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CA POITIERS (2e ch. civ.), 1er juillet 2025

Nature : Décision
Titre : CA POITIERS (2e ch. civ.), 1er juillet 2025
Pays : France
Juridiction : Poitiers (CA), 2e ch. civ.
Demande : 24/01572
Décision : 25/256
Date : 1/07/2025
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 2/07/2024
Décision antérieure : TJ La Roche-sur-Yon, 28 mars 2024
Numéro de la décision : 256
Décision antérieure :
  • TJ La Roche-sur-Yon, 28 mars 2024
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CERCLAB - DOCUMENT N° 24150

CA POITIERS (2e ch. civ.), 1er juillet 2025 : RG n° 24/01572 ; arrêt n° 256

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « Mais la société Leasecom lui objecte que si la notion d'activité principale concerne les contrats conclus hors établissement, Madame X. n'apporte pas la preuve que les critères relatifs à de tels contrats sont remplis en l'espèce. Et dans ses écritures (page 2, premier paragraphe), Madame X. vient elle-même énoncer avoir conclu à distance le 13 mai 2016 le contrat de location litigieux pour financer la mise en place d'un site internet pour assurer sa publicité à distance. Il s'ensuit que le contrat litigieux n'a pas été conclu hors établissement, mais à distance.

Dès lors, Madame X., en sa qualité de professionnel, ne peut pas revendiquer l'extension de la protection du code de la consommation prévue par l'article L. 121-16-1 du code de la consommation, dans sa version alors applicable, qui ne concerne que les contrats conclus hors établissement. »

2/ « Il ressort des écritures respectives des parties que celles-ci se rejoignent en ce que le contrat litigieux est un contrat d'adhésion.

Ce contrat a été souscrit pour une durée irrévocable de 48 mois, prenant effet au 1er novembre 2016. Mais, d'une part, en ce qu'il institue une durée irrévocable, mais sans en fixer la durée, l'article 11 des conditions générales ne revêt aucun caractère abusif, alors que le contrat litigieux a été souscrit pour une durée déterminée, librement fixée par les parties. Car en l'espèce, la durée du contrat, fixée à 48 mois, ne procède pas des conditions générales susdites, mais procède des conditions particulières du contrat de location, sans qu'il apparaisse que cette durée aurait résulté d'une clause non négociable, déterminée à l'avance par le bailleur. Et dans la détermination de cette durée, il appartenait librement aux parties d'apprécier par eux-mêmes les circonstances de nature à affecter la poursuite de la relation contractuelle jusqu'au terme qu'elles avaient choisi et de fixer celui-ci en conséquence.

Et d'autre part, l'article 9 alinéa 2 du contrat, qui se borne à prévoir par avance l'indemnisation du bailleur résultant d'une résiliation anticipée pour quelque motif que ce soit, et qui vise à contraindre le locataire à respecter son obligation jusqu'à son terme, en ce qu'il se trouve le corollaire de la clause précédente prévoyant le caractère irrévocable de la durée de location, n'est pas plus abusif. Car il se borne à prévoir les modalités de résiliation par le bailleur en cas de défaut de paiement par le locataire, tandis qu'il n'écarte pas la faculté pour le locataire d'obtenir la résolution ou la résiliation du contrat en cas de manquement du bailleur à ses obligations.

Surtout, les modalités d'application de la loi dans le temps conduiront à retenir qu'en tout état de cause, les dispositions protectrices du code civil susdites, entrées en vigueur le 1er octobre 2016, ne pouvait pas s'appliquer au contrat initial d'une durée de 48 mois, souscrit le 13 mai 2016, à effet au 1er novembre 2016.

Celles-ci avaient vocation à s'appliquer uniquement s'agissant de la période au titre de la tacite reconduction annuelle, susceptible de courir à l'issue du contrat initial, soit pour la période du 1er novembre 2020 au 31 octobre 2021.

Et même pour cette éventuelle période de tacite reconduction, il a été retenu que ces clauses ne revêtent aucun caractère abusif.

Il y aura donc lieu de rejeter la demande relative à l'existence des clauses abusives, et le jugement sera confirmé de ce chef. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE POITIERS

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 1er JUILLET 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 24/01572. Arrêt n° 256. N° Portalis DBV5-V-B7I-HCMN. Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 mars 2024 rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHE-SUR-YON.

 

APPELANTE :

Madame X.

née le [date] à [Localité 6], [Adresse 3], [Localité 2], Ayant pour avocat Maître Cédric ROBERT de la SARL 3CR AVOCATS, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2024-XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [Localité 7])

 

INTIMÉE :

SASU LEASECOM

prise en la personne de son Président, en exercice, et de tous autres représentants légaux domiciliés ès-qualité audit siège [Adresse 4], [Localité 1], Ayant pour avocat postulant Maître Jérôme CLERC de la SELARL LX POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS. Ayant pour avocat plaidant Maître Carolina CURTUN-ORTEGA, avocat au barreau de BORDEAUX.

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 13 mai 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant : Monsieur Cédric LECLER, Conseiller.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Lydie MARQUER, Présidente, Monsieur Claude PASCOT, Président, Monsieur Cédric LECLER, Conseiller.

GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU

ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, - Signé par Madame Lydie MARQUER, Présidente, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le 13 mai 2016, Madame X., exerçant en entreprise individuelle, a conclu un contrat de location de site internet avec la société par actions simplifiée Leasecom.

Ce contrat a été stipulé pour une durée de 48 mois et 135 euros hors taxes (ht), soit 162 euros toutes taxes comprises (ttc) et reconductible par année.

Le 1er octobre 2018, Madame X. a cessé de payer les loyers.

Le 8 janvier 2021, la société Leasecom a adressé une mise en demeure à Madame X., visant la somme de 4.050 euros.

Le 1er février 2021, la société Leasecom a déposé une requête en injonction de payer devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de La Roche-sur-Yon.

Par ordonnance du 7 juin 2021, le juge des contentieux de la protection de [Localité 5] a enjoint Madame X. à régler à la société Leasecom la somme de 4.255,30 euros.

Le 5 novembre 2021, Madame X. a formé opposition à cette ordonnance devant le tribunal judiciaire de La Roche-sur-Yon.

Par jugement contradictoire en date du 28 mars 2024, le tribunal judiciaire de La Roche-sur-Yon a :

- déclaré l’opposition recevable ;

- rappelé que le présent jugement se substituait à l'ordonnance portant injonction de payer du 7 juin 2021 ;

- rejeté la demande de nullité du contrat ;

- rejeté la demande relative à l'existence de clauses abusives ;

- condamné Madame X. à verser à la société Leasecom la somme de 4050 euros, avec intérêts au taux BCE majoré de 10 points à compter du 31 octobre 2020 ;

- condamné Madame X. aux dépens, conformément aux règles de l'aide juridictionnelle ;

- rejeté le surplus des demandes.

Le 2 juillet 2024, Madame X. a relevé appel de ce jugement, en intimant la société Leasecom.

Le 14 juin 2024, Madame X. a déposé une demande d'aide juridictionnelle.

Le 11 juillet 2024, le bureau d'aide juridictionnelle a alloué l'aide y afférente et a désigné un conseil à l'appelante.

Le 3 septembre 2024, le bureau d'aide juridictionnelle a alloué l'aide y afférente et a désigné un commissaire de justice pour assister l'appelante.

Le 5 septembre 2024, Madame X. a déposé ses premières conclusions au fond.

[*]

Dans ses dernières conclusions du 10 avril 2025, Madame X. demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, de :

A titre principal,

- prononcer la nullité du contrat de location de longue durée n°216L61241 qu'elle avait signé le 13 mai 2016 ;

En conséquence,

- débouter la société Leasecom de l'ensemble de ses prétentions ;

- condamner la société Leasecom à lui rembourser le montant des loyers qui avaient été versés par ses soins sur la période courant du 1er novembre 2016 au 30 septembre 2018, soit la somme de 3726 euros (162 euros ttc x 23 mois) ;

- condamner la même à lui régler la somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 700 du code de procédure civile et 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;

A titre subsidiaire,

- déclarer comme abusives et non écrites les clauses contractuelles constituées par l'article 9 alinéa 2 et l'article 11 des conditions générales du contrat de location longue durée qu'elle avait signé le 13 mai 2016,

En conséquence,

- débouter la société Leasecom de l'ensemble de ses prétentions ;

- condamner la même à régler à Madame X. la somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 700 du Code de procédure civile et 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ainsi qu'aux entiers dépens.

[*]

Dans ses conclusions du 3 décembre 2024, la société Leasecom demande à la cour :

- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il avait :

- rejeté la demande de nullité du contrat ;

- rejeté la demande relative à l'existence de clauses abusives ;

- condamné Madame X. aux dépens, conformément aux règles de l'aide juridictionnelle ;

- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il avait limité la condamnation de Madame X. au montant des loyers échus impayés, à hauteur de 4.050 euros, avec intérêts au taux BCE majoré de 10 points à compter du 31 octobre 2020 ;

Et, statuant à nouveau,

- de condamner Madame X. à lui payer la somme de 5872,50 euros ttc, outre intérêts à compter du 16 janvier 2021, au titre des loyers impayés et de l'indemnité de résiliation, avec intérêts au taux BCE majoré de 10 points à compter du 31 octobre 2020 ;

A titre subsidiaire,

- de condamner Madame X. à lui payer la somme de 6561 euros arrêtée au 27 avril 2022, à parfaire en y ajoutant une indemnité de jouissance de 135 euros par mois à compter de cette date jusqu'au parfait paiement, au titre des loyers impayés et d'une indemnité de jouissance ;

A titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour prononçât la nullité du contrat :

- de débouter Madame X. de sa demande de restitution des loyers, ou à tout le moins la condamner à lui payer une indemnité de jouissance dont le montant ne pourrait être inférieur aux loyers perçus par Leasecom ;

- d'ordonner la compensation des sommes ;

En tout état de cause,

- de la juger recevable et bien fondée dans l'ensemble de ses demandes ;

- de débouter Madame X. de l'intégralité de ses demandes ;

- de juger la résiliation du contrat de location aux torts exclusifs de Madame X. ;

- de condamner Madame X. à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

[*]

Pour plus ample exposé, il sera expressément renvoyé aux écritures précitées des parties déposées aux dates susdites.

Le 15 avril 2025 a été ordonnée la clôture de l'instruction de l'affaire.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIVATION :

A titre liminaire, et au regard des prétentions respectives des parties, concordantes sur ce point, il y aura lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré l'opposition recevable et dit qu'il se substituerait à l'ordonnance d'injonction de payer du 7 juin 2021.

 

Sur la nullité du contrat :

Selon l'article liminaire du code de la consommation, dans sa version résultant de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, entré en vigueur le 1er juillet 2016 et jusqu'au 23 février 2017,

Pour l'application du présent code, on entend par :

- consommateur : toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ;

- non-professionnel : toute personne morale qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ;

- professionnel : toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu'elle agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel.

Selon l'article L. 221-3 du code de la consommation, résultant de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, entré en vigueur le 1er juillet 2016,

Les dispositions des sections 2, 3, 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.

Selon l'article L. 121-16-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, en vigueur du 8 août 2015 au 1er juillet 2016, en son paragraphe III,

III.-Les sous-sections 2, 3, 6, 7 et 8, applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.

Selon l'article L. 121-16-2 du même code, dans la même version,

Le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, à la suite d'un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d'autres coûts que ceux prévus aux articles L. 121-21-3 à L. 121-21-5. Toute clause par laquelle le consommateur abandonne son droit de rétractation est nulle.

Le délai mentionné au premier alinéa du présent article court à compter du jour :

1° De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l'article L. 121-16-2 ;

2° De la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens et les contrats de prestation de services incluant la livraison de biens. Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.

Dans le cas d'une commande portant sur plusieurs biens livrés séparément ou dans le cas d'une commande d'un bien composé de lots ou de pièces multiples dont la livraison est échelonnée sur une période définie, le délai court à compter de la réception du dernier bien ou lot ou de la dernière pièce.

Pour les contrats prévoyant la livraison régulière de biens pendant une période définie, le délai court à compter de la réception du premier bien.

Selon l'article L. 121-16 du code de la consommation, dans sa version en vigueur du 14 juin 2014 au 1er juillet 2016,

Au sens de la présente section, sont considérés comme :

1° "Contrat à distance" tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, dans le cadre d'un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu'à la conclusion du contrat ;

2° "Contrat hors établissement" tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur:

a) Dans un lieu qui n'est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, en la présence physique simultanée des parties, y compris à la suite d'une sollicitation ou d'une offre faite par le consommateur ;

b) Ou dans le lieu où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle ou au moyen d'une technique de communication à distance, immédiatement après que le consommateur a été sollicité personnellement et individuellement dans un lieu différent de celui où le professionnel exerce en permanence ou de manière habituelle son activité et où les parties étaient, physiquement et simultanément, présentes ;

c) Ou pendant une excursion organisée par le professionnel ayant pour but ou pour effet de promouvoir et de vendre des biens ou des services au consommateur ;

3° "Support durable" tout instrument permettant au consommateur ou au professionnel de stocker des informations qui lui sont adressées personnellement afin de pouvoir s'y reporter ultérieurement pendant un laps de temps adapté aux fins auxquelles les informations sont destinées et qui permet la reproduction à l'identique des informations stockées.

Selon l'article L. 121-17 du même code, dans la même version,

I.-Préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat ;

.....

L'article R. 121-1 du même code, dans la même version, comporte en annexe un bordereau-type de rétractation.

- - - - -

Ayant souverainement estimé que la communication commerciale et la publicité via un site internet n'entraient pas dans le champ de l'activité principale d'un architecte, au sens de l'article L. 121-16-1, III, devenu L. 221-3 du code de la consommation, une cour d'appel n'a pu qu'en déduire que, celui-ci ayant conclu un contrat de création et de licence d'exploitation de site internet avec un professionnel, bénéficiait du droit de rétractation prévu à l'article L. 121-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 (Cass. 1ère civ., 12 septembre 2018, pourvoi n° 17-17.319, Bull. 2018, I, n° 149).

- - - - -

Il résulte de l'article L. 221-3 du code de la consommation que le professionnel employant cinq salariés au plus, qui souscrit, hors établissement, un contrat dont l'objet n'entre pas dans le champ de son activité principale, bénéficie des dispositions protectrices du consommateur édictées par ce code.

Les juges du fond apprécient souverainement si un contrat n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel concerné (Cass. 1ère civ., 27 novembre 2019, pourvoi n°18-22.525).

- - - - -

Madame X. demande de prononcer la nullité du contrat litigieux souscrit selon elle hors établissement le 13 mai 2016, motif pris que ce contrat ne comporte aucune information précontractuelle relative aux modalités d'exercice du droit de rétractation, ni le bordereau type tels que prévus par les articles L. 121-17 et R. 121-1 du code de la consommation, dans leur version alors applicable, alors que ces formalités étaient prescrites à peine de nullité.

Elle soutient pouvoir bénéficier des dispositions protectrices du code de la consommation, au regard de l'article L. 121-16-1 du code de la consommation, dans sa version en vigueur au moment de la souscription du contrat litigieux, qui selon elle n'entre pas dans le cadre de son activité principale.

Elle rappelle qu'elle exerçait alors, sous le statut d'auto-entrepreneur ne lui permettant pas d'embaucher des salariés, la profession libérale de décoratrice d'intérieur.

Elle expose que son activité principale consistait à accompagner ses clients dans leurs projets de décoration, stylisation, agencement ou harmonisation des lieux de vie et de travail et qu'elle remplissait à ce titre diverses missions :

- proposer des projets décoratifs entièrement personnalisés ;

- concevoir des plans d'aménagement, des croquis et des maquettes ;

- sélectionner et procéder à l'achat des matériaux et des pièces de mobilier ;

- superviser la réalisation de travaux d'aménagement.

Mais elle soutient que la communication commerciale et la publicité par l'intermédiaire d'un site internet n'entrent pas dans la sphère de son activité principale de décoratrice d'intérieur, qui ne lui confère aucune compétence particulière pour apprécier l'intérêt à s'engager dans le contrat dont s'agit, lui proposant un contrat de configuration d'un site internet, service étranger à son champ de compétence professionnelle.

Elle expose que l'existence d'un site internet vantant ses compétences ne constitue pas un équipement nécessaire ou spécifique à l'exercice de son métier, que le site internet ne participe pas à des besoins impératifs de son activité professionnelle, et qu'il n'existe pas de rapport direct entre le contrat conclu et son activité principale.

Elle observe qu'aucune clause du contrat litigieux ne vient énoncer qu'elle l'a souscrit pour les besoins impérieux de son activité professionnelle.

Mais la société Leasecom lui objecte que si la notion d'activité principale concerne les contrats conclus hors établissement, Madame X. n'apporte pas la preuve que les critères relatifs à de tels contrats sont remplis en l'espèce.

Et dans ses écritures (page 2, premier paragraphe), Madame X. vient elle-même énoncer avoir conclu à distance le 13 mai 2016 le contrat de location litigieux pour financer la mise en place d'un site internet pour assurer sa publicité à distance.

Il s'ensuit que le contrat litigieux n'a pas été conclu hors établissement, mais à distance.

Dès lors, Madame X., en sa qualité de professionnel, ne peut pas revendiquer l'extension de la protection du code de la consommation prévue par l'article L. 121-16-1 du code de la consommation, dans sa version alors applicable, qui ne concerne que les contrats conclus hors établissement.

Il y aura donc lieu de rejeter la demande de nullité du contrat, et le jugement sera confirmé de ce chef.

 

Sur les clauses abusives :

Selon l'article 1110 du code civil, dans sa version en vigueur à compter du 1er octobre 2016, jusqu'au 1er octobre 2018, tel que résultant de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016,

Le contrat de gré à gré est celui dont les stipulations sont librement négociées entre les parties.

Le contrat d'adhésion est celui dont les conditions générales, soustraites à la négociation, sont déterminées à l'avance par l'une des parties.

Selon l'article 1110 du code civil, dans sa version en vigueur à compter du 1er octobre 2018, tel que résultant de la loi n° 2018-287 du 20 avril 2018,

Le contrat de gré à gré est celui dont les stipulations sont négociables entre les parties.

Le contrat d'adhésion est celui qui comporte un ensemble de clauses non négociables, déterminées à l'avance par l'une des parties.

Selon l'article 1171 du code civil, dans sa version en vigueur à compter du 1er octobre 2016, jusqu'au 1er octobre 2018, tel que résultant de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016,

Dans un contrat d'adhésion, toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite.

L'appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix à la prestation.

Selon l'article 1171 du code civil, dans sa version en vigueur à compter du 1er octobre 2018, tel que résultant de la loi n°2018-287 du 20 avril 2018,

Dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite.

L'appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix à la prestation.

Conformément aux dispositions du I de l'article 16 de la loi n°2018-287 du 20 avril 2018, les dispositions de l'article 1110 du code civil dans leur rédaction résultant de ladite loi sont applicables aux actes juridiques conclus ou établis à compter de son entrée en vigueur.

Selon l'article 9 alinéa 2 des conditions générales de location financière annexées au contrat de location litigieux,

En cas de résiliation anticipée qu'elle qu'en soit la cause, leascom aura droit à une indemnité légale à tous les loyers dus et à échoir jusqu'au terme de la période initiale de location majorée de 10 %. La créance de leascom est exigible au jour de la notification de la décision de résiliation...

Selon l'article 11 des mêmes conditions générales,

A l'issue de la durée irrévocable de location, le contrat peut être tacitement reconduit aux mêmes conditions par périodes successives de 12 mois, sauf dénonciation par le bailleur ou le locataire par lettre recommandée avec AR, quatre-vingt dix jours au moins avant le terme de la période de location.

Au regard des dispositions susdites du code civil, Madame X. demande de déclarer abusives et non écrites les deux stipulations contractuelles sus détaillées, et de débouter la société Leasecom de toutes ses prétentions.

Elle estime que ces clauses créent un déséquilibre significatif entre les parties.

Elle soutient que l'article 9 alinéa 2 ne peut pas s'apparenter à une clause de dédit permettant au locataire de rompre le contrat moyennant le paiement d'une juste indemnité au bailleur, mais vise exclusivement à contraindre la locataire à exécuter son engagement contractuel jusqu'à son terme, en aggravant les charges financières lui incombant en cas d'inexécution du contrat par une majoration de 10 % des sommes dues jusqu'à son terme.

Elle estime ainsi que la société Leasecom est mal fondée à lui réclamer la somme de 121,5 euros ttc correspondant à la majoration contractuelle querellée.

Elle considère en outre que l'article 11, instituant une durée de location irrévocable, est aussi abusif, comme écartant les motifs légitimes permettant d'interrompre le contrat avant son échéance, quels que soient les événements imprévisibles susceptibles de le toucher (déménagement, décès, licenciement économique, perte d'emploi, maladie, accident, cessation d'activité).

Il ressort des écritures respectives des parties que celles-ci se rejoignent en ce que le contrat litigieux est un contrat d'adhésion.

Ce contrat a été souscrit pour une durée irrévocable de 48 mois, prenant effet au 1er novembre 2016.

Mais, d'une part, en ce qu'il institue une durée irrévocable, mais sans en fixer la durée, l'article 11 des conditions générales ne revêt aucun caractère abusif, alors que le contrat litigieux a été souscrit pour une durée déterminée, librement fixée par les parties.

Car en l'espèce, la durée du contrat, fixée à 48 mois, ne procède pas des conditions générales susdites, mais procède des conditions particulières du contrat de location, sans qu'il apparaisse que cette durée aurait résulté d'une clause non négociable, déterminée à l'avance par le bailleur.

Et dans la détermination de cette durée, il appartenait librement aux parties d'apprécier par eux-mêmes les circonstances de nature à affecter la poursuite de la relation contractuelle jusqu'au terme qu'elles avaient choisi et de fixer celui-ci en conséquence.

Et d'autre part, l'article 9 alinéa 2 du contrat, qui se borne à prévoir par avance l'indemnisation du bailleur résultant d'une résiliation anticipée pour quelque motif que ce soit, et qui vise à contraindre le locataire à respecter son obligation jusqu'à son terme, en ce qu'il se trouve le corollaire de la clause précédente prévoyant le caractère irrévocable de la durée de location, n'est pas plus abusif.

Car il se borne à prévoir les modalités de résiliation par le bailleur en cas de défaut de paiement par le locataire, tandis qu'il n'écarte pas la faculté pour le locataire d'obtenir la résolution ou la résiliation du contrat en cas de manquement du bailleur à ses obligations.

Surtout, les modalités d'application de la loi dans le temps conduiront à retenir qu'en tout état de cause, les dispositions protectrices du code civil susdites, entrées en vigueur le 1er octobre 2016, ne pouvait pas s'appliquer au contrat initial d'une durée de 48 mois, souscrit le 13 mai 2016, à effet au 1er novembre 2016.

Celles-ci avaient vocation à s'appliquer uniquement s'agissant de la période au titre de la tacite reconduction annuelle, susceptible de courir à l'issue du contrat initial, soit pour la période du 1er novembre 2020 au 31 octobre 2021.

Et même pour cette éventuelle période de tacite reconduction, il a été retenu que ces clauses ne revêtent aucun caractère abusif.

Il y aura donc lieu de rejeter la demande relative à l'existence des clauses abusives, et le jugement sera confirmé de ce chef.

 

Sur les quanta dus au bailleur :

Il est constant entre parties que les loyers, d'un montant mensuel de 162 euros, n'ont pas été payés pour la période courant à compter du 1er octobre 2018 jusqu'au 31 octobre 2020, terme du contrat initial.

Ainsi, la locataire était redevable à ce titre à la bailleresse d'une somme de 4050 euros (162 euros x 25 mois).

* * * * *

Selon l'article 9 des conditions générales de location financière annexées au contrat de location litigieux,

.... leascom dispose d'un droit de résiliation sans préavis et d'indemnisation lorsque, malgré une mise en demeure, le Client ne respecte pas à des obligations du contrat et notamment lorsque le Client est en retard de paiement d'une échéance de loyer.

En cas de résiliation anticipée qu'elle qu'en soit la cause, leascom aura droit à une indemnité égale à tous les loyers dus et à échoir jusqu'au terme de la période initiale de location majorée de 10 %. La créance de leascom est exigible au jour de la notification de la décision de résiliation...

En considérant que le contrat a fait l'objet d'une tacite reconduction pour une période de 12 mois courant du 1er novembre 2020 au 31 octobre 2020, la société Leasecom réclame en outre à Madame X. les sommes de :

- 486 euros, au titre des 3 loyers du 1er novembre 2020 au 16 janvier 2021, date de la résiliation prononcée par la bailleresse,

- 1215 euros au titre des 9 loyers à échoir de février 2021 jusqu'à octobre 2021, jour du terme du contrat renouvelé ;

- 121,50 euros, correspondant à la majoration contractuelle de 10 % des loyers à échoir.

Mais il ressort de son propre courrier en date du 30 novembre 2018 que la société Leasecom a accusé réception du courrier de Madame X. en date du 26 novembre 2018, par laquelle cette dernière l'informait de sa cessation d'activité.

Et il appert de ce courrier qu'en réclamant à Madame X. une indemnité de résiliation anticipée, la société Leasecom a ainsi admis que ce courrier de la locataire manifestait sa volonté de mettre fin à la relation contractuelle, ou à tout le moins de ne pas la prolonger au-delà de son terme initial.

Il en résultera que le contrat susdit était venu à échéance au 31 octobre 2010, selon la volonté des parties, de sorte qu'il ne pouvait pas faire l'objet d'un renouvellement par tacite reconduction.

Dès lors, les présentes demandes du bailleur, portant sur une période postérieure à l'expiration du contrat, ne pourront pas prospérer au titre des loyers échus et de l'indemnité de résiliation.

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A titre infiniment subsidiaire, la bailleresse demande le paiement d'une somme de 2025 euros, à titre d'indemnité de jouissance, d'un montant mensuel de 135 euros, correspondant au loyer contractuel, pour la période courant de la résiliation intervenue le 16 janvier 2021 jusqu'au 27 avril 2022.

Elle observe que sur la période susdite, Madame X. continuait à disposer de l'objet du contrat de location, à savoir le site internet, sans régler aucun loyer.

Mais alors que la société Leasecom est malhabile à se prévaloir du contrat de location pour la période susdite, elle ne démontre aucune faute de la part de Madame X. ni aucun préjudice de son chef.

Sur un tel fondement, ces demandes ne pourront pas plus aboutir.

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Selon l'article 4 des conditions générales du contrat de location financière,

Tout retard de paiement donnera lieu à l'application d'un intérêt de retard calculé sur la base du taux d'intérêt appliqué par la Banque Centrale Européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points de pourcentage, à compter de la date d'exigibilité de la créance et jusqu'à la date de paiement effectif.

Au regard de ces éléments, il y aura donc lieu de :

- condamner Madame X. à payer à la société Leasecom la somme de 4050 euros, avec intérêts au taux Bce majoré de 10 points à compter du 31 octobre 2020,

- rejeter le surplus des demandes de la société Leasecom,

et le jugement sera confirmé de ces chefs.

* * * * *

Il y aura lieu de confirmer le jugement pour avoir condamné Madame X. aux dépens de première instance conformément aux règles de l'aide juridictionnelle, et rejeté au regard de considération d'équité les demandes au titre des frais irrépétibles de première instance.

Aucune considération d'équité ne conduira à allouer à une quelconque partie de sommes au titre des frais irrépétibles d'appel, et toutes deux seront déboutées de leurs demandes respectives y afférentes.

Néanmoins succombante, Madame X. sera condamnée aux dépens d'appel conformément aux règles de l'aide juridictionnelle.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour,

statuant publiquement, par arrêt contradictoire après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne Madame X. aux entiers dépens d'appel conformément aux règles de l'aide juridictionnelle.

LE GREFFIER,                                           LE PRÉSIDENT,