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CAA DOUAI (2e ch.), 28 mai 2013

Nature : Décision
Titre : CAA DOUAI (2e ch.), 28 mai 2013
Pays : France
Juridiction : Douai (CAA)
Demande : 11DA01157
Date : 28/05/2013
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Legifrance
Date de la demande : 18/07/2011
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4450

CAA DOUAI (2e ch.), 28 mai 2013 : req. n° 11DA01157

Publication : Legifrance

 

Extrait : « Que cette clause, restreignant le champ de l’intervention du contrôleur technique, n’est pas contraire aux articles L. 111-23 et L. 111-24 du code de la construction et de l’habitation, dans leur rédaction applicable au marché en cause, qui définissent la mission du contrôleur technique, soulignent que ses missions peuvent être limitées contractuellement et rappellent que cet intervenant peut répondre de sa responsabilité au titre de la garantie décennale ;

que la commune ne peut utilement soutenir que les stipulations de l’article 4 des conditions générales du marché en cause présentent le caractère d’une clause abusive, devant être réputée non écrite, au sens de l’article L. 132-1 du code de la consommation qui ne s’applique qu’aux relations entre un professionnel et un non-professionnel ou un consommateur ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE DOUAI

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 28 MAI 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Requête n° 11DA01157. Deuxième Chambre -

Formation (à trois) : M. Mortelecq, président, M. Patrick Minne, rapporteur, M. Marjanovic, rapporteur public ?

SELARL VOVAN & ASSOCIES, avocat(s).

 

REQUÉRANT : SA Cete Apave Nord-Ouest

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 18 juillet 2011, régularisée par la production de l’original le 20 juillet 2011 au greffe de la cour, présentée pour la SA Cete Apave Nord-Ouest, dont le siège est [adresse], par Maître H. A.; la SA Cete Apave Nord-Ouest demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0706177 du 17 mai 2011 du tribunal administratif de Lille en tant qu’il l’a condamnée à verser à la commune de Bruay-la-Buissière la somme de 93.001,70 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 24 septembre 2007, en réparation des préjudices résultant des désordres affectant la salle d’escrime du complexe sportif des T. ;

2°) à titre principal, de la mettre hors de cause et de mettre à la charge de la commune de Bruay-la-Buissière, de la SARL ABCD Escrime et de la SARL Atelier du Renouveau la somme globale de 3.000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

3°) à titre subsidiaire, de prononcer la condamnation solidaire de la SARL ABCD Escrime et la SARL Atelier du Renouveau à la garantir des condamnations susceptibles d’être prononcées à son encontre, de limiter le coût des travaux de reprise à la somme de 89.568,50 euros (TTC), d’enjoindre à la commune de Bruay-la-Buissière de lui communiquer l’identité et les coordonnées de l’assureur responsabilité civile décennale de la SARL ABCD Escrime, sous astreinte journalière de 500 euros, et de mettre à la charge de la commune de Bruay-la-Buissière, de la SARL ABCD Escrime, de la SARL Atelier du Renouveau et toute partie perdante la somme globale de 3.000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

* * *

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l’ordonnance n° 2005-658 du 8 juin 2005 portant modification de diverses dispositions relatives à l’obligation d’assurance dans le domaine de la construction et aux géomètres experts ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code civil ;

Vu le code de la construction et de l’habitation ;

Vu le code des assurances ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique :

- le rapport de M. Patrick Minne, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public,

- et les observations de Maître A. F., pour la commune de Bruay-la-Buissière et de Maître C. G., pour la société Mutuelle des Architectes Français ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1. Considérant que, dans le cadre de la construction du complexe sportif dit des Tombelles, la commune de Bruay-la-Buissière a confié à la SARL ABCD Escrime, par marché du 16 décembre 2002, l’exécution du lot n° 11 « Equipement d’escrime » ; que la maîtrise d’œuvre de ces travaux a été attribuée, par marché du 23 mai 2002, à un groupement dont le mandataire était la SARL Atelier du Renouveau ; que la SA Cete Apave Nord-Ouest a été chargée du contrôle technique de l’opération par marché du 25 juin 2002 ; que cette dernière société fait appel du jugement du 17 mai 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille l’a, notamment, condamnée, solidairement avec la SARL ABCD Escrime, à verser à la commune, maître de l’ouvrage, la somme de 93.001,70 euros en réparation des préjudices résultant des désordres affectant la piste d’escrime du complexe sportif ;

 

Sur l’intervention de la société Mutuelle des Architectes Français :

2. Considérant que, dans les litiges de plein contentieux, sont seules recevables à former une intervention les personnes qui peuvent se prévaloir d’un droit auquel la décision à rendre est susceptible de préjudicier ; que l’assureur d’un constructeur dont la responsabilité décennale est recherchée ne peut être regardé comme pouvant, dans le cadre d’un litige relatif à l’engagement de cette responsabilité, se prévaloir d’un droit de cette nature ; que, par suite, l’intervention de la société Mutuelle des Architectes Français (MAF), en qualité d’assureur de la SARL Atelier du Renouveau, ne peut être admise ;

 

Sur la responsabilité de la SA Cete Apave Nord-Ouest :

3. Considérant qu’il résulte du marché conclu le 25 juin 2002 entre la commune de Bruay-la-Buissière et la SA Cete Apave Nord-Ouest que cette dernière s’est vu confier, notamment, une mission de type « LP » relative à la solidité des ouvrages et des éléments d’équipement dissociables et indissociables ; que, sur le document signé par les parties, celles-ci sont convenues que l’intervention du contrôleur technique s’exercerait conformément aux dispositions de la norme NF P 03-100 relative aux critères généraux pour la contribution du contrôle technique à la prévention des aléas techniques dans le domaine de la construction et à ses annexes ; que les conditions spéciales applicables à la mission « LP », annexées au contrat, stipulent que celle-ci s’exerce conformément aux dispositions de l’article 4 de ladite norme technique diffusée par l’Afnor ; qu’il résulte de l’article 4.2.7 de la norme NF P 03-100 que « dans sa mission, le contrôleur technique n’examine pas, sauf dispositions contraires du contrat de contrôle technique, les dispositions relatives aux espaces verts et aux aménagements extérieurs, ni celles concernant les aménagements spécifiques des activités professionnelles » ; que les parties, en ayant approuvé l’article 4 des conditions générales, ont, pour définir les limites de l’intervention de la SA Cete Apave Nord-Ouest, considéré, au 8e alinéa de cet article, que « les équipements sportifs fixes ou mobiles » étaient au nombre des aménagements spécifiques des activités professionnelles placés en dehors du champ du contrôle technique ; que cette clause, restreignant le champ de l’intervention du contrôleur technique, n’est pas contraire aux articles L. 111-23 et L. 111-24 du code de la construction et de l’habitation, dans leur rédaction applicable au marché en cause, qui définissent la mission du contrôleur technique, soulignent que ses missions peuvent être limitées contractuellement et rappellent que cet intervenant peut répondre de sa responsabilité au titre de la garantie décennale ; que la commune ne peut utilement soutenir que les stipulations de l’article 4 des conditions générales du marché en cause présentent le caractère d’une clause abusive, devant être réputée non écrite, au sens de l’article L. 132-1 du code de la consommation qui ne s’applique qu’aux relations entre un professionnel et un non-professionnel ou un consommateur ; que, compte-tenu du champ de la mission assignée par le marché du 25 juin 2002, les désordres affectant la piste d’escrime sous la forme d’un décollement des plaques, leur déformation à la suite du clouage entrepris au cours des opérations de réparation et l’absence de rehausse des supports de poulies placées derrière chaque usager, n’étaient pas imputables à la société requérante ; qu’elle est, par suite, fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a estimé qu’elle devait répondre, comme constructeur de l’ouvrage, de la responsabilité décennale sur le fondement des principes dont s’inspirent les articles 1792 et suivants du code civil ;

4. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que, statuant dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel et sans qu’il soit utile de faire droit à la demande de la commune de Bruay-la-Buissière tendant à ordonner la production du rapport initial de contrôle technique établi par la SA Cete Apave Nord-Ouest, les conclusions présentées par cette dernière tendant à sa mise hors de cause doivent être accueillies ; que, faisant droit à ces conclusions principales, il n’y a pas lieu pour la cour de statuer sur les autres conclusions de la SA Cete Apave Nord-Ouest, présentées seulement à titre subsidiaire ;

 

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant qu’aux termes de l’article L 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. » ;

6. Considérant qu’en vertu de ces dispositions, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l’autre partie des frais qu’elle a exposés à l’occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la commune de Bruay-la-Buissière, et, en tout état de cause, par la société MAF, doivent, dès lors, être rejetées ;

7. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la commune de Bruay-la-Buissière, de la SARL ABCD Escrime, représentée par Maître E., liquidateur judiciaire, et de la SARL Atelier du Renouveau, représentée par Maître B., liquidateur judiciaire, une somme globale de 1.500 euros au titre des frais exposés par la SA Cete Apave Nord-Ouest et non compris dans les dépens ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DÉCIDE :

Article 1er : L’intervention de la société Mutuelle des Architectes Français n’est pas admise.

Article 2 : La SA Cete Apave Nord-Ouest est mise hors de cause.

Article 3 : Le jugement n° 0706177 du 17 mai 2011 du tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu’il est contraire au présent arrêt.

Article 4 : La commune de Bruay-la-Buissière, la SARL ABCD Escrime, représentée par Maître E., liquidateur judiciaire, et la SARL Atelier du Renouveau, représentée par Maître B., liquidateur judiciaire verseront solidairement à la SA Cete Apave Nord-Ouest une somme de 1.500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la SA Cete Apave Nord-Ouest et les conclusions de la commune de Bruay-la-Buissière sont rejetés.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Cete Apave Nord-Ouest, à la commune de Bruay-la-Buissière, à la SARL ABCD Escrime, représentée par Maître D. E., liquidateur judiciaire, à la SARL Atelier du Renouveau, représentée par Maître B., liquidateur judiciaire et à la Mutuelle des Architectes Français.