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CA AGEN (1re ch. civ.), 24 janvier 2011

Nature : Décision
Titre : CA AGEN (1re ch. civ.), 24 janvier 2011
Pays : France
Juridiction : Agen (CA), 1re ch. civ.
Demande : 09/01744
Décision : 91/2011
Date : 24/01/2011
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 8/12/2009
Décision antérieure : TI AUCH, 9 novembre 2009
Numéro de la décision : 91
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2866

CA AGEN (1re ch. civ.), 24 janvier 2011 : RG n° 09/01744 ; arrêt n° 91/2011

Publication : Jurica

 

Extrait : « - que la clause autorisant la vente amiable, postérieure à la signature du contrat, était licite et non abusive à la date à laquelle l'acte a été signé par Madame X. ; - que Madame X. ne justifie d'aucune manière l'allégation sur laquelle elle n'aurait signé le document le 7 juin 2008 que parce qu'il lui avait été indiqué que si elle acceptait la vente amiable son obligation serait intégralement soldée ; - que par ailleurs elle n'indique pas quelles clauses du document du 7 juin [2008], seraient abusives ni ne démontre le préjudice qui en découlerait alors que son obligation découle exclusivement du contrat de prêt et des dispositions de l'article L. 311-30 du Code de la consommation ; - que par suite sa demande en dommages et intérêts et en compensation ne peut prospérer ; - que par suite elle n'est pas dégagée de son obligation de payer le solde restant du au titre des mensualités de retard et du capital. ».

 

COUR D’APPEL D’AGEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 24 JANVIER 2011

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 09/01744. Arrêt n° 91/2011.

ARRÊT : Contradictoire. Prononcé par mise à disposition au greffe conformément au second alinéa de l'article 450 et 453 du Code de procédure civile le vingt quatre janvier deux mille onze, par Raymond MULLER, Président de Chambre, assisté d'Audrey LELONG, Greffier en chef placé,

LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1re Chambre dans l'affaire,

 

ENTRE :

SA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE DE RECOUVREMENT DE RÉCUPÉRATION ET DE REDRESSEMENT-SIRRR,

prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège, représentée par la SCP A.L. PATUREAU & P. RIGAULT, avoués, assistée de Maître KAEUFFER, avocat, APPELANTE d'un jugement rendu par le Tribunal d'Instance d'AUCH en date du 9 novembre 2009. D'une part,

 

ET :

Madame X.,

née le [date] à [ville], demeurant chez Monsieur Y., représentée par la SCP Henri TANDONNET, avoués, assistée de Maître Marie-Luce D'ARGAIGNON, avocat, INTIMÉE. D'autre part,

 

DÉBATS ET COMPOSITION DE LA COUR : La cause a été débattue et plaidée en audience publique, le 13 septembre 2010 sans opposition des parties, devant Raymond MULLER, Président de Chambre et François CERTNER, conseiller, rapporteurs assistés d'Isabelle BURY, Greffier.

Le Président de Chambre et le Conseiller rapporteur en ont, dans leur délibéré, rendu compte à la Cour composée, outre eux-mêmes, et de Bernard BOUTIE, Président de Chambre, en application des dispositions des articles 945-1 et 786 du Code de Procédure Civile, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés, les parties ayant été avisées par le Président, à l'issue des débats, que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe à la date qu'il indique.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Selon offre préalable acceptée, la SA GMAC BANQUE a consenti à Madame X. un prêt de 45.000 euros destiné à financer l'achat d'un véhicule d'occasion de marque BMW, de modèle 320 D. Ce prêt au taux de 8,70 % l'an devait être remboursé en quarante huit mensualités de 391,54 euros dont la première devait être payée le 5 août 2006 et la dernière le 10 octobre 2010. Le véhicule était donné en gage au prêteur.

L'échéance du 10 mars 2008, puis toutes les échéances suivantes n'ont pas été honorées, de sorte que le premier incident de paiement non régularisé est du 10 mars 2008.

Madame X. a restitué le véhicule le 7 juin 2008. En même temps, par acte sous seing privé, elle a donné pouvoir à la SA GMAC BANQUE de vendre le véhicule au mieux de leurs intérêts communs. L'acte stipulait que le prix de vente serait compensé avec les sommes dues, et que le solde en faveur de l'emprunteur lui serait versé. Dans l'acte, avant de signer, Madame X. a rayé la disposition mentionnant que si le prix de vente ne permettait pas de désintéresser intégralement le prêteur, elle s'engageait à rembourser le solde en faveur de la SA GMAC BANQUE.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 11 juin 2008, la SA GMAC BANQUE a mis Madame X. en demeure de lui verser la somme de 11.836,81 euros correspondant selon elle au solde restant du au titre du prêt.

Le véhicule a été vendu le 30 juillet 2008 à la SAS AUTO SERVICES 17 de TONNAY-CHARENTE.

Le prêteur a encore reçu une indemnité d'assurance de 154 euros.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 13 août 2008, la SA GMAC BANQUE a mis Madame X. en demeure de lui rembourser la somme de 5.682,81 euros déduction faite du prix de vente du véhicule et de l'indemnité d'assurance.

Par acte sous seing privé du 23 février 2009, la SA GMAC BANQUE a cédé sa créance sur Madame X. à la SA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE DE RECOUVREMENT DE RÉCUPÉRATION ET DE REDRESSEMENT (SIRRR).

Par acte d'huissier du 7 avril 2009, la SA SIRRR a assigné Madame X. devant le Tribunal d'instance d'AUCH et a demandé au Tribunal, à défaut de conciliation et sur le fondement des articles L. 311-1 et suivants du Code la consommation et 1690 et suivants du Code civil, du contrat de crédit et du contrat de cession de créance :

- de constater la résiliation du contrat de crédit du fait de la carence de Madame X. ;

- de lui donner acte de la cession de créance opérée à son profit par acte du 23 février 2009 ;

- de dire et juger que l'assignation vaut signification de la cession à Madame X. ;

- de condamner Madame X., outre aux dépens, à lui payer la somme de 5.682,81 euros à titre principal, augmentée des intérêts au taux contractuel de 8,70 % à compter du 13 août 2008, et celle de 800 euros à titre d'indemnité de procédure.

La SA SIRRR a soutenu :

- que le prêteur n'a pas renoncé aux droits qu'il tire du contrat de prêt, de la déchéance du terme, et de l'article L. 311-30 du Code la consommation ;

- que la clause de voie parée, la dispensant de vendre la voiture aux enchères publiques, est valide car elle n'a pas été stipulée en même temps que le gage ;

- que les conditions de vente ne sont pas abusives, que les dispositions du décret du 31 juillet 1992 ont été respectées, qu'elle a informé Madame X. par courrier du 11 juin 2008 de ce qu'elle disposait d'un délai d'un mois pour trouver un acquéreur ;

- que le prix de vente est égal à la valeur du véhicule à l'argus, déduction faite du coût des réparations indispensables et que Madame X. ne peut invoquer aucun préjudice.

Madame X. a demandé au Tribunal, à titre principal, de débouter la SA SIRRR de l'intégralité de ses demandes et de la condamner, outre aux dépens, à lui payer une indemnité de procédure de 800 euros, et à titre subsidiaire de condamner la SA SIRRR à lui payer la somme de 6.000 euros à titre de dommages et intérêts et d'ordonner la compensation entre les sommes respectivement dues par les parties ;

Par jugement en date du 9 novembre 2009, le Tribunal d'instance d'AUCH a jugé que l’acte du 7 juin 2008 exprimait la volonté des parties de supprimer l'obligation née de l’article L. 311-30 du Code de la consommation, a débouté la SA SIRRR de toutes ses demandes et l'a condamnée à payer la somme de 800 euros à Madame X. en vertu de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par déclaration d'appel remise au greffe le 8 décembre 2009, la SA SIRRR a interjeté appel de ladite décision.

 

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Dans ses conclusions en date du 10 mars 2010, la SA SIRRR fait valoir :

1°) que la suppression unilatérale par Madame X. d'une mention dans l'acte en date du 7 juin 2008 constitue une modification unilatérale du contrat conclu, portée sur un document non signé par le co-contractant, et ne saurait donc exprimer une commune intention des parties ; qu'ainsi en application de l’article L. 311-30 du Code de la consommation, dont les dispositions sont d'ordre public, reprises à l'article 5 des conditions générales du contrat, en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur a droit au paiement des mensualités échues et impayées, du capital restant dû et de l'indemnité de 8 % du capital dû ;

2°) que selon une jurisprudence constante, la nullité de la clause de voie parée n'est encourue que si elle est stipulée à la conclusion du contrat de gage et non lorsqu'elle l'a été postérieurement, que dès lors, la clause contenue dans l'acte en date du 7 juin 2008, établie postérieurement à la convention, n'est pas nulle ;

3°) qu'à la date de la restitution, la valeur argus du véhicule était de 7.550 euros, et qu'il ressort du rapport d'évaluation en date du 23 juin 2008 que l’état du véhicule nécessitait des réparations pour un montant de 1.535,84 euros, que déduction faite de ces frais, la valeur du véhicule était de 6.014,16 euros, que la société gagiste a retenu la meilleure offre faite par un concessionnaire à hauteur de 6.000 euros correspondant à cette valeur ;

4°) que suivant acte sous seing privé en date du 23 février 2009, la Société GMAC BANQUE a cédé à la SA SIRRR « tous ses droits sur l'intégralité des créances cédées et identifiées en annexe 1 » parmi lesquelles figurent celle que la Société GMAC BANQUE détenait sur Madame X. ; que l'assignation introduisant l'instance comporte l'ensemble des informations relatives à la cession de créance et a été accompagnée d'un extrait du contrat de cession ; que cette assignation rend le transport certain et emporte signification de la cession de créance conformément aux dispositions de l’article 1690 du Code civil.

La SA SIRRR, demande à la Cour de réformer en toutes ses dispositions le jugement entrepris, de lui donner acte de la cession de créance opérée à son profit suivant acte de cession en date du 23 février 2009, de condamner Madame X. à lui payer la somme de 5.682,81 euros avec intérêts au taux de 8,70 % à compter du 13 août 2008 et celle de 1.500 euros à titre d'indemnité de procédure.

Par conclusions en date du 11 mai 2010, Madame X., intimée, fait valoir :

1°) qu'elle s'est opposée à la demande en paiement formulée par la SA SIRRR en raison de l'accord concrétisé par l’acte du 7 juin 2008, sur lequel elle a rayé son engagement d'avoir à rembourser le solde éventuel après affectation du prix de vente du véhicule ; que cet acte du 7 juin 2008 exprime la volonté des parties et doit recevoir application conformément aux termes des articles 1322 et 1134 du Code civil ;

2°) que si néanmoins il était fait droit à la demande de paiement de la SA SIRRR, la Cour devrait faire droit à la demande de dommages-intérêts formulée par Madame X., l'acte en date du 7 juin 2008 comportant des clauses abusives qui ont été imposées à Madame X. par un créancier professionnel alors qu'elle se trouvait être un particulier en difficulté, et ce d'autant qu'il lui a été affirmé que si elle régularisait cet acte, l'organisme de crédit serait définitivement désintéressé par le prix de vente du véhicule ;

3°) que les conditions de cette vente sont parfaitement contestables dans la mesure où, pour le moins, le débiteur ne dispose d'aucune garantie que le véhicule ait été vendu au mieux de ses intérêts, la vente étant intervenue dans des conditions exorbitantes de droit commun ; que l’article L. 311-32 du Code de la consommation répute non écrit les pactes commissoires conclus dans des contrats de crédits mobiliers à la consommation conformément à l’article 2348 du Code civil, que l'acte soumis par la GMAC à la régularisation par la concluante en date du 7 juin 2008 constituait un pacte de voie parée détourné.

Madame X. demande en conséquence à la Cour de confirmer en tous points le jugement entrepris, de débouter la SA SIRRR de l'intégralité de ses demandes, et à titre subsidiaire de condamner la SA SIRRR au paiement de la somme de 6.000 euros au titre de dommages et intérêts, d'ordonner la compensation entre les sommes réciproques dues par les parties, de réduire le montant de la clause pénale à une somme de principe, à titre infiniment subsidiaire, d'allouer les plus larges délais de paiement à Madame X., et de condamner la SA SIRRR au paiement d'une somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

A titre liminaire il convient de relever que la SA SIRRR est bien recevable à agir dès lors que la créance litigieuse lui a été cédé par la SA GMAC BANQUE selon acte sous seing privé du 23 février 2009 et que cette cession de créance a été régulièrement signifiée à Madame X. au sens de l’article 1690 du Code civil dès lors que l'assignation mentionnait expressément le cédant, le cessionnaire, la créance cédée, et qu'y était annexée un extrait du contrat de cession.

Pour infirmer le jugement entrepris il suffira de relever :

- qu'aux termes de l’article L. 311-30 du Code de la consommation, repris à l'article 5 des conditions générales du contrat de crédit, en cas de défaillance de l'emprunteur le prêteur a droit au paiement des mensualités échues et impayées, du capital restant dû et de l'indemnité de 8 % du capital du ;

- que le prêteur n'a, à aucun moment, renoncé à se prévaloir des droits découlant de l'application de ces dispositions ;

- que la circonstance que Madame X. ait rayé unilatéralement dans l’acte du 7 juin 2008 la mention prévoyant qu'elle s'engageait à régler le solde restant éventuellement du après la vente amiable du véhicule ne la délivre pas de l'obligation découlant de l'article L. 311-30 et du contrat, qu'en effet les droits du prêteur ne découlent pas de l’acte du 7 juin 2008 mais des dispositions contractuelles, reprenant les dispositions légales, étant observé que si Madame X. a rayé la mention par laquelle elle s'engageait à payer le solde, à aucun moment dans cet acte le prêteur n'a renoncé à se prévaloir de ses droits à obtenir paiement du solde restant éventuellement du après la vente du véhicule ;

- que la clause autorisant la vente amiable, postérieure à la signature du contrat, était licite et non abusive à la date à laquelle l'acte a été signé par Madame X. ;

- que Madame X. ne justifie d'aucune manière l'allégation sur laquelle elle n'aurait signé le document le 7 juin 2008 que parce qu'il lui avait été indiqué que si elle acceptait la vente amiable son obligation serait intégralement soldée ;

- que par ailleurs elle n'indique pas quelles clauses du document du 7 juin [2008], seraient abusives ni ne démontre le préjudice qui en découlerait alors que son obligation découle exclusivement du contrat de prêt et des dispositions de l'article L. 311-30 du Code de la consommation ;

- que par suite sa demande en dommages et intérêts et en compensation ne peut prospérer ;

- que par suite elle n'est pas dégagée de son obligation de payer le solde restant du au titre des mensualités de retard et du capital.

Toutefois compte tenu du taux d'intérêt élevé pour un prêt destiné à financer l'acquisition d'un véhicule, il y a lieu de réduire à un montant de 100 euros l'indemnité de 8 % qui constituent une clause pénale de sorte qu'en définitive la créance de la SA SIRRR s'établit à 4.806,01 euros.

Madame X. apparaissant comme une débitrice malheureuse mais de bonne foi, y a lieu de lui accorder les délais de paiement qu'elle sollicite, dans les termes de dispositif du présent arrêt.

L'équité n'impose pas de faire application des dispositions de l'article 700 au profit de l'appelante.

Madame X. qui succombe ne peut prétendre au bénéfice de l’article 700 du Code de procédure civile et doit être condamnée aux dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant contradictoirement par arrêt prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort ;

DÉCLARE l'appel régulier en la forme et recevable ;

INFIRME le jugement entrepris en toutes ces dispositions ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE Madame X. à payer à la SA SIRRR la somme de 4.806,01 euros (quatre mille huit cent six euros et un centime), majorés des intérêts au taux de 8,70 % à compter du 13 août 2008 ;

AUTORISE Madame X. à se libérer de sa dette en 23 mensualités de 400 euros payables le cinq de chaque mois, à compter du 5 février 2011, et une dernière mensualité correspondant au solde restant alors du ;

DIT qu'à défaut de paiement d'une mensualité dans les huit jours de son échéance la totalité du solde sera immédiatement et de plein droit exigible ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes en paiement d'une indemnité de procédure ;

CONDAMNE Madame X. aux dépens et autorise les avoués de la cause à recouvrer directement ceux des dépens d'appel dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.

Le présent arrêt a été signé par Raymond MULLER, Président de Chambre et par Audrey LELONG, Greffier en chef placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier en chef,   Le Président,

Audrey LELONG       Raymond MULLER