CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

5849 - Code de la consommation - Domaine d’application - Personne soumise à la protection - Notion de professionnel - Principes

Nature : Synthèse
Titre : 5849 - Code de la consommation - Domaine d’application - Personne soumise à la protection - Notion de professionnel - Principes
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
Imprimer ce document

 

CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 5849 (10 juillet 2020)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION

DOMAINE D’APPLICATION - PERSONNES SOUMISES À LA PROTECTION

NOTION DE PROFESSIONNEL - REPRÉSENTATION DU PROFESSIONNEL PAR UN INTERMÉDIAIRE

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2020)

 

Présentation : contrat de mandat. Le mandataire agit au nom et pour le compte de son mandant dont il porte le consentement. L’application stricte de la logique de la représentation conduit à considérer que le contrat qui est en définitive conclu unit le mandant et le tiers, alors que le mandataire reste un tiers à l’égard de cet accord. La qualité de professionnel ou de non-professionnel doit donc être appréciée dans la personne du mandant. Il convient de distinguer selon que le mandant est (A) ou non (B) professionnel.

Rappr. : l’art. 16 du préambule de la directive n° 2011/83/UE du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs dispose : « Il convient que la présente directive n’ait pas d’incidence sur les dispositions nationales en vigueur en matière de représentation légale, telles que les règles relatives à la personne qui agit au nom du professionnel ou pour le compte de ce dernier (par exemple un agent ou un administrateur). Les États membres devraient demeurer compétents dans ce domaine. La présente directive devrait s’appliquer à l’ensemble des professionnels, qu’ils soient publics ou privés. » § N.B. la portée de la directive est difficile à préciser sur celle du 5 avril 1993, puisqu’elle se contente de la compléter marginalement, l’objectif initialement envisagé d’unifier plusieurs directives y compris celle sur les clauses abusives, ayant été abandonné.

Contrat de commission. Aucune des décisions consultées n’examine le cas du contrat de commission. Par application des principes classiques, le commissionnaire s’engageant personnellement à l’égard du tiers et ayant la qualité de professionnel, la protection devrait pouvoir être revendiquée à son encontre.

A. PROFESSIONNEL REPRÉSENTÉ PAR UN INTERMÉDIAIRE

Professionnel représenté par un non-professionnel. Aucune des décisions consultées n’évoque cette hypothèse. Par application des principes de la représentation, la protection devrait être accordée, le contrat étant conclu entre un mandant professionnel et un tiers consommateur ou non-professionnel.

Professionnel représenté par un professionnel. La protection contre les clauses abusives est applicable lorsque le professionnel est représenté par un autre professionnel.

* Ordonnance du 14 mars 2016. Pour la première fois, l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 a inséré dans l’article liminaire du Code de la consommation une définition générale du professionnelle valable « pour l'application du présent code » : « professionnel : toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu'elle agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel ». Ce texte ajoute une précision nouvelle - « y compris lorsqu'elle agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel » - qui suscite l’interrogation.

En effet, dans l’hypothèse de la représentation évoquée par le texte, le contrat est classiquement conclu avec le professionnel mandant. La protection contre les clauses abusives pourra être invoquée à l’encontre de ce dernier. Les liens entre le consommateur et le mandataire n’étant pas de nature contractuelle, cette protection est normalement dépourvue d’objet. Il aurait en revanche été beaucoup plus novateur et protecteur d’étendre la protection lorsqu’un professionnel représente un non-professionnel, en imposant au passage l’application de ses conditions prérédigées (V. ci-dessous B). Il convient cependant de ne pas oublier que l’article liminaire a une portée générale et que la qualification de professionnel du mandataire ou du courtier peut entraîner d’autres effets (V. par exemple le nouvel art. L. 111-7 C. consom. pour les informations).

* Commission des clauses abusives. V. en ce sens pour la Commission des clauses abusives, admettant implicitement l’application de la protection : Recomm. n° 82-04/A : Cerclab n° 2153 (développement de films ; sol. implicite, lorsque le commerçant qui reçoit les pellicules représente un laboratoire) - Recomm. n° 99-02 : Cerclab n° 2193 (téléphones portables ; dans le premier considérant, la Commission s’estime compétente pour examiner les clauses des contrats d'adhésion proposés par les professionnels qu’ils soient opérateurs ou sociétés de commercialisation de services).

* Juges du fond. V. en ce sens pour les juges du fond : TI Poissy, 18 mars 1997 : RG n° 11-96-000857 ; jugt n° 375 ; Cerclab n° 109 (clauses abusives ; remise de négatifs pour agrandissement ; mise hors de cause de la maison de la presse, mandataire du laboratoire) - CA Paris (8e ch D), 1er décembre 1998 : RG n° 1996/02324 ; arrêt n° 726 ; Cerclab n° 1097; Juris-Data n° 1998-024234 (clauses abusives ; application de la protection à un contrat de développement de pellicules conclu entre un consommateur et l’entreprise prestataire par l’intermédaire de son mandataire ; mise hors cause du mandataire, qui devait sans doute être un commerçant se contentant de réceptionner et transmettre les pellicules), sur appel de TI Paris (3e arrdt), 14 septembre 1995 : RG n° 9500428 ; jugt n° 670/95 ; Cerclab n° 431 (problème non abordé, mais action admise contre le professionnel ayant réceptionné les clichés, sans que la qualification de sa situation ne soit étudiée, ni que le laboratoire ait été mis en cause) - CA Paris (pôle 4 ch. 9), 17 juin 2010 : RG n° 08/15550 ; Cerclab n° 3440 (contrat de travail entre un parent d’élève et un enseignant, conclu par l’intermédiaire d’une entreprise de soutien scolaire ; consommateur « achetant » des coupons d’une heure, l’entreprise se chargeant de la mise en place du contrat, puis du reversement de la rémunération à l’enseignant et des charges sociales aux organismes créanciers), sur appel de TI Paris (16e arrdt), 8 juillet 2008 : RG n° 11-08-000184 ; Dnd.

L’hypothèse peut aussi se rencontrer dans les contrats de prestations de services accouplés à une location financière (même si c’est plutôt la technique de la cession qui semble privilégiée). Pour des décisions appliquant la protection contre les clauses abusives ou le démarchage, V. par exemple : CA Dijon (ch. civ. B), 12 novembre 2002 : RG n° 01/00095 ; arrêt n° 717 B ; Cerclab n° 631 ; Juris-Data n° 2002-194152 (démarchage ; professionnel prestataire mandataire des sociétés de financement), infirmant T. com. Dijon (1re ch.), 7 décembre 2000 : RG n° 99/006686 ; Cerclab n° 625 (contrat professionnel).

Application de la protection contre les clauses abusives au bénéfice des adhérents à une assurance-groupe, même si le contrat a été conclu entre deux professionnels, le prêteur professionnel étant analysé comme un mandataire de l’assureur. CA Paris (15e ch. B), 15 juin 2001 : RG n° 1998/17051 ; Cerclab n° 914 ; Juris-Data n° 2001-153910 sur appel de TGI Paris (9e ch. 1re sect.), 13 janvier 1998 : RG n° 97/17051 ; Cerclab n° 1014 (problème non examiné). § N.B les assurances de groupe en matière de crédit sont plutôt analysées comme une stipulation de contrat pour autrui (V. Cerclab n° 5853). § Rappr. : refus d’application de l’ancien art. L. 132-1 [212-1 nouveau] C. consom. à la résiliation d’assurance complémentaire crédit souscrite par une entreprise pour ses salariés, mais dans le cadre d’un litige opposant l’assureur et l’employeur. CA Paris (7e ch. A), 14 novembre 2006 : RG n° 05/04490 ; Cerclab n° 779 ; Juris-Data n° 2006-326695 (cadre de l’activité et compétence), sur appel de TGI Meaux 2 décembre 2004 : RG n° 03/00141 ; Dnd.

Position du mandataire. Sur la position du mandataire : irrecevabilité du moyen tiré du caractère abusif des clauses du contrat d’assurance dans le cadre d’une action qui a été intentée contre le seul banquier, mandataire de l’assureur, sans mise en cause dans l’instance des assureurs. CA Douai (8e ch. sect. 1), 12 février 2004 : RG n° 02/00130 ; Cerclab n° 1685 ; Juris-Data n° 2004-255993, infirmant TI Boulogne sur Mer, 25 octobre 2001 : RG n° 11-01-321 ; Cerclab n° 42 (clause jugée abusive). § Comp. supra la nouvelle rédaction de l’article liminaire.

B – CONSOMMATEUR OU NON-PROFESSIONNEL REPRÉSENTÉ PAR UN INTERMÉDIAIRE PROFESSIONNEL

Non professionnel représenté par un professionnel : présentation. Si le mandant n’est pas professionnel, le problème ne se pose que si le mandataire est professionnel. L’application des principes de la représentation conduit à considérer que le contrat est conclu entre le mandant non-professionnel et un consommateur ou non-professionnel, ce qui exclut la protection contre les clauses abusives. Mais cette solution soulève une difficulté, car l’intervention de cet intermédiaire va entraîner l’introduction dans le contrat de conditions générales préétablies, plaçant le consommateur dans la même situation que s’il avait contracté avec un professionnel. Par ailleurs, la question se pose dans des termes différents selon que l’action concerne un consommateur ou une association de consommateurs. § N.B. La rédaction du nouvel article liminaire du Code de la consommation par l’ordonnance du 14 mars 2016 ne résoud pas cette difficulté, puisqu’il se contente d’envisager le cas où le professionnel « agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel »

Non professionnel représenté par un professionnel : action d’un consommateur. L’ancien art. L. 132-1 [212-1 nouveau] C. consom. est inapplicable à un compromis de vente conclu entre deux particuliers, l'intervention de l'agent immobilier en qualité de mandataire des vendeurs étant sans influence. CA Metz (ch. urg.), 25 septembre 2012 : RG n° 11/00908 ; arrêt n° 12/00585 ; Cerclab n° 3963, sur appel de TGI Metz (1re ch. civ.), 2 février 2011 : Dnd. § Dans le même sens : CA Lyon (8e ch.), 6 mars 2012 : RG n° 10/09261 ; Legifrance ; Cerclab n° 3762 (le fait que le bailleur soit passé par l'intermédiaire d'une agence immobilière pour signer le contrat est indifférent à la solution en droit ; clause au surplus non abusive), sur appel de TI Villeurbanne, 2 décembre 2010 : RG n° 11-10-000600 ; Dnd.

V. cependant en sens contraire : CA Lyon (2e ch.), 11 septembre 2001 : RG n° 1999/00655 ; Cerclab n° 1144 ; Juris-Data n° 2001-172306 (application de la protection contre les clauses abusives dans le cadre du contrat de bail rédigé par un mandataire professionnel de multiples bailleurs privés ; espèce complexe où à la suite d’un contrat entre le promoteur et EDF-GDF sur la fourniture de chaleur et d’eau chaude, une clause prévoyant la souscription d’un contrat avec le fournisseur avait été insérée dans le règlement de copropriété puis dans les baux des locataires, lesquels n’avaient pas été préalablement informés de cette obligation), pourvoi rejeté par Cass. civ. 3e, 9 mars 2005 : pourvoi n° 01-18039 ; arrêt n° 311 ; Bull. civ. III, n° 59 ; Cerclab n° 1940 (problème non abordé) - CA Angers (1re ch. A), 8 janvier 2008 : RG n° 07/00092 ; arrêt n° 4 ; Cerclab n° 1233 ; Juris-Data n° 2008-369956 (arrêt visant une recommandation de la Commission des clauses abusives, jugeant certaines clauses inopportunes, pour estimer que leur non respect n’est pas fautif, alors que le contrat de vente semblait avoir été conclu entre deux particuliers, par l’intermédiaire d’une agence, et en tout cas sans vérifier la qualité du vendeur), sur appel de TGI Laval, 11 décembre 2006 : RG n° 04/01856 ; jugt n° 06/1118 ; Cerclab n° 1600, (problème non examiné) - CA Fort-de-France (ch. civ.), 11 mai 2012 : RG n° 10/00456 ; Cerclab n° 4085 (compromis de vente conclu par l’intermédiaire d’une agence immobilière ; l’arrêt écarte, au terme d’un raisonnement unique, le caractère abusif des deux clauses sanctionnant le défaut de réitération par le vendeur-mandant, au profit tant de l’agence que de l’acheteur, alors que, s’agissant de celle figurant dans le compromis, il s’agissait sans doute d’un contrat conclu entre particuliers, sauf à prendre en compte l’intervention du mandataire professionnel ; N.B. la clause n’était pas défavorable à l’acheteur, bien au contraire, mais il y a une différence entre refuser de contrôler la clause et estimer qu’elle ne crée pas de déséquilibre), sur appel de TGI Fort-de-France, 15 septembre 2009 : RG n° 08/01575 ; Dnd.

Non professionnel représenté par un professionnel : action d’une association de consommateurs. L’action des associations de consommateurs soulève un problème un peu différent dès lors qu’elle est dirigée contre des modèles de contrats ou des types de contrats, proposés ou destinés aux consommateurs (V. aussi Cerclab n° 5759).

Dans la version résultant de la loi du 17 mars 2014, « le juge peut à ce titre ordonner, le cas échéant sous astreinte, la suppression d'une clause illicite ou abusive dans tout contrat ou type de contrat proposé ou destiné au consommateur ». Selon le nouvel art. L. 621-8 C. consom., résultant de l’ordonnace n° 2016-301 du 14 mars 2016, « Lorsqu'il est saisi en application de l'article L. 621-7, le juge peut ordonner, le cas échéant sous astreinte, la suppression d'une clause illicite ou abusive dans tout contrat ou type de contrat proposé ou destiné au consommateur ou dans tout contrat en cours d'exécution ». Interprétés au sens large, le texte pourrait englober les conditions générales rédigées par les intermédiaires dès lors qu’elles sont « destinées » au consommateur.

Les décisions consultées montrent que cette question a fortement divisé les juridictions.

* Problème indifférent : clauses illicites et loi 6 juillet 1989. Le fait que les conditions générales soient prérédigées par l’intermédiaire, puis imposées au consommateur, même dans un contrat conclu avec un mandant particulier, est sans importance si la clause est illicite ou abusive quelle que soit la qualité du cocontractant (loi du 6 juillet 1989). V. en ce sens : TI Saint-Brieuc, 21 septembre 1992 : RG n° 346/92 ; Cerclab n° 126 (admission de l’action d’une association pour éliminer des clause abusives sur le fondement de la loi du 6 juillet 1989 insérée par une agence immobilière dans les modèles de baux d’habitation ; clause abusive en violation des art 5 et 12 de la loi qui s’appliquent quelle que soit la qualité du bailleur), sur appel CA Rennes (1re ch. A), 3 janvier 1995 : RG n° 852/92 ; arrêt n° 10 ; Cerclab n° 1827 (clause illicite) - CA Rennes (4e ch.), 14 décembre 1995 : RG n° 94/05228 ; arrêt n° 725 ; Cerclab n° 1826 ; Juris-Data n° 1995-052951 (décision de réouverture des débats pour les clauses abusives, mais admission immédiate de l’action pour l’élimination de clauses illicites au regard de la loi du 6 juillet 1989) - TGI Grenoble (4e ch. civ.), 2 décembre 2002 : RG 2001/03310 ; jugt n° 223 ; site CCA ; Cerclab n° 3169 (loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ou de la loi n° 70-9 du 92 janvier 1970 ; activité de mandataire salarié pour le compte de bailleurs offrant des locations de locaux à usage d'habitation principale ou à usage mixte professionnel et d'habitation principale), confirmé par CA Grenoble (2e ch. civ.), 19 octobre 2004 : RG n° 03/00333 ; arrêt n° 844 ; Cerclab n° 3128.

Comp. pour l’admission par le jugement, mais pas par l’arrêt : suppression d’une clause illicite ayant pour effet de dégager, par avance, le vendeur de la garantie d'éviction et des vices cachés et de celle résultant de son fait personnel (défaut d'entretien), alors qu’il ne peut être dérogé à l'application des art. 1628, et 1641 du Code Civil que si, à la date de sa renonciation anticipée à ces dispositions légales, l'acheteur était pleinement renseigné sur la portée de cette renonciation, ce qui est en contradiction avec les termes mêmes de la clause. TGI Créteil (5e ch. civ.), 20 septembre 1989 : RG n° 5179/88 ; jugt n° 503 ; Cerclab n° 351 (N.B. le contrat était conclu entre deux particuliers par l’intermédiaire d’une agence professionnelle), infirmé par CA Paris (2e ch. A), 9 décembre 1996 : RG n° 94/000717, n° 94/001109 et n° 94/001338 ; Cerclab n° 1270 (les vendeurs étant des particuliers, irrecevabilité la demande des acheteurs sur les clauses abusives et par voie de conséquence de l’intervention des associations de consommateurs).

Rappr. : les dispositions de l’ancien art. L. 122-1 C. consom. ayant pour but de protéger le consommateur contre l’abus d’une puissance économique sont d’ordre public ; contrevient à ce texte, le gestionnaire d'un immeuble locatif à destination d'étudiants qui subordonne la conclusion du bail à une autre prestation de services, pour un prix forfaitaire. CA Rennes (4e ch.), 2 février 2006 : RG n° 04/07319 ; Legifrance ; Cerclab n° 1780 (arrêt notant que si le bailleur n'est pas un professionnel, le gestionnaire l'est ; peu importe que la prestation résulte du règlement de copropriété ; nullité de la clause du bail et non d'un second contrat avec le gestionnaire), sur appel de TI Vannes, 6 mai 2004 : RG n° 11-00-000725 ; jugt n° 04/317 ; Cerclab n° 1580 (jugement reconnaissant la qualité de mandataire du gestionnaire pour le bail, puisque c'est lui qui a refusé de restituer le dépôt de garantie, mais admettant que pour les prestations de services, le contrat unissait directement le gestionnaire et l'étudiant ; annulation du contrat).

* Cas du mandant inconnu. L’ancien art. L. 132-1 [212-1 nouveau] C. consom. considère que la qualité des contractants et le caractère abusif des clauses doit s’apprécier en fonction de l’avantage excessif qu’elles confèrent à l’autre partie, ce qui a pour conséquence d’exclure du champ d’application les contrats dans lesquels le cocontractant du consommateur est inconnu, bien que le contrat ait été préparé et négocié par un professionnel, celui-ci n’agissant qu’en qualité de mandataire. CA Rennes (4e ch.), 22 janvier 1998 : RG n° 94/05228 ; Cerclab n° 768. § V. précédemment dans la même affaire : pour un contrat de bail, même rédigé par un professionnel de l’immobilier, une discussion peut s’instaurer sur l’application de l’ancien art. L. 132-1 [212-1 nouveau] C. consom. dès lors que le contrat est conclu au profit d’un propriétaire non-professionnel au sens de ce texte. CA Rennes (4e ch.), 14 décembre 1995 : RG n° 94/05228 ; arrêt n° 725 ; Cerclab n° 1826 ; Juris-Data n° 1995-052951 (décision de réouverture des débats, mais admission de l’action pour l’élimination de clauses illicites au regard de la loi du 6 juillet 1989). § Pour la suite de l’affaire (épisode procédural) : CA Rennes (4e ch.), 26 septembre 1996 : RG n° 94/05228 ; arrêt n° 513 ; Cerclab n° 1824 (contrat conclu en 1991) § Pour la suite de l’affaire au fond : CA Rennes (4e ch.), 8 avril 1999 : RG n° 94/05228 et n° 98/04018 ; arrêts n° 164 et 165 (jonction) ; Cerclab n° 1813.

V. cependant, admettant l’action lorsque les conditions de conclusion du contrat ne mettent en présence que le consommateur et l’intermédiaire, l’existence du mandant étant occultée : CA Paris (1re ch. B), 7 mai 1998 : RG n° 96/86626 ; arrêt n° 160 ; Cerclab n° 1103 ; Juris-Data n° 1998-023868 ; RJDA 8-9/98, n° 1058 ; D. Affaires 1998. 1851, obs. V.A.-R ; Lamyline (adoption des motifs du jugement ayant retenu que l’agence était un professionnel de la location saisonnière, qu'elle avait rédigé les conditions générales des contrats en cause, qu'elle les faisait signer, que le propriétaire n'était destinataire que d'un avis ultérieur de location et que l'accord était donné par l'agence après une négociation qui n’avait lieu qu’entre elle et le locataire), confirmant TGI Paris (1re ch.), 8 octobre 1996 : RG n° 15827/95 ; Cerclab n° 426 ; Juris-Data n° 1996-049942 (même solution) - TGI Albertville (ch. civ.), 17 janvier 1997 : RG n° 95/1276 ; jugt n° 052/97 ; Cerclab n° 317 ; Juris-Data n° 1997-044727 (idem : contrat destiné à être signé par le consommateur et l’agence, qui est également le rédacteur des conditions générales de location, alors que le propriétaire des lieux loués, dont le nom n'apparaît pas dans le contrat, ne reçoit de l’agence qu'un avis de location et ne donne aucun accord pour la location qui est entièrement gérée par l’agence).

* Action dirigée contre un modèle établi par un intermédiaire. Pour des décisions acceptant l’action d’une association de consommateurs (V. aussi Cerclab n° 5759 s.) : TGI Créteil (5e ch. civ.), 20 septembre 1989 : RG n° 5179/88 ; jugt n° 503 ; Cerclab n° 351 (N.B. le contrat était conclu entre deux particuliers par l’intermédiaire d’une agence professionnelle), infirmé par CA Paris (2e ch. A), 9 décembre 1996 : RG n° 94/000717, n° 94/001109 et n° 94/001338 ; Cerclab n° 1270 (irrecevabilité de l’intervention des associations de consommateurs dès lors que le contrat était conclu entre deux particuliers s’inspirant d’un modèle de contrat édité par une société privée) - TGI Grenoble (4e ch. civ.), 2 décembre 2002 : RG 2001/03310 ; jugt n° 223 ; site CCA ; Cerclab n° 3169 (activité de mandataire salarié pour le compte de bailleurs offrant des locations de locaux à usage d'habitation principale ou à usage mixte professionnel et d'habitation principale ; admission de l'action d'une association de consommateurs contre un intermédiaire immobilier pour le non respect des prescriptions d'ordre public ou pénalement punissables issues de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ou de la loi n° 70-9 du 92 janvier 1970, ainsi que de l'ancien art. L. 132-1 [212-1 nouveau] C. consom., d'ordre public, applicables quels que soient la forme ou le support du contrat), confirmé par CA Grenoble (2e ch. civ.), 19 octobre 2004 : RG n° 03/00333 ; arrêt n° 844 ; Cerclab n° 3128 - TGI Grenoble (4e ch. civ.), 13 septembre 2004 : RG n° 02/04238 ; Site CCA ; Cerclab n° 3900 (location saisonnière ; admission de l’action contre l’agence, mandataire de propriétaires privés). § Il n'y a pas lieu de distinguer selon que le modèle type de contrat est fourni à des bailleurs professionnels ou à des bailleurs personnes physiques, en ce que l'action préventive en suppression des clauses abusives ou illicites ouverte aux associations des consommateurs a vocation à s'appliquer aux modèles types de contrats destinés aux consommateurs et rédigés par des professionnels en vue d'une utilisation généralisée (Cass. 1re, 3 février 2011, pourvoi n° 08-14402), ce qui est bien le cas en l'espèce puisque le défendeur indique lui-même exercer une activité d'agent immobilier, d'administrateur de biens et de syndic. TGI Grenoble (4e ch.), 4 novembre 2013 : RG n° 11/02833 ; site CCA ; Cerclab n° 7031 (bail d’habitation proposé par un agent immobilier).

* Action contre l’intermédiaire. V. pour une décision complexe, refusant d’appliquer une clause exonératoire insérée dans un contrat de vente de fonds de commerce, conclu par l’intermédiaire du liquidateur du cédant, et visant à exonérer le liquidateur, professionnel du droit, de la faute par lui commise envers un non-professionnel, le cessionnaire d’un fonds de camping, dont rien n'indique qu’il ait des compétences en la matière. CA Agen (ch. civ.), 25 novembre 2009 : RG n° 09/00038 ; arrêt n° 1078/09 ; Cerclab n° 3629 (arrêt ne mentionnant pas explicitement le fondement de l’élimination, même si le raisonnement se rapproche des clauses abusives), sur appel de TGI Cahors du 14 novembre 2008 : Dnd, pourvoi rejeté par Cass. com. 8 mars 2011 : pourvoi n°10-30287 ; Cerclab n° 3062 (moyen prétendant que le cessionnaire était un professionnel et que le contrat avait un rapport direct avec l’activité ; rejet du pourvoi par un motif prudent, estimant que pour retenir une faute du liquidateur, la cour d’appel ne s’est pas fondée sur l'absence de validité de la clause insérée dans l'acte de cession, ce qui peut marquer une certaine distance par rapport à l’arrêt attaqué).

* Action dirigée contre un modèle établi par un tiers. L’action préventive en suppression de clauses abusives ouverte aux associations agréées de défense des consommateurs a vocation à s’appliquer aux modèles types de contrats destinés aux consommateurs et rédigés par des professionnels en vue d’une utilisation généralisée ; cassation pour violation des articles L. 132-1 ancien [212-1 nouveau] et L. 421-6 [L. 621-7 et 8 nouveaux] C. consom. de l’arrêt déclarant irrecevable l’action d’une association de consommateurs, aux motifs que, s’il n’est pas contesté que les associations ayant rédigé les contrats litigieux ont la qualité de professionnels participant à l’industrie du tourisme et des loisirs, elles n’effectuent aucune location et n’interviennent pas directement auprès des locataires. Cass. civ. 1re, 3 février 2011 : pourvoi n° 08-14402 ; Bull. civ. I, n° 23 ; Cerclab n° 3052.

Rappr. antérieurement pour un contrat conclu entre particuliers, après un mandat de vente, le contenu du contrat étant inspiré d’un modèle établi par un tiers : ayant constaté que le contrat dont les clauses étaient critiquées avait été conclu entre des non-professionnels et que la société, éditeur du modèle de contrat, n'avait elle-même conclu aucun contrat avec un consommateur, c'est à bon droit que la cour d'appel, qui n'a pas ajouté aux conditions posées par la loi, a déclaré irrecevables les demandes formées par les associations et qui tendaient à la suppression de clauses dans le modèle édité par cette société ». Cass. civ. 1re, 4 mai 1999 : pourvoi n° 97-14187 ; arrêt n° 817 ; Bull. civ. I, n° 147 ; Cerclab n° 2051 ; D. 2000. somm. 48, obs. Pizzio ; D. Affaires 1999. 985, obs. V. A.-R. ; JCP 1999. II. 10205, note Paisant ; ibid. I. 171, n° 1 s. obs. Jamin ; Defrénois 1999. 1004, obs. D. Mazeaud ; Contrats conc. consom. 1999, n° 125, note Leveneur ; ibid. n° 134, note Raymond ; Petites affiches 24 mars 2000, note Lawson-Body ; RTD civ. 2000. 107, obs. Mestre (compromis de vente conclu entre deux particuliers par l’intermédiaire d’une agence immobilière s’étant inspirée d’un modèle de contrat édité par une autre société), rejetant le pourvoi contre CA Paris (2e ch. A), 9 décembre 1996 : RG n° 94/000717, n° 94/001109 et n° 94/001338 ; Cerclab n° 1270, infirmant TGI Créteil (5e ch. civ.), 20 septembre 1989 : RG n° 5179/8 ; jugt n° 503 ; Cerclab n° 351 (action recevable).