CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA BORDEAUX (2e ch. civ.), 26 janvier 2011

Nature : Décision
Titre : CA BORDEAUX (2e ch. civ.), 26 janvier 2011
Pays : France
Juridiction : Bordeaux (CA), 2e ch.
Demande : 09/05230
Date : 26/01/2011
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 9/09/2009
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 2893

CA BORDEAUX (2e ch. civ.), 26 janvier 2011 : RG n° 09/05230

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu ensuite qu'elle cite toutes les clauses du contrat imprimées en caractères typographiques d'une taille inférieure à celle minimum fixée par la recommandation 97-01 du 24 avril 1997 de la Commission des Clauses Abusives, les qualifiant de ce fait de clauses abusives devant être déclarées nulles en visant les dispositions de l’article L. 132-1 du Code de la consommation ;

que cependant ce texte selon son propre énoncé ne s'applique qu'aux contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs et il ne peut être soutenu que l'appelante qui est une société commerciale se trouvait en l'espèce dans la situation d'un simple consommateur au motif que la location du matériel serait sans rapport avec son activité alors qu'il est courant qu'un établissement hôtelier, au surplus s'il est situé dans une zone sensible, se dote d'un système de surveillance et d'alarme » ;

 

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 26 JANVIER 2011

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 09/05230. Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 7 juillet 2009 (R.G. 2008F00467) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 9 septembre 2009.

 

APPELANTE :

SARL CABRIT,

agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [adresse], représentée par la SCP GAUTIER & FONROUGE, avoués à la Cour, assistée de Maître Abel FADLI, avocat au barreau de BORDEAUX

 

INTIMÉES :

SAS PARFIP France,

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [adresse], représentée par la SCP FOURNIER, avoués à la Cour, assistée de Maître Nathalie SAGNES-JIMENEZ, avocat au barreau de BOURG EN BRESSE

 

INTERVENANTE :

SA EASYDENTIC,

venant aux droits de la SA INNOVATYS, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [adresse], représentée par la SCP LABORY-MOUSSIE & ANDOUARD, avoués à la Cour, assistée de Maître MOREIRA substituant Maître BENHAMOU avocat au barreau de GRENOBLE

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 8 décembre 2010 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Philippe LEGRAS, Conseiller chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Jean-François BOUGON, Président, Monsieur Philippe LEGRAS, Conseiller, Monsieur Jean-François BANCAL, Conseiller,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Monsieur Hervé Goudot

ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le 16 juin 2006 la SARL CABRIT, exploitant un hôtel-restaurant à [ville] (33), souscrivait auprès de la SAS INNOVATYS à AIX en PROVENCE (13) un contrat de prestation de visio-surveillance par IP et de location du matériel pour l'équipement de ses locaux professionnels, aux termes duquel elle s'engageait à verser 48 loyers mensuels de 230 euros HT. Le contrat de location et les matériels étaient cédés selon facture du 25 septembre 2006 à la SAS PARFIP FRANCE, société de financement qui acquittait le prix du matériel et qui transmettait le 28 septembre 2006 à la SARL CABRIT un échéancier des prélèvements pour lesquels celle-ci avait consenti une autorisation. Les équipements comprenant deux caméras, un logiciel Visio-Station plus enregistrement numérique local et des services optionnels faisaient l'objet le 8 septembre 2006 d'une réception sans réserves.

Le 17 octobre 2006 le réceptionniste de la SARL CABRIT était victime d'une agression sans que le système installé y ait fait obstacle et, par LRAR du 2 novembre 2006, cette société informait la SAS INNOVATYS de son intention de résilier le contrat. Parallèlement le 3 novembre 2006 elle demandait à sa banque de suspendre les prélèvements en faveur de la SAS PARFIP FRANCE. Par courrier du 10 novembre 2006 la SAS INNOVATYS indiquait à la SARL CABRIT qu'elle procédait au remboursement des montants prélevés par PARFIP FRANCE entre juillet et novembre 2006 et qu'elle prenait en charge le suivant. Par courrier du 10 novembre 2006 la SARL CABRIT confirmait à INNOVATYS que l'installation n'était toujours pas en fonction et lui demandait de venir récupérer le matériel. Elle faisait établir un constat d'huissier le 24 novembre 2006 dont elle adressait copie à PARFIP FRANCE qui de son côté lui réclamait le paiement des échéances en cours.

Après échanges de courriers et chaque partie restant sur ses positions la SAS PARFIP FRANCE, par LRAR du 16 avril 2007, mettait en demeure la SARL CABRIT de lui payer la somme de 13.506,43euro en visant la clause résolutoire du contrat. Celle-ci y opposait la résiliation du contrat intervenue selon elle depuis le 2 novembre 2006.

Par acte du 6 février 2008 la SAS PARFIP FRANCE faisait assigner la SARL CABRIT devant le tribunal de commerce de BORDEAUX aux fins de voir constater la résiliation du contrat de location pour défaut de paiement des loyers et condamner la locataire à lui payer la somme de 9.902,88 euros au titre des loyers échus et celle de 990,29 euros au titre de la clause pénale, le tout avec intérêts au taux contractuel de 1,5 % par mois à compter du 16 avril 2007, outre à la restitution des matériels loués. Par acte du 21 mars 2008 la SARL CABRIT appelait en cause la SAS INNOVATYS et concluait à la nullité des clauses du contrat comme non conformes à la recommandation 97-01 du 24 avril 1997 de la Commission des Clauses Abusives et comme clauses abusives les dispositions des articles 10,11 et 14 du contrat, à la constatation de sa résiliation à effet du 2 novembre 2006 et aux torts d'INNOVATYS et à la condamnation de celle-ci à lui payer 5.000 euros de dommages-intérêts et à la relever de toutes sommes qui pourraient être mises à sa charge au profit de PARFIP FRANCE. A l'égard d'INNOVATYS la SAS PARFIP FRANCE concluait subsidiairement à l'annulation de la vente du matériel et à sa condamnation à lui rembourser la facture d'achat de 10.203,97 euros ou, à défaut de résiliation du contrat de location aux torts d'INNOVATYS, à sa condamnation à lui payer 9.902,88 euros de dommages-intérêts. La SAS INNOVATYS concluait pour sa part au débouté des demandes à son encontre et, prenant acte de la résiliation du contrat au 2 novembre 2006 aux torts de la SARL CABRIT, à la condamnation de celle-ci à lui payer la somme de 2.723,30 euros outre intérêts.

Par jugement contradictoire du 7 juillet 2009 le tribunal a :

* dit la SAS PARFIP FRANCE recevable à agir ;

* constaté la résiliation du contrat de location à compter du 15 novembre 2006 ;

* condamné la SARL CABRIT à payer à la SAS PARFIP FRANCE la somme de 9.902,88 euros avec intérêts au taux contractuel de 1,5 % par mois à compter du 16 avril 2007 et celle de 990,29 euros au titre de clause pénale ;

* condamné la SARL CABRIT à restituer les matériels loués au siège de la SAS PARFIP FRANCE à ses frais et sous astreinte de 20 euros par jour à compter du 15ème jour suivant la signification du jugement ;

* condamné la SARL CABRIT à payer à la SAS INNOVATYS la somme de 2.723,30 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2006 ;

* débouté les parties de leurs autres demandes ;

* condamné la SARL CABRIT à payer à la SAS PARFIP FRANCE et à la SAS INNOVATYS 1.500 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

La SARL CABRIT a interjeté appel le 9 septembre 2009 de ce jugement dont elle a conclu le 11 janvier 2010 à la réformation en reprenant à l'identique ses demandes de première instance et elle demande la condamnation conjointe et solidaire des intimées à lui payer une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

La SAS PARFIP FRANCE, intimée et appelante incidente, a conclu le 7 mai 2010 à la confirmation du jugement sauf à lui accorder les intérêts au taux contractuel à compter du 16 avril 2007 sur la somme de 990,29 euros et à porter le montant de l'astreinte assortissant la condamnation à restitution du matériel à 50 euros par jour. Subsidiairement elle reprend à l'identique ses demandes de première instance. Elle demande une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

La SA EASYDENTIC, venant aux droits de la SAS INNOVATYS suite à une opération de fusion, a conclu le 2 mars 2010 en reprenant ses demandes de première instance et elle demande une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS ET DÉCISION :

Sur les demandes de la SARL CABRIT :

Attendu que la SARL CABRIT conteste avoir approuvé par sa signature ou son paraphe les conditions générales du contrat passé avec la SAS INNOVATYS et estime que de ce fait le droit du loueur du matériel objet du contrat d'en transférer la propriété à l'une des sociétés désignées, en l'espèce la SAS PARFIP FRANCE avec laquelle elle n'a pas contracté, ne lui est pas opposable ;

Or attendu qu'il est constant que sur les deux pages du contrat la SARL CABRIT a reconnu en apposant sa signature et la formule manuscrite « lu et approuvé » au-dessous de la mention qui en était faite avoir eu connaissance des conditions générales et des conditions particulières du contrat prévoyant en particulier ce transfert de propriété (article 14) et elle ne peut d'autre part prétendre l'avoir ignoré alors qu'elle a, le même jour, signé une autorisation de prélèvements et fourni un RIB destinés à la SAS PARFIP FRANCE, les prélèvements ayant été effectifs d'octobre à décembre 2006 ;

Attendu ensuite qu'elle cite toutes les clauses du contrat imprimées en caractères typographiques d'une taille inférieure à celle minimum fixée par la recommandation 97-01 du 24 avril 1997 de la Commission des Clauses Abusives, les qualifiant de ce fait de clauses abusives devant être déclarées nulles en visant les dispositions de l’article L. 132-1 du Code de la consommation ;

Que cependant ce texte selon son propre énoncé ne s'applique qu'aux contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs et il ne peut être soutenu que l'appelante qui est une société commerciale se trouvait en l'espèce dans la situation d'un simple consommateur au motif que la location du matériel serait sans rapport avec son activité alors qu'il est courant qu'un établissement hôtelier, au surplus s'il est situé dans une zone sensible, se dote d'un système de surveillance et d'alarme ;

Attendu que la SARL CABRIT conteste également que le matériel ait fait l'objet d'une véritable réception, en contradiction avec un document signé par son représentant légal le 8 septembre 2006 intitulé « procès-verbal d'installation » mentionnant les opérations effectuées (câblage électrique et réseau vers les caméras, paramétrage d'envoi de SMS/mail sur alerte, formation des utilisateurs sur les produits installés, remise en mains propres du dossier type de déclaration à la préfecture sur la présence de caméras) et ne comportant aucune ambiguïté quant à son objet ni ne mentionnant aucune réserve ;

Qu'il en résulte que l'installation du matériel ainsi que la vérification de son fonctionnement ont bien été effectuées dans le délai de 90 jours de la signature du contrat visé à l'article 2 de celui-ci et qu'il ne peut être évoqué l'hypothèse prévue par cet article de rejet du dossier de location et de résiliation de plein droit du contrat ;

Attendu enfin que l'appelante invoque l'inexécution par la SAS INNOVATYS de ses obligations contractuelles du fait de l'existence de tels dysfonctionnements que le système était en réalité inutilisable ;

Qu'elle citait en première instance l'agression dont a été victime sa réceptionniste le 17 octobre 2006 et elle produit devant la cour une attestation de celle-ci dans laquelle elle ne fait aucune allusion au système d'alarme ;

Qu'elle produit un constat d'huissier dressé le 24 novembre 2006 d'où il ressort la présence dans les locaux du matériel loué, le fonctionnement de la sirène d'alarme installée à la réception de l'hôtel, qualifiée de faible intensité mais susceptible de faire l'objet d'un réglage, une panne d'un des postes informatiques appartenant à la SARL CABRIT, le non fonctionnement non expliqué d'un second poste et le fonctionnement normal d'un troisième ;

Que la SAS INNOVATYS devait répondre point par point au contenu de ce constat par un courrier LRAR du 19 janvier 2007 ;

Que le fait qu'à la suite de l'incident du 17 octobre 2006 la SAS INNOVATYS ait accepté de prendre à sa charge les mensualités versées à la SAS PARFIP FRANCE entre juillet et novembre 2006, qualifié par INNOVATYS de geste commercial, ne suffit pas à caractériser une reconnaissance de responsabilité ;

Que la réalité des dysfonctionnements et d'une non conformité du matériel à son usage ne peut ressortir de ces éléments et il est d'autre part singulier de ne trouver avant fin novembre 2006 aucun courrier de demande d'intervention du service de maintenance adressé à la SAS INNOVATYS ;

Attendu par suite que le contrat de location a été résilié à compter du 2 novembre 2006, date de la LRAR [N.B. lettre recommandée avec accusé de réception] de la SARL CABRIT, du fait de la suspension par celle-ci de ses paiements, ce en application des dispositions contractuelles (article 11) prévoyant l'application d'une indemnité de résiliation constituée par le solde TTC des mensualités afférentes à la maintenance à échoir à la date de la résiliation majoré de 10 % ;

Que la somme de 2.723,30 euros est bien due à la SAS INNOVATYS et donc à la SA EASYDENTIC venant à ses droits ainsi que les intérêts de retard au taux légal ;

 

Sur les demandes de la SAS PARFIP FRANCE :

Attendu qu'il ressort de ce qui précède que la SARL CABRIT a été parfaitement informée en souscrivant le contrat de location de la faculté du loueur de transférer la propriété du matériel loué à une société de financement et de l'effectivité de ce transfert à la SAS PARFIP France ;

Attendu que s'il existe indéniablement une interdépendance économique entre les conventions de location et de maintenance ayant existé entre la SARL CABRIT, la SAS INNOVATYS et la SAS PARFIP FRANCE celle-ci n'est pas suffisante pour conclure à une indivisibilité juridique de ces contrats lesquels sont distincts, cette précision figurant aux articles 3 et 14 du contrat du 16 juin 2006 ;

Or attendu qu'aucun manquement à ses obligations contractuelles n'est imputé à la SAS PARFIP FRANCE, dont la prestation se limitait à la location du matériel, pouvant justifier une résolution du contrat à ses torts et il ne peut lui être opposé une inexécution, au demeurant non établie, de ses obligations contractuelles par la SAS INNOVATYS ;

Qu'il doit d'autre part être noté que les conditions générales du contrat de location du 16 juin 2006 approuvées par la SARL CABRIT prévoyaient (article 3) :

- que le locataire s'interdisait de cesser de payer les loyers financiers et renonçait à tout recours contre l'établissement cessionnaire dans l'hypothèse ou le contrat de prestation de service serait suspendu, résolu ou résilié ;

- qu'en contrepartie le cessionnaire conférait au locataire un mandat d'ester en justice contre le prestataire ;

Attendu en conséquence que la SAS PARFIP FRANCE est en droit de demander, conformément aux dispositions contractuelles (articles 9 et 10) la restitution du matériel loué et le paiement de l'indemnité de résiliation constituée par le total TTC des loyers afférent à la location et non encore échus, soit la somme de 9.902,88 euros ainsi que la clause pénale contractuelle de 10 % soit 990,29 euros dont la réduction n'est pas sollicitée à titre subsidiaire ainsi que les intérêts au taux contractuel;

Attendu en revanche que la SAS PARFIP FRANCE sera déboutée de son appel incident portant sur l'application des intérêts au taux contractuel sur le montant de la clause pénale et sur le montant de l'astreinte assortissant la condamnation à la restitution du matériel ;

Attendu en conséquence que l'appelante sera déboutée de toutes ses demandes et le jugement déféré confirmé ;

Qu'il sera fait droit aux demandes sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile des deux intimées.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement sauf à fixer au 2 novembre 2006 la date de résiliation du contrat de location ;

DEBOUTE la SARL CABRIT de toutes ses demandes et la SAS PARFIP FRANCE de ses demandes plus amples ;

CONDAMNE la SARL CABRIT à payer à la SAS PARFIP FRANCE et à la SA EASYDENTIC, aux droits de la SAS INNOVATYS, la somme de 2.000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE la SARL CABRIT aux dépens d'appel dont distraction au profit des SCP d'avoués FOURNIER et LABORY-MOUSSIE & ANDOUARD.

Le présent arrêt a été signé par Jean-François Bougon, président et par Hervé Goudot, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.