CA PARIS (pôle 5 ch. 10), 9 décembre 2009
CERCLAB - DOCUMENT N° 2476
CA PARIS (pôle 5 ch. 10), 9 décembre 2009 : RG n° 08/01319
Publication : Jurica
Extrait : « Considérant que c'est encore en vain que l'appelante objecte que le délai de prévenance de neuf mois constituerait une clause abusive qui serait nulle ; qu'en effet, d'une part la société Exprimer, agence conseil, a conclu le contrat pour les besoins de son activité professionnelle, d'autre part le délai de neuf mois n'apparaît pas abusif dans le cadre du contrat de location conclu entre professionnels ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 10
ARRÊT DU 9 DÉCEMBRE 2009
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 08/01319. Décision déférée à la Cour : Jugement du 5 novembre 2007 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2006012539.
APPELANTE :
SA EUROPE COMPUNTER SYSTÈMES
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux [adresse], représentée par la SCP NARRAT - PEYTAVI, avoués à la Cour assistée de Maître Anne Lyne ROCHE, avocat plaidant pour SELARL LAVOIX AVOCATS au barreau de PARIS Toque P 515
INTIMÉE :
SARL EXPRIMER
prise en la personne de ses représentants légaux [adresse], représentée par la SCP Anne-Marie OUDINOT et Pascale FLAURAUD, avoués à la Cour, assistée de Maître Jean-Pierre RAYNE, avocat au barreau d'Aix en Provence
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 octobre 2009, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Pascale GIROUD, Présidente, chargée d'instruire l'affaire.
[minute Jurica page 2] Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Marie-Pascale GIROUD, Présidente, Madame Odile BLUM, Conseillère, Madame Marie-Hélène GUILGUET-PAUTHE, Conseillère
GREFFIÈRE : Lors des débats : Monsieur Daniel COULON,
ARRÊT : Contradictoire, rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile, signé par Madame Marie-Pascale GIROUD , Présidente, et par Marie Claude GOUGE greffière.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu le jugement rendu le 5 novembre 2007 par le tribunal de commerce de Paris qui, au visa des articles 122 et 123 du Code de procédure civile, a :
- dit irrecevable l'assignation de la société Europe computer systèmes pour défaut de qualité pour agir,
- condamné la société Europe computer systèmes aux dépens ;
Vu l'appel relevé par la société Europe computer systèmes et ses dernières conclusions du 18 septembre 2009 par lesquelles elle demande à la cour, au visa des articles 1134 et 1147 du Code civil, de :
- débouter la société Exprimer de toutes ses demandes,
- déclarer la société Europe computer systèmes recevable et bien fondée en ses demandes,
- dire que la société Exprimer était tenue d'exécuter le contrat n° 2001-63XX.1 et son avenant, jusqu'au 30 avril 2006,
- condamner la société Exprimer au paiement des loyers impayés au titre du contrat n° 2001-63XX.1 soit la somme de 13.519,60 € TTC,
- dire que les sommes dues par la société Exprimer à la société Europe computer systèmes porteront intérêts au taux conventionnel de 1,5 % par mois à compter de la date d'exigibilité de chaque échéance impayée,
- condamner la société Exprimer au paiement de la somme de 3.050 € au titre des frais irrépétibles de première instance et de 5.000 € au titre de ceux d'appel, par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamner la société Exprimer aux dépens de première instance et d'appel ;
[minute Jurica page 3] Vu les dernières conclusions signifiées le 3 février 2009 par la société Exprimer qui demande à la cour de :
- confirmer le jugement,
- subsidiairement, constater que la clause « durée » des conditions particulières ne mentionne pas la condition spécifique de tacite reconduction,
- constater que les conditions générales auxquelles il est fait référence, ne comportent pas plus d'explication,
- prononcer la nullité du contrat pour défaut d'information loyale des cocontractants,
- débouter la société Europe computer systèmes de toutes ses demandes,
- condamner la société Europe computer systèmes aux dépens de première instance et d'appel ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE LA COUR :
Considérant que suivant contrat 2001-63XX.1, signé le 30 avril 2002, la société Europe computer systèmes a donné en location à la société Exprimer du matériel informatique, pour une durée de trente six mois à compter du 1er mai 2002, moyennant un loyer mensuel de 1.413 € HT ; qu'un avenant postérieur a porté seulement sur la modification du matériel, toutes les autres clauses du contrat restant inchangées ; que le 7 mars 2005, la société Exprimer a notifié à la société Europe computer systèmes son intention de ne pas prolonger le contrat au-delà de son terme du 30 avril 2005 ; que cependant elle a continué à honorer les échéances mensuelles jusqu'en août 2005 ;
Considérant que le 8 février 2006, la société Europe computer systèmes a assigné la société Exprimer devant le tribunal de commerce de Paris afin d'obtenir paiement des loyers jusqu'au mois d'avril 2006, soit la somme de 13.519,60 € ;
Considérant que la société Europe computer systèmes, appelante du jugement qui a déclaré ses demandes irrecevables, fait valoir qu'elle a qualité pour agir puisqu'à la date de l'assignation elle était titulaire du contrat et propriétaire du matériel y afférent ; qu'elle invoque les dispositions de l'article 10.3 des conditions générales du contrat pour soutenir qu'il s'est poursuivi par tacite reconduction ; qu'elle soutient que le préavis de neuf mois prévu dans le contrat de location ne rompt pas l'équilibre entre deux professionnels ;
Considérant que la société Exprimer fait valoir que la société Europe computer systèmes n'a pas qualité pour agir, seule la société Franfinance étant titulaire des droits issus de l'article 10.3 du contrat ; qu'elle prétend que son attention n'a pas été suffisamment attirée sur les dispositions de cet article, que la clause durée des conditions particulières ne mentionne en aucune façon la tacite reconduction et que cette tacite reconduction n'étant pas rappelée dans le cadre de la novation apportée au contrat, la société Europe computer systèmes y a renoncé ; qu'elle allègue que la clause prévoyant la tacite reconduction faute de notification par lettre recommandée neuf mois à l'avance ne figure pas à l'emplacement qui devait être le sien dans le contrat, à savoir dans la clause de durée, ni dans les conditions particulières ni dans les conditions générales, et que cette clause doit être réputée non écrite ; qu'elle ajoute que le délai de prévenance pour éviter la tacite reconduction est excessif au regard de la durée du contrat et qu'il revêt un caractère abusif qui doit être sanctionné par la nullité ;
Considérant, sur la qualité à agir de la société Eurocomputer systèmes, que l'article 7 des conditions générales du contrat signées par la locataire précise que celle-ci a été tenue informée de l'éventualité d'une cession de l'équipement ou des créances au profit de toute personne physique ou morale de son choix, qu'elle consent dès à présent et sans réserve à une telle opération et que cette opération pourra, [minute Jurica page 4] le cas échéant, lui être simplement et valablement signifiée par lettre recommandée avec accusé de réception ; qu'en application de cet article, la société Europe computer systèmes a cédé à compter du 1er mai 2002 la propriété du matériel et les créances en découlant à Franfinance, tout en conservant l'intégralité des relations commerciales et techniques avec la société Exprimer ; que la société Franfinance location, par lettre non datée adressée à la société Europe computer systèmes lui a confirmé que la propriété du contrat 2001-63XX.1 ainsi que les matériels y afférents lui avaient été transférés à nouveau en date du 1er mai 2005 ; que cette rétrocession est opposable à la société Exprimer par application de l'article 7 sus-visé ; qu'à la date de l'assignation, la société Europe computer systèmes avait donc qualité pour agir ;
Considérant que la durée du contrat est régie à la fois :
- par les stipulations de l'article 4 des conditions particulières, qui fixe sa durée à trente six mois à compter du 1er mai 2005,
- par l'article 10-3 des conditions générales, intitulé « annulation-résiliation-prolongation », qui prévoit que : « le locataire doit informer le loueur avec un préavis de neuf mois, par lettre recommandée avec accusé de réception, de son intention de ne pas poursuivre le contrat au delà de la durée prévue aux conditions particulières et donc de restituer l'équipement au terme du contrat. Dans le cas contraire, au delà de la durée précisée aux conditions particulières, le contrat est prolongé par tacite reconduction par période d'un an minimum aux mêmes conditions et sur la base du dernier loyer. Dans ce cas le préavis de résiliation est de six mois » ;
Considérant que ces stipulations contractuelles étant claires et précises, la société Exprimer ne peut valablement soutenir que son attention n'aurait pas été suffisamment attirée sur ce point et qu'elle n'aurait pas compris la portée de ses engagements ; qu'aucune cause de nullité n'est démontrée ; que la société Europe computer systèmes n'a jamais renoncé à la clause de tacite reconduction ;
Considérant que c'est encore en vain que l'appelante objecte que le délai de prévenance de neuf mois constituerait une clause abusive qui serait nulle ; qu'en effet, d'une part la société Exprimer, agence conseil, a conclu le contrat pour les besoins de son activité professionnelle, d'autre part le délai de neuf mois n'apparaît pas abusif dans le cadre du contrat de location conclu entre professionnels ;
Considérant, en conséquence, qu'il convient de condamner la société Exprimer au paiement des loyers restant dus du 1er septembre 2005 au 30 avril 2006 qui s'élèvent à 11.304 HT, soit 13.519,60 € TTC ; que par application de l'article 5.5 des conditions générales, les sommes dues portent intérêts de plein droit et sans qu'il soit besoin d'une mise en demeure, au taux conventionnel de 1,5 % par mois à compter de leur date d'exigibilité ;
Considérant, vu les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, qu'il y a lieu d'allouer la somme globale de 1.500 € à la société Europe computer systèmes pour ses frais exposés en première instance et en appel ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Infirme le jugement et, statuant à nouveau :
Déclare la société Europe computer systèmes recevable en ses demandes,
Condamne la société Exprimer à payer à la société Europe computer systèmes :
- la somme de 13.519,60 € TTC au titre des loyers impayés,
- les intérêts au taux de 1,5 % par mois à compter de la date d'exigibilité de chaque échéance [minute Jurica page 5] impayée,
- la somme globale de 1.500 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Déboute la société Exprimer de toutes ses demandes,
Condamne la société Exprimer aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT
- 5860 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Protection implicite
- 5878 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères alternatifs : besoins de l’activité
- 5946 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Activité administrative - Informatique
- 6153 - Code civil et Droit commun - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Droit antérieur à l’ordonnance du 10 février 2016 - Extension directe sans texte