CA METZ (3e ch.), 7 avril 2011
CERCLAB - DOCUMENT N° 3206
CA METZ (3e ch.), 7 avril 2011 : RG n° 09/02519
Publication : Jurica
Extrait : « Cependant, outre que les contrats de maintenance et de location ont été conclus le même jour, les clauses du contrat de maintenance stipulent que le matériel installé et entretenu par LA FRANCAISE DES EAUX est mis à disposition dans le cadre d'un contrat de location conclu entre l'abonné et l'organisme de financement et que le montant de la redevance mensuelle stipulé au recto du contrat comprend le coût de la location d'une part, et le coût de la prestation assurée par LA FRANCAISE DES EAUX d'autre part, l'abonné autorisant la perception de la totalité de la redevance par l'établissement financier. Il s'en déduit que la location souscrite auprès de la SAS LOCAM n'a aucun sens sans les prestations d'installation du matériel contractuellement dues à l'association par la société LA FRANCAISE DES EAUX et que les dispositions contractuelles précitées caractérisent l'indivisibilité entre les contrats de maintenance et de location et ce, nonobstant les stipulations de l'article 10 susvisé du contrat de location.
Compte tenu de cette indivisibilité ou interdépendance, la clause prévue à l'article 7 du contrat de location, interdisant au locataire de se prévaloir d'un dysfonctionnement du matériel livré auprès du loueur, s'avère abusive au regard de l’article L. 132-1 du code de la consommation, dès lors qu'elle crée un déséquilibre significatif entre les parties en ayant pour effet de limiter de façon inappropriée les droits légaux du non professionnel vis-à-vis du professionnel en cas d'inexécution défectueuse par le professionnel de l'une quelconque de ses obligations contractuelles.
Il sera observé que l'association Arts martiaux et Sports de Combats est fondée à se prévaloir de la législation sur les clauses abusives, dans la mesure où l'article L.132-1 vise non seulement les consommateurs mais également les non-professionnels, et que le contrat de location d'un distributeur de boissons n'a pas de rapport direct avec l'activité de l'association.
Dans ces conditions, l'association peut utilement opposer à la SAS LOCAM l'exception tirée d'un fonctionnement défectueux du matériel qu'il lui appartient néanmoins de démontrer. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE METZ
TROISIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 7 AVRIL 2011
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G n° 09/02519.
APPELANTE :
ASSOCIATION ARTS MARTIAUX ET SPORTS DE COMBAT
prise en la personne de son Représentant Légal, Académie des Arts Martiaux et Sports de Combat, représentée par Maître Laure-Anne BAI-MATHIS, avocat à la Cour (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2010-XX/YY du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de METZ)
INTIMÉE :
SAS LOCAM
représentée par Maître Agnès BIVER-PATE, avocat à la Cour
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : Monsieur LEBROU, Président de Chambre
ASSESSEURS : Monsieur KNOLL, Conseiller, Mademoiselle KNAFF, Conseiller
GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Madame DESCHAMPS-SAR
DATE DES DÉBATS : Audience publique en date du 3 février 2011. L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 24 mars 2011, ce jour venu le délibéré a été prorogé pour l'arrêt être rendu le 7 avril 2001.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Par acte sous-seing privé du 12 décembre 2003, la SAS LOCAM a donné à bail pour une durée de cinq ans à l'association Arts martiaux et Sports de Combats, prise en la personne de son représentant légal, un distributeur de boissons VEGA 600, fourni par la société LA FRANCAISE DES EAUX, moyennant le versement d'une redevance mensuelle d'un montant de 209,30 euros TTC.
Par contrat du même jour, l'association Arts martiaux et Sports de Combats, prise en la personne de son représentant légal, a confié à la SAS LA FRANCAISE DES EAUX la maintenance du distributeur de boissons pris à bail auprès de la SAS LOCAM.
Le procès-verbal de réception du matériel a été signé par M. X., es qualité de président de l'association Arts martiaux et Sports de Combats, le 7 janvier 2004.
Par lettre recommandée réceptionnée le 10 août 2005, la SAS LOCAM a mis l'association Arts martiaux et Sports de Combats en demeure de régler les mensualités échues impayées de mai, juin et juillet 2005 sous peine de déchéance du terme.
Par déclaration enregistrée au greffe le 18 avril 2006, l'association Arts martiaux et Sports de Combats, prise en la personne de son représentant légal, a formé opposition à l'ordonnance rendue le 13 février 2006 par le Tribunal d'instance de HAYANGE lui ayant enjoint de payer à la SAS LOCAM la somme principale de 9.208,60 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2005, au titre du contrat de location du distributeur de boissons.
Au cours de l'instance sur opposition, la SAS LOCAM a sollicité la condamnation de l'association Arts martiaux et Sports de Combats au paiement, avec exécution provisoire, des sommes de 9.208,60 euros en principal et 920,86 euros au titre de la clause pénale, avec intérêts au taux légal à compter du 13 février 2006.
L'association Arts martiaux et Sports de Combats a conclu au débouté des demandes et, reconventionnellement, à la condamnation de la SAS LOCAM à lui verser la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour inexécution fautive des obligations contractuelles et celle de 1.000 euros en application de l'article 700 du NCPC.
Par jugement du 7 septembre 2007, le tribunal d'instance de HAYANGE a :
- déclaré recevable l'opposition à injonction de payer ;
- condamné l'association Arts martiaux et Sports de Combats à payer à la SAS LOCAM les sommes de :
* 9.208,60 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2006,
* 920,86 euros, avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;
- débouté l'association Arts martiaux et Sports de Combats de ses prétentions reconventionnelles ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- condamné l'association Arts martiaux et Sports de Combats aux dépens, y compris ceux de la procédure d'injonction de payer n° 21.06.14.
Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu que les clauses du contrat de location excluaient toute obligation d'entretien à la charge du loueur ; que par ailleurs, en signant le bail, le locataire avait renoncé à exercer tout recours contre le loueur ; qu'ainsi, en dépit des attestations fournies aux débats concernant le mauvais fonctionnement du distributeur de boissons, l'association Arts martiaux et Sports de Combats n'était pas fondée à se prévaloir du fonctionnement défectueux de la machine prise à bail pour suspendre le paiement des loyers ; qu'en outre, la lettre de l'association Arts martiaux et Sports de Combats adressée le 2 septembre 2005 à la SAS LOCAM révélait que les loyers avaient cessé d'être réglés en raison de difficultés financières ; que dès lors, aucun manquement contractuel ne pouvant être reproché à la SAS LOCAM, celle-ci était bien fondée à résilier le bail suite au défaut de paiement des loyers.
Par déclaration enregistrée au greffe le 8 octobre 2007, l'association Arts martiaux et Sports de Combats a interjeté appel de cette décision par le biais de son conseil, Maître BAI-MATHIS.
Par décision du 17 mars 2008, le conseiller de la mise en état a ordonné la radiation de l'affaire en application de l'article 915 du CPC.
Par conclusions déposées le 27 juillet 2009, la SAS LOCAM a repris l'instance et demandé à cette Cour de confirmer le jugement entrepris et de condamner l'appelante aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 600 euros en application de l'article 700 du CPC.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 avril 2010 sans que l'association Arts martiaux et Sports de Combats ait déposé de conclusions justificatives d'appel et l'affaire a été mise en délibéré au 1er juillet 2010 à l'issue de l'audience de plaidoiries du 6 mai 2010.
Par courrier enregistré par le greffe de cette juridiction le 26 mai 2010, M. X., es qualité de Président de l'association Arts martiaux et Sports de Combats, a sollicité la « révision de l'affaire citée en référence du courrier ci-joint dans le but d'obtenir un effacement de la dette » envers la SAS LOCAM qu'il conteste.
Par arrêt avant-dire-droit du 1er juillet 2010, cette juridiction a ordonné la réouverture des débats afin de permettre à l'association Arts martiaux et Sports de Combats de déposer un dossier de demande d'aide juridictionnelle et renvoyé l'affaire à une audience de mise en état.
Par conclusions déposées le 27 janvier 2011, l'association Arts martiaux et Sports de Combats, prise en la personne de son représentant légal, conclut à l'infirmation du jugement entrepris, au débouté des prétentions de la SAS LOCAM, subsidiairement à la réduction de l'indemnité de 10% à l'euro symbolique, et à la condamnation de la SAS LOCAM aux dépens des deux instances.
Aux termes de ses dernières écritures déposées le 3 février 2011, la SAS LOCAM demande à cette Cour de confirmer la décision déférée et de condamner l'association Arts martiaux et Sports de Combats aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du CPC.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
L'article 10 des conditions générales du contrat de location, dont l'association Arts martiaux et Sports de Combats a reconnu avoir connaissance en acceptant la location, stipule que le locataire est rendu attentif à l'indépendance juridique existant entre le contrat de location et le contrat de prestation maintenance entretien dont les difficultés d'exécution ne sauraient justifier le non paiement des loyers.
L'article 7 précise que si le bien est atteint de vices rédhibitoires ou cachés ou en cas de détérioration ou de fonctionnement défectueux, de mauvais rendement ou dommages quelconques causés par ce bien, le locataire renonce à tout recours contre le loueur, que ce soit pour obtenir des dommages et intérêts, la résiliation ou la résolution du contrat et ne pourra différer au prétexte de cette contestation aucun règlement de loyer.
Cependant, outre que les contrats de maintenance et de location ont été conclus le même jour, les clauses du contrat de maintenance stipulent que le matériel installé et entretenu par LA FRANCAISE DES EAUX est mis à disposition dans le cadre d'un contrat de location conclu entre l'abonné et l'organisme de financement et que le montant de la redevance mensuelle stipulé au recto du contrat comprend le coût de la location d'une part, et le coût de la prestation assurée par LA FRANCAISE DES EAUX d'autre part, l'abonné autorisant la perception de la totalité de la redevance par l'établissement financier.
Il s'en déduit que la location souscrite auprès de la SAS LOCAM n'a aucun sens sans les prestations d'installation du matériel contractuellement dues à l'association par la société LA FRANCAISE DES EAUX et que les dispositions contractuelles précitées caractérisent l'indivisibilité entre les contrats de maintenance et de location et ce, nonobstant les stipulations de l'article 10 susvisé du contrat de location.
Compte tenu de cette indivisibilité ou interdépendance, la clause prévue à l'article 7 du contrat de location, interdisant au locataire de se prévaloir d'un dysfonctionnement du matériel livré auprès du loueur, s'avère abusive au regard de l’article L. 132-1 du code de la consommation, dès lors qu'elle crée un déséquilibre significatif entre les parties en ayant pour effet de limiter de façon inappropriée les droits légaux du non professionnel vis-à-vis du professionnel en cas d'inexécution défectueuse par le professionnel de l'une quelconque de ses obligations contractuelles.
Il sera observé que l'association Arts martiaux et Sports de Combats est fondée à se prévaloir de la législation sur les clauses abusives, dans la mesure où l'article L.132-1 vise non seulement les consommateurs mais également les non-professionnels, et que le contrat de location d'un distributeur de boissons n'a pas de rapport direct avec l'activité de l'association.
Dans ces conditions, l'association peut utilement opposer à la SAS LOCAM l'exception tirée d'un fonctionnement défectueux du matériel qu'il lui appartient néanmoins de démontrer.
Or, en l'occurrence, les attestations établies au cours des mois de mai et juin 2006 relatant que le distributeur de boissons était souvent en panne ne suffisent pas à rapporter cette preuve, eu égard à l'absence de toute réclamation écrite relative au fonctionnement de l'appareil postérieurement à la signature du procès-verbal de réception et surtout, du courrier adressé le 2 septembre 2005 à la SAS LOCAM par l'association faisant état de difficultés de trésorerie, et non d'un quelconque problème technique, et sollicitant des délais de paiement.
Aussi, la SAS LOCAM était en droit de résilier le contrat de location de façon anticipée suite à la cessation du paiement des redevances par l'association en application de l'article 12 des conditions générales, stipulant qu'outre la restitution du matériel, le locataire devra verser au loueur une somme égale au montant des loyers impayés au jour de la résiliation majorée d'une clause pénale de 10 % ainsi qu'une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'à la fin du contrat telle que prévue à l'origine majorée d'une clause pénale de 10 %.
La créance de la SAS LOCAM au titre des trois redevances impayées de mai à juillet 2005 et des 41 restant à échoir est justifiée à concurrence de la somme totale de 9.208,60 euros.
La clause pénale de 10 % s'avère en revanche manifestement excessive, le préjudice subi par la SAS LOCAM du fait de la résiliation anticipée étant réparé par la condamnation de l'association Arts martiaux et Sports de Combats au paiement de l'intégralité des redevances à échoir jusqu'au terme du contrat. Elle sera donc réduite à la somme de un euro.
En conséquence, il convient d'infirmer le jugement entrepris sur le quantum de la condamnation prononcée à l'encontre de l'association Arts martiaux et Sports de Combats et, statuant à nouveau dans cette limite et par substitution de motifs, de condamner l'association à payer à la SAS LOCAM la somme de 9.209,60 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2006, date de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer.
L'association Arts martiaux et Sports de Combats, partie perdante pour l'essentiel, supportera les dépens d'appel.
Enfin, eu égard à la situation économique de l'association, bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la SAS LOCAM, qui succombe au demeurant partiellement, les frais par elle exposés à hauteur de Cour et non compris dans les dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
INFIRME le jugement entrepris sur le quantum de la condamnation au paiement prononcée à l'encontre de l'association Arts martiaux et Sports de Combats, prise en la personne de son représentant légal ;
Statuant à nouveau dans cette limite et par substitution de motifs,
CONDAMNE l'association Arts martiaux et Sports de Combats, prise en la personne de son représentant légal, à payer à la SAS LOCAM la somme de 9.209,60 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2006 ;
DEBOUTE la SAS LOCAM du surplus de sa demande en paiement au titre du contrat de location ;
CONFIRME le jugement entrepris sur le surplus ;
CONDAMNE l'association Arts martiaux et Sports de Combats, prise en la personne de son représentant légal, aux dépens d'appel ;
DIT n'y avoir lieu au prononcé d'une condamnation en application de l'article 700 du CPC.
Le présent arrêt a été prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le7avril 2011 par Monsieur LEBROU, Président de Chambre, assisté de Madame DESCHAMPS-SAR, Greffier, et signé par eux.
- 5859 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Protection explicite
- 5929 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Mise à disposition d’un distributeur de boissons
- 6138 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Indivisibilité ou divisibilité conventionnelle
- 6311 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Distributeur de boissons (mise à disposition)