TI MULHOUSE (3e sect. civ.), 25 septembre 2003
CERCLAB - DOCUMENT N° 2780
TI MULHOUSE (3e sect. civ.), 25 septembre 2003 : RG n° 11-01-001759
(sur appel CA Colmar (3e ch. civ. B), 15 février 2006 : RG n° 04/00851 ; arrêt n° 06/0155)
Extrait : « Au terme de l'article VII du bail renouvelé en date du 10 juin 1991, le locataire a l'obligation : a) de faire assurer pour toute la durée du bail les locaux pris en location et tous les objets garnissant les lieux loués contre les risques d'incendie, d'explosion et de dégâts des eaux sans aucune exception auprès d'une Compagnie notoirement solvable, ayant son siège ou une succursale en France, b) de s'assurer pour les mêmes risques contre le recours des tiers et des voisins voire du bailleur, c) de renoncer et de faire renoncer ses assureurs à tout recours contre le bailleur, d) de s'assurer du trouble qui pourrait lui être apporté par les tiers à sa jouissance par voie de fait ou autrement... de justifier à première demande du bailleur de l'exécution des clauses qui précèdent par la production des polices et des quittances de prime y afférent. […] La partie demanderesse relève que les pièces produites ne répondent pas au paragraphe c) de l'article VII susvisé en l'absence de clause de renonciation de l'assureur à tout recours contre le bailleur.
Il convient de constater avec le défendeur que la clause dont se prévaut le bailleur, de part son caractère général et absolu, a pour effet de décharger ce dernier de sa responsabilité et de son obligation d'entretien et de garantie d'une jouissance paisible, y compris en cas de faute lourde, alors pourtant que le bailleur ne peut valablement s'exonérer des conséquences d'une telle faute. Il s'agit par conséquent d'une clause nulle qui doit être réputée non écrite. Le preneur ayant satisfait aux obligations du contrat, la SCI Place de la Paix sera déboutée de sa demande. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL D’INSTANCE DE MULHOUSE
JUGEMENT DU 25 SEPTEMBRE 2003
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11-01-001759.
PARTIE DEMANDERESSE :
SCI PLACE DE LA PAIX,
prise en la personne de son représentant légal au siège [adresse], représenté(e) par Maître STUCK Henri-Paul, avocat au barreau de MULHOUSE
PARTIE DÉFENDERESSE :
Monsieur X.,
[adresse], représenté(e) par SCP HORN - CYWIE - WOLFF, avocats au barreau de MULHOUSE
Nature de l'affaire : Demande tendant à l'exécution des autres obligations du locataire et/ou tendant à faire prononcer la résiliation pour inexécution de ces obligations et ordonner l'expulsion
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS : Isabelle DIEPENBROEK, Président, Martine GUERARD, Greffier ad hoc
DÉBATS : A l'audience publique du 4 septembre 2003
JUGEMENT : contradictoire et en premier ressort, prononcé publiquement le 25 septembre 2003 et signé par Isabelle DIEPENBROEK, Président et Mlle Martine HASSENFORDER, Greffier ad hoc.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :
Par acte introductif d'instance déposé au greffe le 28 juin 2001, la SCI Place de la Paix a fait citer Mr X. devant le tribunal d'instance de MULHOUSE aux fins de le voir condamné sous astreinte, à produire l'attestation d'assurance concernant les locaux loués sis [adresse].
Dans le dernier état de ses prétentions, elle demande la production d'une attestation d'assurance confirmant la prise en charge des risques liés à l'utilisation de produits inflammables par le locataire ainsi que la confirmation par une clause du contrat d'assurance de la renonciation de l'assureur à tout recours contre le bailleur pour les risques incendie, explosion et dégâts des eaux. La SCI Place de la Paix sollicite en outre l'exécution provisoire du jugement à intervenir et la condamnation du défendeur au paiement d'une somme de 609,80 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et d'une indemnité de procédure de même montant sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Au soutien de sa demande, la SCI Place de la Paix expose que suivant contrat de bail commercial en date du 10 juin 1991 elle loue au défendeur un local sis [adresse] et que ce dernier, malgré sommation, n'a pas justifié de la souscription d'un contrat d'assurance conforme aux exigences de l'article 7 du contrat de bail.
Mr X. conclut au rejet de la demande et sollicite condamnation de la SCI Place de la Paix au paiement d'une somme de 762,25 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi que d'une indemnité de procédure de 762,25 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Il soutient avoir produit les conditions générales et particulières de l'assurance souscrite et avoir justifié du paiement de la prime afférente et relève que la présente demande apparaît pour le moins surprenante et abusive alors qu'il exerce son activité d'antiquaire dans les lieux depuis 1969 et que la SCI Place de la Paix, qui est devenue propriétaire en 1991, n'a émis aucun reproche pendant 10 ans.
La demanderesse fait valoir que sa demande est justifiée par des incidents répétés, tels qu'émanations de solvants dans l'immeuble, et estime que les documents produits ne répondent pas aux stipulations contractuelles notamment en ce qui concerne la renonciation au recours contre le bailleur.
Le défendeur soutient que le bailleur ne peut imposer à son locataire de faire renoncer son assureur à tout recours, ce qui équivaudrait à décharger le bailleur de son obligation de délivrance et de jouissance paisible, et que cette clause est par conséquent abusive car trop générale.
Les parties étant présentes ou représentées, il y a lieu en considération de la nature du litige de statuer par jugement contradictoire et en premier ressort.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Au terme de l'article VII du bail renouvelé en date du 10 juin 1991, le locataire a l'obligation :
[minute page 3]
a) de faire assurer pour toute la durée du bail les locaux pris en location et tous les objets garnissant les lieux loués contre les risques d'incendie, d'explosion et de dégâts des eaux sans aucune exception auprès d'une Compagnie notoirement solvable, ayant son siège ou une succursale en France,
b) de s'assurer pour les mêmes risques contre le recours des tiers et des voisins voire du bailleur,
c) de renoncer et de faire renoncer ses assureurs à tout recours contre le bailleur,
d) de s'assurer du trouble qui pourrait lui être apporté par les tiers à sa jouissance par voie de fait ou autrement...
de justifier à première demande du bailleur de l'exécution des clauses qui précèdent par la production des polices et des quittances de prime y afférent.
Mr X. produit les conditions générales et particulières du contrat multirisques (incendie-tempête-grêle-neige-catastrophes naturelles) souscrit pour les lieux loués ainsi qu'une attestation de son assureur indiquant qu'eu égard au volume et au nombre des produits professionnels une adaptation du contrat n'est pas nécessaire.
La partie demanderesse relève que les pièces produites ne répondent pas au paragraphe c) de l'article VII susvisé en l'absence de clause de renonciation de l'assureur à tout recours contre le bailleur.
Il convient de constater avec le défendeur que la clause dont se prévaut le bailleur, de part son caractère général et absolu, a pour effet de décharger ce dernier de sa responsabilité et de son obligation d'entretien et de garantie d'une jouissance paisible, y compris en cas de faute lourde, alors pourtant que le bailleur ne peut valablement s'exonérer des conséquences d'une telle faute. Il s'agit par conséquent d'une clause nulle qui doit être réputée non écrite.
Le preneur ayant satisfait aux obligations du contrat, la SCI Place de la Paix sera déboutée de sa demande.
Le caractère abusif de la présente procédure n'est pas suffisamment démontré, le défendeur n'ayant produit qu'en cours de procédure l'intégralité des conditions générales et particulières de la police d'assurance souscrite. Mr X. sera débouté de sa demande de dommages et intérêts.
La demanderesse qui succombe à titre principal supportera la charge des dépens. Il est inéquitable de laisser les frais irrépétibles à la charge de Mr X. auquel sera alloué un montant de 230 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LE TRIBUNAL, statuant publiquement, par Jugement contradictoire et en premier ressort,
- DÉBOUTE la SCI Place de la Paix de ses différents chefs de demande ;
- [minute page 4] DÉBOUTE Mr X. de sa demande de dommages et intérêts - DIT n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire du présent jugement
- CONDAMNE la SCI Place de la Paix aux dépens ainsi qu'au paiement d'un montant de 230 € (deux cent trente euros) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le Président : Le Greffier :
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