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CA PARIS (pôle 4 ch. 9), 4 juin 2009

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 4 ch. 9), 4 juin 2009
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 4 ch. 9
Demande : 06/17099
Date : 4/06/2009
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 2/10/2006
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2469

CA PARIS (pôle 4 ch. 9), 4 juin 2009 : RG n° 06/17099

Publication : Jurica

 

Extrait : « Considérant que, lorsqu'une clause est abusive, elle n'entraîne pas l'irrégularité du contrat de crédit mais est simplement réputée non écrite ; que, contrairement à ce que prétend l'organisme de crédit, il s'agit bien une clause contractuelle prévoyant l'augmentation du montant du crédit initial sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre préalable de crédit ;

Considérant qu'une telle clause laisse penser que le prêteur ne doit pas, pour chaque nouveau crédit que constitue l'augmentation du crédit initial, délivrer à l'emprunteur d'une nouvelle offre que ce dernier doit formellement accepter, et que l'emprunteur ne dispose donc pas à cette occasion de la faculté, d'ordre public, de rétracter son acceptation, observation étant faite que son attention n'a été attirée lors de la signature du contrat que sur le montant initialement limité du crédit et les indications corrélatives s'agissant du taux applicable et du montant des mensualités de remboursement ;

Qu'elle contrevient manifestement à l'objectif du législateur d'information de l'emprunteur sur l'ensemble des caractéristiques du crédit, et notamment la charge des remboursements, et du délai de réflexion ;

Que, créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, et ce au détriment du consommateur, elle s'analyse en une clause abusive, réputée non écrite conformément aux dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, qu'il en résulte que l'augmentation de l'ouverture de crédit en vertu de ladite clause est sans incidence sur la détermination du point de départ du délai de forclusion ;

Considérant que dès lors que la clause de variabilité du montant maximum emprunté est considérée comme réputée non écrite, et non comme entraînant des irrégularités du contrat de crédit au regard des dispositions des articles L. 311-8 à L. 311-10 du Code de la consommation, la sanction ne peut être que la déchéance du droit aux intérêts édictée par l'article L. 311-33 [NB conforme à la minute : comp. supra] ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 4 CHAMBRE 9

ARRÊT DU 4 JUIN 2009

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 06/17099. Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 août 2006 -Tribunal d'Instance de PARIS 05 - RG n° 11-05-000277.

 

APPELANTE :

Madame Y. épouse X.

[adresse], représentée par Maître Pascale BETTINGER, avoué à la Cour, assistée de Maître Paul BARTHELEMY, avocat au barreau de PARIS, toque : B 290 (bénéficiaire d'une aide juridictionnelle partielle numéro 2006/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

 

INTIMÉE :

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE anciennement CETELEM prise en la personne de ses représentants légaux

[adresse], représentée par la SCP TAZE-BERNARD - BELFAYOL-BROQUET, avoués à la Cour, assistée de Maître Julien BAUDOT, avocat au barreau de PARIS, toque : R.233, plaidant pour l'association GAUTIER VALCIN GAFFINEL

 

COMPOSITION DE LA COUR : Après rapport oral de Madame Catherine BONNAN-GARÇON, et en application des dispositions de [minute Jurica page 2] l'article 786 et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 7 avril 2009, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine BONNAN-GARÇON, conseillère faisant fonction de présidente et Madame Catherine BOUSCANT, conseillère,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Catherine BONNAN-GARÇON, conseillère faisant fonction de présidente, Madame Viviane GRAEVE, conseillère, Madame Catherine BOUSCANT, conseillère

GREFFIER : Lors des débats : Madame Hélène BODY

ARRÊT : CONTRADICTOIRE, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, signé Catherine BONNAN-GARÇON, conseillère faisant fonction de présidente et par Madame Hélène BODY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le 3 juin 2002, Madame X. a souscrit auprès de la SA CETELEM une offre préalable de crédit utilisable par fractions d'un montant de 3.000 € au taux effectif global de 13,92 %.

Le 18 août 2005, la SA CETELEM a fait assigner Madame X. devant le tribunal d'instance du 5ème arrondissement de Paris qui, par jugement du 24 août 2006, a condamné Madame X. à payer à la SA CETELEM la somme de 11.135,23 € avec intérêts au taux contractuel à compter du 10 juin 2005 et celle de 1 € au titre de l'indemnité légale.

Le 2 octobre 2006, Madame X. a relevé appel de cette décision.

 

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les conclusions de Madame X. du 13 mars 2009 tendant à l'infirmation du jugement, à la forclusion de l'action de la SA CETELEM, à ce que soit constatée l'absence d'offre préalable de la SA CETELEM concernant l'augmentation du découvert des crédits renouvelables, à la déchéance du droit aux intérêts de la SA CETELEM sur les deux contrats, à ce qu'il soit constaté que la société a engagé sa responsabilité pour violation de son devoir de vigilance et de son devoir de conseil en lui accordant successivement de crédit permanent et un prêt personnel avec légèreté blâmable, à ce que soit ordonnée en conséquence la restitution des intérêts indûment perçus, à ce qu'il soit enjoint à la SA CETELEM de produire un décompte détaillé des intérêts perçus, à ce que soit ordonnée la compensation entre les intérêts perçus augmentés des intérêts au taux légal et le solde du capital restant éventuellement du, à la confirmation du jugement en ce qu'il est dit n'y avoir lieu à application de l'indemnité de 8 %, à la condamnation de la SA CETELEM à lui payer 53.000 € en réparation de son préjudice matériel et moral, à la compensation entre les sommes restant éventuellement dû et les sommes dues par la SA CETELEM en réparation de son préjudice, à la condamnation de la SA CETELEM à lui payer 2.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu les conclusions de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE anciennement la SA [minute Jurica page 3] CETELEM du 11 mars 2009 tendant à la confirmation de la décision entreprise hormis en ce qui concerne les montants des condamnations, à la condamnation de Madame X. à lui payer : 10.560,49 € au titre du crédit renouvelable du 3 juin 2002 et 765 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

 

SUR CE, LA COUR,

Considérant que les dispositions du jugement qui mettent hors de cause M. X. ne sont pas contestées ; qu'il y a lieu en conséquence de les confirmer ;

Considérant que le premier juge a retenu qu'aucune irrégularité n'affecte l'offre préalable et que le découvert maximum autorisé n'a pas été atteint et que dès lors, la forclusion n'est pas encourue ;

Considérant que l'appelante fait valoir :

- qu'en application de l'article L. 311-37 du Code de la consommation, la SA CETELEM est forclose en son action, le montant du prêt ayant été fixé contractuellement à 3.500 € et ayant été dépassé dès le 1er juillet 2002,

- qu'il en est de même si on considère que le montant était de 10.000 € puisque ce montant a été dépassé dès le 23 janvier 2003,

- que l'augmentation du découvert utile n'a pas fait l'objet d'une demande de Madame X.,

- qu'il existe une clause d'exigibilité immédiate dans le contrat sous l'article « conditions générales du crédit », clause qui s'impose au prêteur,

- qu'il appartenait en conséquence à la SA CETELEM de résilier le contrat pour dépassement du découvert accepté,

- qu'en tout état de cause elle est fondée à contester le contrat sur le terrain des clauses abusives,

- que tel est le cas de la clause d'augmentation du découvert,

- que subsidiairement il y a lieu à la déchéance du droit aux intérêts en raison des clauses abusives d'augmentation du découvert, en raison des clauses résolutoires abusives,

- que la responsabilité de la SA CETELEM dans l'octroi des crédits et dans l'exécution du contrat de prêt doit être retenue, la banque ayant laissé Madame X. s'endetter lourdement, ayant manqué à son devoir de conseil au moment de la formation du contrat et lors de l'exécution du contrat et à son devoir de vigilance ;

Considérant que la société intimée fait valoir quant à elle :

- que la première échéance impayée non régularisée est intervenue le 5 août 2004 et en conséquence la forclusion n'est pas acquise,

- que le seul dépassement du découvert utile ne manifeste pas la défaillance de l'emprunteur faisant courir le délai de forclusion,

- qu'en tout état de cause le montant maximum du découvert autorisé était de 12.000 €, l'emprunteur disposant d'un découvert utile qu'il peut décider d'augmenter à tout moment dans la limite du montant maximum autorisé est fixé dans le contrat,

- [minute Jurica page 4] que le contrat a été conclu en juin 2002 et que les dispositions de l'article L. 311-9 du Code de la consommation qui exigent la présentation d'une offre préalable pour le contrat initial et pour toute augmentation du crédit consenti ne trouvent application que pour les contrats reconduits postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 28 janvier 2005,

- que si est abusive la clause autorisant la variation du découvert utile sans émission d'une nouvelle offre, cela ne peut être le cas que lorsque le découvert maximum est arrêté au plafond légal, ce qui n'est pas le cas en l'espèce,

- qu'en tout état de cause, la sanction adaptée serait la déchéance du droit aux intérêts et non la forclusion de l'action,

- que la société a vérifié les facultés de remboursement de Madame X.,

- qu'elle a payé les échéances pendant plus de deux années,

- qu'elle a sciemment trompé son cocontractant sur ses ressources en imitant la signature de son mari,

- qu'il doit être fait droit à sa demande concernant l'indemnité contractuelle de résiliation ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR,

Considérant que le contrat liant les parties est rédigé de la manière suivante : « découvert utile : 3.500 € remboursement mensuel choisi 140 € » puis en plus petits caractères dans le texte « Le prêteur vous autorise à tirer sur votre compte dans la limite du découvert maximum autorisé de 12.000 € » ; que, cependant le contrat ne précise pas le montant des intérêts de 3.500 € à 12.000 € non plus que les mensualités alors que les intérêts sont décrits de manière précise « jusqu'à 1.372,04 € »... et « plus de 1.372,04 € »

Qu'à l'évidence, le montant du découvert maximum autorisé à l'ouverture du compte est de 3.500 € ;

Considérant que, lorsqu'une clause est abusive, elle n'entraîne pas l'irrégularité du contrat de crédit mais est simplement réputée non écrite ; que, contrairement à ce que prétend l'organisme de crédit, il s'agit bien une clause contractuelle prévoyant l'augmentation du montant du crédit initial sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre préalable de crédit ;

Considérant qu'une telle clause laisse penser que le prêteur ne doit pas, pour chaque nouveau crédit que constitue l'augmentation du crédit initial, délivrer à l'emprunteur d'une nouvelle offre que ce dernier doit formellement accepter, et que l'emprunteur ne dispose donc pas à cette occasion de la faculté, d'ordre public, de rétracter son acceptation, observation étant faite que son attention n'a été attirée lors de la signature du contrat que sur le montant initialement limité du crédit et les indications corrélatives s'agissant du taux applicable et du montant des mensualités de remboursement ;

Qu'elle contrevient manifestement à l'objectif du législateur d'information de l'emprunteur sur l'ensemble des caractéristiques du crédit, et notamment la charge des remboursements, et du délai de réflexion ;

Que, créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, et ce au détriment du consommateur, elle s'analyse en une clause abusive, réputée non écrite conformément aux dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, qu'il en résulte que l'augmentation de l'ouverture de crédit en vertu de ladite clause est sans incidence sur la détermination du point de départ du délai de forclusion ;

[minute Jurica page 5]

Sur la sanction applicable :

Considérant que dès lors que la clause de variabilité du montant maximum emprunté est considérée comme réputée non écrite, et non comme entraînant des irrégularités du contrat de crédit au regard des dispositions des articles L. 311-8 à L. 311-10 du Code de la consommation, la sanction ne peut être que la déchéance du droit aux intérêts édictée par l'article L. 311-33 [NB conforme à la minute : comp. supra] ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 311-37 du Code de la consommation, l'action en paiement né d'un contrat de crédit à la consommation doit être engagée dans le délai de deux ans de l'événement qui lui a donné naissance ;

Que, conformément à la règle selon laquelle le point de départ à l'expiration duquel une action ne peut plus être exercée se situe nécessairement à la date d'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance, le délai biennal de forclusion prévue par ces textes court, dans le cas d'une ouverture de crédit, d'un montant déterminé et reconstituable et assorti d'une obligation de remboursement à échéances convenues, à compter du moment où le montant maximum du découvert autorisé et dépassé sans être régularisé, ce qui caractérise la défaillance de l'emprunteur ;

Qu'en l'espèce, il est constant, comme l'invoque Madame X. et comme l'établit l'historique du compte produit aux débats, que le montant maximum de 3.500 € autorisé à l'ouverture a été constamment dépassé, sans jamais être restauré, à compter d'octobre 2002, et ce sans nouvelle offre ;

Que l'assignation ayant été délivrée que le 18 août 2005, l'action en paiement de la société de crédit est atteinte par la forclusion biennale ; que le jugement doit en conséquence être infirmé ;

Considérant que l'équité ne compte pas l'application à l'espèce ses dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Infirme le jugement entrepris

Dit la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE forclose en son action en paiement,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne Madame X. aux dépens de première instance et d'appel et dit que ces derniers pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE         LA PRÉSIDENTE