CA GRENOBLE (1re ch.), 13 novembre 2000
CERCLAB - DOCUMENT N° 3115
CA GRENOBLE (1re ch.), 13 novembre 2000 : RG n° 99/00770 ; arrêt n° 837
Publication : Juris-Data n° 135588
Extrait : « Attendu que Monsieur X. ne peut valablement soutenir qu'il n'a pas lu la clause litigieuse, clause qui est la première figurant aux conditions générales, au verso du document ; que ce document porte au recto la signature de Monsieur X., et en dessous, la mention « CONDITIONS GENERALES AU VERSO » ; qu'il ne peut soutenir, pour échapper à ses obligations, qu'il n'a pas expressément accepté cette clause ; Attendu en outre que la clause litigieuse n'est pas en contradiction avec le § IX du contrat de mandat qui prévoit la possibilité pour le mandant de vendre lui-même ou par l'intermédiaire d'une autre agence ;
Que la clause du § VI, qui prévoit seulement l'hypothèse dans laquelle l'acquéreur aurait été présenté par l'agence, ne prive pas le mandant, comme l'a justement relevé le premier juge, du droit de vendre à tout autre acquéreur ; que cette clause ne présente aucun caractère abusif au sens de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation ; qu'il n'est pas démontré qu'elle crée un quelconque déséquilibre entre le mandant et le mandataire ; qu'elle a pour objet de garantir au mandataire la rémunération de son travail ».
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 13 NOVEMBRE 2000
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 99/00770. Arrêt n° 837. Appel d'une décision (N° RG 11-97-003302) rendue par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE GRENOBLE en date du 17 décembre 1998 suivant déclaration d'appel du 22 janvier 1999.
APPELANT :
Monsieur X.
Chez M. et Madame X. [adresse], Représenté par la SCP GRIMAUD (avoués à la Cour), Assisté de Maître Didier BOUSQUET (avocat au barreau de GRENOBLE)
INTIMÉE :
Société CIMM IMMOBILIER
poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège [adresse], Représentée par Maître Hervé-Jean POUGNAND (avoué à la Cour), Assistée de Maître CHAPUIS (avocat au barreau de GRENOBLE)
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Madame Odile FALLETTI-HAENEL, Président, Madame Claude-Françoise KUENY, Conseiller, M. Jean-Pierre VIGNAL, Conseiller, Assistés lors des débats de Madame Hélène PAGANON, Greffier.
[minute page 2] DÉBATS :
A l'audience publique du 16 octobre 2000, Les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries, Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le 22 janvier 1999, Monsieur X. a interjeté appel d'un jugement du Tribunal d'Instance de GRENOBLE en date du 17 décembre 1998 qui l'a condamné à payer à la SARL CIMM IMMOBILIER la somme en principal de 30.000 francs et celle de 4.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Monsieur X. expose ce qui suit :
Désireux de vendre un appartement, il a confié à l'Agence AUBRETON le 2 décembre 1996, et à l'Agence CIMM le 20 juin 1997, un mandat de vente non exclusif.
Le 4 juillet 1997, il signe un compromis de vente par l'entremise de l'Agence AUBRETON avec les époux Y., et en informe immédiatement l'Agence CIMM IMMOBILIER.
Cette dernière lui adresse le 4 juillet un bon de visite signé par les époux Y., et lui demande le paiement de la commission prévue au mandat.
Il soutient qu'en cas de pluralité d'agents immobiliers mandataires, seul celui par l'entremise duquel l'opération a été conclue en les termes de l'article 6 de la Loi du 2 janvier 1970, a droit à commission, et qu'en prétendant que le droit à commission est acquis à celui qui a fait visiter l'immeuble, le premier juge a violé les dispositions d'ordre public de cette loi.
[minute page 3] Il fait valoir que la clause litigieuse que lui oppose la SARL CIMM IMMOBILIER figurait au verso du mandat et qu'il ne l'a pas signée.
Selon lui, cette clause aux termes de laquelle il s'interdisait de vendre sans le concours de l'agence à un acquéreur qui aurait été présenté par l'Agence CIMM IMMOBILIER pendant la durée du mandat et deux ans après son expiration, est abusive au regard de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation.
Il prétend que cette clause est incompréhensible et contradictoire avec le mandat qu'il entendait confier à l'Agence CIMM IMMOBILIER ; qu'en effet, il a choisi un mandat simple sans exclusivité ; que dans ce cas, il conserve toute liberté de vendre par lui-même ou par l'intermédiaire d'une autre agence ; qu'en insérant la clause litigieuse qui stipule le contraire, il y a volonté de faire adhérer le non-professionnel à un régime qu'il a expressément exclu ; que cette clause crée effectivement un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
A titre subsidiaire, il sollicite la saisine de la Commission des clauses abusives pour avis.
Très subsidiairement, il estime que cette clause crée un doute sur la nature du mandat confié à l'Agence CIMM IMMOBILIER : mandat exclusif ou mandat non exclusif, et qu'il doit être interprété en sa faveur, en application de l'article 1162 du Code Civil et de l'article L. 133-2 du Code de la Consommation.
Il demande à la Cour :
- de réformer le jugement déféré,
- de dire que la clause litigieuse est abusive,
- subsidiairement, de saisir pour avis la Commission des clauses abusives, et de surseoir à statuer dans l'attente de cet avis,
- plus subsidiairement, d'interpréter le contrat en disant que cette clause lui est inopposable,
- [minute page 4] de condamner la SARL CIMM IMMOBILIER à lui payer la somme de 6.000 francs au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure civile.
La SARL CIMM IMMOBILIER conclut à la confirmation de la décision déférée et au débouté de l'appelant.
Elle sollicite la somme de 8.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Elle précise qu'elle a fait visiter l'appartement le 28 juin 1997 et que le bon de visite a été adressé au vendeur par lettre recommandée du 7 juillet 1997 ; qu'elle a rappelé à celui-ci, par lettre du 8 juillet 1997, l'interdiction conventionnelle de vendre le bien sans son concours ; que Monsieur X. ne tenant pas compte de ce rappel, a réitéré la vente en octobre 1997.
Elle répond :
- que la clause litigieuse ne présente aucun caractère abusif ; qu'elle figure dans la plupart des mandats (dont celui de l’Agence AUBRETON) ; qu'elle ne fait que préserver les droits du professionnel qui a été le premier à présenter les acquéreurs au vendeur ; que Monsieur X. n'explique pas en quoi cette clause créerait un déséquilibre significatif entre les droits et obligation de chaque partie au contrat ; que contrairement à ce que prétend l'appelant, il ne s'agit pas d'un mandat exclusif déguisé ;
- que l'étude comparative des deux mandats révèle l'absence de toute différence significative entre les clauses ; que Monsieur X. n'est pas de bonne foi lorsqu'il prétend qu'il ignorait les conditions d'application du mandat de vente sans exclusivité ;
- qu'en aucun cas, cette clause ne confère au mandat simple un caractère d'exclusivité ; que cette clause n'interdit pas au vendeur de vendre directement ou par l'intermédiaire d'une autre agence à n'importe quel autre acquéreur ; que Monsieur X. a délibérément choisi de violer cette clause.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 5] MOTIFS DE LA DÉCISION :
Attendu qu'il est établi que le 2 décembre 1996, Monsieur X. a confié à l'Agence AUBRETON, par un « mandat de vente sans exclusivité », la mission de rechercher un acquéreur pour un appartement situé à [ville] ; qu'une commission de 20.000 francs a été stipulée ;
Que pareil mandat a été confié à la SARL CIMM IMMOBILIER le 20 juin 1997, avec une commission prévue de 30.000 francs ; que ce mandat comportait, au paragraphe VI - DURÉE, la clause suivante :
« Nous nous interdisons de vendre sans votre concours, à un acquéreur qui nous aurait été présenté par vous, pendant la durée du mandat et deux ans après son expiration » ;
Qu'il est constant que le 28 juin 1997 l'Agence CIMM IMMOBILIER a fait visiter l'appartement aux époux Y., en présence de Monsieur X. ;
Que cependant, un compromis de vente a été signé avec les époux Y. le 4 juillet, sans l'intervention de l'Agence CIMM IMMOBILIER ; que le 7 juillet, cette agence a adressé à Monsieur X. le bon de visite et lui a rappelé qu'il s'exposait à payer deux fois la commission ;
Attendu que Monsieur X. ne peut valablement soutenir qu'il n'a pas lu la clause litigieuse, clause qui est la première figurant aux conditions générales, au verso du document ; que ce document porte au recto la signature de Monsieur X., et en dessous, la mention « CONDITIONS GÉNÉRALES AU VERSO » ; qu'il ne peut soutenir, pour échapper à ses obligations, qu'il n'a pas expressément accepté cette clause ;
Attendu en outre que la clause litigieuse n'est pas en contradiction avec le § IX du contrat de mandat qui prévoit la possibilité pour le mandant de vendre lui-même ou par l'intermédiaire d'une autre agence ;
[minute page 6] Que la clause du § VI, qui prévoit seulement l'hypothèse dans laquelle l'acquéreur aurait été présenté par l'agence, ne prive pas le mandant, comme l'a justement relevé le premier juge, du droit de vendre à tout autre acquéreur ; que cette clause ne présente aucun caractère abusif au sens de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation ; qu'il n'est pas démontré qu'elle crée un quelconque déséquilibre entre le mandant et le mandataire ; qu'elle a pour objet de garantir au mandataire la rémunération de son travail ;
Qu'enfin, les stipulations contractuelles sont parfaitement claires; qu'il n'y a pas lieu à faire application des dispositions de l'article 1162 du Code Civil ;
Qu'en conséquence, le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions ;
Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la SARL CIMM IMMOBILIER, en cause d'appel, des frais non compris dans les dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et après en avoir délibéré conformément à la loi,
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré,
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
CONDAMNE Monsieur X. aux dépens d'appel avec application au profit de Maître POUGNAND, avoué, des dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
RÉDIGÉ par Jean-Pierre VIGNAL, Conseiller, et prononcé par Odile FALLETTI-HAENEL, Président, qui a signé avec le greffier.
- 6041 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Exécution du contrat - Contraintes d’exécution - Professionnel - Contraintes de gestion
- 6087 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Opposabilité des conditions générales - Conditions figurant sur l’écrit signé par le consommateur - Clauses de reconnaissance et d’acceptation
- 6331 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Agence immobilière - Mandat de vente ou de location