TI STRASBOURG, 7 mai 2007
CERCLAB - DOCUMENT N° 3549
TI STRASBOURG, 7 mai 2007 : RG n° 11-06-003689
(sur appel CA Colmar (3e ch. civ. sect. A), 19 octobre 2009 : RG n° 07/02853 ; arrêt n° 09/01068)
Extraits : 1/ « Attendu que la loi du 11 décembre 2001, prise notamment en ses dispositions qui réservent la forclusion aux actions en paiement du prêteur, s'applique à tous les contrats conclus postérieurement à son entrée en vigueur ; que les contrats de crédit sont conclus pour une durée d'un an, et renouvelés par tacite reconduction à leur date anniversaire et qu'ainsi, la reconduction du contrat doit s'analyser comme la conclusion d'un nouveau contrat de crédit ».
2/ « Attendu qu'en vertu de l'article L. 311-9 du Code de la consommation - dans la version en vigueur jusqu'au 1er août 2005 -, pour les ouvertures de crédit qui offrent à leur bénéficiaire la possibilité de disposer de façon fractionnée, aux dates de leur choix, du montant du crédit consenti, l'offre préalable n'est obligatoire que pour le contrat initial ; Mais attendu que l'acte par lequel le plafond d'un crédit se trouve augmenté doit être analysé comme un nouveau contrat dont l'objet se trouve modifié, et non comme la reconduction du contrat initial ; Attendu qu’ainsi, la dispense d'offre préalable prévue par l'article L. 311-9 du Code de la consommation ne trouve pas à s'appliquer ;
Attendu, au demeurant et en outre, qu'il en va de même de l'article 10 du contrat, prévoyant que l'accord de COFINOGA pour une augmentation, à la demande de l'emprunteur, du plafond du découvert autorisé au terme de l'offre initiale, résultera de la mise à disposition effective du montant représentatif de l'augmentation sollicitée, en ce que cette disposition crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, dès lors que cette clause imposée par la partie économiquement dominante dans un contrat d'adhésion, tend subrepticement à faire échapper l'emprunteur à la protection du régime légal d'ordre public tout en modifiant notablement ses engagements ;
Attendu que le montant du plafond de crédit indiqué sur le relevé de compte à la date du 12 janvier 2002 est de 10.671 € alors même que celui figurant sur l'offre préalable acceptée le 25 janvier 1996 était de 40.000 francs, soit 6.097,96 € ; Attendu que la défenderesse ne justifie pas d'une autre offre préalable à l'ouverture de crédit faite à l'emprunteur ;
Attendu que la sanction dès lors prévue par l'article L. 311-33 du Code de la consommation est la déchéance du préteur à son droit aux intérêts ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL D’INSTANCE DE STRASBOURG
JUGEMENT DU 7 MAI 2007
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N 11-06-003689/2C. Nature de l'affaire : Autres demandes relatives au prêt.
PARTIE DEMANDERESSE :
Madame X.
[adresse], comparant en personne
PARTIE DÉFENDERESSE :
SA COFINOGA
[adresse], représenté (e) par Maître CALDEROLI-LOTZ Martine (C. 163), avocat du barreau de STRASBOURG
COMPOSITION DU TRIBUNAL : Monsieur Olivier DAESCHLER, Vice-Président, Madame Marie-Claude OHLMANN, Greffier, Monsieur Philippe GUISLAIN, Auditeur de Justice
DÉBATS : A l'audience publique du 2 avril 2007
JUGEMENT : contradictoire en premier ressort prononcé par mise à disposition au greffe par Monsieur Olivier DAESCHLER, Vice-Président et signé par Monsieur Olivier DAESCHLER, Vice-Président et par Madame Marie-Claude OHLMANN, Greffier
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] Par acte d'huissier en date du 9 novembre 2006, Madame X. faisait assigner la SA COFINOGA devant le Tribunal d'instance de STRASBOURG aux fins de restitution des intérêts versés depuis le mois de février 2002, soit 9.904,29 € au titre du crédit permanent utilisable par fractions, aux motifs, en premier lieu, que les modalités de remboursement échelonné en cas de non-reconduction du contrat n'étaient pas communiquées de manière exhaustive trois mois avant la date anniversaire du contrat, en second lieu que le prêteur n'a pas proposé à l'emprunteuse 3 mois avant la date anniversaire du contrat le renouvellement et précisé ses conditions de façon exhaustive et explicite et, en dernier lieu, que des augmentations de plafond du crédit avaient été réalisées sans établissement d'une offre préalable de prêt, ceci en contradiction avec les dispositions de l'article 311-9 du Code de la consommation. Elle sollicite en outre l'exécution provisoire du jugement, ainsi que la condamnation de la défenderesse aux entiers dépens, et au paiement de 500 € au titre de l'article 700 du NCPC.
Ces prétentions étaient reprises à l'audience du 26 mars 2007.
En réplique, reprenant oralement ses conclusions lors de la même audience, la société COFINOGA soulève avant tout moyen au fond, une fin de non recevoir tirée de la forclusion de l'action. Elle soutient ainsi qu'en l'espèce, le contrat ayant été conclu le 25 janvier 1996, et en tout cas avant l'entrée en vigueur de la loi du 11 décembre 2001, les dispositions de l'article 311-37 du Code de la consommation prévoyaient un délai de forclusion de deux ans pour toutes les actions engagées à compter de l'émission de l'offre préalable de crédit, y compris les demandes de l'emprunteur. En conséquence, l'action de la demanderesse devrait être déclarée irrecevable, à tout le moins pour ce qui concerne les prélèvements de découverts antérieurs au mois de novembre 2004, l'assignation datant du 9 novembre 2006. De manière subsidiaire, la société COFINOGA affirme avoir répondu aux exigences de l'article 311-9 du Code de la consommation, en premier lieu en précisant les possibilités de remboursement échelonné en cas de non-reconduction du contrat dans l'offre préalable de crédit en date du 25 janvier 1996, en second lieu en précisant lors de chaque relevé de compte de septembre la reconduction du contrat à venir au mois de janvier suivant, et en dernier lieu en n'ayant pas à établir d'offre préalable au-delà du contrat initial. Elle sollicite ainsi le rejet des demandes de Madame X., ainsi que sa condamnation aux entiers dépens, et au paiement de 500 € au titre de l'article 700 du NCPC.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
VU LES PIÈCES DE LA PROCÉDURE ET LES DOCUMENTS JOINTS,
Sur la fin de non-recevoir tire de la forclusion de l'action :
Attendu que la loi du 11 décembre 2001, prise notamment en ses dispositions qui réservent la forclusion aux actions en paiement du prêteur, s'applique à tous les contrats conclus postérieurement à son entrée en vigueur ; que les contrats de crédit sont conclus pour une durée d'un an, et renouvelés par tacite reconduction à leur date anniversaire et qu'ainsi, la reconduction du contrat doit s'analyser comme la conclusion d'un nouveau contrat de crédit ;
Attendu qu'il ressort du dossier que le contrat de crédit a été initialement conclu le 25 janvier [minute page 3] 1996 et se trouvait tacitement reconduit chaque mois de janvier de l'année ; qu'ainsi, la loi du 11 décembre 2001 trouve à s'appliquer pour les contrats conclus depuis le mois de janvier 2002.
Attendu en conséquence, que les demandes de Madame X. sont intégralement recevables, étant relatives aux relations contractuelles des parties depuis le mois de février 2002 ;
Sur le fond :
Attendu qu'en vertu de l'article L. 311-9 du Code de la consommation - dans la version en vigueur jusqu'au 1er août 2005 -, pour les ouvertures de crédit qui offrent à leur bénéficiaire la possibilité de disposer de façon fractionnée, aux dates de leur choix, du montant du crédit consenti, l'offre préalable n'est obligatoire que pour le contrat initial ;
Mais attendu que l'acte par lequel le plafond d'un crédit se trouve augmenté doit être analysé comme un nouveau contrat dont l'objet se trouve modifié, et non comme la reconduction du contrat initial ;
Attendu qu’ainsi, la dispense d'offre préalable prévue par l'article L. 311-9 du Code de la consommation ne trouve pas à s'appliquer ;
Attendu, au demeurant et en outre, qu'il en va de même de l'article 10 du contrat, prévoyant que l'accord de COFINOGA pour une augmentation, à la demande de l'emprunteur, du plafond du découvert autorisé au terme de l'offre initiale, résultera de la mise à disposition effective du montant représentatif de l'augmentation sollicitée, en ce que cette disposition crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, dès lors que cette clause imposée par la partie économiquement dominante dans un contrat d'adhésion, tend subrepticement à faire échapper l'emprunteur à la protection du régime légal d'ordre public tout en modifiant notablement ses engagements ;
Attendu que le montant du plafond de crédit indiqué sur le relevé de compte à la date du 12 janvier 2002 est de 10.671 € alors même que celui figurant sur l'offre préalable acceptée le 25 janvier 1996 était de 40.000 francs, soit 6.097,96 € ;
Attendu que la défenderesse ne justifie pas d'une autre offre préalable à l'ouverture de crédit faite à l'emprunteur ;
Attendu que la sanction dès lors prévue par l'article L. 311-33 du Code de la consommation est la déchéance du préteur à son droit aux intérêts ;
Attendu que tout autre moyen apparaît surabondant ;
Attendu en conséquence, que la société COFINOGA sera déchue de ce droit pour l'utilisation du crédit à compter du mois de février 2002 et condamnée à payer à Mme X. la somme de 9.904,12 € selon décompte actualisé, avec les intérêts au taux légal à compter du jour du jugement ;
[minute page 4]
Sur l'exécution provisoire :
Attendu qu'aucune urgence particulière n’est démontrée, il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire de la présente procédure ;
Sur l'article 700 du NCPC
Attendu que la demande de la partie demanderesse a été jugée fondée, il convient de la décharger des frais irrépétibles qu'elle a exposés à concurrence d'une somme de 300 € au lieu des 500 € sollicités ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL, statuant par mise à disposition au greffe du jugement contradictoire en premier ressort,
DÉCLARE la demande de Madame X. recevable et bien fondée.
En conséquence,
CONDAMNE la SA COFINOGA prise en la personne de son représentant légal à payer à Madame X. la somme de 9.904,29 € (neuf mille neuf cent quatre euros vingt neuf cents) avec les intérêts au taux légal à compter du présent jugement.
La CONDAMNE à payer à la demanderesse la somme de 300 € (trois cents euros) au titre de l'article 700 du NCPC.
La CONDAMNE aux entiers dépens.
DIT qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire ;
DÉBOUTE les parties de tout moyen plus ample ou contraire.
AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ, par mise à disposition au greffe, les jour, mois et an susdits, et Nous, O. DAESCHLER, Vice-Président du Tribunal d'instance et Greffier, avons signé le présent jugement.
LE GREFFIER LE VICE-PRÉSIDENT
- 5707 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Recevabilité - Délai pour agir - Forclusion - Crédit à la consommation
- 5749 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets de l’action - Autres effets - Déchéance des intérêts
- 6631 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 2 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Obligation de faire une offre
- 6633 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 4 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Clauses abusives