat de prêt signé entre les parties le 11 avril 2019 intitulé « Exigibilité anticipée » (page 5/11) stipule en son paragraphe 10.2 que les sommes versées en exécution du prêt ainsi que tous intérêts, commissions, frais et accessoires y afférents seront exigibles, si bon semble au prêteur, dans plusieurs cas dont celui du non-paiement par l'emprunteur à son échéance d'une somme quelconque devenue exigible.

Il résulte des pièces produites, auxquelles se réfère l'intimé dans ses écritures et exactement observées et analysées par le premier juge, que comme retenu par le tribunal, la déchéance du terme a été régulièrement prononcée par la banque Crédit du Nord, par courrier recommandé avec demande d'avis de réception du 26 novembre 2020, notamment en ce que le recours par la banque à la clause résolutoire contractuelle y est explicitement exposé, et en ce que cette mise en demeure comporte une interpellation suffisante.

Le grief n'est fondé ni en fait ni en droit et le tribunal doit être approuvé en ses entiers motifs tels qu'exposés, de ce premier chef.

 

Sur le caractère abusif de la clause de déchéance du terme :

Le tribunal énonce que la société MJS et M. X. entendent se prévaloir des articles L. 212-1, R. 212-1 et R. 212-2 du code de la consommation pour conclure que la clause de déchéance du terme prévue au contrat de prêt doit être qualifiée d'abusive, alors que le code de la consommation n'est pas applicable au cas d'espèce.

M. X. et la société MJS soulignent avoir invoqué également, et soutenir encore, l'application des dispositions du droit commun. Ils rappellent les termes de l'article 10 du contrat de prêt relatif à l'exigibilité anticipée qui stipule : « Ces sommes seront en outre exigibles si bon semble au prêteur dans un des cas suivants (…) en cas de non-paiement à son échéance d'une somme quelconque devenue exigible », pour soutenir qu'au regard des dispositions de l'article 1171 du code civil, cette clause crée un déséquilibre significatif en ce qu'elle ne contient pas de réciprocité, en ce qu'elle crée une soumission de l'emprunteur, et en ce qu'elle permet de solliciter un montant manifestement disproportionné, à savoir l'ensemble des échéances à échoir. C'est la raison pour laquelle la jurisprudence considère ce type de clause qui autorise de façon anticipée l'exigibilité des sommes abusive, en ce qu'elle est de nature à laisser croire que l'établissement de crédit dispose d'un pouvoir discrétionnaire et que l'emprunteur ne peut donc pas contester le bienfondé de la déchéance du terme. En outre, la clause ne prévoit pas l'envoi d'une mise en demeure avant l'exigibilité des échéances, ce qui établit son caractère abusif.

L'intimé répond qu'en application de l'article 1171 du code civil, une clause ne crée pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat si elle est claire, nécessaire et proportionnelle. En premier lieu, la mention « si bon semble au prêteur » signifie uniquement qu'il s'agit d'une simple faculté pour le prêteur d'appliquer la déchéance du terme. Les cas dans lesquels le prêteur peut se prévaloir de la clause de déchéance du terme sont strictement énumérés, ce qui est gage de sécurité pour l'emprunteur. Deuxièmement, sur l'absence de réciprocité et la soumission de l'emprunteur, un contrat de prêt est un contrat unilatéral au sens de l'article 1106 alinéa 2 du code civil - il n'impose d'obligation qu'à l'emprunteur, celle de rembourser la somme prêtée - dès lors on voit mal comment une clause de déchéance du terme prévue dans un contrat de prêt pourrait avoir une réciprocité, puisque le contrat de prêt lui-même est unilatéral. Troisièmement, s'agissant de la soumission de l'emprunteur, cet argument n'est nullement étayé, et parfaitement déconcertant, la possibilité de prévoir une clause de déchéance du terme est expressément prévue par la loi, le Crédit du Nord a ni plus ni moins fait application d'une faculté légale. Quatrièmement, sur le montant manifestement disproportionné - correspondant à l'ensemble des échéances à échoir - que l'emprunteur peut solliciter, tel est le principe d'une clause de déchéance du terme, dûment autorisée par la loi, et l'argument est dépourvu de toute pertinence. Enfin, cinquièmement, en ce qui concerne l'envoi d'une mise en demeure préalable, ni la loi, ni la jurisprudence ne sanctionnent par la nullité ou le non-écrit, une clause de déchéance du terme qui ne prévoirait pas l'envoi d'une mise en demeure préalable, la jurisprudence citée par les appelants concerne un particulier pouvant se prévaloir des dispositions protectrices du code de la consommation, et non une société commerciale telle que la société MJS.

Sur ce,

L'article 1171 du code civil visé par les appelants, dans sa rédaction issue de la loi n°2018-287 du 20 avril 2018 et en vigueur au 1er octobre 2018, et applicable aux faits de l'espèce, le contrat de prêt étant en date du 11 avril 2019, dispose que : « Dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties, qui créé un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite. L'appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix à la prestation ».

L'article 1171 du code civil fait partie du droit commun des contrats et peut s'appliquer à ceux conclus entre professionnels, ce dont en l'espèce ne disconviennent pas les parties, lesquelles s'opposent uniquement sur la question de l'existence d'un déséquilibre significatif entre les parties qui serait né - ou pas - de la clause critiquée, précitée.

En l'espèce, l'intimé répond utilement à chacun des points de l'argumentation développée par les appelants, lesquels en définitive échouent à démontrer qu'un quelconque déséquilibre existerait entre les droits et obligations des parties au contrat comme résultant de la rédaction ou de l'application de la clause d'exigibilité anticipée.

 

Sur le défaut de vérification de la solvabilité de l'emprunteur et sur le manquement de la banque à l'obligation d'information, de conseil et de mise en garde :

C'est à bon droit que le tribunal a écarté l'application du code de la consommation, en particulier ses articles L. 312-6 et L. 312-16, L. 312-12 dont la société MJS et M. X. se prévalaient pour reprocher à la banque Crédit du Nord de ne pas avoir vérifié la solvabilité de l'emprunteur, la société MJS, ainsi que l'absence de délivrance d'une fiche d'information précontractuelle.

Pour soutenir en appel que pèserait sur le prêteur une obligation de vérification de la solvabilité de l'emprunteur et qu'il ne peut à cet égard se contenter des éléments déclarés par l'emprunteur au titre de ses ressources et charges, mais doit vérifier la réalité en sollicitant tout document utile à cette vérification, au visa de l'article 1112-1 du code civil M. X. et la société MJS présentent plus précisément la question sous l'angle du 'devoir de conseil et mise en garde des établissements de crédit'. Ils notent qu'en l'espèce le dossier de prêt se compose uniquement du contrat de crédit et d'une fiche de renseignement de solvabilité de la caution, et qu'aucun élément n'est produit quant à la solvabilité de l'emprunteur. Par suite, la banque a reporté le risque financier sur la caution. Elle a commis une faute au titre de son devoir de conseil et de mise en garde, que lui impose la jurisprudence. En droit, il revient au banquier de rapporter la preuve de ce qu'il a informé son client non averti du risque de l'opération. Or en l'espèce, la société MJS n'a même pas reçu la fiche d'information précontractuelle, distincte de l'offre, obligatoire avant toute souscription d'un contrat de crédit. Cette absence est considérée comme un manquement à l'obligation d'information qui incombe au professionnel.

L'intimé répond que c'est au visa de l'ancien article 1135 (1194) du code civil, que la Cour de cassation a pu juger que le banquier est tenu à l'égard de ses clients, emprunteurs profanes, d'un devoir de mise en garde, lequel consiste à vérifier les capacités financières de son client et à alerter ce dernier des risques encourus. En l'espèce, la société MJS est une société commerciale, en activité depuis 2013, qui a acquis une solide expérience en matière de financement d'activité, elle n'est pas 'profane'. Ainsi, rien n'imposait à la banque Crédit du Nord de vérifier la solvabilité de la société MJS.

Sur ce,

a) Tout d'abord, il sera rappelé que le banquier dispensateur de crédit, compte tenu de son devoir de non-immixtion n'est pas tenu d'un devoir de conseil sauf s'il a contracté une obligation spécifique à cet égard, et en l'espèce il ne ressort aucunement des pièces produites que tel serait le cas.

b) Ensuite, il y a lieu de rappeler que le fondement juridique du devoir de mise en garde siège dans les dispositions de l'article 1231-1, anciennement 1147 du code civil.

Ainsi, il est de principe que le banquier qui consent un prêt à un emprunteur non averti est tenu à l'égard de ce dernier, lors de la conclusion du contrat, à un devoir de mise en garde, en considération des capacités financières de l'emprunteur et de ses risques d'endettement excessif nés de l'octroi du prêt.

Or, en l'espèce, alors que la preuve lui en incombe, la société MJS ne propose aucune démonstration du caractère excessif de l'emprunt contracté. Dès lors, il n'y a pas lieu à examiner si la société emprunteur était avertie ou non.

c) Enfin, s'agissant du devoir d'information, qui pèse sur le banquier que l'emprunteur soit averti ou non, l'article 1112-1 du code civil que l'appelant vise à l'appui de ses prétentions est rédigé en ses termes : 'Il incombe à celui qui prétend qu'une information lui était due de prouver que l'autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu'elle l'a fournie. Les parties ne peuvent ni limiter ni exclure ce devoir'.

Au cas présent, l'appelant, pour objectiver un défaut d'information de la part de la banque, se reporte à des prévisions du code de la consommation qui ne sont pas applicables à l'espèce. Il ne démontre donc pas que lui aurait été due l'information qu'il caractérise - uniquement - ainsi.

Par conséquent, la société MJS ne peut qu'être déboutée de sa demande de condamnation de la banque à lui verser 'la somme de 82 680,94 euros à titre de dommages et intérêts au titre de son manquement à son obligation de conseil et de mise en garde’[page 11 de ses écritures].

 

Sur l'opposabilité de la déchéance du terme à la caution :

Comme en première instance, M. X. fait valoir qu'aucune clause du contrat de prêt ne prévoit d'étendre la sanction de la déchéance du terme, à la caution. Il y a donc lieu, selon lui, de faire purement et simplement application de l'article 1305-5 du code civil en vertu duquel : 'La déchéance du terme encourue par un débiteur est inopposable à ses coobligés, mêmes solidaires, et à ses cautions.'

L'intimé fait valoir que les parties peuvent déroger aux dispositions de l'article 1305-5 du code civil, qui ne sont pas d'ordre public. Dès lors, rien n'empêche qu'une caution solidaire accepte contractuellement que la déchéance du terme dont fait l'objet le débiteur principal lui soit opposable. En l'espèce, l'acte de cautionnement de M. X. définit clairement l'obligation garantie. Ce dernier avait donc une parfaite connaissance de la clause d'exigibilité anticipée prévue au contrat de prêt et a expressément accepté, en souscrivant son engagement de caution, que le Crédit du Nord puisse lui opposer ladite exigibilité anticipée en lui demandant de payer les sommes dues par la société MJS, y compris celles devenues exigibles par anticipation.

Sur ce,

En effet c'est à bon droit que le tribunal a retenu que des termes mêmes de l'acte de cautionnement (pièce 5 de la Société Générale) daté du 28 mars 2019 et signé par M. X., il découle que celui-ci avait une parfaite connaissance de la clause d'exigibilité anticipée prévue au contrat de prêt, et qu'il a accepté, en s'engageant à payer les sommes dues par la société MJS, que la banque Crédit du Nord puisse lui opposer en sa qualité de caution cette clause d'exigibilité anticipée sanctionnant la défaillance du débiteur principal.

Plus précisément, l'acte de cautionnement, reprenant les caractéristiques principales du prêt ainsi garanti, en particulier indique :

- qu'il s'agit, par ce cautionnement solidaire, de garantir 'le remboursement du concours d'un montant de 85.000 euros à consentir par la Banque au Cautionné aux termes d'un acte sous seing privé', concours 'consenti pour une durée de 84 mois donnant lieu à perception d'intérêts au taux fixe de 1,910 %',

- que cette garantie est à hauteur d'un montant de '110 500 euros incluant principal, intérêts, commissions, frais et accessoires y compris l'indemnité due en cas d'exigibilité anticipée',

- que :'L'indemnité due en cas d'exigibilité anticipée du crédit est égale à 3 % du capital restant dû à la date d'envoi de la lettre recommandée d'exigibilité anticipée',

- que : 'La Caution déclare avoir une parfaite connaissance des conditions de ce concours',

- que : 'La Caution solidaire est tenue de payer à la Banque ce que doit et devra le Cautionné au cas où ce dernier ne ferait pas face à ce paiement',

- que : 'En cas de défaillance du Cautionné pour quelque cause que ce soit, la Caution sera tenue de payer à la Banque ce que lui doit le Cautionné, y compris les sommes devenues exigibles par anticipation'.

Il est à noter au surplus que le contrat de prêt consenti à la société MJS a été signé par M. X. lui-même, en sa qualité d'associé gérant.

Dans de telles conditions, M. X. n'est pas fondé à demander qu'il soit fait application de l'article 1305-5 du code civil, précité, dont il livre une interprétation superficielle, et inadéquate en ce qu'elle viderait entièrement de sa substance le mécanisme du cautionnement, auquel il a pourtant consenti.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce que la banque peut opposer à M. X. en sa qualité de caution, la clause d'exigibilité anticipée sanctionnant la défaillance du débiteur principal.

 

Sur la disproportion alléguée de l'engagement de la caution :

M. X. soutient son argumentation au visa de l'article 1112-1 du code civil.

Or, en droit, selon les dispositions de l'article L. 341-4 devenu L. 332-1 du code de la consommation, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était lors de sa conclusion manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution au moment où celle-ci est appelée ne lui permette de faire face à son obligation.

La proportionnalité du cautionnement s'appréciera donc au 28 mars 2019, date de l'engagement de caution de M. X. donné en garantie du prêt professionnel d'un montant de 85.000 euros consenti par la société Crédit du Nord à la société à responsabilité limitée MJS en vue de financer des travaux d'aménagement et d'installation. Ce cautionnement a été souscrit dans la limite de la somme de 110 500 euros et pour la durée de 108 mois à compter du jour de sa signature.

La preuve de la disproportion et de son caractère manifeste incombe alors à la caution, et non pas à la banque. Or, force est de constater que M. X. ne produit aucun élément sur sa situation patrimoniale à la date de son engagement, ni même ne fait aucune proposition de démonstration chiffrée et concrète dans le cours de ses écritures.

À toutes fins la Société Générale verse aux débats, en pièce 11, un document sur cinq pages qui bien qu'intitulé 'Fiche de renseignements de solvabilité personne physique (Crédits immobiliers)', est toutefois contemporain de l'engagement de caution présentement querellé, puisque daté du 5 mars 2019, rempli et signé par M. X. lequel a certifié, manuscritement, l'exactitude des renseignements qu'il contient. Il ressort de cette fiche patrimoniale que M. X. a déclaré :

- être marié, sous le régime de la séparation des biens, avoir deux enfants à charge ;

- être gérant de société et percevoir à ce titre des revenus professionnels annuels de 34.000 euros, en sus d'autres revenus, de 26.000 euros, soit au total 60.000 euros ;

- n'avoir aucun crédit en cours de remboursement (immobilier, prêt à la consommation) ;

- n'avoir aucune dette telles pensions, rentes, loyer ;

- n'avoir antérieurement consenti aucune caution ;

- être propriétaire de trois biens, dans un cadre successoral à hauteur de 50 %, estimés à 2 500.000 euros ;

- détenir des participations dans cinq sociétés (dont la société Soclaine dont il est gérant) pour une valeur de 500.000 euros,

- détenir un portefeuille d'actions d'une valeur de 250.000 euros.

Il est de principe que la banque est en droit de se fier aux éléments ainsi recueillis sans être tenue de faire de vérification complémentaire (contrairement à ce que soutient M. X. déplorant qu'aucun élément ne permette de vérifier les indications portées dans la fiche) dès lors que, comme au cas présent, la fiche de renseignements patrimoniale ne révèle en soi aucune anomalie ou incohérence.

Or, au vu de ces éléments renseignés dans la fiche patrimoniale, il apparait clairement et incontestablement que l'engagement de caution de M. X., donné à hauteur de la somme de 110 500 euros, n'était pas manifestement disproportionné au moment de sa signature au regard du niveau de ses revenus et de son patrimoine, conséquents, rapportés à ses charges.

Par conséquent le jugement déféré ne peut qu'être confirmé en ce que le tribunal est entré en voie de condamnation à l'encontre de M. X. au titre du cautionnement en date du 28 mars 2019.

 

Sur le quantum des demandes de l'établissement bancaire :

Sur l'absence d'information annuelle et ses conséquences

M. X. fait valoir qu'aux termes des articles 2293 du code civil et L. 313-22 du code monétaire et financier, le manquement à l'obligation d'information de la caution emporte la déchéance de tous les accessoires de la dette, frais et pénalités. En l'espèce, le Crédit du Nord ne justifie d'aucun envoi des lettres d'information annuelle, ni à la société MJS (sic), ni à M. X..

L'article 2293 nouveau du code civil cité par M. X. ‘'Le cautionnement ne peut exister que sur une obligation valable. Néanmoins, celui qui se porte caution d'une personne physique dont il savait qu'elle n'avait pas la capacité de contracter est tenu de son engagement’’ne concerne manifestement pas le cas d'espèce.

L'article L. 313-22 du code monétaire et financier, également visé par M. X. disposait : 'Les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée. Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette.'

Comme indiqué par l'intimé dans ses écritures, désormais il y a lieu d'appliquer les dispositions nouvelles de l'article 2302 du code civil tel qu'issu de la réforme du droit des sûretés, conformément à l'article 37 de l'ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021 selon lequel les dispositions de l'ordonnance entrent en vigueur le 1er janvier 2022 et en cette matière s'appliquent y compris aux cautionnements constitués antérieurement.

L'article 2302 nouveau du code civil dispose :'Le créancier professionnel est tenu, avant le 31 mars de chaque année et à ses frais, de faire connaître à toute caution personne physique le montant du principal de la dette, des intérêts et autres accessoires restant dus au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie, sous peine de déchéance de la garantie des intérêts et pénalités échus depuis la date de la précédente information et jusqu'à celle de la communication de la nouvelle information'. Cet article se poursuit ainsi : 'Dans les rapports entre le créancier et la caution, les paiements effectués par le débiteur pendant cette période sont imputés prioritairement sur le principal de la dette. Le créancier professionnel est tenu, à ses frais et sous les mêmes sanctions, de rappeler à la personne physique le terme de son engagement ou, si le cautionnement est à durée indéterminée, sa faculté de résiliation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci peut être exercée (...)'.

Le nouvel article du code civil reprend ainsi les prévisions de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier - sur lequel l'appelant fonde sa demande - les principes dégagés jusqu'ici par la jurisprudence restant toutefois applicables

Ainsi, si aucune forme n'est exigée de la banque pour l'envoi de ces informations, il lui incombe toutefois de prouver qu'elle a satisfait à son obligation d'information annuelle, dont on rappellera qu'elle pèse sur l'établissement bancaire jusqu'à l'extinction de la dette.

En l'espèce, la banque qui ne justifie par aucune pièce avoir satisfait à son obligation d'information annuelle envers la caution, faite observer que la demande portant sur l'absence d'information annuelle est invoquée pour la première fois en cause d'appel et se heurte aux dispositions des articles 564 et 565 du code de procédure civile, sans pour autant en tirer de conséquence en termes de recevabilité de la demande, du moins au dispositif de ses conclusions.

Elle entend rappeler qu'en tout état de cause, la sanction de la déchéance ne frappe que les intérêts conventionnels et non les intérêts légaux, qui restent dus.

Il convient de retenir que la banque doit être déchue en totalité de son droit aux intérêts et pénalités échus conformément aux prévisions de l'article 2302 nouveau du code civil, à partir du 1er avril 2020.

En conséquence, et au vu du décompte produit par la banque en pièce 13, M. X. en sa qualité de caution sera tenu au paiement des sommes suivantes :

Au titre des échéances du prêt :

* échéances non atteintes par la déchéance :

- échéance du 2 janvier 2020 : 1 140,07 euros

- échéance du 2 février 2020 : 1 135,57 euros

- échéance du 2 mars 2020 : 1 131,07 euros

* échéances frappées de déchéance

- échéance du 2 avril 2020 : 961,75 euros au titre du capital et 17,71 euros au titre de l'assurance, soit 979,46 euros

- échéance du 2 mai 2020 : 963,28 euros au titre du capital et 17,71 euros au titre de l'assurance, soit 980,99 euros

- échéance du 2 juin 2020 : 964,82 euros au titre du capital et 17,71 euros au titre de l'assurance, soit 982,53 euros

- échéance du 2 juillet 2020 : 966,35 euros au titre du capital et 17,71 euros au titre de l'assurance, soit 984,06 euros

- échéance du 2 août 2020 : 967,89 euros au titre du capital et 17,71 euros au titre de l'assurance, soit 985,60 euros

- échéance du 2 septembre 2020 : 969,43 euros au titre du capital et 17,71 euros au titre de l'assurance, soit 987,14 euros

- échéance du 2 octobre 2020 : 970,97 euros au titre du capital et 17,71 euros au titre de l'assurance, soit 988,68euros

Outre le capital restant dû hors impayés de 68 701,64 euros,

Pour un total général de 78 996,81 euros, portant intérêt au taux légal à compter du 17 août 2021 date de la mise en demeure adressée à la caution.

 

Sur la modération de la clause pénale :

Les appelants, à titre reconventionnel, demandent à la cour de : 'REDUIRE la clause d'indemnité d'exigibilité anticipée à 1 € ; REDUIRE la clause de déchéance à 1 € ;'

M. X. et la société MJS soutiennent qu'en l'espèce, il ne saurait être contesté que la clause de déchéance anticipée du terme est qualifiable de clause pénale. Celle-ci est manifestement excessive puisqu'elle permet d'octroyer à la banque une somme considérable, alors même que l'échéance mensuelle était de 1 099,58 euros. Il en est de même s'agissant de la somme de 2 061,05 euros correspondant à une clause 'indemnité d'exigibilité anticipée’qui fixe un montant de 3 % du capital restant dû. La société MJS et M. X. sollicitent que ces sommes soient réduites à 1 euro chacune, par application de l'article 1231-5 du code civil.

L'intimé fait valoir que constitue une clause pénale, la stipulation selon laquelle le taux sera majoré en cas de défaillance de l'emprunteur. Il convient de ne pas confondre clause pénale et clause de déchéance du terme, cette dernière n'est pas considérée comme une clause pénale mais comme une clause résolutoire. Le juge doit se placer à la date de sa décision pour apprécier le caractère excessif de la clause pénale en comparant le montant de la peine conventionnellement fixée avec celui du préjudice subi par le créancier. En l'espèce, le préjudice subi par la banque consiste en la non-perception des intérêts restant à courir jusqu'au terme du prêt. À la lecture du tableau d'amortissement, il apparaît que la société MJS n'a réglé que 1 404,95 euros d'intérêts (ce qui correspond aux onze premières échéances) alors que la banque Crédit du Nord avait vocation à percevoir la somme de 5 876,30 euros à ce titre, soit une perte de 4 471,35 euros. L'indemnité d'exigibilité anticipée, fixée à la somme de 2 061,05 euros, n'apparaît donc pas excessive au regard de la perte subie par le Crédit du Nord.

Sur ce,

Constitue une clause pénale la clause d'un contrat par laquelle les parties évaluent forfaitairement et d'avance l'indemnité à laquelle donnera lieu l'inexécution de l'obligation contractée. La peine ainsi convenue peut être même d'office modérée ou augmentée par le juge si elle est manifestement excessive ou dérisoire, par application de l'article 1152 ancien devenu 1231-5 du code civil.

La clause prévoyant que l'intégralité des sommes restant dues en ce compris le capital deviendra immédiatement exigible ne constitue pas une clause pénale et n'est donc pas susceptible de modération.

En revanche le contrat comporte d'autres stipulations s'analysant en clause pénale : l'article 4.2 intitulé : 'Intérêts de retard', stipule : 'Toute somme non payée à son échéance normale ou anticipée portera intérêts de plein droit au taux du prêt majoré de trois points (à compter) du jour de ladite échéance', et l'article 10.4 du contrat de prêt indique :'En cas d'exigibilité anticipée du prêt pour un des motifs énoncés ci-dessus l'Emprunteur paiera une indemnité égale à 3 % du capital restant dû à la date d'envoi de la lettre recommandée d'exigibilité anticipée (...)'.

Cependant, étant prononcée la déchéance des intérêts et pénalités comme sanctionnant le manquement de la banque à son obligation d'information annuelle, la demande de modération de la clause pénale prévoyant intérêts majorés et pénalité liées à la résiliation, est dès lors sans objet.

 

Sur le solde débiteur du compte :

Les appelants défendent que la société MJS n'a jamais été avertie de la fermeture de son compte puisque le courrier recommandé avec accusé de réception du 29 juin 2020 dans lequel le Crédit du Nord indiquait qu'il reviendrait vers elle dans un délai de 60 jours lui indiquant les sommes restantes à devoir, a été envoyé à l'ancienne adresse de la société - [Adresse 8], alors que la nouvelle adresse de la société MJS, connue de la banque, était [Adresse 3], à [Localité 12], la preuve en étant qu'elle lui a envoyé à cette dernière adresse le courrier du 17 novembre 2020. La banque ne justifie donc pas avoir régulièrement avisé sa cliente de la fermeture de son compte. Par ailleurs la société Crédit du Nord n'indique pas à quoi correspondraient les 'impayés’à hauteur de la somme de 972,94 euros, qui n'ont fait l'objet d'aucune mise en demeure.

L'intimé rappelle qu'en vertu de l'article L. 313-12 du code monétaire et financier les établissements bancaires n'ont pas à motiver la clôture d'un compte, laquelle peut intervenir unilatéralement à l'initiative de chacune des parties à la convention de compte, dès lors qu'ils respectent un préavis de 60 jours minimum. En l'espèce, le courrier de préavis de clôture a été adressé le 29 juin 2020 et le compte a été effectivement clôturé le 27 octobre 2020, date à laquelle le solde débiteur a été viré sur un compte dit 'contentieux'. Le délai de préavis de 60 jours a donc été respecté. Concernant l'adresse à laquelle la lettre de préavis a été adressée, il s'agit ni plus ni moins du siège social de la société MJS tel que mentionné sur son extrait Kbis - et en première page de ses conclusions. Si le Crédit du Nord a ensuite adressé ces courriers au [Adresse 2] à [Localité 12] [Adresse 1]), c'est certainement parce que sa cliente l'a informé de son changement de domiciliation. La société MJS ne saurait se prévaloir de sa propre négligence en indiquant que le courrier daté du 17 novembre 2020 est revenu avec la mention 'pli avisé et non réclamé'. Concernant le montant du solde débiteur en compte de 972,94 euros, la société MJS ne saurait, sauf à faire preuve d'une particulière mauvaise foi, prétendre qu'elle ne sait pas à quoi cela correspondrait dès lors que ces relevés de compte ont été mis à sa disposition et qu'elle ne les a pas contestés.

Sur ce,

1 - La société MJS, qui n'établit pas à quel moment la banque aurait eu connaissance de sa nouvelle adresse, ne peut valablement lui imputer à faute l'absence de réception effective, par son destinataire la société MJS, du courrier annonçant la future clôture du compte, ni donc se prévaloir d'un défaut de notification régulière de cette décision.

2 - Il résulte du relevé de compte que la somme contestée est constituée de l'entier solde débiteur du compte ouvert le 4 mars 2019 et clôturé le 27 octobre 2020.

Il est constant que la société MJS ne conteste pas avoir reçu lesdits relevés de compte - étant à observer qu'elle discute l'actualité de son adresse uniquement en ce qui concerne l'expédition de la lettre portant notification de la clôture du compte - et qu'elle n'a jamais élevé la moindre contestation lors de leur réception, en sorte qu'elle est réputée les avoir approuvés.

Il s'ensuit que les prétentions de la société MJS demandant à la cour de juger que la société Crédit du Nord a abusivement clôturé le compte de la société MJS sans l'en avertir et que la Société Générale ne rapporte pas la preuve des impayés qu'elle impute à la société MJS, ne sauraient prospérer.

 

Sur la demande de délai de paiement :

Au visa de l'article 1343-5 du code civil, les appelants, exposant que solidairement ou pris individuellement, ni la société MJS, ni M. X., ne sont en mesure de s'acquitter du montant des condamnations, demandent à la cour de reporter ou échelonner le paiement des sommes dues, et d'ordonner que les sommes correspondantes aux échéances reportées portent intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.

En vertu de l'article 1343-5 du code civil, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues. Tel aménagement de la dette n'est envisageable que si son montant le permet eu égard aux facultés contributives du débiteur et si les propositions faites pour son apurement permettent à celui-ci de s'en acquitter dans le respect des droits du créancier. En outre, l'octroi d'un délai de paiement, qui n'est pas de plein droit, ne peut bénéficier qu'au débiteur de bonne foi.

La Société Générale fait valoir que la demande des appelants tendant à obtenir un report ou un échelonnement du paiement des sommes qui leur sont réclamées apparait irrecevable puisqu'ils ne l'ont pas soumise au premier juge. Quoiqu'il en soit, la société MJS et M. X. ne versent aucun élément aux débats permettant de justifier qu'ils ne seraient pas en mesure de s'acquitter du montant des condamnations. De plus, outre le fait que les appelants ont d'ores et déjà bénéficié, de fait, d'importants délais, il serait totalement contreproductif d'accorder des délais de paiement à une société qui a fait l'objet d'une déchéance du terme de son obligation pour non-respect des échéances et à une caution qui refuse de s'exécuter malgré l'engagement pris.

Sur ce,

Il est à noter que si dans le cours de ses écritures la Société Générale fait valoir que cette demande est irrecevable comme étant nouvelle en cause d'appel, elle ne forme au dispositf de ses conclusions aucune demande d'irrecevabilité.

La société MJS et M. X. ne donnent pas de précisions sur les difficultés qui seraient les leurs ni ne produisent la moindre pièce justificative de nature à éclairer la cour sur leur situation financière actuelle.

Par ailleurs, une demande de report de paiement de la dette pour être reçue doit être appuyée par des éléments suffisamment précis, tangibles, et certains, permettant de croire à un désintéressement du créancier à l'expiration du délai de grâce. Or en l'espèce ni la société MJS, ni M. X. ne fournissent d'explications ni ne formulent de proposition précise. Par conséquent, en l'état, la demande de report de paiement de la dette, telle que succintement formulée par la société MJS et M. X., ne peut qu'être rejetée.

En outre, la société MJS et M. X. ne font aucune proposition de versements à l'appui d'un échelonnement du paiement de la dette.

En l'état, la société MJS et M. X. ne peuvent qu'être déboutés de leur demande. Sur l'exécution provisoire

M. X. et la société MJS font valoir que le tribunal n'a pas statué sur leur demande d'écarter l'exécution provisoire et a donc commis un déni de justice. Sans reprendre cette prétention parmi les demandes figurant au dispositif de leurs conclusions, qui seul saisit la cour, ils considèrent que pour cette raison le jugement entrepris ne peut qu'être annulé.

Le Crédit du Nord fait valoir que selon les dispositions des articles 514, 514-1, 4 et 5 du code de procédure civile, le fait, pour un juge, de ne pas se prononcer sur une demande tendant à écarter l'exécution provisoire de droit n'est pas constitutif d'un déni de justice.

Sur ce,

Il était loisible aux appelants de saisir le Premier Président de la Cour d'appel d'une demande d'écarter l'exécution provisoire de droit, ce qu'ils n'ont pas fait.

En toute hypothèse, le grief fait au juge de première instance, en sus d'être infondé, au stade de la procédure d'appel est sans emport.

 

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

M. X. et la société MJS qui échouent dans leurs demandes, supporteront la charge des dépens et ne peuvent prétendre à aucune somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. En revanche pour des raisons tenant à l'équité il y a lieu de faire droit à la demande de la Société Générale formulée sur ce même fondement, mais uniquement dans la limite de la somme de 3.000 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant dans les limites de l'appel,

‘CONFIRME le jugement déféré :

- en toutes ses dispositions concernant la société MJS ;

- en ce que le tribunal a condamné solidairement la société MJS et M. X. ;

- en ce que le tribunal a prononcé la capitalisation des intérêts ;

- en ce qui concerne la charge des dépens et des frais irrépétibles ;

DIT que les condamnations prononcées bénéficient à la Société Générale en ce qu'elle vient aux droits et obligations de la société Crédit du Nord ;

‘AJOUTANT au jugement déféré et le réformant sur le montant des condamnations prononcées à l'encontre de M. X. en sa qualité de caution :

- PRONONCE la déchéance du droit de la banque aux intérêts et pénalités échus à compter du 1er avril 2020 à raison du défaut d'information annuelle due à la caution ;

- En conséquence, CONDAMNE M. X. dans la limite de son engagement de caution de 110 500 euros, à payer à la Société Générale venant aux droits de la société Crédit du Nord, la somme de 78 996,81 euros, qui produira intérêts au taux légal à compter du 17 août 2021, date de la mise en demeure ;

‘Y ajoutant encore,

DÉBOUTE M. X. et la société MJS de leur demande de délais de paiement ;

CONDAMNE in solidum M. X. et la société MJS à payer à la Société Générale la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à raison des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;

DÉBOUTE M. X. et la société MJS de leur propre demande formulée sur ce même fondement ;

CONDAMNE M. X. et la société MJS aux entiers dépens d'appel.

LE GREFFIER                                            LE PRÉSIDENT