TI PARIS (17e arrdt), 29 mai 2007
CERCLAB - DOCUMENT N° 3588
TI PARIS (17e arrdt), 29 mai 2007 : RG n° 11-06-001530 ; jugt n° 07-556
(sur appel CA Paris (pôle 4 ch. 9), 2 juillet 2009 : RG n° 07/10900)
Extrait : « Il en résulte qu'en matière de crédit à la consommation, toute modification du montant du crédit précédemment accordé doit être conclue dans les termes d'une offre préalable comportant les mentions prescrites par l'article L. 311-10 puisqu'il ne s'agit pas d'une simple reconduction du contrat.
Par ailleurs, l'article L. 132-1 du code de la consommation répute non écrite comme abusive une clause prévoyant l'augmentation du montant du crédit initial sans [minute page 4] acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre de crédit puisque ce dernier ne dispose pas, à cette occasion, de la faculté d'ordre public de rétracter son acceptation, ce qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur (avis de la Commission des clauses abusives du 27 mai 2004, avis de la Cour de Cassation du 1er novembre 2006). »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL D’INSTANCE DE PARIS
DIX SEPTIÈME ARRONDISSEMENT
JUGEMENT DU 29 MAI 2007
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11-06-001530. Jugement n° 07-556.
DEMANDEUR :
SA COFINOGA (Compagnie Financière des Nouvelles Galeries),
[adresse] , représentée par Maître DE KRASSILNIKOFF-VIALA I., avocat au barreau de PARIS
DÉFENDEUR :
Mme X. épouse Y.
[adresse], non comparante
Monsieur Y.
[adresse], non comparant
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Président : Marie GIROUSSE
Greffier lors des débats et du prononcé : Janick ESTELLIN
DÉBATS : Audience publique du 3 avril 2007 où la date du délibéré a été fixée au 29 mai 2007
JUGEMENT : réputé contradictoire et en premier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe par Marie GIROUSSE, Président, assistée de Janick ESTELLIN, adjointe administrative faisant fonction de Greffier.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :
Par acte du 17 novembre 2006, la société Compagnie Financière des Nouvelles Galeries dite COFINOGA a fait assigner Mme X. épouse Y. et M. Y., en leur qualité de co-emprunteurs, pour obtenir leur condamnation solidaire à lui payer avec exécution provisoire la somme de 18.082,05 euros avec intérêts au taux contractuel de 16,38 % sur la somme de 16.433,90 euros à compter du 13 septembre 2006 au titre du solde dû sur un contrat de crédit par découvert en compte souscrit le 27 décembre 2000, ainsi que la somme de 610 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Par jugement avant dire droit du 6 février 2007, le Tribunal de céans a :
* invité les parties à
- produire les offres de crédit augmentant le crédit initialement consenti de 3.048,98 euros,
- présenter, à défaut, leurs observations sur le caractère abusif de la clause prévoyant cette augmentation sans nouvelle offre de crédit ainsi que sur la forclusion,
- si les offres de crédit augmentant le découvert autorisé sont produites, présenter leurs observations sur l'existence d'une forclusion résultant du fait que le relevé d'août 2003 mentionne déjà que le plafond indiqué est atteint, que ce plafond , fixé à 14.370 euros sur les relevés d'août 2004 et 2005, est dépassé en août 2004, le solde débiteur ne redescendant jamais en deçà de ce plafond et des échéances impayées apparaissant dés mars 2004,
* renvoyé l'affaire à l'audience du 3 avril 2007.
A cette audience la Sté COFINOGA a maintenu ses demandes faisant notamment valoir que le montant maximum du découvert autorisé dans le contrat de crédit en cause était de 21.342,86 euros, montant jamais dépassé par les défendeurs ; que la première échéance impayée non régularisée constituant le point de départ du délai de forclusion est survenu le 28 novembre 2004 ; que le dépassement du découvert utile ne constitue pas le point de départ du délai de forclusion ; que le paiement des nouvelles échéances par le client concrétisaient l'accord des parties sur l'augmentation du crédit sans qu'une nouvelle offre ne soit nécessaire ; que la mention d'un découvert maximum autorisé avec un montant disponible à l'ouverture est protectrice du consommateur puisque le crédit est octroyé en fonction de la situation financière de l'emprunteur ; que la seule sanction du dépassement du découvert autorisé est la déchéance du droit aux intérêts mais non [minute page 3] la forclusion ; que la clause contractuelle de modification du découvert initial n'est pas abusive ; que si elle l'était la seule sanction serait son inexistence ; que la forclusion biennale opposable à l'emprunteur contestant l'offre préalable est acquise.
Les époux Y. cités par acte remis à personne pour l'épouse et à domicile pour l'époux n'ont pas comparu.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Eu égard à la nature de la demande, les défendeurs n'ayant pas comparu, il sera statué par jugement réputé contradictoire et en premier ressort.
Aux termes de l'article 472 du Nouveau Code de Procédure Civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
Selon les dispositions d'ordre public de l'article L. 311-37 du code de la consommation, les actions en paiement relatives à une opération de crédit doivent, à peine de forclusion, être formées dans les deux ans du premier incident de paiement non régularisé, dispositions relevées d'office dans le jugement avant dire droit du 6 février 2007 en application de l'article 125 du nouveau code de procédure civile.
L'article L. 311-9 du même code, dans ses dispositions en vigueur à la date du contrat en cause, prévoit qu'un contrat initial d'ouverture de crédit doit faire l'objet d'une offre préalable conforme à l'article L. 311-10 indiquant notamment le montant du crédit, ses modalités, la faculté de rétractation, que la durée du contrat est limitée à un an renouvelable et que le prêteur devra indiquer, trois mois avant l'échéance, les conditions de reconduction du contrat.
Il en résulte qu'en matière de crédit à la consommation, toute modification du montant du crédit précédemment accordé doit être conclue dans les termes d'une offre préalable comportant les mentions prescrites par l'article L. 311-10 puisqu'il ne s'agit pas d'une simple reconduction du contrat.
Par ailleurs, l'article L. 132-1 du code de la consommation répute non écrite comme abusive une clause prévoyant l'augmentation du montant du crédit initial sans [minute page 4] acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre de crédit puisque ce dernier ne dispose pas, à cette occasion, de la faculté d'ordre public de rétracter son acceptation, ce qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur (avis de la Commission des clauses abusives du 27 mai 2004, avis de la Cour de Cassation du 1er novembre 2006).
En l'espèce, les époux Y. ont accepté une offre de crédit mentionnant : « montant maximum du découvert global pouvant être autorisé FF 140.000 (21.342,86 euros) - le montant du découvert maximum autorisé à l'ouverture du compte est fixé à 20.000 Frs (3.048,98 euros). Ce montant est révisable par COFINOGA, qui se réserve le droit de le modifier à la hausse ou à la baisse. Ce montant peut être augmenté sur simple demande de votre part après acceptation de COFINOGA » étant précisé dans les Conditions Générales de cette offre au paragraphe II-4 « * Sauf accord préalable de COFINOGA, le montant du financement ne devra, en aucun cas, conduire à un dépassement du montant maximum du découvert autorisé, ou tel qu'il aura été révisé après que vous en ayez été avisé par COFINOGA. * L'accord de COFINOGA pour une augmentation, à votre demande, du plafond du découvert autorisé au terme de la présente offre, résultera de la mise à votre disposition effective du montant représentatif de l'augmentation sollicitée et/ou de l'inscription effective de l'opération de débit domiciliée. »
Il ressort de ces tenues que le contrat n'accordait pas d'emblée une autorisation de découvert aux emprunteurs égale au montant maximum du découvert global pouvant être autorisé de 21.342,86 euros.
Au contraire, le terme « montant du découvert maximum autorisé à l 'ouverture du compte » révèle que seule la somme de 20.000 Frs (3.048,98 euros) était mise à la disposition de l'emprunteur. En outre, si les conditions générales du contrat prévoient la possibilité de faire évoluer le plafond du découvert autorisé elle la subordonne à l'accord de COFINOGA.
Dés lors qu'en application de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation toute clause prévoyant l'augmentation du crédit initial sans acceptation d'une offre par l'emprunteur est réputée non écrite comme abusive, le plafond du découvert convenu entre les parties s'élevant à 3.048,98 euros ne peut être modifié sans offre et il est inopérant de faire valoir qu'en acceptant les relevés de compte ou en réglant les mensualités, l'emprunteur admet tacitement une modification de ce plafond.
[minute page 5] Il en résulte que lorsque l'emprunteur dépasse ce plafond sans avoir bénéficié d'une nouvelle offre autorisant ce dépassement, il s'agit d'un incident de paiement qu'il doit régulariser en redescendant en deçà de ce montant. Toutes les fois où l'emprunteur ne parvient pas à redescendre en deçà du découvert autorisé mais ne fait qu'augmenter sa dette faute d'être en mesure de régulariser sa situation, le délai de forclusion prévu par l'article L. 311-17 du Code de la Consommation court.
Or, bien que le contrat ait fixé initialement le plafond du découvert autorisé à la somme de 3.048,98 euros, il apparaît sur l'historique du compte que ce montant a été largement dépassé à partir du 7 mars 2003, date où est inscrit un débit de 13.814,95 euros, et qu'il n'est jamais redescendu en deçà du maximum autorisé de 3.048,98 euros, sans qu'il soit justifié de l'existence d'une nouvelle offre préalable de crédit. Au surplus, il apparaît sur le relevé du 12 août 2004 que le nouveau plafond fixé sans offre par COFINOGA à 14.370 euros était également dépassé, le solde débiteur étant de 14.661 euros et n'est jamais redescendu en deçà.
La crédit consenti dans le contrat initial ayant été dépassé à compter de mars 2003 sans jamais être restauré par l'emprunteur et l'assignation n'ayant été délivrée que le 17 novembre 2006, la forclusion prévue par l'article L. 311-37 précité s'applique, et ce, nonobstant le fait qu'en l'espèce, l'offre initiale soit antérieure à la loi du 11 décembre 2001, puisqu'elle est fondée sur la date du premier incident de paiement non régularisé et non sur l'irrégularité de l'offre initiale.
Il convient, en conséquence, de débouter la Sté COFINOGA de l'ensemble de ses demandes.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal, statuant par jugement mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et en premier ressort,
DÉBOUTE la Sté COFINOGA de l'ensemble de ses demandes,
CONDAMNE la Sté COFINOGA aux dépens,
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
J. ESTELLIN M. GIROUSSE
- 5745 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Conséquences sur l’issue du litige - Effet rétroactif - Point de départ d’une forclusion - Illustrations
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