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CA METZ (ch. urg.), 25 septembre 2012

Nature : Décision
Titre : CA METZ (ch. urg.), 25 septembre 2012
Pays : France
Juridiction : Metz (CA), ch. urg.
Demande : 11/00908
Décision : 12/00585
Date : 25/09/2012
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 9/03/2011
Numéro de la décision : 585
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3963

CA METZ (ch. urg.), 25 septembre 2012 : RG n° 11/00908 ; arrêt n° 12/00585 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Les époux X. se sont expressément obligés à déposer, dans le délai de 15 jours une ou plusieurs demandes de prêts répondant aux caractéristiques définis dans la promesse de vente et à en justifier au vendeur ou au mandataire dans les 48 h. du dépôt.

Outre que l'appelante n'indique nullement en quoi ladite clause serait abusive, il sera rappelé qu'elle ne peut se prévaloir des dispositions sur les clauses abusives de l’article L. 132-1 du code de la consommation s'agissant d'un compromis de vente conclu entre deux particuliers, l'intervention de l'agent immobilier en qualité de mandataire des vendeurs étant sans influence. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE METZ

CHAMBRE DES URGENCES

ARRÊT DU 25 SEPTEMBRE 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11/00908. Arrêt n° 12/00585.

 

APPELANTE :

Madame X.

représentée par Maître Agnès BIVER-PATE, avocat au barreau de METZ

 

INTIMÉS :

Monsieur Y.

représenté par Maître Patrick VANMANSART, avocat au barreau de METZ

Madame Z. épouse Y.

représentée par Maître Patrick VANMANSART, avocat au barreau de METZ

Monsieur X.

représenté par Maître Agnès BIVER-PATE, avocat au barreau de METZ

 

DATE DES DÉBATS : A l'audience publique du 24 avril 2012 tenue par Monsieur LEBROU, Magistrat Rapporteur qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés et en a rendu compte à la Cour dans son délibéré pour l'arrêt être rendu le 26 juin 2012. Ce jour venu le délibéré a été prorogé pour l'arrêt être rendu le 25 septembre 2012

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDENT : Monsieur LEBROU, Président de Chambre

ASSESSEURS : Madame SOULARD, Conseiller, Madame KNAFF, Conseiller

GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Madame DESCHAMPS-SAR

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par acte sous seing privé du 31 janvier 2006, M. Y. et Mme Z., son épouse, ont vendu à M. X. et Mme X. une maison d'habitation sise [adresse].

La vente n'ayant pas été réitérée dans le délai contractuel, les époux Y. ont fait assigner les époux X. suivant exploit d'huissier signifié les 26 et 28 novembre 2007 devant le tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu en paiement de la clause pénale.

Par ordonnance du 18 décembre 2008, le juge de la mise en état a déclaré le tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu incompétent et a renvoyé l'affaire devant la première chambre civile du tribunal de grande instance de Metz.

Les époux Y. ont sollicité :

A titre principal,

- la condamnation in solidum des époux X. à leur verser une somme principale de 35.000 euros avec les intérêts de droit à compter de la décision à intervenir, avec application de l’article 1154 du Code civil ;

A titre subsidiaire,

- la condamnation in solidum des époux X. à leur verser une somme principale de 35.000 euros à titre de dommages et intérêts, avec les intérêts de droit à compter de la décision ;

- l'exécution provisoire de la décision ;

- la condamnation in solidum des époux X. au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Mme X. a demandé au tribunal de :

- juger les demandes des époux Y. irrecevables, faute d'avoir été introduites avant le 31 juillet 2006 ;

En tout état de cause,

- débouter les époux Y. de toutes leurs demandes, tant sur le fondement de la responsabilité contractuelle que sur celui de la responsabilité délictuelle ;

A titre infiniment subsidiaire,

- dire n'y avoir lieu à application de la clause pénale ;

- condamner les époux Y. aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

 

Par jugement du 2 février 2011, le TGI de METZ a :

- condamné in solidum M. X. et Mme X. à régler à M. Y. et son épouse née Mme Z. la somme de 35.000 euros, augmentée des intérêts légaux à compter du jugement ;

- dit que les intérêts échus pour au moins une année seront capitalisés conformément aux dispositions de l’article 1154 du Code Civil ;

- ordonné l'exécution provisoire à hauteur de la moitié de la somme principale allouée ;

- condamné in solidum M. X. et Mme X. à payer à M. Y. et son épouse née Mme Z. la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du CPC ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- condamné in solidum M. X. et Mme X. aux dépens.

 

Par déclaration enregistrée au greffe le 9 mars 2011, Mme X. a interjeté appel de cette décision en intimant également M. X.

Par conclusions déposées le 20 avril 2011, Mme X. demande à cette Cour d'infirmer le jugement entrepris, de débouter les époux Y. de leurs prétentions et, subsidiairement, de réduire à une somme symbolique le montant des dommages et intérêts. Elle sollicite également la condamnation solidaire des époux Y. aux dépens et au paiement de la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du CPC.

Par conclusions déposées le 30 juin 2011, les époux Y. concluent à la confirmation de la décision déférée et à la condamnation des époux X. aux dépens et au paiement de la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du CPC.

M. X., bien qu'ayant constitué avocat, n'a pas fait déposer de conclusions en son nom.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 20 mars 2012.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Aux termes de l’article L. 271-1 du code de la [construction et de l’habitation] [N.B. minute jurica mentionnant par erreur le Code de la consommation], « pour tout acte ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'un immeuble à usage d'habitation, la souscription de parts donnant vocation à l'attribution en jouissance ou en propriété d'immeubles d'habitation ou la vente d'immeubles à construire ou de location-accession à la propriété immobilière, l'acquéreur non professionnel peut se rétracter dans un délai de sept jours à compter du lendemain de la première présentation de la lettre lui notifiant l'acte. Cet acte est notifié à l'acquéreur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par tout autre moyen présentant des garanties équivalentes pour la détermination de la date de réception ou de remise. La faculté de rétractation est exercée dans ces mêmes formes. Lorsque l'acte est conclu par l'intermédiaire d'un professionnel ayant reçu mandat pour prêter son concours à la vente, cet acte peut être remis directement au bénéficiaire du droit de rétractation. Dans ce cas, le délai de rétractation court à compter du lendemain de la remise de l'acte, qui doit être attestée selon des modalités fixées par décret ».

En l'espèce, les époux Y. justifient que leur mandataire, l'agence S., a notifié, par actes séparés, à M. X. et Mme X. le compromis de vente du 31 janvier 2006, en rappelant le délai de rétraction et ses modalités d'exercice, par lettres recommandées avec accusés de réception signés le 25 février 2006.

Contrairement aux allégations de Mme X., le délai de rétractation a ainsi commencé à courir le 26 février 2006 pour expirer sept jours plus tard. La lettre recommandée adressée par l'appelante le 21 octobre 2006 ne peut donc en aucun cas être regardée comme un courrier de rétractation.

L’article 42 de la loi du 1er juin 1924 modifiée par la loi du 4 mars 2002 dispose que tout acte entre vifs, translatif ou déclaratif de propriété immobilière, doit être suivi à peine de caducité, d'un acte authentique ou, en cas de refus de l'une des parties, d'une demande en justice, dans les six mois qui suivent la passation de l'acte.

La sanction de caducité, dont l'objectif est de ne pas laisser subsister indéfiniment des actes de vente immobilières qui ne seraient pas transcrits au Livre Foncier, ne concerne que l'acte portant transfert de droit immobiliers et n'affecte pas la clause pénale qui doit précisément produire effet en cas de non réitération de la vente en la forme authentique par suite de la défaillance fautive de l'une de parties.

Dès lors, la circonstance que l'assignation des époux Y. ait été délivrée bien après l'expiration du délai de six mois à compter de la conclusion du compromis de vente est sans incidence sur la recevabilité de la demande en paiement de la clause pénale.

Le compromis de vente du 31 janvier 2006 prévoyait, au paragraphe « Clause Pénale », qu'au cas où l'une des parties viendrait à refuser de régulariser la vente dans le délai imparti, sauf à justifier de l'application d'une condition suspensive, la partie qui ne serait pas en défaut percevra une somme de 35.000 euros à titre d'indemnisation forfaitaire.

En l'occurrence, ledit compromis a été conclu sous la condition suspensive de l'obtention d'un ou de plusieurs prêts, condition d'une durée de validité de 35 jours à compter de la signature de l'acte expirant le 7 mars 2006 à 18 h. 00.

Les époux X. se sont expressément obligés à déposer, dans le délai de 15 jours une ou plusieurs demandes de prêts répondant aux caractéristiques définis dans la promesse de vente et à en justifier au vendeur ou au mandataire dans les 48 h. du dépôt.

Outre que l'appelante n'indique nullement en quoi ladite clause serait abusive, il sera rappelé qu'elle ne peut se prévaloir des dispositions sur les clauses abusives de l’article L. 132-1 du code de la consommation s'agissant d'un compromis de vente conclu entre deux particuliers, l'intervention de l'agent immobilier en qualité de mandataire des vendeurs étant sans influence.

Les époux X. ne démontrent pas avoir sollicité un prêt dans le délai de 15 jours qui leur était imparti par le compromis de vente et surtout ne justifient pas s'être vus opposer un refus de prêt durant la période de validité de la condition suspensive dont l'expiration était fixée au 7 mars 2006, et non en juillet 2006, ce dernier mois correspondant à la période retenue pour la signature de l'acte authentique de vente.

En effet, ce n'est que par courrier du 28 juillet 2006 que Mme X. a transmis à l'agent immobilier S., mandataire des époux Y., l'attestation de refus de prêt de la Société Générale datée du 25 juillet 2006, étant observé qu'il n'est pas justifié de démarches auprès d'autres banques aux fins d'obtention d'un prêt, alors même que le compromis de vente mentionnait au paragraphe E que l'acquéreur entendait solliciter le prêt auprès de « tous organismes financiers ».

Les époux X. ont dès lors failli à leurs obligations contractuelles et ainsi empêché l'accomplissement de la condition suspensive et, partant la régularisation du compromis par acte authentique. La clause pénale a donc vocation à s'appliquer, la circonstance que les époux Y. ne justifient pas avoir mis en demeure les époux X. de se présenter en l'étude du notaire pour signer l'acte authentique étant indifférente et s'expliquant au demeurant par l'absence de prêt consenti aux acquéreurs.

De plus, l'allégation de Mme X. selon laquelle les époux Y. n'auraient pas entendu donner suite au compromis de vente est contredite par le courrier adressé le 31 octobre 2006 à l'assureur protection juridique des époux Y. par Mme X. faisant état de la recherche d'un autre financement « devant les relances incessantes du vendeur et de son agent immobilier ».

Par ailleurs, les époux Y. justifient avoir réalisé le procès-verbal d'arpentage de la section 3 n° 57 stipulé dans les conditions particulières du compromis de vente par la production dudit procès-verbal et de la facture correspondante de la SARL G. du 10 mai 2006.

De même, les attestations de témoins relatant que la prise de possession par les consorts X. de l'immeuble d'habitation objet du compromis de vente aurait été impossible en juillet 2006 en raison des travaux entrepris par les époux Y., également propriétaires de la parcelle voisine, sont remises en cause par les pièces adverses.

Les époux Y. établissent en effet qu'au cours du mois de mai 2005, ils ont entrepris sur le terrain situé [...] la construction d'une remise en agglos, et non d'un immeuble d'habitation, d'une superficie de 130 mètres carré (courrier du Centre des Impôts fonciers de METZ du 31 octobre 2008) et dont les écoulements sont situés à l'arrière et sur le côté de la remise.

La clause pénale du compromis de vente a donc vocation à s'appliquer.

En application de l’article 1152 du Code Civil, le juge peut modérer la peine qui avait été convenue si elle est manifestement excessive.

La disproportion manifeste s'apprécie en comparant le montant de la peine conventionnellement fixé et celui du préjudice effectivement subi.

En l'occurrence, il ressort de l'attestation de Maître M., Notaire à [ville A.], qu'aux termes d'un acte authentique reçu le 3 janvier 2007, les époux Y. ont vendu l'immeuble d'habitation situé [...] moyennant la somme de 341.000 euros.

De surcroît, si les époux Y. démontrent avoir souscrit un prêt relais auprès du Crédit Agricole de Lorraine d'un montant de 155.600 euros pour financer l'acquisition d'un immeuble d'habitation à [ville O.], ce prêt n° 86 XX a été contracté par offre acceptée le 17 juillet 2005, soit un peu plus de six mois avant la signature du compromis de vente avec les époux X., et non consécutivement au manquement des consorts X. à leurs obligations contractuelles comme allégué par les époux Y.

Les époux Y. ne [justifient] pas par ailleurs que l'absence de réitération par les consorts X. de l'acte authentique de vente ait généré une augmentation du coût du prêt relais.

Ces éléments, et notamment la vente relativement rapide de l'immeuble d'habitation à un bon prix, caractérisent une disproportion excessive entre la pénalité mise à la charge de la partie responsable, par son comportement passif fautif, de la non réalisation de la vente et le préjudice effectivement subi par les époux Y. justifiant de réduire le montant de la clause pénale à la somme de 10.000 euros.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris sur le quantum de la condamnation in solidum prononcée au titre de la clause pénale à l'encontre de Mme X. et, statuant à nouveau dans cette limite, de limiter la condamnation in solidum prononcée à l'encontre de Mme X. à la somme de 10.000 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du jugement.

La décision entreprise sera confirmée sur le surplus.

Mme X. ayant eu partiellement gain de cause en appel, les dépens y afférents seront partagés par moitié.

Pour le même motif, aucune considération d'équité ne légitime le prononcé d'une condamnation en application de l’article 700 du CPC dans la présente instance.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant contradictoirement,

INFIRME le jugement entrepris sur le quantum de la condamnation in solidum prononcée au titre de la clause pénale à l'encontre de Mme X. ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

LIMITE la condamnation au paiement in solidum prononcée à l'encontre de Mme X. à la somme de 10.000 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du jugement ;

DEBOUTE M. Y. et son épouse née Z. du surplus de leur demande en paiement au titre de la clause pénale en tant que dirigée à l'encontre de Mme X. ;

CONFIRME la décision déférée sur le surplus ;

CONDAMNE Mme X. d'une part et M. Y. et son épouse née Z., d'autre part, à supporter par moitié les dépens d'appel ;

DIT n'y avoir lieu au prononcé d'une condamnation en application de l'article 700 du CPC.

Le présent arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le25 septembre 2012 par Monsieur LEBROU, Président de Chambre, assisté de Madame DESCHAMPS-SAR, Greffier, et signé par eux.