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CA NANCY (2e ch. civ.), 23 janvier 2012

Nature : Décision
Titre : CA NANCY (2e ch. civ.), 23 janvier 2012
Pays : France
Juridiction : Nancy (CA), 2e ch. civ.
Demande : 11/00701
Décision : 241/12
Date : 23/01/2012
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 15/03/2011
Numéro de la décision : 241
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3575

CA NANCY (2e ch. civ.), 23 janvier 2012 : RG n° 11/00701 ; arrêt n° 241/12

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Les juges du fond sont tenus de relever d'office la fin de non-recevoir tirée de la forclusion édictée par l'article L. 311-37 du code de la consommation.

S'il est exact que c'est au débiteur d'invoquer et de prouver les faits qui établissent que la forclusion est acquise, il appartient à la Cour, si l'intimé ne se constitue pas, de ne faire droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés, ce qui implique que soient examinées les pièces produites. En l'espèce, les pièces produites par la SA MEDIATIS permettent de faire toutes les constatations utiles pour déterminer si la forclusion est acquise ou non. »

2/ « En l'espèce, le contrat de crédit stipule que l'emprunteur a choisi de fixer la « fraction disponible » de son crédit à la somme de 2.000 euros, soit des mensualités de remboursement de 90 euros.

Les conditions générales du contrat prévoient que la fraction disponible peut évoluer sur demande spécifique du débiteur dans la limite du montant maximum du découvert autorisé fixé à 21.500 euros, sauf si le débiteur se trouve dans un cas de suspension du droit à découvert depuis l'ouverture du crédit ou la dernière augmentation de la fraction disponible.

Toutefois, cette clause constitue, en application de l'article L. 132-1 du code de la consommation, une clause abusive qui doit être tenue pour non-écrite. En effet, l'absence d'information, notamment quant aux nouvelles charges de remboursement résultant du dépassement du crédit initialement choisi par l'emprunteur, et l'absence de toute faculté de rétractation sont de nature à créer un déséquilibre économique significatif au détriment de l'emprunteur non professionnel, ainsi que l'a justement relevé le premier juge.

Or, suivant l'historique des écritures passées au compte, le plafond du crédit disponible, soit 2.000 euros, a été dépassé dès le 12 octobre 2008 pour ne plus jamais être restauré. […]

En assignant en paiement Monsieur X. seulement le 21 octobre 2010, alors que le délai biennal de forclusion avait commencé à courir le 12 octobre 2008, la SA MEDIATIS n'a pas agi dans le délai de deux ans et sa demande doit être déclarée forclose. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 23 JANVIER 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11/00701. Arrêt n° 241/12. Décision déférée à la Cour : jugement n° 30 du Tribunal d'Instance de LUNEVILLE, R.G. n° 11-10-000431, en date du 31 janvier 2011.

 

APPELANTE :

SA MEDIATIS

prise en la personne de ses représentants légaux pour ce domiciliés au siège social, sise [adresse], représentée par Maître Thierry GRETERE, avoué à la Cour, assistée de Maître Philippe SOUCHAL, avocat au barreau de NANCY

 

INTIMÉ :

Monsieur X.

le [date] à [ville], demeurant [adresse], n'ayant pas constitué avoué

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 905 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 5 décembre 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Francis MARTIN, Conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre, Monsieur Christian MAGNIN, Conseiller, Monsieur Francis MARTIN, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Caroline HUSSON ;

A l'issue des débats, le Président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 23 janvier 2012, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

ARRÊT : Défaut, rendu par mise à disposition publique au greffe le 23 janvier 2012, par Madame Caroline HUSSON, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; signé par Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre, et par Madame Caroline HUSSON, greffier ;

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Suivant l'offre préalable acceptée le 18 juillet 2006, la SA MEDIATIS a accordé à Monsieur X. un crédit renouvelable pour un montant maximum de découvert autorisé de 21.500 euros et une « fraction disponible choisie » de 2.000 euros.

Plusieurs mensualités de remboursement étant restées impayées, la SA MEDIATIS a fait assigner Monsieur X., devant le tribunal d'instance de Lunéville, en paiement des sommes de 3.615,21 euros en principal, outre le intérêts contractuels, de 800 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Monsieur X. n'a pas comparu et ne s'est pas fait représenter.

Le tribunal a soulevé, avant dire droit, la forclusion de l'action en paiement et la déchéance du droit aux intérêts.

Puis, par jugement rendu le 31 janvier 2011, le tribunal d'instance de Lunéville a déclaré irrecevable l'action de la SA MEDIATIS pour cause de forclusion.

Le tribunal a motivé sa décision en relevant que la fraction disponible du crédit avait été dépassée dès le 12 octobre 2008, sans restauration ultérieure, et que l'assignation était intervenue plus de deux ans après, le 21 octobre 2010 seulement.

La SA MEDIATIS a régulièrement interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 15 mars 2011. Elle demande à la Cour d'infirmer le jugement déféré, de déclarer sa demande recevable et de condamner Monsieur X. à lui payer les sommes de 3.615,21 euros, avec intérêts au taux de 17,77 % sur la somme de 3.113,33 euros, et de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Elle expose :

- que c'est au débiteur de prouver les faits causant la forclusion, ce que Monsieur X. n'a pas pu faire puisqu'il n'a pas comparu,

- que le découvert du compte de Monsieur X. n'a jamais dépassé le maximum autorisé de 21.500 euros,

- que même si l'on retient, pour faire partir le délai de forclusion, le dépassement du montant disponible, le délai ne court qu'à compter du prélèvement suivant l'achat qui a dépassé ce plafond, soit le 2 novembre 2008 en l'occurrence,

- que ce n'est qu'à compter du mois d'avril 2009 que Monsieur X. a cessé de rembourser les mensualités et qu'a commencé à courir le délai de forclusion.

Par acte d'huissier du 27 mai 2011, la SA MEDIATIS a régulièrement assigné Monsieur X. devant la Cour en lui signifiant sa déclaration d'appel et ses conclusions.

Mais Monsieur X. n'a pas constitué avoué.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Vu les dernières écritures déposées le 16 août 2011 par la SA MEDIATIS,

Vu l'assignation du 27 mai 2011 signifiée à l'étude de l'huissier de justice instrumentaire,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 7 septembre 2011.

 

Sur la forclusion de l'action en paiement :

Les juges du fond sont tenus de relever d'office la fin de non-recevoir tirée de la forclusion édictée par l'article L. 311-37 du code de la consommation.

S'il est exact que c'est au débiteur d'invoquer et de prouver les faits qui établissent que la forclusion est acquise, il appartient à la Cour, si l'intimé ne se constitue pas, de ne faire droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés, ce qui implique que soient examinées les pièces produites.

En l'espèce, les pièces produites par la SA MEDIATIS permettent de faire toutes les constatations utiles pour déterminer si la forclusion est acquise ou non.

L'article L. 311-37 du code de la consommation dispose que « les actions en paiement engagées devant le tribunal d'instance à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion ».

Dans le cas d'une ouverture de crédit utilisable sous forme de découvert en compte, le dépassement du découvert autorisé, dès lors qu'il n'a pas été ultérieurement restauré, manifeste la défaillance de l'emprunteur et constitue le point de départ du délai biennal de forclusion.

En l'espèce, le contrat de crédit stipule que l'emprunteur a choisi de fixer la « fraction disponible » de son crédit à la somme de 2.000 euros, soit des mensualités de remboursement de 90 euros.

Les conditions générales du contrat prévoient que la fraction disponible peut évoluer sur demande spécifique du débiteur dans la limite du montant maximum du découvert autorisé fixé à 21.500 euros, sauf si le débiteur se trouve dans un cas de suspension du droit à découvert depuis l'ouverture du crédit ou la dernière augmentation de la fraction disponible.

Toutefois, cette clause constitue, en application de l'article L. 132-1 du code de la consommation, une clause abusive qui doit être tenue pour non-écrite. En effet, l'absence d'information, notamment quant aux nouvelles charges de remboursement résultant du dépassement du crédit initialement choisi par l'emprunteur, et l'absence de toute faculté de rétractation sont de nature à créer un déséquilibre économique significatif au détriment de l'emprunteur non professionnel, ainsi que l'a justement relevé le premier juge.

Or, suivant l'historique des écritures passées au compte, le plafond du crédit disponible, soit 2.000 euros, a été dépassé dès le 12 octobre 2008 pour ne plus jamais être restauré.

Ce dépassement a été constitué par un achat de 1.560 euros à cette date du 12 octobre 2008, alors que le découvert en compte était déjà de 1.745,30 euros, ce qui a immédiatement porté le découvert à 3.305,30 euros et, par voie de conséquence, a nécessairement changé les conditions d'amortissement du crédit (notamment quant au montant des mensualités de remboursement), sans qu'aucune nouvelle offre préalable ait été préalablement acceptée par l'emprunteur, ni même sans qu'aucune ne lui ait été soumise.

Contrairement à ce que prétend l'organisme prêteur, il n'y a aucun motif pour repousser à la date du paiement de la mensualité de remboursement suivante l'effet de ce dépassement : seul doit être pris en compte le montant effectif du découvert pour déterminer la date du dépassement.

En assignant en paiement Monsieur X. seulement le 21 octobre 2010, alors que le délai biennal de forclusion avait commencé à courir le 12 octobre 2008, la SA MEDIATIS n'a pas agi dans le délai de deux ans et sa demande doit être déclarée forclose.

Par conséquent, le jugement déféré sera confirmé.

 

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

La SA MEDIATIS, qui est la partie perdante, supportera les dépens et sera déboutée de sa demande de remboursement de ses frais de justice irrépétibles.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par arrêt de défaut prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile,

DÉCLARE l'appel recevable ;

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

DÉBOUTE la SA MEDIATIS de sa demande sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

LAISSE à la SA MEDIATIS la charge des dépens.

Le présent arrêt a été signé par Madame CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre à la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame HUSSON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,        LE PRÉSIDENT,

Minute en cinq pages.