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TI SENS, 6 décembre 2006

Nature : Décision
Titre : TI SENS, 6 décembre 2006
Pays : France
Juridiction : Sens (TI)
Demande : 06-000239
Décision : 06/306
Date : 6/12/2006
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 25/07/2006
Décision antérieure : CA PARIS (pôle 4 ch. 9), 25 mars 2010
Numéro de la décision : 306
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2788

TI SENS, 6 décembre 2006 : RG n° 06-000239 ; jugement n° 06/306

(sur appel CA Paris (pôle 4 ch. 9), 25 mars 2010 : RG n° 07/09657)

 

Extraits : 1/ « L'article 125 du Nouveau Code de procédure civile fait obligation au juge de relever d'office les fins de non-recevoir lorsqu'elles revêtent un caractère d'ordre public. Aux termes de l'article L. 311-37 du Code de la consommation, l'action en paiement née d'un contrat de crédit à la consommation doit être engagée dans le délai de deux ans qui suit l'évènement qui lui a donné naissance. »

2/ « Cependant, la clause aux termes de laquelle le montant de l'ouverture de crédit fixé initialement a peut être dépassé avec l'accord du prêteur en fonction des tirages de l'emprunteur ne prévoit pas que l'augmentation du montant du découvert doit être réalisé dans les termes d'une nouvelle offre préalable, qui doit être acceptée par l'emprunteur et qui ouvre une faculté de rétractation. Ainsi, cette clause n'impose pas au prêteur, pour chaque nouveau crédit que constitue l'augmentation du montant du crédit initial, de délivrer à l'emprunteur une nouvelle offre préalable, que ce dernier doit formellement accepter. En outre, l'emprunteur ne dispose donc pas, à cette occasion, de la faculté d'ordre public de rétracter son acceptation.

Dès lors, cette clause crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur et, de ce fait, se trouve réputée non écrite par application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation (Commission des clauses abusives, Avis 04-02 et 04-03 du 24 juin 2004 ; Avis Cass. 10 juillet 2006). En effet, l'augmentation du plafond d'une ouverture de crédit ne peut être réalisée que dans les termes d'une offre préalable, et la stipulation permettant l'augmentation tacite de l'ouverture de crédit, n'a donc aucune incidence sur la détermination du point de départ du délai de forclusion. En toute hypothèse, un crédit dont le plafond est stipulé révisable ne peut néanmoins être augmenté sans que l'emprunteur ait été saisi d'une nouvelle offre préalable (Civ. 1ère, 26 octobre 2004, pourvoi n° 02-20564), ce dernier ne pouvant renoncer au dispositif protecteur des articles L. 311 -8 et suivants du Code de la consommation.

En conséquence, la stipulation permettant l'augmentation du plafond initial est illicite et réputée non écrite. »

 

TRIBUNAL D’INSTANCE DE SENS

JUGEMENT DU6 DÉCEMBRE 2006

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 06-000239. Jugement n° 06/306.

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Laure COMTE

Greffier : Béatrice ARGAST, Adjoint administratif faisant fonction de Greffier

 

DEMANDEUR :

Société Anonyme MEDIATIS

[adresse], représentée par Maître DUMONT, avocat au barreau de Sens

 

DÉFENDEURS :

Monsieur X.

[adresse], non comparant

Madame X. née Y.

[adresse],  non comparante

 

DÉBATS : Audience Publique du 8 novembre 2006

JUGEMENT : Par mise à disposition au greffe le 6 décembre 2006

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] FAITS, PROCÉDURE PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Selon offre préalable acceptée le 10 avril 2000, la SA MEDIATIS a consenti à Monsieur X. et Madame X., une ouverture de crédit par découvert en compte d'un montant en capital de 30.000 Francs soit 4.573,47 Euros ouvrant pour la société de crédit à la perception d'intérêts au taux effectif global de 15,36 % calculés sur les sommes réellement empruntées.

Plusieurs échéances n'ayant pas été honorées, la société de crédit a provoqué la déchéance du terme.

Par acte du 25 juillet 2006, la SA MEDIATIS a fait assigner Monsieur X. et Madame X. afin d'obtenir avec exécution provisoire, leur condamnation solidaire au paiement des sommes suivantes :

- 13.790,79 Euros, avec intérêts au taux conventionnel de 16,01 %, sur la somme de 12.959,64 Euros, jusqu'à parfait paiement, pour solde du crédit,

- 800 Euros en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Elle a soutenu que le premier impayé non régularisé datait du mois de février 2005, que la date de déchéance du terme avait été prononcée le 5 mars 2006 et qu'une lettre de mise en demeure en date du 7 mars 2006 était envoyée à Monsieur X. et Madame X., demeurée sans effet.

Assignés à mairie, Monsieur X. et Madame X. n'ont pas comparu, ni personne pour les représenter à l'audience du 6 septembre 2006.

La SA MEDIATIS, représentée par Maître DUMONT, a réitéré les termes de son assignation.

Par jugement en date du 4 octobre 2006, le tribunal a ordonné la réouverture des débats afin que les parties puissent se prononcer sur le dépassement du capital emprunté de la somme déterminée dans l'offre préalable à savoir la somme de 30.000 Francs soit 4.573,47 Euros.

A l'audience du 8 novembre 2006, la SA MEDIATIS, représentée par Maître DUMONT, a maintenu l'intégralité de ses prétentions en soulignant que :

- le juge ne pouvait pas soulever d'office un tel moyen, au motif que les dispositions relatives au crédit à la consommation relevaient de l'ordre public de protection et en concluait donc que seuls les défendeurs étaient dépositaires de leur intérêt personnel,

- si l'offre a été conclue initialement pour un capital de 30.000 Francs soit 4.573,47 Euros, celui-ci pouvait être porté au maximum de 140.000 Francs soit 21.342,86 Euros ainsi qu'il résulte des stipulations contractuelles.

Elle a ajouté que toute nouvelle offre préalable n'était donc pas nécessaire, que ces augmentations de capital avaient été faites à la demande de l'emprunteur dans le respect des dispositions contractuelles et dans le cadre de l'exercice d'un droit résultant ainsi du contrat. Elle a ainsi allégué que son action n'était pas forclose, les emprunteurs n'ayant jamais emprunté plus que le montant de découvert maximum contractuellement déterminé à savoir 140.000 Francs soit 21.342,86 Euros.

Enfin, elle a rappelé que le dernier impayé non régularisé datait du mois de février 2005.

Les défendeurs n'ont pas comparu ni personne pour les représenter.

[minute page 3] L'affaire a été mise en délibéré au 6 décembre 2006.

Le montant de la demande est supérieur à la somme de 4.000 Euros, le jugement sera rendu en premier ressort.

Les défendeurs n'ayant pas comparu, mais la décision étant susceptible d'appel, le jugement rendu sera réputé contradictoire en vertu de l'article 474 du nouveau Code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Selon l'article 472 du nouveau Code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

 

Sur la demande principale :

L'article 125 du Nouveau Code de procédure civile fait obligation au juge de relever d'office les fins de non-recevoir lorsqu'elles revêtent un caractère d'ordre public.

Aux termes de l'article L. 311-37 du Code de la consommation, l'action en paiement née d'un contrat de crédit à la consommation doit être engagée dans le délai de deux ans qui suit l'évènement qui lui a donné naissance.

Conformément à la règle selon laquelle le point de départ à l'expiration duquel une action ne peut plus être exercée, se situe nécessairement à la date d'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance, le délai biennal de forclusion prévu par l'article L. 311-37 du Code de la consommation court, dans le cas d'une ouverture de crédit, d'un montant déterminé et reconstituable, assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, à compter du moment où le montant du dépassement maximum convenu n'est pas régularisé, cette situation constituant un incident qui caractérise la défaillance de l'emprunteur.

En l'espèce, l'offre de crédit a été plafonnée à 30.000 Francs soit 4.573,47 Euros, avec la possibilité d'une augmentation jusqu'au seuil de 140.000 Francs soit 21.342,86 Euros selon les utilisations réalisées par l'emprunteur, ainsi qu'il résulte des stipulations contractuelles.

Cependant, la clause aux termes de laquelle le montant de l'ouverture de crédit fixé initialement a peut être dépassé avec l'accord du prêteur en fonction des tirages de l'emprunteur ne prévoit pas que l'augmentation du montant du découvert doit être réalisé dans les termes d'une nouvelle offre préalable, qui doit être acceptée par l'emprunteur et qui ouvre une faculté de rétractation.

Ainsi, cette clause n'impose pas au prêteur, pour chaque nouveau crédit que constitue l'augmentation du montant du crédit initial, de délivrer à l'emprunteur une nouvelle offre préalable, que ce dernier doit formellement accepter.

En outre, l'emprunteur ne dispose donc pas, à cette occasion, de la faculté d'ordre public de rétracter son acceptation.

Dès lors, cette clause crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des [minute page 4] parties au détriment du consommateur et, de ce fait, se trouve réputée non écrite par application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation (Commission des clauses abusives, Avis 04-02 et 04-03 du 24 juin 2004 ; Avis Cass. 10 juillet 2006).

En effet, l'augmentation du plafond d'une ouverture de crédit ne peut être réalisée que dans les termes d'une offre préalable, et la stipulation permettant l'augmentation tacite de l'ouverture de crédit, n'a donc aucune incidence sur la détermination du point de départ du délai de forclusion.

En toute hypothèse, un crédit dont le plafond est stipulé révisable ne peut néanmoins être augmenté sans que l'emprunteur ait été saisi d'une nouvelle offre préalable (Civ. 1ère, 26 octobre 2004, pourvoi n° 02-20564), ce dernier ne pouvant renoncer au dispositif protecteur des articles L. 311 -8 et suivants du Code de la consommation.

En conséquence, la stipulation permettant l'augmentation du plafond initial est illicite et réputée non écrite.

Le montant initial du crédit de 30.000 Francs soit 4.573,47 Euros autorisé a été dépassé au mois de novembre 2001 et l'historique de compte montre que le dépassement n'a jamais été régularisé.

Au contraire, la situation n'a cessé de s'aggraver, ce dépassement de plafond constituant donc un incident de paiement manifestant la défaillance de l'emprunteur, laquelle ne peut être regardée comme utilement effacée par l'octroi de crédit complémentaire dans des conditions irrégulières au regard de la législation en la matière (Civ. 1re, 30 mars 2005, Bull. I, n° 159).

L'assignation ayant été délivrée le 25 juillet 2006, et après l'expiration du délai biennal, l'action est atteinte par la forclusion et les demandes doivent être déclarées irrecevables.

 

Sur les dépens :

Il y a lieu de condamner la SA MEDIATIS aux entiers dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire rendu en premier dernier ressort, par mise à disposition,

Constate que l'action engagée par la SA MEDIATIS est atteinte par la forclusion,

Déclare irrecevables les demandes de la SA MEDIATIS,

Condamne la SA MEDIATIS aux dépens de l'instance.

Le présent jugement a été signé par Laure COMTE, Juge et par Béatrice ARGAST, Greffier présent lors du prononcé les jour, mois et an indiqués en première page.

Le Greffier Le juge