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T. COM. PARIS (6e ch.), 3 mars 1997

Nature : Décision
Titre : T. COM. PARIS (6e ch.), 3 mars 1997
Pays : France
Juridiction : TCom Paris. 6e ch.
Demande : 96/088837
Date : 3/03/1997
Nature de la décision : Admission
Date de la demande : 19/06/1996
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 CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 297

T. COM. PARIS (6e ch.), 3 mars 1997 : RG n° 96/088837

Publication : Gaz. Pal. 1998.1, somm. p. 185

 

Extrait  « Que l'installation d'un système d'alarme dans une pharmacie afin d'éviter que ne surviennent de nouveaux cambriolages ou attaques dans le but de se procurer soit de l'argent soit plus vraisemblablement des substances toxiques non prescrites, a sans aucun doute possible, un rapport direct avec les activités spécifiques d'un pharmacien. »

« Attendu, par ailleurs, que la SNC BOUCICAUT demande de substituer les dispositions légales aux clauses qu'elle considère comme abusives du contrat. Mais que le texte en référence est une Recommandation émise par la Commission des Clauses Abusives relative aux contrats de location de certains biens [mobiliers] autres que les véhicules automobiles, que ce texte n'a à ce jour aucun caractère contraignant, qu'il ne peut donc en aucun cas être substitué, sans qu'il soit donc nécessaire de vérifier que les clauses du contrat en question répondent aux recommandations de ce texte. Que, par ailleurs, le Tribunal ne pourrait prononcer la nullité de certaines clauses que si leur nullité était de droit. »

 

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

SIXIÈME CHAMBRE

JUGEMENT DU 3 MARS 1997

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

RG 96088837. I.P. 96.8065.

ENTRE :

PARTIE DEMANDERESSE

NAMUR-ASSURANCES DU CREDIT SA

[adresse], comparant par Monsieur X., Mandataire

ET :

PARTIE DEFENDERESSE

BOUCICAUT SNC

[adresse], assistée de Maître BOULET, Avocat (M536) et comparant par la SEP SEVELLEC­-CHOLAY-CRESSON, Avocats (W09).

APRES EN AVOIR DÉLIBÉRÉ

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LES FAITS :

Lassés des cambriolages nombreux dont ils ont été victimes, les dirigeants de la SNC PHARMACIE BOUCICAUT ont commandé à la société CIPE qui les avait démarchés, un matériel de télésurveillance.

Le 23 septembre 1994 a été signé un contrat de « renting » par lequel la société SAPAR-LOCAGESTION achetait un matériel à la société CIPE pour le louer, sans option d'achat, à la SNC BOUCICAUT.

La livraison du matériel a été faite le 3 octobre 1994 et le procès-verbal de réception a été signé le lendemain 4 octobre.

Le système mis en place ayant connu de très graves problèmes de fonctionnement et ayant même ensuite cessé de fonctionner, la SNC BOUCICAUT a cessé de payer les loyers et demandé la résiliation du contrat, la SAPAR a alors constaté cette résiliation et a demandé le paiement de l'indemnité de résiliation.

La SA NAMUR ASSURANCES DU CREDIT (ci-après NAMUR), subrogée aux droits de LOCAGESTION, a décidé d'engager la présente procédure pour le recouvrement de sa créance.

 

LA PROCÉDURE :

Le 19 juin 1996, le Tribunal de céans a rendu une ordonnance d'injonction à la SNC BOUCICAUT de payer le solde de la facture, soit la somme de 21.248,64 Francs avec les intérêts légaux et la somme de 1.699,08 Francs à titre de clause pénale.

Le 18 juillet, une opposition a été formée à cette injonction de payer. [minute page 2]

Par deux jeux de conclusions déposés, le premier à l'audience du 21 octobre 1996, le second à celle du 16 décembre 1996, La SA NAMUR ASSURANCES DU CREDIT demande au Tribunal de rejeter l'opposition formulée par la SNC BOUCICAUT comme non fondée et de confirmer l'ordonnance d'injonction de payer, rendue le 19 juin 1996, à hauteur de 21.248,64 Francs avec intérêts de retard au taux légal majoré de la somme de 1.699,08 Francs au titre de la clause pénale, La SA NAMUR ASSURANCES DU CREDIT demande aussi l'exécution provisoire du jugement et la condamnation de la SNC BOUCICAUT à lui payer la somme de 2.000 Francs au titre de l'article 700 du NCPC et à la prise en charge des dépens.

Par conclusions déposées à l'audience du 18 novembre 1996, la SNC BOUCICAUT demande au Tribunal d'infirmer l'ordonnance d'injonction de payer, de débouter La SA NAMUR ASSURANCES DU CREDIT en toutes ses demandes fins et conclusions et de la condamner reconventionnellement à lui payer la somme de 15.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

 

LES MOYENS DES PARTIES

1 - Sur la recevabilité :

L'opposition ayant été régulièrement formée dans le délai imparti par l'article 1416, alinéa 2 du NCPC, est recevable.

 

2 - Sur le mérite :

La SA NAMUR ASSURANCES DU CREDIT indique :

- qu'il n'est pas contesté qu'après avoir versé douze loyers, la SNC BOUCICAUT a cessé tout versement, qu'ainsi, en application des dispositions de l'article 6 des conditions générales, le contrat s'est trouvé résilié et l'indemnité de résiliation est devenue exigible.

- Que l'article 1-6 des conditions générales du contrat précise que le locataire ne peut se prévaloir à l'encontre du bailleur d'une contestation quelconque portant sur le matériel pour différer ou suspendre le règlement des loyers.

- Que l'article 13 rappelle l'indépendance entre le contrat de location et l'abonnement de télésurveillance.

Et elle conclut, qu'en conséquence, l'injonction de payer doit être confirmée.

La SNC BOUCICAUT souligne que le matériel installé a été très vite défaillant, que la société CIPE a installé un second système qui lui n'a jamais fonctionné et que la seule solution était donc la résiliation du contrat.

La SNC BOUCICAUT considère que le contrat signé est nul car il ne respecte pas les règles relatives à la loi sur le démarchage, parce que, entre autres éléments : la mention obligatoire de la faculté de renonciation n'y figure pas, il n'y a pas de formulaire effectivement détachable relatif à la dénonciation.

[minute page 3] La Loi prévoit une interdiction de recevoir une contrepartie quelconque au moment du démarchage et qu'un avis de prélèvement a été signé.

La SNC BOUCICAUT affirme que la nullité du contrat principal entraîne la nullité du contrat de crédit qui lui est attaché.

Elle conclut qu'ainsi le Tribunal ne pourra que « mettre à néant » l'ordonnance portant injonction de payer.

Subsidiairement, la SNC BOUCICAUT soutient que le contrat soumis à la signature des pharmaciens est un catalogue de clauses abusives, qu'il contient huit des douze clauses jugées abusives par la Recommandation n° 91-04 de la Commission des clauses abusives relative aux contrats de location.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LE TRIBUNAL :

Attendu que la SNC BOUCICAUT a accepté l'installation dans ses locaux d'un système d'alarme avec télésurveillance.

Qu'elle a adhéré à un système par lequel le bailleur, la société SAPAR (et son mandataire de gestion, la société LOCAGESTION), a acheté au fournisseur la société CIPE le matériel souhaité, pour le mettre à la disposition de la SNC BOUCICAUT, et qu'elle a signé un contrat de location le 23 septembre 1994.

Attendu que, compte-tenu du mauvais fonctionnement du système puis de son non fonctionnement, la SNC BOUCICAUT a résilié le contrat.

Que la SA NAMUR ASSURANCES DU CREDIT, subrogée dans les droits du bailleur demande à la SNC BOUCICAUT l'application de l'article 6 du contrat qui prévoit le paiement des loyers restant dus et l'application de la clause pénale.

Attendu cependant que la SNC BOUCICAUT soutient que le contrat de location est nul pour non-respect des règles relatives à la Loi sur le Démarchage.

Mais que l'article 122-22 de la dite Loi, précise que ne sont pas soumises aux dispositions des articles 121-23 à 121-29 les « ventes, locations ou locations ventes de biens ou les prestations de services lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession ».

Que l'installation d'un système d'alarme dans une pharmacie afin d'éviter que ne surviennent de nouveaux cambriolages ou attaques dans le but de se procurer soit de l'argent soit plus vraisemblablement des substances toxiques non prescrites, a sans aucun doute possible, un rapport direct avec les activités spécifiques d'un pharmacien.

Que le Tribunal constate, en conséquence, que les règles relatives au démarchage au domicile ne s'appliquent pas, en l'espèce, et sans qu'il soit nécessaire d'évoquer les [minute page 4] différents moyens énumérés à ce titre, il déboutera la SNC BOUCICAUT de sa demande d'annulation du contrat.

Attendu, par ailleurs, que la SNC BOUCICAUT demande de substituer les dispositions légales aux clauses qu'elle considère comme abusives du contrat.

Mais que le texte en référence est une Recommandation émise par la Commission des Clauses Abusives relative aux contrats de location de certains biens immobiliers [N.B. : conforme à la minute, lire « mobiliers »] autres que les véhicules automobiles, que ce texte n'a à ce jour aucun caractère contraignant, qu'il ne peut donc en aucun cas être substitué, sans qu'il soit donc nécessaire de vérifier que les clauses du contrat en question répondent aux recommandations de ce texte.

Que, par ailleurs, le Tribunal ne pourrait prononcer la nullité de certaines clauses que si leur nullité était de droit.

Que le Tribunal déboutera donc la SNC BOUCICAUT de sa demande de modification du contrat.

Attendu donc que les dispositions de l'article 6 du contrat qui fixent les conditions dans lesquelles doivent être payées les indemnités en cas de résiliation du contrat doivent s'appliquer, le Tribunal condamnera la SNC BOUCICAUT à payer à La SA NAMUR ASSURANCES DU CREDIT la somme de 21.248,64 Francs, avec intérêts au taux légal à compter du 18 juillet 1996, date de l'assignation.

Attendu que, compte-tenu des circonstances, l'application de la clause pénale serait particulièrement injuste, le Tribunal déboutera La SA NAMUR ASSURANCES DU CREDIT de sa demande à ce titre.

 

Sur la demande au titre de l'article 700 du NCPC :

Attendu que, compte-tenu des mêmes circonstances, il ne parait pas inéquitable de laisser chaque partie supporter les frais engagés dans la présente procédure ; le Tribunal déboutera les parties de leurs demandes au titre des dispositions de l'article 700 du NCPC.

 

Sur l'exécution provisoire :

Attendu que l'exécution provisoire demandée n'est pas justifiée, le Tribunal ne l'accordera pas.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal statuant publiquement par jugement CONTRADICTOIRE en PREMIER RESSORT.

Dit la SNC BOUCICAUT recevable mais mal fondée en son opposition.

En conséquence,

Condamne la SNC BOUCICAUT à payer à La SA NAMUR ASSURANCES DU CREDIT la somme de vingt et un mille deux cent quarante nuit francs soixante quatre centimes, cette somme portant intérêts de droit à compter du 18 juillet 1996,

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires.

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

[minute page 5] Condamne la SNC BOUCICAUT aux entiers dépens dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de : 543,84 Francs TTC (App. 5,25 + Aff. 201,50 + Emol. 244,20 + TVA 92, 89) non compris le coût de l'injonction de payer : 143,27 Francs dont 24,47 Francs de TVA.

Confié lors de l'audience du 20 JANVIER 1997 à Monsieur HOMO, en qualité de Juge Rapporteur.

Puis mis en délibéré.

Délibéré par Madame MAHLER-BESSE, Messieurs THIL, HOMO et prononcé à l'audience publique où siégeaient : Monsieur Jean PUECH, PRESIDENT, Monsieur VERREY, Mesdames MAHLER-BESSE, FELACO, Messieurs THIL, HOMO, VIEILLEVIGNE, JUGES, les parties en ayant été préalablement avisées.

La minute du Jugement est signée par le Président du Délibéré et par Madame DAVOUS, Greffier.

 

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