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JUR. PROX. MONTREUIL, 3 mars 2008

Nature : Décision
Titre : JUR. PROX. MONTREUIL, 3 mars 2008
Pays : France
Juridiction : Montreuil (Jprox)
Date : 3/04/2008
Nature de la décision : Admission
Mode de publication : Site Com. cl. abusives (CCA)
Date de la demande : 15/03/2007
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4018

JUR. PROX. MONTREUIL, 3 mars 2008 : RG n° inconnu

Publication : Site CCA

 

Extrait : « En l'espèce, la clause de non-garantie de retard stipulée dans les conditions générales de vente que la société C. invoque pour dénier sa responsabilité, est abusive en ce qu'elle est contraire aux dispositions combinées des articles 1er et 23 de la loi du 13 juillet 1992, il y a donc lieu de la réputer non écrite ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

JURIDICTION DE PROXIMITÉ DE MONTREUIL

JUGEMENT DU 3 MARS 2008

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° inconnu.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 3 mars 2008. Sous la Présidence de BROGLY Michel, Juge d'Instance, assisté de AUTRET Clarisse, Greffier ; Après débats à l'audience du 18 janvier 2008, le jugement suivant a été rendu ;

 

ENTRE :

DEMANDEUR(S) :

Monsieur X. B.

[…], assisté(e) de SLELARL THIEBAUT et WOIMBEE, avocat au barreau de HAUTE MARNE

Monsieur X.

[…], représenté(e) par SELARL THIEBAUT et WOIMBEE, avocat du barreau de HAUTE MARNE

Madame Y. épouse X.

[…], représenté(e) par SELARL THIEBAUT et WOIMBEE, avocat du barreau de HAUTE MARNE

 

ET :

DÉFENDEUR(S) :

SA N.

[adresse], représenté(e) par Maître REGOLI Hervé, avocat du barreau de PARIS

Société C.

représenté(e) par Maître GIMENO Laure, avocat du barreau de PARIS

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE.

Par actes introductifs d'instance en date respectivement des 15 et 19 mars 2007, Monsieur X. B. ainsi que Monsieur et Madame X. ont fait délivrer assignation à la société N. d'une part, ainsi qu’à la société C. d'autre part, devant le Juge de Proximité du Tribunal d'Instance de MONTREUIL, aux fins :

- de les entendre condamner à leur verser à chacun des trois, la somme de 845 € à titre d'indemnisation des préjudices par eux subis du fait du retard de leur vol de départ, ainsi que la somme de 700 € au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi que les dépens.

Ils exposent à l'appui de leurs demandes :

- qu'ils ont acheté leurs billets d'avion en ligne sur le site internet de l'Agence de Voyages N., pour passer en famille leurs vacances de Noël au Sénégal,

- que lors de l'enregistrement, il leur a été indiqué que le décollage aurait un léger retard,

- qu'après une attente de plusieurs heures, il leur a été précisé que le vol était annulé et qu'un autre vol leur serait proposé ultérieurement, sans plus de précision sur la cause exacte de l'annulation,

- qu'ils furent relogés après 20 heures, dans des hôtels proches de l'aéroport,

- que réveillés à 2 heures du matin, ils furent invités à se présenter à l'accueil pour être acheminés vers l'aéroport, où le décollage n'intervint qu'à 9 heures du matin.

 

L'affaire appelée à l'audience du 25 mai 2007 a été renvoyée à plusieurs reprises.

Lors de l'audience du 18 janvier 2008, les consorts X., par leur conseil, ont repris leurs demandes par écritures déposées à l'audience auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des motifs et y ajoutant sollicitent :

- [minute page 3] de voir dire et juger illicite ou abusive la clause des conditions particulières de la société N. et de la société C. dégageant toute responsabilité en cas de modification d'horaires, d'itinéraires ou de changement d'aéroport,

- d'ordonner en conséquence auxdites sociétés de supprimer sur leurs contrats les clauses qui y sont stipulées, et ce, dans le mois de la décision à intervenir, et passé ce délai, sous astreinte de 100 € par jour de retard,

 

Par écritures déposées à l'audience par son conseil, la société T., exerçant sous l'enseigne N., demande au Juge de Proximité :

- de constater que s'agissant « d'un vol sec », sa responsabilité ne peut être engagée à la suite de l'annulation par la compagnie aérienne du vol initialement prévu le 22 décembre 2006 à 19 heures 30,

- de débouter les consorts X. de leur demande tendant à voir déclarer illicite et abusive la clause des conditions particulières relatives aux modifications d'horaires, ladite clause ne pouvant en aucun cas être considérée comme abusive,

- de la mettre hors de cause,

- de condamner in solidum les consorts X. à lui verser la somme de 1.500 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et celle de 1.500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

 

La société C., par son conseil, demande au Juge de Proximité :

- de constater qu'elle s'est conformée aux obligations lui incombant au regard du règlement communautaire n° 261/2004,

- de constater qu'elle ne garantit pas dans ses conditions générales de vente, les horaires de ses vols, qui ne font pas partie du contrat de transport,

- de constater que la clause de non-garantie des horaires de vol telle qu'insérée dans les conditions générales de vente, est valide,

- de constater qu'elle n'a pas commis de faute,

- [minute page 4] de constater que les demandeurs ne démontrent ni l'existence, ni le quantum de leurs préjudices,

- de débouter en conséquence les consorts X. de l'ensemble de leurs demandes,

- si par extraordinaire, le Tribunal ne faisait pas droit à cette demande, de condamner la société T. exerçant sous l'enseigne N., à la relever et garantir pour défaut d'information quant aux horaires de vol fixés par la société C. dont elle ne garantit pas la ponctualité des horaires de vol fixés,

- de condamner en tout état de cause les consorts X. à lui verser la somme de 1.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux dépens.

L'affaire a été mise en délibéré au 3 mars 2008.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE.

Il y a lieu, à titre liminaire, d'écarter des débats la note que la société C. a fait parvenir par son conseil en cours de délibéré, comme n'y ayant pas été autorisée, contrairement à ce qu'elle soutient,

 

Sur les demandes des consorts X.

Il n'est pas contesté que le vol à bord duquel les consorts devaient embarquer à destination de DAKAR le 22 décembre 2006 a été différé au 23 décembre 2006 au matin à 9 heures,

 

Sur les demandes formées à l'encontre de la société T. exerçant sous l'enseigne N.

La société T. exerçant sous l'enseigne N. qui s'est bornée à vendre des billets en ligne s'exonère de la responsabilité qu'elle pourrait encourir en vertu de l'article 15 de la loi du 21 juin 2004, dans la mesure où il est constant que la mauvaise exécution du contrat est imputable au fait imprévisible et insurmontable [minute page 5] d'un tiers, la société C,  étranger à la fourniture de la prestation prévue au contrat,

Les consorts X. doivent être déboutés de leurs demandes formées à l'encontre de la société T. exerçant sous l'enseigne N.

 

Sur les demandes formées à l'encontre de la société C.

Pour s'opposer aux demandes formées à son encontre, la société C. expose avoir respecté les obligations lui incombant en tant que transporteur aérien au regard de la législation européenne, et ajoute que les consorts X. ne démontrent nullement le préjudice qu'il allèguent et dont ils sollicitent l'indemnisation à hauteur de la somme de 845 € par passager,

Les consorts X. ne contestent pas avoir bénéficié de boissons, de repas et de l'hébergement dans un hôtel situé dans la zone aéroportuaire durant la nuit du 22 au 23 décembre 2006, de sorte qu'il y a lieu de considérer que la société C. a effectivement respecté les obligations lui incombant en vertu des articles 6, 8, 9 du règlement communautaire n° 261/2004,

Si l'article 6 du règlement précité qui fait référence aux retards ne fait aucun renvoi à l'article 7 relatif au droit à indemnisation, il n'en demeure pas moins que les passagers sont en droit de rechercher la responsabilité contractuelle de la compagnie aérienne sur le fondement des dispositions des article 1142 et suivants du Code Civil, qu'il leur appartient à cet effet de rapporter la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice,

Aux termes de l'article 1147 du Code Civil, le débiteur d'une obligation est responsable de son inexécution ou du retard dans son exécution toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée,

En l'espèce, la clause de non-garantie de retard stipulée dans les conditions générales de vente que la société C. invoque pour dénier sa responsabilité, est abusive en ce qu'elle est contraire aux dispositions combinées des articles 1er et 23 de la loi du 13 juillet 1992, il y a donc lieu de la réputer non écrite,

Les cas d'exonération de responsabilité sont limitativement énumérés par les articles 15 et suivants de la loi du 21 juin 2004 et l'article L. 121-20-3 du Code de la Consommation, en vertu desquels « le professionnel peut s'exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en [minute page 6] apportant la preuve que l'inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable, soit à l'acheteur, soit au fait, imprévisible et insurmontable, d'un tiers étranger à la fourniture de prestations prévues au contrat, soit à un cas de force majeure »,

Il est constant que la défaillance d'un sous-traitant ne présente pas les caractères de la force majeure, étant précisé au surplus que les mauvaises conditions météorologiques à Londres qui sont simplement alléguées, ne suffisent pas à elles-seules à justifier l'inexécution par la société C. de ses obligations,

Cette société doit être déclarée responsable des conséquences dommageables du retard,

Les éléments de la procédure permettent d'évaluer à la somme de 500 €, toutes causes confondues et pour l'ensemble de la famille, l'indemnisation des préjudices justifiés résultant du retard du vol à destination de DAKAR,

 

Sur la demande de la société C. tendant à se voir garantie par la société T. exerçant sous l'enseigne N. du montant des condamnations prononcées à son encontre.

Il y a lieu de débouter de cette demande, la société C. qui est seule responsable du préjudice lié au retard,

 

Sur la demande reconventionnelle de la société T. exerçant sous l'enseigne N. en paiement de dommages-intérêts pour procédure.

Les consorts X. ayant pu se méprendre sur l'étendue de ses droits, leur action ne saurait être qualifiée d'abusive, étant précisé à cet égard que l'exercice d'une action en justice ne dégénère en abus que s'il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi, ou s'il s'agit d'une erreur grave équipollente au dol, ce qui n'est pas démontré en l'espèce,

La société T. exerçant sous l'enseigne N. doit donc être déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.

[minute page 7]

Sur l'application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Il serait inéquitable de laisser aux consorts X. la charge des frais irrépétibles par eux exposés dans le cadre de cette procédure et non compris dans les dépens, que la société doit être condamnée à leur verser la somme de 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Il n'est pas inéquitable de laisser à la société T., exerçant sous l'enseigne N., la charge des frais irrépétibles visés à l'article de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS.

Le Juge de Proximité, statuant publiquement, en dernier ressort, par jugement contradictoire,

Déboute les consorts X. comme mal fondés en leurs demandes formées à l'encontre de la société T. exerçant sous l'enseigne N.,

Déclare la société C. responsable, sur le fondement des dispositions de l'article 1147 du Code Civil, des préjudices résultant pour les consorts X. du retard de leur vol à destination de DAKAR initialement prévu le 22 décembre 2006,

La condamne à leur verser la somme de 500 €, à titre d'indemnisation de leurs préjudices, toutes causes confondues, pour l'ensemble de la famille,

La déboute de sa demande tendant à voir la société T. exerçant sous l'enseigne N., à la garantir du montant des condamnations prononcées à son encontre,

Déboute la société T. exerçant sous l'enseigne N. de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, et de sa demande formée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

[minute page 8] Condamne la société C. à verser aux consorts X. la somme de 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

La condamne aux dépens.

Fait et jugé au Tribunal d'Instance de MONTREUIL, le 3 mars 2008.

Le Greffier                Le Juge de Proximité.