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TI ÉPINAL, 24 novembre 2005

Nature : Décision
Titre : TI ÉPINAL, 24 novembre 2005
Pays : France
Juridiction : Epinal (TI)
Demande : 11-05-000189
Date : 24/11/2005
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 16/02/2005
Décision antérieure : CA NANCY (2e ch. civ.), 28 janvier 2010
Numéro de la décision : 566
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2768

TI ÉPINAL, 24 novembre 2005 : RG n° 11-05-000189 et 11-05-000403 ; jugement n° 566

(sur appel CA Nancy (2e ch. civ.), 28 janvier 2010 : RG n° 06/00016 ; arrêt n° 307)

 

Extrait : « Attendu qu'il suit de ces considérations que la société Panorimmo a sciemment créé une confusion entre les prestations qu'elle a offertes aux époux X. et celles que ceux-ci pouvaient attendre d'une agence immobilière ; que la nullité du contrat sera en conséquence prononcée par application de l'article L. 121-23 du code de la consommation ; que pareillement sera prononcée la nullité du contrat de prêt en raison de son lien avec le contrat principal par application des dispositions de l'article L. 311-21 du code de la consommation ».

 

TRIBUNAL D’INSATNCE D’ÉPINAL

JUGEMENT DU 24 NOVEMBRE 2005

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11-05-000189 et 11-05-000403. Jugement n° 566.

À l'audience publique du Tribunal d'Instance tenue le 24 novembre 2005, Sous la Présidence de Bernard CUNIN, Président du Tribunal de Grande d'ÉPINAL, assisté de Bernard GERMAIN, Greffier ;

Le jugement suivant a été rendu :

 

ENTRE :

DEMANDEUR(S) :

SA CREATIS

dont le siège est [adresse], Représentée par la SCP KIHL, Avocat au Barreau d'ÉPINAL substituant Maître ALIAS, avocat du barreau de AIX EN PROVENCE

 

ET :

DÉFENDEUR(S) :

- Monsieur X.

demeurant [adresse], représenté par la SCP HAEMMERLE-BEGEL-GUIDOT, avocat du barreau de ÉPINAL

- Madame X. née Y.

demeurant [adresse], représentée par la SCP HAEMMERLE-BEGEL-GUIDOT, avocat du barreau de ÉPINAL

- Maître RAFONI., ès qualité de mandataire liquidateur de la Société PANORIMMO

sise [adresse], demeurant [adresse], Appelé en garantie, non comparant

Après débats à l'audience publique du 22 septembre 2005, devant Bernard CUNIN, Président assisté de Bernard GERMAIN, Greffier, pour le jugement être rendu ce jour. Les parties présentes ayant été avisées de la date du délibéré.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :

La société Créatis a fait assigner, par actes d'huissier en date du 16 février 2005, Monsieur et Madame X. pour les voir condamner solidairement et avec exécution provisoire à lui payer la somme principale de 7.326,23 euros avec intérêts et la somme de 380 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle expose que les époux X. ont souscrit auprès de la société Créatis une offre de crédit d'un montant de 6.578 euros accessoire au financement d'une prestation de service livrée par la société Panorimmo, à savoir la diffusion d'une offre de vente de leur bien immobilier. Elle ajoute qu'ils s'étaient engagés à rembourser le capital en une échéance unique dès l'arrivée du terme du contrat, notamment la vente du bien, et à rembourser les intérêts en 24 mensualités.

Elle fait valoir que, le bien ayant été vendu, le montant de l'emprunt est devenu exigible. Elle a donc mis en demeure les époux X. de régulariser, mais ceux-ci n'ont pas obtempéré.

Monsieur et Madame X., qui s'opposent à ces prétentions, ont fait assigner, par actes d'huissier en date du 27 juillet 2005, Maître Z., ès qualité de liquidateur de la société Panorimmo, pour voir déclaré nul le contrat qui les lie et pour obtenir sa condamnation à les garantir de toutes condamnations contre eux.

Les deux instances étant connexes, il convient d'en ordonner la jonction.

Les époux X. demandent au Tribunal de prononcer la nullité du contrat qu'ils ont conclu avec la société Panorimmo, et donc également la nullité du contrat conclu avec la société Créatis. Ils s'opposent en conséquence à la demande de restitution du capital présentée par la société Créatis.

Subsidiairement, ils demandent l'annulation, en raison de leur caractère abusif, de plusieurs clauses du contrat Panorimmo et réclament le débouté des prétentions de la société Créatis.

Ils demandent la levée sous astreinte de leur inscription du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers et réclament le remboursement de la somme de 323,40 euros et la condamnation de la société Créatis à leur payer une indemnité de 1.500 euros pour procédure abusive et une somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

[minute page 3] Dans ses dernières écritures, la société Créatis demande la condamnation solidaire des époux X. à lui verser pour solde de son emprunt la somme de 7.326,23 euros outre les intérêts et la somme de 526,24 euros à titre d'indemnité contractuelle.

Subsidiairement, elle demande la remise en état antérieur des parties en raison de la nullité du contrat et le remboursement de la somme de 6.578 euros reçue dans le cadre de leurs relations contractuelles.

Elle demande encore l'exécution provisoire du jugement et le payement d'une somme de 380 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Maître Rafoni, ès qualité, ni présent, ni représenté, mais a fait connaître par lettre que la liquidation judiciaire de la société Panorimmo est impécunieuse et a rappelé qu'aucune condamnation ne peut intervenir en raison du défaut de déclaration de créance, le contrat étant antérieur au prononcé du redressement judiciaire. Il sera en conséquence statué par jugement réputé contradictoire.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Attendu que les époux X., ayant décidé de mettre en vente leur immeuble, ont été démarchés par un représentant de la société Panorimmo qui leur a proposé un contrat de communication pour la transmission de leur bien immobilier ; qu'ils ont signé le 6 juin 2003 ce contrat et ont souscrit auprès de la société Créatis une offre préalable de crédit affecté pour un montant de 6.578 euros destinée au financement de la prestation servie par la société Panorimmo ;

Attendu que les époux X. se sont engagés à rembourser le prêt en une échéance unique à l'arrivée du terme du contrat ; que le terme du contrat est fixé au jour de la vente du bien ou à l'expiration d'un délai de 24 mois ; que cependant une assurance « vendu ou remboursé » a été souscrite en cas de non réalisation de la vente dans ce délai ;

Attendu que la société Créatis, prétendant que le bien a été vendu, estime que le montant de l'emprunt est devenu exigible et demande la condamnation des époux X. à régler leur dette ; que les époux X. déclarent que le bien n'a pas été vendu et se prévalent de la nullité du contrat ;

 

- Sur la demande de nullité :

Attendu qu'il est certain que, le contrat ayant été conclu au domicile des époux X., les dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation sont applicables ; que les époux X. fondent leur demande en nullité sur les conditions de [minute page 4] forme relatives à la faculté de renonciation et sur les conditions du contrat, notamment la nature des prestations offertes et les conditions d'exécution du contrat ;

Attendu qu'il ne ressort pas de l'examen du contrat que les conditions générales et les mentions portées sur le formulaire détachable ne sont pas lisibles et que les caractères imprimés sont inférieurs à ceux prescrites par la loi ; que pareillement il n'est pas démontré que les époux X. ont été mis dans l'impossibilité de faire usage du formulaire détachable en raison d'une remise tardive de l'exemplaire du contrat devant leur revenir ; que la nullité du contrat ne peut donc pas être prononcé sur ce fondement ;

Attendu que les époux X. prétendent qu'ils ont conclu le contrat dans la conviction erronée qu'ils confiaient à la société Panorimmo la vente de leur maison, comme ils l'auraient fait auprès d'une agence immobilière ; qu'ils se prévalent des mentions ambiguës figurant au contrat et dans les documents qui leur ont été remis ;

Attendu que les mentions portées sur le contrat « Panorimmo - vente et achat immobilier entre particuliers - bien immobilier » laissent à penser que cette société agit comme une agence immobilière, alors même que le contrat mentionne que la société Panorimmo déclare n'intervenir qu'au titre de la communication immobilière dans le domaine de prestation de service entre particuliers et ne jouer en aucun cas le rôle d'une agence immobilière ; que cette société entretient donc sciemment la confusion entre les prestations d'une agence immobilière et celles qu'elle propose réellement ; que pourtant le montant du prix de sa prestation se rapproche davantage d'une commission d'une agence immobilière que du coût d'une simple publication dans la presse ;

Attendu en effet que le contrat prévoit la diffusion nationale et mondiale du bien, l'élaboration du dossier confidentiel du bien à vendre et la diffusion de l'offre à tout acheteur potentiel ; qu'elle se présente ainsi comme une société qui apporte son concours à la vente d'un bien immobilier au sens de la loi du 2 janvier 1970 ; que pourtant, grâce au montage réalisé, la société Panorimmo se fait payer par l'intermédiaire de la société Créatis, même si la vente ne se réalise pas ou n'est pas de son fait, en méconnaissance des dispositions de l'article 6 de cette loi ;

Attendu que la prestation de la société Panorimmo est assortie d'une assurance « vendu ou remboursé » garantissant le remboursement du montant de la prestation pour le cas où le bien ne serait pas vendu dans le délai de deux ans ; qu'il apparaît ainsi pour un consommateur ordinaire que la prestation de la société Panorimmo est comparable à celle d'une agence immobilière ; qu'en effet, d'après le montage imaginé par les sociétés Créatis et Panorimmo, celle-ci n'a droit à rémunération que si la vente est réalisée, en l'espèce le remboursement du capital, ou en cas de non réalisation de la vente après un délai de deux ans, en l'espèce l'intervention de l'assurance vendu ou remboursé ;

Attendu que la confusion est encore entretenue par le fait qu'il est stipulé que la contrepartie financière sera due dans tous les cas, « même si le bien immobilier est vendu [minute page 5] par un autre intermédiaire que Panorimmo » ; que cette expression met en fait la prestation de la société Panorimmo au même plan que celle d'une agence immobilière ;

Attendu que le dépliant publicitaire remis par les sociétés Créatis et Panorimmo contenant une reconnaissance de consentement éclairé n'explicite pas davantage les réelles prestations offertes par la société Panorimmo, dans la mesure où il utilise le terme général de « prestation » sans faire référence à une prestation de simple publicité d'une offre de vente ; que par contre il met en avant l'efficacité immobilière de Panorimmo et le fait que le remboursement s'effectue en une seule fois à la vente du bien dans un délai ne pouvant excéder 24 mois ; que le dépliant publicitaire Panorimmo fait également référence à des prestations d'agence immobilière en utilisant les expressions « l'alliance de professionnels pour une transaction réussie » ou « cessions de biens immobiliers, d'entreprises et de commerces » ;

Attendu que le mandat d'intérêt commun signé par les parties laisse entendre que la société Panorimmo se charge de la vente du bien, puisqu'une mention indique que l'objet du contrat consiste, aux fins de vente du bien immobilier, dans la réalisation d'opérations de communications autour de cette vente et que le prêt est remboursable dès lors que l'emprunteur a réalisé la vente de son bien immobilier ; que, dans cette dernière hypothèse, le remboursement du prêt est prévu par prélèvement sur le prix de vente par le notaire, comme il est d'usage en matière de vente immobilière réalisée par l'intermédiaire d'une agence immobilière ;

Attendu qu'il suit de ces considérations que la société Panorimmo a sciemment créé une confusion entre les prestations qu'elle a offertes aux époux X. et celles que ceux-ci pouvaient attendre d'une agence immobilière ; que la nullité du contrat sera en conséquence prononcée par application de l'article L. 121-23 du code de la consommation ; que pareillement sera prononcée la nullité du contrat de prêt en raison de son lien avec le contrat principal par application des dispositions de l'article L. 311-21 du code de la consommation ;

 

- Sur le remboursement du prêt :

Attendu que la société Créatis demande le remboursement des sommes qu'elle a versées à la société Panorimmo en exécution du contrat ;

Attendu cependant qu'il apparaît des pièces du dossier, notamment du document publicitaire établi par les sociétés Créatis et Panorimmo, que la société Créatis a accepté de financer un contrat de prestation de service qu'elle savait contraire à la réglementation relative au démarchage à domicile ; qu'en considération de cette faute et en sa qualité de professionnel du crédit, elle ne peut prétendre à la remise en état des parties dans leur état antérieur à la conclusion des contrats ; qu'elle sera en conséquence déboutée de sa demande en restitution des sommes qu'elle a versées à la société Paronimmo ;

[minute page 6]

- Sur les autres demandes :

Attendu que la société Créatis sera condamnée à procéder sous astreinte à la levée de l'inscription des époux X. au fichier national des incidents de paiements ; que la nature de l'affaire ne requiert pas l'exécution provisoire du jugement, hormis pour la levée de l'inscription des époux X. sur le fichier des incidents de remboursement des crédits ;

Attendu que la société Créatis, qui succombe en ses prétentions, sera débouté du surplus de ses demandes et sera condamnée aux dépens, outre la somme de 1.500 euros titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; que les époux X., qui ne justifient d'aucun préjudice particulier, seront débouté de leur demande d'indemnité pour procédure abusive ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,

Déclare nuls les contrats conclus le 27 mars 2003 par les époux X. avec la société Panorimmo et avec la société Créatis.

Déboute la société Créatis de sa demande en restitution des sommes qu'elle a versées à la société Panorimmo.

Déboute la société Créatis du surplus de ses demandes.

Condamne avec exécution provisoire la société Créatis à procéder à la levée de l'inscription des époux X. au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers dans le délai d'un mois.

Dit qu'à défaut d'y procéder, elle y sera contrainte sous astreinte de 30 euros par jour de retard.

Déboute les époux X. de leur demande d'indemnité pour procédure abusive.

Déclare le présent jugement opposable à Maître Z., ès qualité de liquidateur de la société Panorimmo.

Condamne la société Créatis à payer aux époux X. la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Condamne la société Créatis aux dépens.

Et le Président a signé avec le Greffier.

Le Greffier :     Le Président :