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TI PRIVAS, 29 octobre 2006

Nature : Décision
Titre : TI PRIVAS, 29 octobre 2006
Pays : France
Juridiction : Privas (TI)
Demande : 11-06-000087
Décision : 329/2006
Date : 26/10/2006
Nature de la décision : Admission
Date de la demande : 22/03/2006
Décision antérieure : CA NÎMES (ch. civ. 2 A), 11 septembre 2007
Numéro de la décision : 329
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2785

TI PRIVAS, 26 octobre 2006 : RG n° 11-06-000087 ; jugement n° 329/2006

(sur appel CA Nîmes (2e ch. civ. A), 11 septembre 2007 : RG n° 06/04988, arrêt n° 388)

 

Extraits : 1/ « Aux termes de l'article 6 du Code civil, les parties ne peuvent pas déroger aux lois qui intéressent l'ordre public ; l'article 1134 du même Code précise encore que seules les conventions légalement formées ont force obligatoire. En outre, le consommateur ne peut renoncer au bénéfice des dispositions des articles L. 311-1 et suivants du Code de la consommation qui sont d'ordre public en application de l'article L. 311-16 du même Code. Dès lors, ce qui échappe à l'autonomie de la volonté ne saurait être obtenu grâce au silence, à l'ignorance ou au défaut de comparution de la partie que la loi entend protéger, fût-ce contre elle même.

A cet égard, aux termes de l'article 472 du Nouveau Code de procédure civile, « Si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée. » En application des articles 7, 12 et 16 du Nouveau Code de Procédure Civile, le Tribunal peut dans le respect du principe du contradictoire, relever d'office les moyens de droit afin de trancher le litige conformément aux règles qui lui sont applicables ; en effet l'application d'une loi d'ordre public découle de la nature même de cette norme et ne saurait donc être subordonnée à son invocation par l'une des parties.

Par voie de conséquence, le Tribunal, conformément à la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés Européennes qui fait obligation au juge de relever d'office les moyens tirés du caractère abusif d'une clause stipulée dans un contrat de crédit, entend user de son pouvoir de soulever d'office les moyens de pur droit tirés de la méconnaissance des dispositions d'ordre public des articles L. 311-1 et suivants du Code de la consommation et de les soumettre à la contradiction. »

2/ « En l'espèce l'offre préalable de crédit personnel prévoit, dans le paragraphe relatif à l'exigibilité du prêt (3-3) et l'offre préalable du prêt TEMA vise dans son article 9  « déchéance du terme-exigibilité du prêt », d'autres dispositions que la seule défaillance de l'emprunteur. De telles clauses, non prévues par les modèles types, aggravent incontestablement la situation de l'emprunteur puisqu'elle offre au prêteur une possibilité supplémentaire de résilier le contrat et d'exiger immédiatement la totalité des sommes dues. Dès lors l'offre préalable de crédit méconnaît les dispositions de l'article L. 311-13 du Code de la consommation. Il résulte de l'article L. 311-33 du Code de la consommation que la sanction de la méconnaissance des dispositions des articles L. 311-8 à L. 311-13 du même code consiste en la déchéance du droit aux intérêts, l'emprunteur n'étant tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu. »

 

TRIBUNAL D'INSTANCE DE PRIVAS

JUGEMENT DU 26 OCTOBRE 2006

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

RG n° 11-06-000087. Jugement n° 329/2006.

 

DEMANDEUR (S) :

Caisse CRÉDIT AGRICOLE SUD RHÔNE ALPES

[adresse], rreprésenté(e) par SCP BERAUD - COMBE-SOULELIAC-LECAT - CHEMEL, avocat au barreau de l'ARDÈCHE, plaidant par Maître BERAUD Henri

 

DÉFENDEUR(S) :

Madame X.

[adresse], non comparante, ni représentée,

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Joëlle BLATRY, Vice Président

Greffier : Yolaine DELORY

DÉBATS : Audience publique du : 28 septembre 2006

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Selon offre préalable acceptée le 19 mars 2003, le CRÉDIT AGRICOLE SUD RHÔNE-ALPES a consenti à Madame X., en sa qualité de co-emprunteur de son mari, M. Y., un crédit TEMA accessoire à une vente de véhicule automobile, d'un montant en capital de 7.600,00 €, remboursable en 73 mensualités de 126,90 € moyennant un TEG de 6,259 %.

Selon offre préalable acceptée le 19 février 2004, le CRÉDIT AGRICOLE SUD RHÔNE-ALPES a consenti à Madame X., un prêt personnel d'un montant en capital de 10.000,00 €, remboursable en 60 mensualités de 198,01 € moyennant un TEG de 7,00 %.

Par acte d'huissier en date du 22 mars 2006, le CRÉDIT AGRICOLE SUD RHÔNE-ALPES sollicite la condamnation de Madame X., sous le bénéfice de l'exécution provisoire, à lui payer :

- la somme de 7.597,69 € assortie des intérêts au taux conventionnel à compter de la présente assignation, outre la somme de 556,80 € pour l'indemnité forfaitaire concernant le prêt affecté,

- la somme de 10.945,93 € assortie des intérêts au taux conventionnel à compter de la présente assignation, outre la somme de 766,28 € pour l'indemnité forfaitaire concernant le prêt personnel,

- la somme de 300 ,00 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- les entiers dépens.

Par jugement par mention au dossier en date du 22 juin 2006, le tribunal a invité le CRÉDIT AGRICOLE SUD RHÔNE-ALPES à présenter ses observations sur l'éventuelle déchéance du prêteur aux intérêts en raison de la présence dans les 2 contrats de clauses aggravant la situation de l'emprunteur.

A l'audience du 28 septembre 2006, la banque, représentée par son conseil, conteste au tribunal le droit de soulever d'office des moyens tendant à s'opposer à la légitime perception par la banque, des intérêts conventionnels.

Elle soutient, en outre, qu'elle ne s'est prévalue que de la défaillance de l'emprunteur et que les clauses critiquées, sont sans incidence dans le règlement du litige.

Le CRÉDIT AGRICOLE SUD RHÔNE-ALPES réitère ses demandes.

Madame X., citée en l'étude de Maître COMBELASSE, est non comparante et non représentée.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

I/ SUR LES MOYENS SOULEVÉS D'OFFICE PAR LE TRIBUNAL :

Aux termes de l'article 6 du Code civil, les parties ne peuvent pas déroger aux lois qui intéressent l'ordre public ; l'article 1134 du même Code précise encore que seules les conventions légalement formées ont force obligatoire.

[minute page 3] En outre, le consommateur ne peut renoncer au bénéfice des dispositions des articles L. 311-1 et suivants du Code de la consommation qui sont d'ordre public en application de l'article L. 311-16 du même Code.

Dès lors, ce qui échappe à l'autonomie de la volonté ne saurait être obtenu grâce au silence, à l'ignorance ou au défaut de comparution de la partie que la loi entend protéger, fût-ce contre elle même.

A cet égard, aux termes de l'article 472 du Nouveau Code de procédure civile, « Si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée. »

En application des articles 7, 12 et 16 du Nouveau Code de Procédure Civile, le Tribunal peut dans le respect du principe du contradictoire, relever d'office les moyens de droit afin de trancher le litige conformément aux règles qui lui sont applicables ; en effet l'application d'une loi d'ordre public découle de la nature même de cette norme et ne saurait donc être subordonnée à son invocation par l'une des parties.

Par voie de conséquence, le Tribunal, conformément à la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés Européennes qui fait obligation au juge de relever d'office les moyens tirés du caractère abusif d'une clause stipulée dans un contrat de crédit, entend user de son pouvoir de soulever d'office les moyens de pur droit tirés de la méconnaissance des dispositions d'ordre public des articles L. 311-1 et suivants du Code de la consommation et de les soumettre à la contradiction.

 

2/ SUR LA CRÉANCE DE LA BANQUE :

A/ SUR LE DROIT AUX INTÉRÊTS :

L'article L. 311-13 du Code de la consommation dispose que l'offre préalable est établie en application des conditions prévues aux articles précédents selon l'un des modèles types fixés par le comité de réglementation bancaire après consultation du conseil national de la consommation.

Il n'est pas possible d'ajouter au modèle type des clauses qui aggraveraient la situation de l'emprunteur en cas de défaillance de celui-ci.

Le modèle-type n° 3 annexé à l'article R. 311-6 du Code de la consommation, applicable aux prêts personnels renvoie, pour ce qui concerne l'exécution du contrat au modèle type n° 1, relatif aux crédits accessoires à une vente, à savoir les 2 contrats litigieux. Le modèle type N°1 prévoit la possibilité pour le prêteur d'exiger le remboursement immédiat des sommes dues, uniquement en cas de défaillance de l'emprunteur.

En l'espèce l'offre préalable de crédit personnel prévoit, dans le paragraphe relatif à l'exigibilité du prêt (3-3) et l'offre préalable du prêt TEMA vise dans son article 9 [minute page 4] « déchéance du terme-exigibilité du prêt », d'autres dispositions que la seule défaillance de l'emprunteur.

De telles clauses, non prévues par les modèles types, aggravent incontestablement la situation de l'emprunteur puisqu'elle offre au prêteur une possibilité supplémentaire de résilier le contrat et d'exiger immédiatement la totalité des sommes dues. Dès lors l'offre préalable de crédit méconnaît les dispositions de l'article L. 311-13 du Code de la consommation.

Il résulte de l'article L. 311-33 du Code de la consommation que la sanction de la méconnaissance des dispositions des articles L. 311-8 à L. 311-13 du même code consiste en la déchéance du droit aux intérêts, l'emprunteur n'étant tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu.

Par voie de conséquence, il convient de prononcer la déchéance du CRÉDIT AGRICOLE SUD RHÔNE-ALPES de son droit aux intérêts.

 

B/ SUR LE PRÊT TEMA :

Il ressort de l'examen des comptes produits par la banque que Madame X. a réglé la somme de 1.700,36 € sur la somme empruntée de 7.600,00 € ; elle reste donc redevable de la somme de 5.899,64 €.

Il convient donc de la condamner au paiement de ce montant au profit du CRÉDIT AGRICOLE SUD RHÔNE-ALPES avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance à défaut de justification de la date de la mise en demeure.

 

C/ SUR LE PRÊT PERSONNEL :

Il ressort de l'examen des comptes produits par la banque que Madame X. a réglé la somme de 543,74 € sur la somme empruntée de 10.000,00 € ; elle reste donc redevable de la somme de 9.456,26 €.

Il convient donc de la condamner au paiement de ce montant au profit du CRÉDIT AGRICOLE SUD RHÔNE-ALPES avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance à défaut de justification de la date de la mise en demeure.

 

3/ SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES :

L'équité ne justifie pas de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

L'exécution provisoire, n'apparaissant justifiée par aucune considération particulière, ne sera pas ordonnée.

Madame X., qui succombe à la présente instance en supportera les entiers dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 5] PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL,

statuant par jugement réputé contradictoire, mis à disposition au greffe, en premier ressort,

CONDAMNE Madame X. à payer au CRÉDIT AGRICOLE SUD RHÔNE-ALPES les sommes de :

* 5.899,64 € avec intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2006,

* 9.456,26 € avec intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2006.

REJETTE le surplus des demandes.

CONDAMNE Madame X. aux entiers dépens.

Et le présent jugement a été signé par le greffier et le président de ce tribunal.

LE GREFFIER            LE PRÉSIDENT