CASS. COM., 18 octobre 2011
CERCLAB - DOCUMENT N° 3511
CASS. COM., 18 octobre 2011 : pourvoi n° 10-15296
Publication : Legifrance ; Bull. civ.
Extrait : « Attendu que l’action en répétition exercée sur le fondement de ces textes par le ministre chargé de l’économie suppose seulement la constatation d’un avantage indu reçu par le distributeur du fournisseur ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu par le distributeur au fournisseur ou manifestement disproportionné au regard du service rendu » (cassation de l’arrêt rejetant l’action au motif que l’« avantage ne s’est concrétisé par aucun mouvement de fonds en leur faveur »).
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 18 OCTOBRE 2011
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 10-15296.
DEMANDEUR à la cassation : Ministre chargé de l’économie de l’industrie et de l’emploi
DÉFENDEUR à la cassation : Sociétés Carcoop France, Carrefour Hypermarchés et Continent 2001
Mme Favre (président), président. SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, SCP Odent et Poulet, avocat(s).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’à la suite d’une enquête menée par les services de la direction régionale de la concurrence et de la répression des fraudes du Nord, le ministre chargé de l’économie a poursuivi les sociétés Carrefour Hypermarchés SAS, Continent 2001, et Carcoop, sur le fondement de l’article L. 442-6 III du code de commerce, en leur reprochant d’avoir fait mettre à la disposition des magasins à l’enseigne Carrefour, par la société Dollfus Mieg et Compagnie (la société DMC), des intérimaires chargés de procéder à l’inventaire physique des marchandises qu’elle leur avait vendues ; que le ministre a demandé en conséquence la condamnation de ces sociétés au paiement d’une amende civile et à la répétition de l’indu ;
Sur le premier moyen et le second moyen pris en sa première branche réunis :
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche :
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu l’article L. 442-6 I, 1° du code de commerce et l’article L. 442-6, III du même code ;
CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que l’action en répétition exercée sur le fondement de ces textes par le ministre chargé de l’économie suppose seulement la constatation d’un avantage indu reçu par le distributeur du fournisseur ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu par le distributeur au fournisseur ou manifestement disproportionné au regard du service rendu ;
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que pour rejeter l’action en répétition de l’indu formée par le ministre chargé de l’économie contre les sociétés Carcoop et Continent 2001, la cour d’appel, après avoir relevé que la pratique mise en œuvre par ces sociétés constituait l’obtention d’un avantage sans contrepartie pour la société DMC, retient que cet avantage ne s’est concrétisé par aucun mouvement de fonds en leur faveur ;
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS : CASSE et ANNULE, mais seulement en ce qu’il a débouté le ministre chargé de l’économie de l’industrie et de l’emploi de son action en répétition de l’indu, l’arrêt rendu le 17 décembre 2009, par la cour d’appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris ;
Condamne les sociétés Carcoop France, Carrefour Hypermarchés et Continent 2001 aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer au ministre de l’économie de l’industrie et de l’emploi la somme globale de 2.500 euros et rejette leur demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille onze.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyens produits par la SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, avocat aux Conseils pour le ministre de l’économie de l’industrie et de l’emploi
PREMIER MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le moyen reproche à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir jugé irrecevable l’action du Ministre chargé de l’économie dirigée contre la société Carrefour Hypermarchés ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Aux motifs que le dossier de la cour établit que la société Carrefour Hypermarchés a, le 1er février 2006, pris en location gérance les hypermarchés jusqu’alors exploités par des entités juridiquement distinctes, la société Carrefour Hypermarchés France et la société Continent France.
Les faits reprochés ayant été commis en 2003, la société Carrefour Hypermarchés ne saurait être recherchée en responsabilité délictuelle pour des agissements commis par des personnes morales qui lui sont parfaitement étrangères, la société Carrefour Hypermarchés France et la société Continent France, peu important qu’elles soient toutes des filiales à 100 % de la société Carrefour France, ou qu’elles aient un dirigeant commun.
La faculté de substitution de « toute société du Groupe Carrefour détenu à 100 % » insérée aux contrats conclus par la société Carrefour Hypermarchés n’implique pas que ces filiales à 100 % de la société Carrefour soient solidairement responsables des manquements susceptibles d’être reprochés à l’une d’elles.
L’erreur sur la personne assignée à comparaitre constituant une fin de non-recevoir susceptible d’être soulevée en tout état de la procédure, il ne saurait être reproché à la société Carrefour Hypermarchés de ne pas l’avoir invoquée plus tôt ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Alors que l’action dirigée à l’encontre du nouvel exploitant d’un hypermarché, qui, vis-à-vis des tiers, déclare poursuivre l’exploitation de l’enseigne et en assumer la continuité juridique, est recevable, nonobstant la circonstance qu’il n’exploitait pas l’enseigne lors de la commission des pratiques restrictives de concurrence ; qu’en statuant comme elle l’a fait, sans rechercher, ainsi qu’elle y était invitée, si la continuité juridique des anciens exploitants par la société Carrefour Hypermarchés ne résultait pas du fait que cette dernière société avait poursuivi l’exploitation des magasins à enseigne Carrefour en reprenant et poursuivant les relations commerciales nouées par les précédentes sociétés avec les fournisseurs, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 31 et 32 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le second moyen reproche à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir débouté le Ministre chargé de l’économie de sa demande en répétition de l’indu à l’encontre des sociétés Continent 2001 et Carcoop France ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Aux motifs que « sur la recevabilité de la demande en répétition de l’indu » ;
« que l’article L. 442-6-I-2° a), devenu l’article L. 442-6-I, 1er du code de commerce donne au ministre la faculté d’exercer une action en répétition de l’indu en lieu et place de la victime ;
Que l’article 1376 du code civil subordonne le succès de l’action à l’existence d’un paiement indu ; qu’en l’espèce, les sociétés Continent 2001 et Carcoop France ayant bénéficié d’un avantage qui ne s’est concrétisé par aucun mouvement de fond en leur faveur, l’action en répétition de l’indu ne peut prospérer à leur encontre » ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Alors, d’une part, que le juge doit faire respecter et respecter lui-même le principe de la contradiction ; qu’en retenant, d’office, pour rejeter l’action en répétition de l’indu exercée par le Ministre chargé de l’économie à l’encontre des sociétés Continent 2001 et Carcoop France, distributeurs, que le succès de l’action était subordonné à l’existence d’un paiement indu et que l’avantage reçu par ces sociétés ne s’était concrétisé par aucun mouvement de fond en leur faveur, sans inviter les parties à débattre préalablement et contradictoirement de ce moyen, la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile ;
Alors, en tout état, que l’action en répétition exercée sur le fondement de l’article L. 442-6-I, 1° du code de commerce par le Ministre chargé de l’économie suppose simplement la constatation d’un avantage indu reçu par le distributeur du fournisseur ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu par le distributeur au fournisseur ; d’où il résulte que la cour d’appel qui constatait que les sociétés Continent 2001 et Carcoop France avaient reçu de la société DMC un avantage sans contrepartie commerciale et s’étaient enrichies sans cause en étant dispensées de régler le personnel chargé des opérations d’inventaire, rémunéré par la société DMC, ne pouvait refuser de faire droit à l’action en répétition exercée par le Ministre chargé de l’économie ; qu’elle n’a ainsi pas tiré les conséquences légales de ses constatations en violation de l’article L. 442-6-I, 1° précité.
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