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6152 - Code civil et Droit commun - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Droit postérieur à l’ordonnance du 10 février 2016 et à la loi du 20 avril 2018 - Art. 1171 C. civ. – Articulation avec d’autres dispositions

Nature : Synthèse
Titre : 6152 - Code civil et Droit commun - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Droit postérieur à l’ordonnance du 10 février 2016 et à la loi du 20 avril 2018 - Art. 1171 C. civ. – Articulation avec d’autres dispositions
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6152 (10 février 2024)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE CIVIL ET EN DROIT COMMUN

SANCTION DIRECTE DES DÉSÉQUILIBRES SIGNIFICATIFS - DROIT POSTÉRIEUR À L’ORDONNANCE DU 10 FÉVRIER 2016 – LOI DE RATIFICATION DU 20 AVRIL 2018 : ARTICLE 1171 DU CODE CIVIL

ARTICULATION AVEC D’AUTRES DISPOSITIONS

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2024)

 

Présentation. Insérée dans le Code civil, la sanction des clauses créant un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties relève désormais d’un droit commun potentiellement applicable à tous les contrats d’adhésion, ce qui invite à préciser les modalités d’articulation du texte avec l’art. L. 212-1 C. consom (A), l’art. L. 442-1-I-2° C. com. (B) ou l’éventuelle influence de législations spéciales (C). L’ordre logique des sanctions soulève enfin un problème assez classique (D).

Primauté des règles particulières sur les règles particulières. La disposition essentielle en la matière est le nouvel art. 1105 C. civ. Ce texte dispose : « Les contrats, qu'ils aient ou non une dénomination propre, sont soumis à des règles générales, qui sont l'objet du présent sous-titre. [alinéa 1] Les règles particulières à certains contrats sont établies dans les dispositions propres à chacun d'eux. [alinéa 2] Les règles générales s'appliquent sous réserve de ces règles particulières. [alinéa 3] » C’est l’alinéa 3 qui concentre l’attention.

A. ARTICULATION DE L’ART. 1171 C. CIV. ET DE L’ART. L. 212-1 C. CONSOM.

Principe. Il ne fait aucun doute que l’art. L. 212-1 C. consom. et ses dispositions connexes constituent un corps de règle particulières qui dérogent au droit commun et priment par conséquent l’art. 1171 C. civ. La protection du Code de la consommation emporte en effet nombre de solutions spécifiques différentes de celle posée a minima par l’art. 1171 C. civ. : elle peut jouer pour des clauses négociées, l’exclusion des clauses concernant l’objet principal n’est pas définie de la même manière et est conditionnée au caractère compréhensible de la clause, la sanction générale est complétée par une liste de clauses présumées irréfragablement ou simplement abusives (R. 212-1 à R. 212-5 C. consom.), les associations de consommateurs peuvent contester les contrats proposés aux consommateurs et, sans que la liste soit limitative, les clauses abusives doivent être relevées d’office par le juge (R. 632-1 C. consom.), etc.

La solution a été explicitement posée par la Cour de cassation : il ressort des travaux parlementaires de la loi du 20 avril 2018 ratifiant l’ordonnance du 10 février 2016, que l'intention du législateur était que l'art. 1171 du code civil, qui régit le droit commun des contrats, sanctionne les clauses abusives dans les contrats ne relevant pas des dispositions spéciales des art. L. 442-6 C. com. et L. 212-1 C. consomCass. com., 26 janvier 2022 : pourvoi n° 20-16782 ; arrêt n° 62 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 9440 (points n° 4 à 7), pourvoi contre CA Lyon (3e ch. A), 27 février 2020 : RG n° 18/08265 ; Cerclab n° 8366.

V. pourtant pour des décisions s’écartant de la position de la Cour de cassation en examinant les deux fondements : CA Paris (pôle 4 ch. 9-A), 13 janvier 2022 : RG n° 19/12685 ; Cerclab n° 9359 (installation d’une cuisine équipée ; consommatrice visant l’art. L. 212-1 et l’art. 1171), sur appel de TI Sucy-en-Brie, 11 avril 2019 : RG n° 11-18-001617 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 11), 15 avril 2022 : RG n° 20/10821 ; Cerclab n° 9569, sur appel de T. com. Paris, 6 juillet 2020 : RG n° 2020008539 ; Dnd - CA Bordeaux (2e ch. civ.), 25 mai 2022 : RG n° 19/00810 ; Cerclab n° 9641, sur appel de TGI Bordeaux (7e ch. civ.), 9 janvier 2019 : RG n° 17/09672 ; Dnd - CA Aix-en-Provence (ch. 1-8), 8 juin 2022 : RG n° 20/11095 ; arrêt n° 2022/287 ; Cerclab n° 9650, confirmant T. proxim. Antibes, 17 septembre 2020 : RG n° 11-19-0833 ; Dnd - CA Toulouse (3e ch.), 13 juillet 2022 : RG n° 21/03952 ; arrêt n° 533/2022 ; Cerclab n° 9731 (assurance prévoyance garantissant le versement d'indemnités journalières en cas d'hospitalisation ; N.B. l’arrêt reproduit les dispositions de l’art. 1171 puis estime que l’art. L. 212-1 « dit pareillement que […] », alors que les deux extraits incluent les passages sur l’objet principal qui, justement, sont rédigés de façon différente), sur appel de TJ Toulouse, 21 mai 2021 : RG n° 20/04865 ; Dnd - CA Metz (3e ch. - TI), 22 septembre 2022 : RG n° 21/00793 ; arrêt n° 22/00319 ; Cerclab n° 9832 (mandat de vente d’une maison individuelle ; examen et rejet du caractère abusif de la clause usuelle sanctionnant le mandant vendant à un tiers présenté par l’agence, sous le double fondement des art. 1171 et L. 212-1), confirmant T. proxim. Saint-Avold, 11 mars 2021 : RG n° 11-20-193 ; Dnd.

Le visa des deux textes est également pratiqué par les parties. V. par exemple : CA Paris (pôle 4 ch. 9-A), 13 janvier 2022 : RG n° 19/12685 ; Cerclab n° 9359 (installation d’une cuisine équipée ; consommatrice visant l’art. L. 212-1 et l’art. 1171), sur appel de TI Sucy-en-Brie, 11 avril 2019 : RG n° 11-18-001617 ; Dnd.

V. aussi : CA Paris (pôle 5 ch. 10), 9 octobre 2023 : RG n° 21/15485 ; Cerclab n° 10461 (crédit-bail de véhicule ; pour un enchaînement complexe : 1/ exclusion du droit de la consommation pour un commerçant ; 2/ admission d’une application conventionnelle ; 3/ principe de l’estoppel s’opposant à ce que le bailleur, qui a invoqué l’art. D 312-18 C. consom. en première instance pour fonder sa demande d’indemnité de résiliation puisse contester en appel l’applicabilité de ce texte ; 4/ « en tout état de cause », admission de l’applicabilité de l’art. 1171 C. civ. dont « il est admis désormais que le contrat de location financière relève de ces dispositions »), sur appel de T. com. Paris, 5 juillet 2021 : RG n° 2019064678 ; Dnd.

Comp. estimant de façon contestable que l’art. 1171 a repris les dispositions de l’art. L. 212-1 C. consom. : CA Montpellier (ch. com.), 25 octobre 2022 : RG n° 20/04222 ; Cerclab n° 9914 (« nonobstant la question de l'application ou non des dispositions du code de la consommation au litige, inopérante en l'espèce, l'article 1171 du code civil reprenant lesdites dispositions du code de la consommation »), sur appel de T. com. Montpellier, 8 juillet 2020 : RG n° 2019005807 ; Dnd.

N.B. Concernant la sanction, le nouvel art. 1184 C. civ. alinéa 2 dispose que « le contrat est maintenu lorsque la loi répute la clause non écrite », alors que l’art. L. 241-1 C. consom. alinéas 1 et 2 précise « Les clauses abusives sont réputées non écrites. Le contrat reste applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s'il peut subsister sans ces clauses ». La différence n’est en réalité qu’apparente et l’art. 1184 C. civ. procède d’une vision simpliste qui, confrontée à la réalité contractuelle, ne pourra faire abstraction du fait que la suppression de certaines clauses est incompatible avec le maintien du contrat (par exemple une clause de fixation du prix, V. Cerclab n° 5748) et qu’en fonction de la nature de la clause, le sort du contrat est parfois concerné par la suppression (ex. suppression d’une clause interdisant la résiliation, Cerclab n° 5747).

Influence rétroactive du texte. Sur la problématique inverse, d’une influence rétroactive de l’art. 1171 sur l’anc. art. L. 132-1 C. consom. : application du critère du rapport direct, pour écarter l’art. L. 132-1 C. consom., même en interprétant ses dispositions « à la lumière de l'article 1171 nouveau du code civil ». CA Versailles (16e ch.), 28 octobre 2021 : RG n° 20/01720 ; Cerclab n° 9221 (prêt à une SCI ayant pour objet le financement d'un bâtiment industriel destiné à la location ; refus de l’application de la protection contre les clauses abusives et en matière de crédit immobilier), sur appel de TGI Nanterre, 20 décembre 2019 : RG n° 19/03275 ; Dnd. § Si l'art. 1171 C. civ., tel qu'issu de l'ordonnance du 10 février 2016, n'est pas applicable aux contrats bien antérieurs conclus en l’espèce, il vient confirmer la sanction du déséquilibre du contrat ; celle-ci était d'ailleurs déjà prévue par l'art. L. 442-6 C. com., en sa version en vigueur à l'époque de la conclusion des contrats. CA Paris (pôle 4 ch. 10), 26 janvier 2023 : RG n° 20/03089 ; Cerclab n° 10064 (plusieurs contrats de location d'un véhicule de taxi équipé conclus entre 2001 et 2006 ; N.B. l’arrêt examine ensuite et rejette l’existence d’un déséquilibre significatif, dans la logique de l’art. 1171, en recherchant notamment l’existence d’un contrat d’adhésion), sur appel de TGI Paris, 20 février 2018 : RG n° 15/09886 ; Dnd.

Limites. L’exclusion totale de l’art. 1171 C. civ. dans les contrats de consommation n’est cependant pas acquise, dès lors que cette protection n’est pas absolue et que certaines situations peuvent y échapper.

1/ L’illustration la plus flagrante est constituée par les contrats conclus par des particuliers par l’intermédiaire d’un mandataire professionnel. L’application des règles de la représentation conduit à considérer que le contrat n’est pas conclu entre un professionnel et un consommateur, ce qui exclut l’application de l’art. L. 212-1 C. consom. (V. Cerclab n° 5849). Cependant, l’intervention du mandataire a toujours pour conséquence d’imposer au tiers contractant, en l’espèce un consommateur, des conditions prérédigées comportant exactement les mêmes stipulations abusives que celles qui pourraient être imposées par un mandant professionnel.

Dans l’absolu, il serait sans doute préférable de modifier les textes du Code de la consommation, pour prendre en compte la spécificité de cette situation et le rôle majeur des intermédiaires (comme commence à le faire le Code, notamment dans son art. L. 111-7 C. consom., pour les plateformes sur internet mettant en relation un consommateur et des particuliers dont le caractère professionnel ou pas peut-être très variable et difficile à vérifier).

En attendant cette éventuelle réforme, il est permis de se demander si l’exigence explicite d’un contrat d’adhésion n’offre pas paradoxalement une certaine souplesse (V. ci-dessous B).

2/ Aussi étonnant que cela puisse paraître (l’hypothèse ne semble pas avoir été envisagée par l’arrêt du 26 janvier précité), l’art. 1171 a été invoqué, au moins dans une décision, par le professionnel qui prétendait que c’était le consommateur qui lui avait imposé un contrat d’adhésion ! V. en effet pour une décision examinant sous l’angle de l’art. 1171 les clauses d’un contrat pouvant incontestablement être qualifié de contrat de consommation, à la demande… du professionnel  : CA Dijon (1re ch. civ.), 1er février 2022 : RG n° 20/00968 ; Cerclab n° 9384 (protocole d’accord entre une particulière et un entrepreneur à l’occasion de malfaçons lors de la réfection d’enduits de façade de sa résidence secondaire), sur appel de T. com. Chalon-sur-Saône, 27 juillet 2020 : RG n° 2019003471 ; Dnd.

B. ARTICULATION DE L’ART. 1171 C. CIV. ET DE L’ART. L. 442-1-I-2° C. COM.

Situation antérieure à l’introduction de l’art. 1171. Avant l’introduction de l’art. 1171 C. civ., les contrats échappant à l’art. L. 442-6 C. com. ne disposaient d’aucune disposition en droit commun (V. les tentatives de sanction directe Cerclab n° 6153 ou indirecte par le biais des art. 1134 anc., Cerclab n° 6154, ou 1135 anc., Cerclab n° 6155). § Pour une illustration : refus d’écarter la clause d’indexation d’un bail commercial sur l’indice du coût de la construction, au motif que cet indice serait inadapté et entraînerait une augmentation excessive des loyers, dès lors qu’il n'existe pas encore en droit commun des contrats, de texte qui, à l'instar de l'ancien art. L. 442-6-I-2° C. com., sur le fondement duquel est rendue la jurisprudence citée par le locataire, invite les parties à renégocier leur contrat dans l'hypothèse d'un déséquilibre significatif dans leurs droits et obligations. CA Aix-en-Provence (11e ch. A), 22 septembre 2015 : RG n° 14/02447 ; arrêt n° 2015/446 ; Cerclab n° 5325 ; Juris-Data n° 2015-021907 (absence d’application de la loi Pinel du 18 juin 2014 qui, si elle a effectivement prévu le remplacement de l'ICC par l'indice des loyers commerciaux, n’est applicable qu’aux contrats conclus ou renouvelés à partir du 1er septembre 2014 ; arrêt évoquant le projet de réforme de droit des obligations et son art. 1169 consacrant la possibilité pour les parties d'adapter leur contrat en cas de changement imprévisible de circonstances et la suppression par le juge de la clause qui créé un déséquilibre significatif entre leurs droits et obligations ; absence de faute des bailleurs, investisseurs particuliers, qui ont adhéré au contrat proposé par le preneur qui exploite une résidence de loisirs et qui a choisi l’indice), sur appel de TGI Aix-en-Provence, 9 janvier 2014 : RG n° 12/04128 ; Dnd.

1. ARTICULATION DE L’ART. 1171 C. CIV. ET DE L’ANCIEN ART. L. 442-6-I-2° C. COM.

Discussion. L’articulation de l’art. 1171 C. civ. et de l’anc. art. L. 442-6-I-2° C. com. soulevait davantage de difficultés, dès lors qu’en dépit de leur objectif commun de sanctionner les déséquilibres significatifs, les dispositions comportaient de multiples différences.

Dans une approche globale, mais simpliste, les deux dispositions pouvaient être considérées comme visant à sanctionner les clauses déséquilibrées entre professionnels, le texte spécial du Code de commerce l’emportant sur le texte général du Code civil. Cependant, cette conclusion semblait discutable pour de multiples raisons.

Tout d’abord, l’ancien art. L. 442-6-I-2° C. com. ne concernait que les partenaires commerciaux, solution beaucoup plus étroite que le contrat d’adhésion visé par l’art. 1171 C. civ. (Cerclab n° 6169). Par conséquent, si le contrat conclu était un contrat d’adhésion, mais sans partenariat commercial, il n’y avait aucune raison de l’écarter du champ d’application de l’art. 1171 C. civ. § N.B. Comme le montrent les innombrables décisions recensées sur ce site, cette solution est d’une importante pratique considérable, notamment pour tous les contrats de location financière couplés avec des prestations de services qui sont proposés à de « petits » professionnels artisans, commerçants, agriculteurs, professions libérales, auto-entrepreneurs, etc. Compte tenu de la restriction du domaine d’application de la protection consumériste, l’art. 1171 C. civ. est amené à jouer un rôle considérable. Il convient d’ailleurs de souligner que cette solution va considérablement modifier les choses, puisque sous l’empire du droit antérieur, c’est surtout le domaine d’application de la protection consumériste qui était discuté, avec une conclusion souvent négative, alors que désormais c’est l’existence même du déséquilibre qui va être discutée. § Rappr. : si les contrats d'adhésion ne permettent pas a priori de négociations entre les parties, il incombe néanmoins à la partie qui invoque l'existence d'un déséquilibre significatif de rapporter la preuve qu'elle a été soumise, du fait du rapport de force existant, à des obligations injustifiées et non réciproques. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 11 octobre 2017 : RG n° 15/03313 ; Cerclab n° 7094 (concession dans la distribution de photocopieurs, couplée à une sous-traitance de maintenance), sur appel de T. com. Paris, 26 janvier 2015 : RG n° 2013036811 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 11), 24 juin 2016 : RG n° 13/20422 ; Cerclab n° 5677 ; Juris-Data n° 2016-015041 (contrat de télésurveillance pour un carrossier ; preuve non rapportée en l’espèce ; même motif), sur appel de T. com. Paris, 12 septembre 2013 : RG n° 2012061972 ; Dnd .

Le problème devait donc être cantonné aux relations entre partenaires commerciaux. Or, même dans ce cadre restreint, les deux textes présentaient des différences. L’ancien art. L. 442-6-I-2° C. com. était avant tout une disposition de droit de la concurrence, comme le montraient la place du texte et le III de l’article qui évoquait les actions d’autorités extérieures au contrat, avec des sanctions spécifiques (amende civile notamment). Dans cette logique, d’ailleurs, ce contentieux avait été concentré vers un nombre limité de juridictions de première instance et, en appel, devant la seule Cour d’appel de Paris. Même si l’ancien art. L. 442-6-II C. com. invalidait directement certaines clauses, l’action fondée sur l’ancien art. L. 442-6-I-2° C. com. était une action en responsabilité visant à réparer le préjudice provoqué par la clause déséquilibrée et non à supprimer la clause, en tout cas lorsque l’action est intentée par le contractant (les effets peuvent être différents V. Cerclab n° 6252). D’ailleurs, dans le cadre de l’ancien art. L. 442-6-I-5° C. com., il était acquis que le contractant pouvait se contenter d’agir sur le droit commun du contrat (si c’était possible) ou solliciter le dispositif spécial prévu par ce texte. Pour conclure, même dans cette seconde hypothèse, l’application de l’art. 1171 C. civ. n’était pas exclue.

Consécration de la primauté du texte spécial. La primauté du texte spécial est désormais explicitement posée par la Cour de cassation : il ressort des travaux parlementaires de la loi du 20 avril 2018 ratifiant l’ordonnance du 10 février 2016, que l'intention du législateur était que l'art. 1171 du code civil, qui régit le droit commun des contrats, sanctionne les clauses abusives dans les contrats ne relevant pas des dispositions spéciales des art. L. 442-6 C. com. et L. 212-1 C. consom. ; dès lors, l'art. 1171 C ; civ., interprété à la lumière de ces travaux, s'applique donc aux contrats, même conclus entre producteurs, commerçants, industriels ou personnes immatriculées au répertoire des métiers, lorsqu'ils ne relèvent pas de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 24 avril 2019, applicable en la cause, tels que les contrats de location financière conclus par les établissements de crédit et sociétés de financement, lesquels, pour leurs opérations de banque et leurs opérations connexes définies à l'art. L. 311-2 CMF, ne sont pas soumis aux textes du code de commerce relatifs aux pratiques restrictives de concurrence (Com. 15 janv. 2020, n° 18-10512). Cass. com., 26 janvier 2022 : pourvoi n° 20-16782 ; arrêt n° 62 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 9440 (points n° 4 à 7), pourvoi contre CA Lyon (3e ch. A), 27 février 2020 : RG n° 18/08265 ; Cerclab n° 8366.

* Admission du principe par les juges du fond. Dans le même sens que la Cour de cassation : CA Paris (pôle 5 ch. 11), 11 mars 2022 : RG n° 20/01435 ; Cerclab n° 9483 (crédit-bail ; exclusion de l’art. L. 442-6 au profit du CMF et exclusion de l’art. 1171, mais en raison de la date de conclusion du contrat), sur appel de T. com. Bordeaux, 6 décembre 2019 : RG n° 2018F00770 ; Dnd - CA Grenoble (ch. com.), 31 mars 2022 : RG n° 20/04209 ; Cerclab n° 9544 (site internet pour un paysagiste ; il est de principe que les contrats de location financière conclus par les sociétés de financement ne sont pas soumis aux textes du code de commerce relatifs aux pratiques restrictives de concurrence, mais que peuvent leur être appliquées les dispositions de l'article 1171 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 mars 2016), sur appel de T. com. Grenoble, 13 novembre 2020 : RG n° 2018J425 : Dnd - CA Douai (ch. 2 sect. 2), 19 octobre 2023 : RG n° 22/02325 ; Cerclab n° 10489 (lorsqu'un contrat conclu entre commerçants relève des dispositions de l'art. L. 442-6-I-2° C. com., qui font figure de règles particulières, celles de l'article 1171 C. civ., qui font figure de règles générales, n'ont pas vocation à s'appliquer audit contrat ; arrêt citant Com.., 26 janvier 2022, pourvoi n° 20-16.782), infirmant sur ce point T. com. Lille-Métropole, 29 mars 2022 : RG n° 2021005384 ; Dnd - CA Lyon (3e ch. A), 9 novembre 2023, : RG n° 20/03238 ; Cerclab n° 10538 (contrat entre un fabricant et un distributeur de produits capillaires ; l'art. 1171 C. civ., interprété à la lumière de ces travaux, s'applique aux contrats, même conclus entre producteurs, commerçants, industriels ou personnes immatriculées au répertoire des métiers, lorsqu'ils ne relèvent pas de l'anc. art. L. 442-6-I-2° C. com.), sur appel de T. com. Bourg-en-Bresse, 21 février 2020 : RG n° 2019009822 ; Dnd - CA Douai (ch. 2 sect. 1), 16 novembre 2023 : RG n° 21/03145 ; Cerclab n° 10537 (l’art. L. 442-6 C. com. ne « complète » pas les dispositions du code civil et leur application n'est pas cumulative ; l'art. 1171 ne s'applique aux contrats conclus entre producteurs, commerçants, industriels ou personnes immatriculées au répertoire des métiers que lorsqu'ils ne relèvent pas de l'art. L. 442-6-I-2 - Cass. com., 26 janvier 2022, pourvoi n° 20-16.782), sur appel de T. com. Arras, 12 mai 2021 : RG n° 2019/1029 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 5), 23 novembre 2023 : RG n° 21/07860 ; arrêt n° 198 ; Cerclab n° 10540 (adoption de la position de la Cour de cassation sur la prééminence de l’art. L. 442-6-I-2° entre partenaires commerciaux), sur appel de T. com. Paris, 19 mars 2021 : RG n° 2019070268 ; Dnd.

* Application du principe par les juges du fond. Certaines décisions continuent de se référer à notion étroite du partenariat commercial. L’existence d’un tel partenariat exclut alors l’application de l’art. 1171. V. en ce sens : CA Douai (ch. 2 sect. 2), 19 octobre 2023 : RG n° 22/02325 ; Cerclab n° 10489 (contrat de publicité entre un centre de contrôle technique et une société spécialisée dans la publicité, en vue d'éditer des coupons de réduction figurant au dos des tickets de caisse de moyennes et grandes surfaces ; des contrats de promotion publicitaire, conclus entre commerçants, relèvent des dispositions de l’art. L. 442-6-I-2° C. com., de sorte que celles de l'art 1171 C. civ. leur sont inapplicables), infirmant sur ce point T. com. Lille-Métropole, 29 mars 2022 : RG n° 2021005384 ; Dnd - CA Lyon (3e ch. A), 9 novembre 2023 : RG n° 20/03238 ; Cerclab n° 10538 (contrat entre un fabricant et un distributeur de produits capillaires ; exclusion de l’art. 1171 dès lors que l’art, L. 442-6 s'applique dans les relations entre partenaires commerciaux, ce qui est le cas en l'espèce, le contrat litigieux étant un contrat de fabrication de produits cosmétiques conclu entre deux commerçants, qui avait pour vocation à s'appliquer dans la durée et qui se trouvait être le support de l'activité de distribution de l’acheteur), sur appel de T. com. Bourg-en-Bresse, 21 février 2020 : RG n° 2019009822 ; Dnd - CA Douai (ch. 2 sect. 1), 16 novembre 2023 : RG n° 21/03145 ; Cerclab n° 10537 (contrat entre un concessionnaire automobile et un prestataire de téléphonie ; ce contrat de refonte de la téléphonie et de mise en place d'un centre d'appel, ainsi que le contrat de maintenance concernant cette installation, procèdent d'une relation commerciale entre les deux parties qui peuvent dès lors être qualifiées de partenaires commerciaux, de sorte qu'ils relèvent des dispositions du code de commerce, ce qui exclut l'application des dispositions du code civil), sur appel de T. com. Arras, 12 mai 2021 : RG n° 2019/1029 ; Dnd.

Inversement, l’absence d’un tel partenariat permet l’application de l’art. 1171 : CA Rennes (3e ch. com.), 24 octobre 2023 : RG n° 21/04305 ; arrêt n° 447 ; Cerclab n° 10517 (les relations entre la société et la société d’audit ne sont pas celles de deux partenaires commerciaux, ni celles d'un consommateur et d'un professionnel, ce dont il résulte qu'aucune disposition spéciale relative au déséquilibre significatif ne fait obstacle à l'application des dispositions de l'art. 1171 C. civ.), sur appel de T. com. Quimper, 25 juin 2021 : Dnd.

L’exclusion de l’art. L. 442-6 C. com. en raison de la nature du contrat ouvre aussi la voie à l’application de l’art. 1171 C. civ. : CA Versailles (16e ch.), 19 octobre 2023 : RG n° 23/01016 ; Cerclab n° 10518 (le dispositif prévu par les articles L. 442-1 s. C. com., qui relève du droit des pratiques restrictives de concurrence entre entreprises, n'a pas lieu de s'appliquer dans une espèce qui concerne un prêt immobilier ponctuel consenti par un établissement de crédit à une SCI), sur appel de TJ Pontoise (Jex), 24 janvier 2023 : RG n° 21/00233 ; Dnd - CA Versailles (16e ch.), 19 octobre 2023 : RG n° 23/01016 ; Dnd (idem), sur appel de TJ Pontoise (Jex), 24 janvier 2023 : RG n° 21/00232 ; Dnd.

* Décisions s’éloignant du principe de primauté. Certaines décisions sont cependant moins nettes et semblent examiner les déséquilibres sur les deux fondements, aux logiques proches. V. pour une décision écartant l’existence d’un déséquilibre significatif dans le cadre de l’anc. art. L. 442-6-I-2° C. com., en renvoyant aux développements précédents écartant ce déséquilibre dans le cadre de l’art. 1171 C. civ. CA Paris (pôle 4 ch. 9), 25 juin 2020 : RG n° 17/16211 ; Cerclab n° 8478 (location financière de site internet pour un disc-jockey professionnel ; les parties ne sont pas des partenaires commerciaux et absence au surplus de déséquilibre significatif), sur appel de TI Lagny-sur-Marne, 7 juillet 2017 : RG n° 11-17-000243 ; Dnd. § V. aussi : CA Paris (pôle 5 ch. 5), 23 novembre 2023 : RG n° 21/07860 ; arrêt n° 198 ; Cerclab n° 10540 (contrat d’entretien des locaux pour une société ayant pour activité le conseil et l'assistance aux entreprises, pour deux ans, renouvelable tacitement ; la société cliente ne précisant pas sur lequel des deux fondements juridiques elle s'appuie pour soutenir que la clause litigieuse devrait être déclarée non écrite, l’arrêt estime ensuite « en tout état de cause » que la preuve d’une soumission ou tentative de soumission n’est pas établie), sur appel de T. com. Paris, 19 mars 2021 : RG n° 2019070268 ; Dnd.

Rappr. : CA Douai (ch. 2 sect. 2), 19 mai 2022 : RG n° 21/02587 ; Cerclab n° 9608 (contrat de location, apparemment non financière, de matériels de chantier par une entreprise de construction ; examen d’office de la recevabilité du moyen fondé sur l’anc. art. L. 442-6 pour considérer que le caractère abusif était en l’espèce fondé sur l’art. 1171), sur appel de T. com. Arras, 23 avril 2021 : RG n° 2019/990 ; Dnd.

2. ARTICULATION DE L’ART. 1171 C. CIV. ET DE L’ART. L. 442-1-I-2° C. COM.

Discussion. L’ordonnance du 24 avril 2019 a remplacé l’ancien art. L. 442-6-I-2° C. com. par un nouvel art. L. 442-1-I-2° C. com. Les deux textes sont très proches, sauf sur deux points : la suppression de l’exigence d’un partenariat commercial. Selon la nouvelle disposition, « I. - Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, dans le cadre de la négociation commerciale, de la conclusion ou de l'exécution d'un contrat, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services : […] 2° De soumettre ou de tenter de soumettre l'autre partie à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ». Par ailleurs, l’art. L. 442-4 C. com. ouvre désormais explicitement au cocontractant la possibilité de demander l’annulation de la clause et non seulement celle de solliciter le préjudice causé par son insertion. Les effets se sont donc rapprochés. Il reste à déterminer si les domaines des deux dispositions se chevauchent ou pas.

L’art. L. 442-1-I-2° C. com. est fondamentalement une action en responsabilité, la faute étant celle de ne pas avoir négocié le contrat, alors que cette négociation aurait dû être le principe. Dans cet esprit, a fortiori après la loi de ratification du Code civil, l’articulation aurait pu être assez simple : l’art. L. 442-1-I-2° C. com. aurait sanctionné les contrats qui doivent être négociés et qui ne l’ont pas été, l’art. 1171 les contrats d’adhésion qui ne sont pas négociables. La combinaison peut être efficace, à condition que la possibilité de négocier dans le cadre de l’art. 1171 soit abordée de façon réaliste.

Principe de primauté. La Cour de cassation n’a pas eu l’occasion de confirmer dans le cadre de l’art. L. 442-1 C. com. la solution qu’elle avait posée pour l’art. L. 442-6 C. com. Néanmoins, compte tenu de son interprétation large de la notion de partenaire commercial, que l’ordonnance est venue confirmer, il semble probable qu’elle maintienne la même solution.

Tel est déjà le cas de décisions des juges du fond : CA Lyon (3e ch. A), 7 juillet 2022 : RG n° 19/01741 ; Cerclab n° 9711 (location financière d'une imprimante par un commissionnaire de transport non concernée par l’art. L. 442-1), sur appel de T. com. Saint-Étienne, 12 février 2019 : RG n° 2019j0077 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 11), 17 mars 2023 : RG n° 21/10782 ; Cerclab n° 10256 (application du principe posé par la Cour de cassation et exclusion de l’art. L. 442-1 au profit de l’art. 1171 pour un contrat de location financière), sur appel de TJ Créteil, 2 avril 2021 : RG n° 19/01992 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 14 juin 2023 : RG n° 21/09467 ; arrêt n° 118 ; Cerclab n° 10351 (même principe pour un contrat de franchise, l’arrêt raisonnant ensuite uniquement sur l’art. 1171 sans expliquer en quoi la règlementation du contrat de franchise s’opposerait à l’application de l’art. L. 442-1), sur appel de T. com. Bobigny, 11 mai 2021 : RG n° 2019F01099 ; Dnd.

V. cep. pour le visa des deux textes : CA Paris (pôle 5 ch. 11), 27 janvier 2023 : RG n° 21/07493 ; Cerclab n° 10228 (contrat d’organisation d’une exposition de galeristes qui n’a pu se tenir en raison du Covid ; absence de déséquilibre significatif, tant sur le fondement de l’art. 1171 C. civ. que sur celui de l’art. L. 442-1 C. com.), sur appel de T. com. Paris, 11 mars 2021 : RG n° 2020037956 ; Dnd.

N.B. La solution posée présente un inconvénient majeur, d’ordre procédural, en ce qu’elle continuera de conforter soit l’encombrement de la juridiction d’appel spécialisée (la cour de Paris), soit elle dissuadera les parties d’agir sur ce fondement. Sur les conséquences procédurales, rappr. : refus d’annuler le jugement pour non-respect de l’art. D. 442-2 C. com., dès lors que le litige n’est pas fondé sur l’art. L. 442-1 C. com., mais sur l’art. 1171 C. civ. CA Poitiers (1re ch.), 28 mars 2023 : RG n° 21/02575 ; arrêt n° 144 ; Cerclab n° 10161, sur appel de T. com. Saintes, 1er juillet 2021 : Dnd. § L’art. L. 442-6-I-2° C. com. n'est pas devenu l'art. 1171 C. civ., mais l'article L. 442-1-I-2° C. com. et les litiges qui y sont relatifs relèvent aussi de juridictions spécialisées ainsi que le prévoit l'art. L. 442-4 C. com. ; l'introduction de l'art. 1171 n'a donc pas fait disparaître la compétence des juridictions spécialisées pour statuer sur les actions en responsabilité engagées sur le fondement du déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties prévu par les dispositions du code du commerce. CA Grenoble (ch. com.), 6 juillet 2023 : RG n° 21/02075 ; Cerclab n° 10360 ; JurisData n° 2023-014510, sur appel de T. com. Grenoble, 21 avril 2021 : RG n° 2021J38 ; Dnd.

C. ARTICULATION DE L’ART. 1171 C. CIV. AVEC D’AUTRES RÈGLEMENTATIONS SPÉCIALES

La disposition de l’art. 1105 C. civ. est générale et par conséquent, toute disposition « particulière » peut primer l’art. 1171 C. civ. (V. pour l’art. L. 212-1 C. consom. Cerclab n° 5840).

En revanche, ce texte doit être appliqué avec prudence et, notamment, la spécificité d’un domaine particulier, le droit du travail par exemple, n’est pas suffisante pour justifier l’éviction de l’art. 1171 C. civ. En droit de la consommation, l’art. L. 212-1 C. consom. est appliqué indifféremment à des secteurs non réglementés (prestations de services), moyennement réglementés (fourniture de gaz ou communications électroniques) ou précisément réglementés (agences de voyages, maisons de retraite). Il n’y a pas de raison qu’il en aille autrement pour l’art. 1171 C. civ. pour une raison fondamentale : la notion de déséquilibre significatif intègre dans son fonctionnement même toutes les contraintes applicables au contrat ou aux parties (sur l’application de l’art. 1171 au contrat de travail, V. Cerclab n° 9748).

V. cep. CA Versailles (17e ch.), 1er juillet 2020 : RG n° 17/05012 ; Cerclab n° 8499 (« à supposer que l’art. 1171 C. civ. puisse trouver à s’appliquer ») - CA Rouen (ch. soc.), 24 juin 2021 : RG n° 19/00169 ; Cerclab n° 9023 (décision émettant un doute sur l’applicabilité de l’art. 1110 au contrat de travail : « si tant est que cette qualification doive être appliquée au contrat de travail »), sur appel de Cons. prud’h. Évreux, 11 décembre 2018 : Dnd.

D. ORDRE LOGIQUE DES SANCTIONS

Absence de contrat. V. dans une affaire particulière, l’inutilité de s’interroger sur l’existence d’un déséquilibre significatif ou du caractère léonin du contrat, en l’absence de contrat de location entre le propriétaire du parc de loisirs et les occupants d’un emplacement sans droit ni titre, propriétaires d’une résidence de loisir implantée dessus. CA Nîmes (2e ch. civ. sect. B), 3 avril 2023 : RG n° 22/03654 ; Cerclab n° 10214 (1/ l’occupante, propriétaire de son chalet et qui invoquait aussi l’art. 1169, estimait qu’elle était débitrice d'un nombre très important d'obligations alors que le bailleur n'en avait quasiment aucune ; 2/ rejet de la demande d’expulsion en vertu de l’art. 8 Conv. EDH, le chalet correspondant à une résidence principale, mais admission d’une indemnité d’occupation, au montant réduit compte tenu du mauvais état d’entretien du parc), sur appel de TJ Alès (cont. protect.), 24 octobre 2022 : RG n° 22/00321 ; Dnd. § Dans le même sens (même bailleur) : CA Nîmes (2e ch. civ. sect. B), 3 avril 2023 : RG n° 22/03655 ; Dnd, sur appel de TJ Alès (cont. protect.), 24 octobre 2022 : RG n° 22/00271 ; Dnd - CA Nîmes (2e ch. civ. sect. B), 3 avril 2023 : RG n° 22/03656 ; Dnd, sur appel de TJ Alès (cont. protect.), 24 octobre 2022 : RG n° 22/00279 ; Dnd - CA Nîmes (2e ch. civ. sect. B), 3 avril 2023 : RG n° 22/03743 ; Dnd, sur appel de TJ Alès (cont. protect.), 24 octobre 2022 : RG n° 22/00281 ; Dnd. § V. aussi, mais pour une locataire : CA Nîmes (2e ch. civ. sect. B), 3 avril 2023 : RG n° 22/03658 ; Cerclab n° 10215 (admission d’une contestation sérieuse sur l’acquisition de la clause résolutoire, compte tenu du moyen tiré de l’exception d’inexécution en raison de l’inexécution par le bailleur de ses obligations, « sans qu'il y ait nécessité de statuer sur le caractère léonin du contrat » ; rejet de la demande d’expulsion compte tenu du titre de propriété du chalet), sur appel de TJ Alès (cont. protect.), 24 octobre 2022 : RG n° 22/00281 ; Dnd. § N.B. Le rappel des faits est un peu imprécis. Il semble qu’initialement, la SCI propriétaire avait loué le terrain à une association, qui sous-louait des emplacements à des propriétaires de résidence, mais que le contrat de location n’ait pas été transmis à des acquéreurs de chalet, faute d’avoir été agréés par le bailleur.

Nullité du contrat préalable à l’examen du déséquilibre. La nullité du contrat rend inutile la vérification du déséquilibre allégué. V. par exemple : CA Grenoble (ch. com.), 24 juin 2021 : RG n° 19/03410 ; Cerclab n° 9020 (contrat de services de téléphonie fixe ; nullité du contrat conclu par une personne ayant clairement indiqué ne pas disposer d’un pouvoir de représentation, outre des manœuvres dolosives, le prestataire démarcheur ayant prétendu agir au nom de la société Orange, et fait signer un contrat dont les conditions générales étaient au surplus illisibles ; portage des lignes effectué en dépit de l’opposition du client…), sur appel de T. com. Gap, 3 mai 2019 : Dnd.

Application préalable d’une autre cause d’invalidation. Dès lors que la clause de non-concurrence litigieuse n'est pas suffisamment limitée dans le temps et l'espace et qu'elle va au-delà de ce qui est strictement nécessaire à la protection des intérêts légitimes de la société mandante, elle doit être déclarée non écrite, sans qu'il soit nécessaire d'examiner si elle crée un déséquilibre significatif entre les parties et constitue une clause abusive et si elle doit être réduite par le juge en vertu de son pouvoir de modération tiré de l'art. 1231-5 C. civ. CA Toulouse (2e ch.), 7 juin 2023 : RG n° 21/05090 ; arrêt n° 260 ; Cerclab n° 10329, sur appel de T. com. Toulouse, 13 décembre 2021 : RG n° 2020J00257 ; Dnd. § V. aussi : CA Paris (pôle 6 ch. 9), 13 décembre 2023 : RG n° 21/06349 ; Cerclab n° 10612 (nullité d’une clause de mobilité fixant le lieu de travail chez les clients et ne comportant aucune mention relative à la zone géographique concernée), sur appel de Cons. prud. Paris, 21 mai 2021 : RG n° 19/10844 ; Dnd.

Clause sans influence sur l’issue du litige. Dès lors que le mandataire ne rapporte pas la preuve     d’une vente conclue sans son concours, justifiant son droit à rémunération, est sans objet la discussion sur le caractère abusif de la clause de rémunération ou sur la clause pénale. CA Fort-de-France (ch. civ.), 20 juillet 2021 : RG n° 20/00165 ; Cerclab n° 9019 (mandat de vente ;), sur appel de TJ Fort-de-France, 5 mai 2020 : RG n° 18/02411 ; Dnd. § V. aussi : CA Lyon (3e ch. A), 7 juillet 2022 : RG n° 19/01741 ; Cerclab n° 9711 (caractère inopérant de la contestation d’une clause inapplicable au litige). § Il est inopérant de solliciter que soit déclarée non écrite la stipulation autorisant le syndicat de copropriétaires à résilier la convention à tout moment, puisqu'en l'espèce, il y a mis fin au terme contractuel. CA Paris (pôle 5 ch. 3), 30 novembre 2022 : RG n° 20/02499 ; Cerclab n° 9963 (convention d’occupation précaire du 1er au 31 mars 2017), sur appel de TGI Évry, 7 novembre 2019 : RG n° 17/03158 ; Dnd.

Pour d’autres illustrations, V. aussi : CA Bordeaux (4e ch. com.), 1er février 2023 : RG n° 20/04681 ; Cerclab n° 10083 (contrat de télésurveillance d’une pizzeria ; absence d’examen du moyen tiré d’un manquement à l’obligation de maintenance et du caractère abusif des clauses la concernant, dès lors que l’action est dirigée contre le bailleur financier qui n’est pas tenu d’une telle obligation), sur appel de T. com. Bordeaux, 5 octobre 2020 : RG n° 2019F00565 ; Dnd.

Clause inapplicable, faute d’en respecter les conditions. L’acheteur n’ayant pas respecté la formalité d’envoi d’une LRAR dans les trois jours de la livraison, le point de savoir si la limitation de responsabilité portant sur le seul remplacement des vitrages sans aucune autre indemnité et après récupération de la marchandise défectueuse est contraire aux dispositions de l'art. 1171 C. civ. est inopérant. CA Rouen (ch. civ. com.), 5 janvier 2023 : RG n° 21/04625 ; Cerclab n° 10023 (contrat de fourniture de vitrages entre un fabricant et un installateur), sur appel de T. com. Bernay, 28 octobre 2021 : RG n° 2021J00040 ; Dnd

Clause inappliquée. Pour l’absence d’examen du caractère abusif d’une clause qui n’est pas invoquée par celui qui l’a imposée : CA Paris (pôle 5 ch. 6), 6 septembre 2023 : RG n° 22/07674 ; Cerclab n° 10412 (contrat d’approvisionnement entre un coiffeur et un fabricant de produits spécialisés dans le secteur, contre une avance pour l’installation avec la caution solidaire du gérant, jugé disproportionné ; il doit être observé que le fournisseur ne se prévaut pas de la stipulation figurant à l'acte de cautionnement selon laquelle « la caution déclare que l'engagement qu'elle prend au titre de la présente est proportionné à ses biens et revenus » pour l'empêcher d'établir cette disproportion manifeste dont la charge lui incombe, de sorte que statuer sur son caractère abusif n'est pas nécessaire à la solution du litige étant observé que le coiffeur ne forme pas de demande de ce chef dans le dispositif de ses conclusions), sur appel de T. com. Paris, 9 mars 2022 : RG n° 2019052359 ; Dnd.

Clauses pénales. La stipulation d'une clause pénale ne présente, en soi, aucun caractère abusif, le juge disposant par ailleurs de la faculté, au visa de l'art. 1231-5 C. civ., de modérer la pénalité convenue si elle est manifestement excessive. CA Toulouse (2e ch.), 24 mai 2023 : RG n° 21/04172 ; arrêt n° 226 ; Cerclab n° 10328 (location financière, en décembre 2018, d’un logiciel de gestion par une société commerciale spécialisée dans la vente et la réparation d'engins, notamment agricoles ; clause classique visant les loyers échus et à échoir majorés de 10 %). § Hormis les loyers échus et impayés, qui sont la contrepartie de la mise à disposition du matériel, les autres sommes prévues, telles que les loyers restant à échoir au jour de la résiliation augmentés du montant de l'option d'achat et d’une majoration de 10 %, s’analysent en clause pénale et sont toutes soumises au pouvoir modérateur du juge, de sorte qu'elles ne peuvent être considérées comme créant un déséquilibre significatif au détriment du crédit-preneur. CA Besançon (1re ch. civ. com.), 7 février 2023 : RG n° 21/00988 ; Cerclab n° 10082 (chirurgien-dentiste concluant trois contrats de crédit-bail sur du matériel médical), confirmant TJ Lons-le-Saunier, 21 avril 2021 : RG n° 20/00190 ; Dnd. § Pour d’autres décisions prenant en compte le caractère révisable de la clause pénale pour apprécier le déséquilibre significatif : CA Agen (1re ch. civ. sect. com.), 29 mars 2023 : RG n° 21/01099 ; Cerclab n° 10167.

V. pour un arrêt ambigu, écartant au préalable l’existence d’un déséquilibre significatif par des motifs classiques, notamment la protection contre la fraude du mandant, avant d’ajouter « étant observé en outre que si le montant de l'indemnité due par le mandant en cas de non-respect est susceptible de réduction par application de l'article 1231-5 du code civil, cette clause ne peut être qualifiée de clause abusive au sens des articles 1171 du code civil et L. 212-1 du code de la consommation », ce qui semble écarter systématiquement la clause pénale du contrôle, en raison du contrôle de son montant, CA Metz (3e ch. - TI), 22 septembre 2022 : RG n° 21/00793 ; arrêt n° 22/00319 ; Cerclab n° 9832 (mandat de vente d’une maison individuelle), sur appel de T. proxim. Saint-Avold, 11 mars 2021 : RG n° 11-20-193 ; Dnd. § N.B. Cette position en droit de la consommation est désormais contredite par l’art. R. 212-2-3° C. consom. Dans le cadre de l’art. 1171, elle omet le fait que le caractère abusif peut avoir une autre origine que le seul montant (absence de réciprocité ou de manquement, automaticité, etc.) et, en tout état de cause, un montant particulièrement disproportionné oblige à agir en justice pour réduire la clause, ce qui est aussi un élément à prendre en compte pour apprécier le déséquilibre.