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TGI LYON (4e ch.), 16 avril 2012

Nature : Décision
Titre : TGI LYON (4e ch.), 16 avril 2012
Pays : France
Juridiction : TGI Lyon. 4e ch.
Demande : 10/15611
Date : 16/04/2012
Nature de la décision : Rejet
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 4/11/2010
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4105

TGI LYON (4e ch.), 16 avril 2012 : RG n° 10/15611

Publication : Site CCA

 

Extrait : « Attendu que l'événement suite auquel la banque est en droit de considérer que le prêt est exigible est en l'espèce totalement indépendant de la volonté du prêteur ; Qu'il résulte au contraire d'une décision de Justice ; Que la clause attaquée ne confère donc pas d'avantage exorbitant au créancier ;

Attendu que la mention aux termes de laquelle « les sommes dues seront exigibles, si bon semble à la banque » est au contraire plus favorable au co-emprunteur, dès lors que le prêt est en principe exigible « de plein droit », alors que la banque se réserve la possibilité de ne pas l'opposer au co-emprunteur ;

Qu'au surplus, cette clause ne fait que reprendre les termes de l'article L. 643-1 du Code de Commerce rendant exigible la créance en cas de liquidation judiciaire du débiteur ;

Que ce texte rend également la créance exigible indépendamment du défaut éventuel de paiement de cette créance par le débiteur, du seul fait de la survenue de la liquidation judiciaire ;

Attendu que Madame X. sera donc déboutée de ses demandes tendant à déclarer que l'article 16 du contrat de prêt est une clause abusive, à prononcer en conséquence le courrier prononçant la résiliation du contrat de prêt, et à condamner la Société [L. A.] à exécuter le contrat de prêt ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LYON

QUATRIÈME CHAMBRE

JUGEMENT DU 16 AVRIL 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 10/15611.

 

DEMANDERESSE :

Madame X.

[adresse], représente(e) par Maître Éric ANDRÈS, avocat au barreau de LYON

 

DÉFENDERESSE :

SA L.A.

[adresse], représente(e) par Maître Pierre-Yves CERATO, avocat au barreau de LYON

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Monsieur Georges PEGEON

Assesseurs : Madame Florence BARDOUX, Madame Stéphanie  JOSCHT

Greffier : Madame Michèle TRAIT

JUGEMENT : réputé contradictoire, en premier ressort, prononcé le 16 avril

DÉBATS : Audience publique du 6 février 2012

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 1 - N.B. première page non paginée]

FAITS ET PRÉTENTIONS :

Par acte d'Huissier en date du 4 novembre 2010, Madame X. a fait assigner la Société [L. A.] devant la présente juridiction.

Madame X. expose qu'elle s'est portée co-emprunteur avec Monsieur Y. pour un prêt immobilier de 134.000,00 € consenti par la Société [L. A.].

Monsieur Y. a été placé en liquidation judiciaire par décision du Tribunal de Commerce du 13 avril 2010 et la banque a considéré que le solde du prêt était devenu exigible de plein droit de ce fait en application de l'article 16 du contrat de prêt.

Madame X. soutient que cette clause est abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation au motif que la résiliation est étrangère à un manquement du débiteur à son obligation de remboursement.

Elle invoque en ce sens un avis de la Commission des Clauses Abusives. Elle précise qu'il n'y a aucune échéance impayée.

Elle en déduit que cette clause est manifestement abusive et que le courrier de la banque du 10 mai 2010 prononçant la résiliation du prêt sur son fondement est nul et de nul effet.

Madame X. demande donc au Tribunal :

- de déclarer que l'article 16 du contrat de prêt est une clause abusive ;

- de dire que le courrier prononçant la résiliation du contrat de prêt est donc nul ;

- de condamner la Société [L. A.] à exécuter le contrat de prêt ;

- de condamner la Société [L. A.] à lui payer la somme de 3.000,00 €  à titre de dommages et intérêts et celle de 3.000,00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- de rejeter toutes demandes adverses ;

- de condamner la banque aux dépens, avec distraction au profit de son avocat.

La Société [L. A.] conclut au rejet des prétentions adverses et demande au Tribunal de fixer sa créance à la somme de 123.712,61 € arrêtée au 30 juillet 2010, outre Intérêts au Taux Conventionnel de 4,40 %, frais et accessoires postérieurs à cette date.

Elle réclame la condamnation de Madame X. au paiement de la somme de 3.500,00 € à titre de Dommages et Intérêts pour procédure abusive et de celle de 3.000,00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, et aux dépens, avec distraction au profit de son avocat

La Société [L. A.] explique que la liquidation judiciaire n'est pas un événement dépendant de son pouvoir d'appréciation ou de son bon vouloir et que dès lors, la clause d'exigibilité immédiate de plein droit du prêt dans une telle hypothèse n'est pas abusive.

Elle rappelle que les avis de la Commission des Clauses Abusives n'ont aucun pouvoir normatif.

Elle souligne qu'en application de l'article L. 643-1 du Code de Commerce, la liquidation judiciaire rend exigibles les créances non échues.

[minute page 2] Madame X. réplique que même si les avis de la Commission des Clauses Abusives ne s'imposent pas, les juges peuvent s'y référer et les suivre.

Elle conteste l'application de l'article L. 643-1 du Code de Commerce au motif qu'il n'est applicable qu'aux créances non échues du débiteur alors que la banque n'est pas débitrice.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 novembre 2011.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Attendu que Madame X. s'est portée co-emprunteur solidaire avec Monsieur Y. par acte de prêt en date du 21 décembre 2004 ;

Attendu qu'en application de l'article L. 132-1 Code de la Consommation, « dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat »

Qu'en l'espèce, la clause critiquée est ainsi libellée :

16. EXIGIBILITÉ IMMÉDIATE

16.1. Les sommes dues seront de plein droit et immédiatement exigibles, si bon semble à la banque, sans formalités ni mise en demeure : - (…) - en cas de liquidation judiciaire de l'emprunteur - (…)

Attendu que l'événement suite auquel la banque est en droit de considérer que le prêt est exigible est en l'espèce totalement indépendant de la volonté du prêteur ;

Qu'il résulte au contraire d'une décision de Justice ;

Que la clause attaquée ne confère donc pas d'avantage exorbitant au créancier ;

Attendu que la mention aux termes de laquelle « les sommes dues seront exigibles, si bon semble à la banque » est au contraire plus favorable au co-emprunteur, dès lors que le prêt est en principe exigible « de plein droit », alors que la banque se réserve la possibilité de ne pas l'opposer au co-emprunteur ;

Qu'au surplus, cette clause ne fait que reprendre les termes de l'article L. 643-1 du Code de Commerce rendant exigible la créance en cas de liquidation judiciaire du débiteur ;

Que ce texte rend également la créance exigible indépendamment du défaut éventuel de paiement de cette créance par le débiteur, du seul fait de la survenue de la liquidation judiciaire ;

[minute page 3] Attendu que Madame X. sera donc déboutée de ses demandes tendant à déclarer que l'article 16 du contrat de prêt est une clause abusive, à prononcer en conséquence le courrier prononçant la résiliation du contrat de prêt, et à condamner la Société [L. A.] à exécuter le contrat de prêt ;

Attendu que la créance de la Société [L. A.] à l'encontre de Madame X. pourra être fixée comme demandé à la somme non contestée de 123.712,61 € arrêtée au 30 juillet 2010, outre Intérêts au Taux Conventionnel de 4,40 % à compter du 31 juillet 2010 ;

Attendu que la demande de Dommages et Intérêts de Madame X. qui succombe au principal sera rejetée ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de Dommages et Intérêts pour procédure abusive présentée par la banque en l'absence de préjudice distinct de l'obligation de se défendre en justice

Qu'il lui sera par contre alloué la somme de 1.200,00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Attendu que la partie qui succombe est condamnée aux dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de l'avocat adverse dans les conditions prévues à l'article 699 du Code de Procédure Civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL, statuant publiquement, par jugement contradictoire, et en premier ressort,

DÉBOUTE Madame X. ;

FIXE la créance de la Société [L. A.] à la somme de 123.712,61 € arrêtée au 30 juillet 2010, outre Intérêts au Taux Conventionnel de 4,40 % à compter du 31 juillet 2010 ;

CONDAMNE Madame X. à payer à la Société [L. A.] la somme de 1.200,00 Euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

DÉBOUTE la Société [L. A.] pour le surplus ;

CONDAMNE Madame X. aux dépens, avec droit de recouvrement direct dans les conditions prévues à l'article 699 du Code de Procédure Civile au profit de Maître CERATO, avocat.

Prononcé à la date de mise à disposition au greffe par Florence BARDOUX, Vice-Président ;

En foi de quoi le présent jugement a été signé par le Président, Georges PEGEON, Vice-Président, et Michelle TRAIT, Greffier présent lors du prononcé.

Le Greffier                                        Le Président

Madame Michèle TRAIT                Monsieur G. PEGEON