CA PARIS (8e ch. sect. A), 3 avril 2008
CERCLAB - DOCUMENT N° 2979
CA PARIS (8e ch. sect. A), 3 avril 2008 : RG n° 06/7002
(sur pourvoi Cass. civ. 1re, 19 novembre 2009 : pourvoi n° 08-16342)
Publication : Legifrance ; Lamyline ; Jurica
Extrait : « Mais considérant que le blocage des cartes bleues est intervenu conformément aux conditions générales du contrat remis à l’intéressé qui lui sont opposables ; que la clause prévoyant le blocage de la carte ne constitue pas une clause abusive puisque le blocage faisait suite à un découvert non autorisé sur le compte personnel et un découvert dépassé sur le compte professionnel ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
HUITIÈME CHAMBRE SECTION A
ARRÊT DU 3 AVRIL 2008
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Numéro d’inscription au répertoire général : 06/07002. Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 mars 2006 - Tribunal d’Instance de PARIS 15ème - RG n° 11-05-000963
APPELANT :
Monsieur X.
née le [date] à [ville], de nationalité française, avocat, demeurant [adresse] comparant en personne assisté de Maître Lionel Z., avoué à la Cour
INTIMÉE
SA CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL « CIC »
prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège [adresse] représentée par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, avoués à la Cour, assistée de Maître Catherine A., avocat au barreau de PARIS, toque : C 2181, plaidant pour Maître Didier B., avocat au barreau de PARIS, toque : C 924.
COMPOSITION DE LA COUR : Après rapport oral de Madame Viviane GRAEVE et en application des dispositions de l’article 786 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 5 février 2008, en audience publique, l’avocat ne s’y étant pas opposés, devant et Mesdames Viviane GRAEVE, et Catherine BOUSCANT, [minute page 2] conseillères,
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Catherine BONNAN-GARÇON, conseillère faisant fonction de présidente, Madame Viviane GRAEVE, conseillère, Madame Catherine BOUSCANT, conseillère
Greffier : Lors des débats et du prononcé de l’arrêt : Madame Christiane BOUDET
ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, signé par Madame Catherine BONNAN-GARÇON, conseillère faisant fonction de présidente, et par Madame Christiane BOUDET, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
M. X. a ouvert dans les livres de la banque SA CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL un compte courant personnel et un compte courant professionnel le 4 juillet 2003.
Il a été également été souscrit une autorisation de découvert à la même date à hauteur de 2.000 €.
Le 23 juillet 2003, M. X. a souscrit un produit Filbanque particulier pour assurer la gestion de ses comptes.
Le 6 décembre 2003, le CIC a mis en demeure M. X. de remédier au solde débiteur non autorisé des comptes.
Cette demande a été renouvelée le 24 décembre 2003 et le 27 mai 2004.
Le 28 mai 2004, le CIC a porté à 3.500 € l’autorisation de découvert du compte professionnel.
Les parties ont échangé un certain nombre de lettres.
Le 13 juillet 2004, par courrier recommandé, le CIC a mis une nouvelle fois M. X. en demeure de régulariser ses comptes.
Le 2 août 2004, le CIC a dénoncé la convention de compte personnel en le mettant en demeure de payer le solde débiteur et le concours lié au compte professionnel avec préavis de 60 jours expirant le 5 octobre 2004.
Une nouvelle mise en demeure est intervenue le 25 février 2005.
[minute page 3] Le CIC, par acte des 10 octobre 2005 et 21 mars 2005, a assigné M. X. en paiement.
Par jugement du 16 mars 2006, le tribunal d’instance du 15ème arrondissement de Paris a dit valable l’assignation délivrée du 17 mars 2005, a condamné M. X. à payer à la SA CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL la somme de 8.680,04 € avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2005 et 1.000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile.
M. X. a relevé appel de cette décision le 13 avril 2006.
PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Vu les conclusions de la SA CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL du 15 janvier 2008 tendant à la confirmation du jugement déféré, au débouté de M. X. de l’ensemble de ses demandes, à la capitalisation des intérêts, à la condamnation de M. X. à lui payer une somme de 3.500 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Vu les conclusions de M. X. du 18 janvier 2008 tendant à l’annulation du jugement entrepris, subsidiairement à son infirmation, à la condamnation de la SA CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL à lui payer 10.000 € à titre de dommages intérêts pour manquement à son obligation de renseignement et inscription abusive au fichier des incidents de paiement (FICP), à sa condamnation à lui rembourser la somme de 104 € illicitement prélevée sur son compte au titre des frais de retrait, au débouté de la banque de toutes ses demandes, en tous les cas à sa condamnation à lui rembourser les sommes perçues en exécution du jugement entrepris soit 8.978,17 € et à lui payer 3.500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR :
Sur la régularité de l’assignation et du jugement :
Considérant qu’aux termes de l’article 836 du Code de procédure civile, l’assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites à l’article 856, les lieux, jour et heure de l’audience à laquelle la conciliation sera tentée si elle ne l’a déjà été et, le cas échéant, l’affaire jugée ; qu’il est constant que l’assignation délivrée le 17 mars 2005 ne comporte pas indication de la possibilité d’une tentative de conciliation entre les parties ; qu’ainsi que l’a retenu le premier juge, il ne s’agit pas d’une fin de non-recevoir mais d’une nullité de sorte qu’il appartient à celui qui l’invoque de caractériser le grief que lui cause le défaut de cette mention ; que le premier juge a retenu à juste titre que M. X. avait écrit lui-même le 2 mars 2005 : « j’attends donc l’engagement de la procédure judiciaire que vous m’annoncez au cours de laquelle j’entends faire valoir mes moyens de défense. J’estime inutile de continuer des échanges de correspondance qui n’aboutissent à rien et je vous invite désormais de vous abstenir à m’adresser du courrier que ce soit à mon cabinet ou à mon domicile vous indiquant au surplus que je ne répondrai plus que de telles lettres” et qu’il n’était donc animé d’aucune volonté de conciliation à l’égard du CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL ;
Considérant dès lors qu’il y a lieu de confirmer le jugement déféré de ce chef ;
Considérant que M. X. soulève en outre la nullité du jugement pour avoir été rendu sans aucune tentative de conciliation préalable en violation des articles 840 et 841 du Code de procédure civile ;
Considérant que l’article 458 du Code de procédure civile prévoit : « ce qui est prescrit par les articles 447, 451, 454, en ce qui concerne la mention des juges, 455 (alinéa premier) et 456 doit être observé à peine de nullité ; que la tentative de conciliation n’est pas prescrite à peine de nullité ; qu’il y a lieu en conséquence de débouter M. X. de ce chef de demande ;
[minute page 4]
Au fond :
Considérant que le CIC verse aux débats :
- la convention d’ouverture de compte courant professionnel du 4 juillet 2003,
- les conditions générales de la convention de compte,
- les conditions générales de la facilité de caisse dénommée Notimatic,
- la convention d’ouverture du compte personnel du 4 juillet 2003,
- la facilité de caisse supplémentaire consentie le 28 mai 2004,
- les relevés des comptes,
- les courriers échangés entre les parties,
- la mise en demeure du 1er février 2005 ;
Considérant qu’il est constant que le compte personnel a fonctionné à découvert pendant plus de trois mois soit à compter du 31 janvier 2004 sans que la banque ne régularise d’offre préalable de prêt de sorte qu’en application de l’article L. 311- 33 du Code de la consommation, elle doit être déchue du droit aux intérêts à compter du 30 avril 2004 ; qu’il y a lieu en conséquence de retirer de la somme réclamée les intérêts perçus après cette date soit 40,28 €, 85,48 € et 90,44 € ; que la somme due au titre du compte personnel est de 2.568,96 € ;
Considérant qu’il est constant que le compte professionnel a fonctionné au-delà du découvert autorisé de 2.000 € puis de 3.500 € pendant plus de trois mois soit à compter du 30 avril 2004 sans que la banque ne régularise d’offre préalable de prêt de sorte qu’en application de l’article L. 311-33 du Code de la consommation, elle doit être déchue du droit
aux intérêts à compter du 30 juillet 2004 ; qu’il y a lieu en conséquence de retirer de la somme réclamée les intérêts perçus après cette date soit 257,96 € ; que la somme due au titre du compte professionnel est de 5.793,60 € ;
Considérant que M. X. reproche au CIC de l’avoir informé tardivement, le 18 juin 2004 seulement, plus de deux mois après son entretien avec la banque, des nouvelles conditions d’utilisation de son compte professionnel, d’avoir refusé de l’informer du montant et des conditions d’autorisation de son découvert sur son compte personnel et de ne pas l’avoir saisi d’une offre préalable de crédit ;
Considérant que la sanction du fait que la banque n’ait pas saisi le débiteur d’une offre préalable de crédit est, ainsi qu’il ait été démontré plus haut, la déchéance du droit aux intérêts et non des dommages intérêts alloués au débiteur ;
Considérant qu’il est en outre établi que M. X. ne bénéficiait pas d’une autorisation de découvert sur son compte et que la banque ne saurait être contrainte d’en accorder une ; qu’enfin, il résulte d’une correspondance nourrie entre les parties que la banque informait régulièrement l’intéressé de l’évolution de sa situation et le sollicitait régulièrement afin d’obtenir une régularisation de ses comptes ;
Considérant que, sur l’information tardive sur le nouveau découvert consenti sur le compte professionnel, il n’est pas justifié du préjudice de M. X. dont le solde débiteur [minute page 5] excédait dès le mois d’avril 2004 le découvert autorisé de 2.000 € et même celui de 3.500 € qui lui sera accordé postérieurement ;
Considérant que M. X. conteste le montant des frais et intérêts prélevés en application de l’article 1907 du Code civil ; que cependant les contrats signés par lui mentionnent les intérêts et frais ; qu’il en est de même dans la notification remise lors de la mise en place de l’autorisation de crédit de 2.000 € et de celle de 3.500 € ; qu’en outre, il a été notifié chaque trimestre à M. X. des tickets d’agios et d’échelles intérêts versés aux débats ;
Considérant que M. X. reproche en outre à la banque d’avoir bloqué unilatéralement et sans préavis ses moyens de dépenses et fait valoir que les modifications des conditions d’utilisation des cartes bleues lui sont inopposables car unilatérales ;
Mais considérant que le blocage des cartes bleues est intervenu conformément aux conditions générales du contrat remis à l’intéressé qui lui sont opposables ; que la clause prévoyant le blocage de la carte ne constitue pas une clause abusive puisque le blocage faisait suite à un découvert non autorisé sur le compte personnel et un découvert dépassé sur le compte professionnel ;
Considérant que M. X. conteste encore la validité de son inscription au FICP au regard des dispositions du règlement numéro 2004-01 du 15 janvier 2004 ; qu’il ne saurait être contesté que la SA CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL a bien « mis des fonds à la disposition » de M. X. au sens de l’article 2 dudit règlement ; que la déclaration au FICP est régulièrement intervenue le 3 janvier 2005 avec effet au 25 janvier 2005 ; qu’elle a été précédée par une mise en demeure régulière du 16 août 2004 ; qu’ainsi le délai de régularisation a été largement respecté ;
Considérant qu’il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du Code civil ;
Considérant que les circonstances de la cause et l’équité justifient l’application de l’article 700 du Code de procédure civile ; que le jugement déféré sera confirmé de ce chef et que M. X. sera condamné à payer en outre en cause d’appel qu’une somme de 1.500 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions hormis en ce qui concerne le quantum de la demande ; statuant à nouveau de ce chef,
Condamne M. X. à payer à la SA CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL les sommes de 2.568,96 € et 5.793,60 € avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2005 ;
Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du Code civil,
Déboute M. X. de l’ensemble de ses demandes,
Condamne M. X. à payer en outre à la SA CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL la somme de 1.500 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile,
Condamne M. X. aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du Code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
- 5936 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Financement de l’activité - Conventions de compte et trésorerie
- 6050 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Exécution du contrat - Comportement des parties - Consommateur - Inexécution
- 6153 - Code civil et Droit commun - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Droit antérieur à l’ordonnance du 10 février 2016 - Extension directe sans texte