CA PAU (1re ch.), 12 septembre 2011
CERCLAB - DOCUMENT N° 3459
CA PAU (1re ch.), 12 septembre 2011 : RG n° 10/00742 ; arrêt n° 11/3696
Publication : Jurica
Extrait : « Aux termes de l'article 2-3 des conditions générales du contrat d'irrigation, le contrat peut être résilié par la CACG, notamment pour manquement aux obligations du souscripteur, comme en cas de retard de paiement. En effet, en cas d'inexécution par le souscripteur de l'une des obligations mises à sa charge par le présent contrat ou par une convention particulière ou accessoire, la CACG pourra interrompre la fourniture d'eau ou résilier le contrat de plein droit, huit jours après mise en demeure par lettre recommandée restée sans effet. Le contrat sera alors partiellement suspendu pour ce qui est des obligations de la CACG et ce jusqu'à l'exécution par le souscripteur de ses obligations ou bien jusqu'à la résiliation du contrat.
Si M. X., exploitant agricole, ne peut se prévaloir des dispositions de l’article L. 132-1 du Code de la Consommation du chef d'une clause stipulée dans un contrat conclu pour les besoins de l'exercice de son activité professionnelle, un contrôle judiciaire de la validité de la clause est cependant possible sur le fondement de l’article 1135 du Code Civil aux termes duquel les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature.
En l'espèce, le délai de régularisation de huit jours imposé par le contrat à peine de résiliation de plein droit n'est pas disproportionné ou excessif au regard de l'économie générale de la convention et des nécessités de l'exploitation d'un réseau d'irrigation qui implique une surveillance et une réactivité constantes de la part du gestionnaire auquel la brièveté du délai contractuel de régularisation garantit une réponse immédiate de ses cocontractants. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PAU
PREMIÈRE CHAMBRE
ARRÊT DU 12 SEPTEMBRE 2011
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Dossier : 10/00742. Numéro 11/3696. Nature affaire : Demande en exécution formée par le client contre le prestataire de services.
ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 12 septembre 2011, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
APRES DÉBATS à l'audience publique tenue le 2 mai 2011, devant : Madame PONS, Président, Monsieur CASTAGNE, Conseiller, magistrat chargé du rapport conformément à l’article 785 du code de procédure civile, Madame SORONDO, Vice-Président placé, désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 28 janvier 2011, assistés de Madame PEYRON, Greffier, présente à l'appel des causes.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi, dans l'affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur X.
représenté par la SCP MARBOT / CREPIN, avoués à la Cour, assisté de Maître MONROUX, avocat au barreau de LIBOURNE
INTIMÉE :
SA COMPAGNIE D'AMÉNAGEMENT DES COTEAUX DE GASCOGNE
représentée par la SCP P. et C. LONGIN / P. LONGIN-DUPEYRON / O. MARIOL, avoués à la Cour, assistée de Maître LARROZE, avocat au barreau de TARBES
sur appel de la décision en date du 27 JANVIER 2010 rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TARBES
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
La Compagnie d'Aménagement des Coteaux de Gascogne (ci-après CACG), société d'économie mixte, a reçu de l'Etat mission de réaliser et de gérer, par la mise en place de contrats d'abonnement, des réseaux d'irrigation collectifs desservant des exploitations agricoles.
Dans ce cadre, M. X., propriétaire exploitant à [ville M.] a conclu courant 1990 des contrats de fourniture d'eau d'irrigation pour lesquels lui ont été confiés des appareils dénommés « manchettes », équipés de limiteurs afin de garantir la livraison d'un débit égal à celui de la prise considérée.
A la suite de la mise en place d'un nouveau réseau d'irrigation courant 2000-2001, les parties ont conclu :
- le 23 mai 2002, un contrat n° 2002 XX prévoyant notamment de nouvelles conditions générales,
- le 21 juin 2005, un contrat portant le même numéro, prévoyant l'attribution de sept bornes d'irrigation et de quatre manchettes d'un débit de 12 litres/seconde.
Le 11 juillet 2006, un contrôle d'un préposé de la CACG mettait en évidence l'utilisation par M. X. d'une manchette supplémentaire, faisant partie du lot initialement attribué à ce dernier et non restituée à l'occasion de la conclusion des nouveaux abonnements, permettant le prélèvement d'une quantité d'eau supplémentaire sans la payer.
Le 13 juillet 2006, la CACG notifiait à M. X. une pénalité de 11.464,90 euros dont le non-paiement entraînait la délivrance, le 22 août 2006, d'une mise en demeure, demeurée vaine.
La CACG notifiait à M. X., le 21 décembre 2006, la résiliation du contrat, à effet du 31 décembre 2006, et elle procédait le 30 janvier 2007 au démantèlement des bornes d'irrigation.
Par ordonnance du 3 juillet 2007, le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Tarbes ordonnait le rétablissement de la distribution d'eau et instituait une mesure d'expertise.
Le 13 mai 2008, M. X. a fait assigner la CACG devant le Tribunal de Grande Instance de Tarbes en réparation :
- d'une part du préjudice résultant d'une prétendue violation grave et répétée de son droit de propriété dans le cadre de l'exécution du contrat d'abonnement,
- d'autre part du préjudice résultant de la résiliation prétendument abusive du contrat d'abonnement.
Par jugement du 27 janvier 2010, le Tribunal de Grande Instance de Tarbes a :
- dit qu'il n'y a pas eu de violation de la propriété de M. X.,
- dit que les relations contractuelles sont régies par le contrat du 23 mai 2002 et son avenant du 21 juin 2005,
- dit que la fraude résultant de l'utilisation de la manchette 7260 est établie par l'attestation du préposé de la CACG contre lequel aucune procédure de faux n'est engagée,
- dit qu'en l'absence de paiement de la pénalité prévue en cas de fraude, la résiliation du contrat a été régulièrement prononcée le 31 décembre 2006,
- débouté M. X. de ses demandes,
- condamné M. X. à payer à la CACG la somme de 12.611,39 euros au titre de la pénalité contractuelle et des majorations de retard et celle de 1.500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.
M. X. a interjeté appel de cette décision selon déclaration enregistrée au greffe de la Cour le 19 février 2010.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du magistrat de la mise en état en date du 4 janvier 2011.
Dans ses dernières conclusions déposées le 20 mai 2010, M. X. demande à la Cour, réformant le jugement entrepris :
- de constater que les parties étaient liées par un contrat de droit privé de fourniture d'irrigation signé le 21 juin 2005 pour une durée de cinq ans suivant des conditions générales et particulières faisant leur loi au sens de l’article 1134 du Code Civil,
- de dire abusive la clause 2-3 limitant à huit jours le préavis avant interruption de la fourniture d'eau ou résiliation de plein droit et d'en supprimer les effets,
- de dire inefficace et sans portée la résiliation du contrat daté du 24 avril 2002 et remplacé par la volonté des parties,
- de dire sans fondement et fautive la résiliation du contrat du 21 juin 2005 en l'absence de preuve par la CACG de l'inexécution par l'usager de l'une ses obligations mises à sa charge,
- de constater qu'il a réglé les quantités d'eau consommées et facturées,
- de dire que le contrat 2002 XX du 21 juin 2005 annulant et remplaçant le contrat portant le même numéro du 24 avril 2002 emporte ses pleins et entiers effets,
- de constater que par ordonnance de référé du 3 juillet 2007 la CACG a été condamnée à rétablir sous astreinte le circuit de distribution d'eau et qu'elle s'est exécutée avec retard, occasionnant le versement de l'astreinte,
- de confirmer le rétablissement de la fourniture d'eau ordonné en référé,
- d'ordonner la remise des fonds par lui consignés et de condamner la CACG au paiement des intérêts légaux à compter du 4 juillet 2007 et jusqu'à rétablissement effectif,
- de condamner la CACG à lui payer au titre des indemnités légales et contractuelles, en contrepartie des servitudes par lui concédées, la somme de 26.000 euros pour la période comprise entre 1996 et 2008, outre une indemnité annuelle révisable de 2.000 euros payable le 20 octobre de chaque année,
- de condamner la CACG à lui payer les sommes de 26.192,71 euros en réparation de son préjudice économique et de 5.000 euros en réparation de son préjudice moral, outre la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens avec autorisation pour la SCP Marbot - Crépin, Avoués à la Cour, de procéder au recouvrement des dépens d'appel conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.
Il soutient en substance :
- qu'en l'absence de tout écrit, la seule non-opposition du propriétaire-exploitant ne peut emporter renonciation au bénéfice de l'indemnité légalement due par la compagnie du chef de l'utilisation du sol et du sous-sol pour les besoins de son activité, utilisation qui doit par l'effet même de la loi être compensée par le versement spontané d'une indemnité,
- que la résiliation d'un contrat à exécution successive suppose, par application des articles 1134 et 1184 du Code Civil, une mise en demeure préalable et la preuve d'une faute ou d'une inexécution fautive, conditions non établies en l'espèce dès lors :
* que la clause fixant un délai de préavis de huit jours seulement pour la mise en œuvre d'une résiliation de plein droit doit être considérée comme abusive au regard de ses conséquences excessives quant à la pérennité de l'exploitation et de l'absence de tout contrôle judiciaire,
* que la preuve de la fraude ne peut être considérée comme rapportée sur la seule base des « constatations » non contradictoires d'un préposé de la CACG alors même que l'expert judiciaire a précisé qu'il était impossible de conclure sur la nature frauduleuse de la surconsommation, dans la mesure où la vente d'eau est fondée sur le volume consommée et non sur le débit instantané prélevé,
* que la résiliation porte sur un contrat qui n'était plus en vigueur pour avoir été annulé et remplacé par un contrat postérieur.
Dans ses dernières conclusions déposées le 9 novembre 2010, la CACG conclut à la confirmation de la décision entreprise et sollicite la condamnation de M. X. à lui payer la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens.
Elle soutient pour l'essentiel :
- qu'elle intervient sous le bénéfice des dispositions de l’article L. 152-3 du Code Rural et que M. X. ne peut prétendre qu'il y a eu une violation de sa propriété génératrice d'un préjudice puisqu'il ne s'est pas opposé et a donné son accord à l'implantation des canalisations enfouies dans sa propriété,
- que la matérialité de la fraude est établie par le procès-verbal et l'attestation du contrôleur contractuellement habilité à accéder aux ouvrages, que la clause résolutoire n'est pas abusive et a été régulièrement mise en œuvre et qu'elle n'a généré aucun préjudice ainsi que l'a constaté l'expert judiciaire,
- que le contrat de 2005 n'est qu'un avenant au contrat initial de 2002 qui conservait sa validité jusqu'au 31 décembre 2006 en conservant les mêmes références, le contrat de 2005 ayant pour objet d'annuler et remplacer les conditions particulières en ce qui concerne le débit d'une manchette.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
I - Sur la demande d'indemnité au titre de l'utilisation du sol et du sous-sol de la propriété de M. X. :
M. X. soutient que la CACG a commis une double atteinte à son droit de propriété en procédant sans avoir recueilli son consentement écrit à l'enfouissement de canalisations d'irrigation et en circulant sur sa propriété sans égard pour la seule mission de contrôle et de relevé des compteurs.
Le défaut d'établissement d'un acte authentique de constitution de servitude de passage de canalisation d'irrigation (dont la CACG verse aux débats copie d'un acte conclu avec des tiers au titre de la construction du réseau d'irrigation de B. qui dessert la propriété de l'appelant) est sans incidence sur la régularité de l'implantation par la CACG de canalisations sur le fonds X. dès lors :
- qu'en souscrivant un abonnement pour fourniture d'eau d'irrigation, M. X. a implicitement mais nécessairement accepté que soient mis en place sur sa propriété les moyens matériels et notamment les canalisations permettant d'amener l'eau aux parcelles à irriguer,
- qu'en toute hypothèse, la servitude de passage pour canalisations d'irrigation est une servitude légale consacrée par l’article L. 152-3 du Code Rural aux termes duquel il est institué au profit de collectivités publiques et de leurs concessionnaires ainsi qu'au profit des établissements publics, une servitude leur conférant le droit d'établir à demeure, dans les conditions les plus rationnelles et les moins dommageables à l'exploitation présente et future, en vue de l'irrigation, des canalisations souterraines dans les terrains privés non bâtis.
Par ailleurs, il n'est justifié d'aucun comportement outrepassant les prérogatives contractuellement reconnues à la CACG au titre du contrôle et de la police du réseau par les conditions générales du contrat de fourniture d'eau d'irrigation souscrit par l'appelant qui stipulent :
- en leur article 9, que dans l'intérêt de l'ensemble des usagers, la compagnie assume la responsabilité de la police des réseaux, notamment la constatation des anomalies de fonctionnement et le relevé des compteurs dont le contrôle est assuré par des agents de la compagnie assermentés à cet effet et habilités à constater les infractions et à percevoir les pénalités correspondantes,
- en leur article 13 qu'indépendamment des servitudes constituées au profit de la compagnie, l'abonné s'engage à donner libre accès aux ouvrages ainsi qu'aux parcelles irriguées.
Dès lors M. X. ne peut solliciter indemnisation qu'au titre des articles L. 152-3 et L. 152-4 du Code Rural qui disposent que les servitudes de passage de conduites d'irrigation ouvrent droit à indemnité et que les contestations relatives au règlement de ladite indemnité sont jugées comme en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique.
Il convient à cet égard d'observer que la CACG ne conteste pas la recevabilité de la demande présentée de ce chef par M. X. devant la juridiction civile de droit commun.
Aucun élément du dossier ne permet de caractériser une renonciation, même tacite mais univoque, de M. X. au bénéfice des dispositions de l'article L. 152-4 du Code Rural, alors même qu'une telle renonciation ne peut se déduire de sa seule absence d'opposition à la réalisation des travaux d'installation d'un réseau pour laquelle l'exploitant bénéficie d'une servitude légale et dont il convient de rappeler que l'utilisation par l'appelant revêt un caractère onéreux.
Il résulte du rapport d'expertise judiciaire établi par M. P., dont la mission consistait notamment à décrire les conditions dans lesquelles la CACG aurait implanté dans le tréfonds X. une ou plusieurs canalisations :
- que la modernisation du réseau d'irrigation desservant les parcelles de M. X. a nécessité l'enfouissement de canalisations le long du tracé du réseau,
- que ces canalisations, d'un diamètre de 140 mm suivent un cheminement en limite des parcelles de l'appelant, sur une distance globale de 915 mètres, desservant huit bornes d'irrigation dont six sont attribuées à M. X.,
- que les travaux d'enfouissement d'une canalisation d'irrigation de diamètre 140 nécessitent la réalisation d'une tranchée d'environ 1 mètre de largeur et de profondeur et que le débardage des tuyaux et la pose demandent en général un espace libre autour de la tranchée de 3 mètres environ pour l'accès des engins de chantier.
L'indemnité prévue par l'article L. 152-4 du Code Rural prend la forme d'un capital destiné à compenser de manière définitive la moins-value résultant de la présence des canalisations souterraines et non celle d'une redevance périodique et elle sera en l'espèce, évaluée à la somme de 200 euros, au vu des justificatifs des accords de règlement amiable versés aux débats par la CACG, relatifs à des constitutions de servitudes afférentes au réseau d'irrigation litigieux (cf. en particulier l'acte authentique du 27 novembre 2002 prévoyant une indemnité de 284 euros pour une servitude instituée sur une distance de plus de 1.500 mètres).
II - Sur la contestation de la résiliation du contrat d'irrigation :
M. X. conteste la validité de la résiliation du contrat d'irrigation prononcée par la CACG en raison du caractère abusif de la clause de résiliation de plein droit mise en œuvre par la CACG, de l'irrégularité de la résiliation prétendument notifiée au titre d'un contrat devenu caduque et du défaut de justification des griefs invoqués par la CACG.
Sur la nature prétendument abusive de la clause de résiliation de plein droit du contrat d'irrigation :
Aux termes de l'article 2-3 des conditions générales du contrat d'irrigation, le contrat peut être résilié par la CACG, notamment pour manquement aux obligations du souscripteur, comme en cas de retard de paiement. En effet, en cas d'inexécution par le souscripteur de l'une des obligations mises à sa charge par le présent contrat ou par une convention particulière ou accessoire, la CACG pourra interrompre la fourniture d'eau ou résilier le contrat de plein droit, huit jours après mise en demeure par lettre recommandée restée sans effet. Le contrat sera alors partiellement suspendu pour ce qui est des obligations de la CACG et ce jusqu'à l'exécution par le souscripteur de ses obligations ou bien jusqu'à la résiliation du contrat.
Si M. X., exploitant agricole, ne peut se prévaloir des dispositions de l’article L. 132-1 du Code de la Consommation du chef d'une clause stipulée dans un contrat conclu pour les besoins de l'exercice de son activité professionnelle, un contrôle judiciaire de la validité de la clause est cependant possible sur le fondement de l’article 1135 du Code Civil aux termes duquel les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature.
En l'espèce, le délai de régularisation de huit jours imposé par le contrat à peine de résiliation de plein droit n'est pas disproportionné ou excessif au regard de l'économie générale de la convention et des nécessités de l'exploitation d'un réseau d'irrigation qui implique une surveillance et une réactivité constantes de la part du gestionnaire auquel la brièveté du délai contractuel de régularisation garantit une réponse immédiate de ses cocontractants.
Sur la validité même de la résiliation prononcée par la CACG :
La mise en demeure préalable à la résiliation du contrat a été signifiée par une lettre recommandée avec avis de réception du 21 décembre 2006 ainsi rédigée : « A ce jour, nous constatons que vous n'avez effectué aucun règlement tant au titre de la facture 90 XX de juillet 2006 portant pénalité (voir notre courrier du 24 novembre 2006 adressé à votre avocat) pour un montant de 12.611,39 euros TTC qu'au titre de la facture 2011 38XX de novembre 2006 relative à la facture d'eau pour un montant de 24.989,35 euros TTC. Nous vous mettons en demeure de nous régler la somme totale de 37.600,74 euros TTC avant le 31 décembre 2006. Passé cette date et sans autre préavis de notre part, nous procéderons à la résiliation automatique de votre contrat 2002 XX signé le 23 mai 2002. »
M. X. conteste l'efficacité de la résiliation prononcée par la CACG sur le fondement de cette mise en demeure en soutenant que le contrat du 23 mai 2002 auquel ce document fait référence est devenu caduque par l'effet de la signature les 7 et 21 juin 2005 d'un nouveau contrat l'annulant et le remplaçant.
Il résulte cependant de l'analyse des documents contractuels versés aux débats que le contrat de 2005 ne constitue qu'un simple avenant (comme expressément stipulé) au contrat précédent, actualisant d'une part l'article 3 des conditions générales relatives au débit souscrit, aux quotas d'eau et au tarif de dépassement des quotas et d'autre part les conditions particulières quant à la quantité de débit souscrit par l'agriculteur sur l'une des manchettes mises à sa disposition.
La volonté univoque des parties de maintenir la continuité des relations contractuelles instaurée par la convention de 2002 se déduit de la double identité de numérotation et de durée des conventions dont s'agit, la date d'expiration de la convention de 2005, stipulée d'une durée de cinq ans, étant ainsi fixée à la date d'expiration du contrat de 2002, soit le 31 décembre 2006.
Sur le bien-fondé de la résiliation :
La résiliation du contrat d'irrigation a été prononcée par la CACG sur le fondement du non-paiement de la facture de pénalités éditée au titre de l'utilisation frauduleuse d'une manchette non restituée lors de la rénovation du réseau d'irrigation intervenue courant 2001.
La CACG a procédé à la résiliation sur le fondement d'un procès-verbal de constat d'infraction établi le 11 juillet 2006 par M. F., agent assermenté, aux termes duquel il est indiqué que M. X. utilisait la manchette n° 7260 02 sur la borne 308 d'un débit de 10 litres/seconde qu'il n'avait pas sur son contrat, tout en utilisant les quatre autres manchettes (104, 105, 106 et 107) qui, elles, sont sur son contrat, que la manchette 7260 02 aurait dû être restituée en 2002 avant la campagne d'irrigation.
Le contrôle opéré par l'agent de la CACG a été réalisé dans le respect des stipulations contractuelles aux termes desquelles (article 12 des conditions générales) indépendamment des servitudes constituées au profit de la CACG, le client s'engage à donner libre accès aux ouvrages et, (article 7), il appartient à chaque bénéficiaire d'utiliser les équipements conformément à leur destination et aux règles prescrites et la CACG assure la surveillance des réseaux, notamment la constatation des anomalies de fonctionnement, ses agents sont habilités à constater les infractions.
Ce procès-verbal - qui n'a pas la force probante d'un procès-verbal établi par un officier ou agent de police judiciaire - est cependant en l'espèce corroboré :
- par une attestation confirmative, non spécialement arguée de faux, établie le 31 mars 2007 par M. F., aux termes de laquelle ce dernier indique qu'il a pu constater que M. X. avait branché sur la borne 308 la manchette portant le n° 7260.02 qui ne lui est pas attribuée par le contrat en cours et y prélevait un débit de 10l/s, que M. X. utilisait en même temps les quatre autres manchettes incluses dans le contrat et portant les n° 104, 105, 106 et 107, que la manchette utilisée à tort aurait dû être restituée en 2002 et que M. F. a fermé la borne 308 et récupéré la manchette indûment utilisée,
- par l'examen de l'exemplaire des clauses particulières du 21 mai 1997 duquel il résulte qu'une manchette 7260 02 était effectivement attribuée à M. X., dont celui-ci ne justifie pas de la restitution à la CACG.
Il y a lieu dans ces conditions de considérer que la CACG rapporte suffisamment la preuve de l'existence et de la gravité du grief allégué à l'encontre de M. X., justifiant la résiliation du contrat à ses torts exclusifs dès lors que l'utilisation d'une manchette indûment conservée constitue une fraude manifeste.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a dit qu'en l'absence de paiement de la pénalité prévue en cas de fraude, la résiliation du contrat a été régulièrement prononcée le 31 décembre 2006, a débouté M. X. de ses demandes indemnitaires et l'a condamné à payer à la CACG la somme de 12.611,39 euros au titre de la pénalité contractuelle et des majorations de retard, somme exactement calculée sur la base des dispositions contractuelles applicables.
L'équité ne commande pas en l'espèce de faire application de l’article 700 du Code de procédure civile en faveur de l'une quelconque des parties, tant en première instance qu'en cause d'appel.
M. X. sera condamné aux entiers dépens d'appel et de première instance.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Vu le jugement du Tribunal de Grande Instance de Tarbes en date du 27 janvier 2010,
En la forme, déclare l'appel de M. X. recevable,
Au fond,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :
- dit que la résiliation du contrat de fourniture d'eau d'irrigation a été régulièrement prononcée par la Compagnie d'Aménagement des Coteaux de Gascogne le 31 décembre 2006,
- débouté M. X. de ses demandes indemnitaires pour résiliation abusive,
- condamné M. X. à payer à la Compagnie d'Aménagement des Côteaux de Gascogne la somme de 12.611,39 euros (douze mille six cent onze euros trente neuf centimes) au titre de la pénalité contractuelle et des majorations de retard,
Réformant la décision déférée pour le surplus :
- Condamne la Compagnie d'Aménagement des Côteaux de Gascogne à payer à M. X., en application de l’article L. 152-4 du Code Rural, la somme de 200 euros à titre d'indemnité compensatrice de la servitude de passage de canalisations d'irrigation sur son fonds,
- Dit n'y avoir lieu à application de l’article 700 du Code de procédure civile en faveur de l'une quelconque des parties tant en ce qui concerne les frais irrépétibles exposés en première instance que ceux exposés en cause d'appel,
Condamne M. X. aux entiers dépens d'appel et de première instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.
Le présent arrêt a été signé par Mme Pons, Président, et par Mme Peyron, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Mireille PEYRON Françoise PONS
- 5926 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Fourniture d’eau
- 6155 - Code civil et Droit commun - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Droit antérieur à l’ordonnance du 10 février 2016 - Ancien art. 1135 C. civ.
- 6314 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Eau (fourniture) - Obligations du consommateur
- 6391 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs - Économie du contrat