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CA NÎMES (1re ch. civ. A), 24 octobre 2013

Nature : Décision
Titre : CA NÎMES (1re ch. civ. A), 24 octobre 2013
Pays : France
Juridiction : Nimes (CA), 1re ch. sect. A
Demande : 12/04190
Date : 24/10/2013
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4491

CA NÎMES (1re ch. civ. A), 24 octobre 2013 : RG n° 12/04190

Publication : Jurica

 

Extrait : « Par sa Recommandation n° 2004-3 émise le 24 mai 2004 relative aux contrats de crédit immobilier, dont se prévalent les appelants, la Commission des clauses abusives recommande d'éliminer des contrats de prêt immobilier la clause ayant pour objet « d'obliger l'emprunteur, pendant toute la durée du prêt, à verser l'ensemble de ses revenus sur un même compte dans l'établissement prêteur, sous peine de déchéance du terme, alors même que l'emprunteur aura ponctuellement satisfait à ses remboursements et de ne prévoir aucune contrepartie individualisée à cette obligation au profit de l'emprunteur » (pièce n° 3 des appelants).

En l'espèce il est stipulé aux conditions particulières de l'offre préalable de prêt immobilier que « le taux consenti aux conditions financières particulières est un taux préférentiel lié à l'engagement de l'emprunteur de domicilier ses revenus et qu'en cas de non-respect par l'emprunteur de son engagement, le prêteur se réserve le droit de revenir au taux annuel standard, celui-ci étant égal au taux préférentiel majoré de 0,75 %. »

Cette clause d'engagement de domiciliation des revenus en contrepartie d'un taux préférentiel de prêt, n'est pas stipulée à peine de déchéance du terme alors même que l'emprunteur aura satisfait à ses remboursements et comporte une contrepartie individualisée au profit de l'emprunteur qui bénéficie d'un taux préférentiel.

Le Tribunal a donc exactement retenu que cette clause qui ne créait pas un déséquilibre significatif au détriment de l'emprunteur n'est pas une clause abusive, qui en tout état de cause, si elle était reconnue comme telle, serait réputée non écrite et n'emporterait pas la nullité de la stipulation d'intérêts. »

 

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

PREMIÈRE CHAMBRE A

ARRÊT DU 24 OCTOBRE 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 12/04190. [Sur appel de] TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'AVIGNON, 6 septembre 2012.

 

APPELANTS :

Monsieur X.

le [date] à [ville], [adresse], Représentée par Maître Jean-François CECCALDI, Plaidant/Postulant (avocat au barreau d'AVIGNON), Représentée par Maître Georges POMIES RICHAUD, Plaidant/Postulant (avocat au barreau de NÎMES)

Madame Y. épouse X.

née le [date] à [ville], Représentée par Maître Jean-François CECCALDI, Plaidant/Postulant (avocat au barreau d'AVIGNON), Représentée par Maître Georges POMIES RICHAUD, Plaidant/Postulant (avocat au barreau de NÎMES)

 

INTIMÉE :

Société CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE

prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège social sis, Représentée par la SCP FORTUNET ET ASSOCIES, Plaidant/Postulant (avocats au barreau d'AVIGNON)

 

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 13 juin 2013

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS : M. Dominique BRUZY, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l’article 786 du Code de Procédure Civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : M. Dominique BRUZY, Président, M. Serge BERTHET, Conseiller, Mme Anne-Marie HEBRARD, Conseiller

GREFFIER : Mme Vanessa CHRISTIAN, Greffier, lors des débats, et Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffier, lors du prononcé,

DÉBATS : à l'audience publique du 27 juin 2013, où l'affaire a été mise en délibéré au 24 octobre 2013. Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT : Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Dominique BRUZY, Président, publiquement, le 24 octobre 2013, par mise à disposition au greffe de la Cour.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Monsieur X. et Madame Y. épouse X. ont relevé appel du jugement rendu le 6 septembre 2012 par le Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON, auquel il y a lieu de se reporter pour l'exposé complet des faits et de la procédure antérieure, les condamnant solidairement à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence la somme de 396.679,66 euros outre intérêts au taux contractuel de 4,88 % à compter du 9 septembre 2011, celle de 1.500 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile et aux entiers dépens.

Dans le dernier état de leurs conclusions notifiées et déposées par voie électronique le 21 mars 2013, Monsieur et Madame X. demandent au visa des articles L. 312-8-2, L. 313-1, R. 313-1, R. 312-1 et L. 132-1 du Code de la Consommation, et de la Recommandation n° 2004-3 émise par la Commission des clauses abusives relative aux contrats de prêt mobilier :

- de dire recevable et bien fondé leur appel.

- de réformer la décision entreprise.

- de dire que le tableau d'amortissement n'est absolument pas conforme aux dispositions édictées par l’article L. 312-8-2 du Code de la Consommation.

- de dire que le taux de période ne figure pas sur l'offre de crédit qui leur a été adressé.

- de dire que la clause qui impose à l'emprunteur d'ouvrir un compte bancaire dans les livres du prêteur et d'y domicilier ses revenus est une clause abusive au sens de l’article L. 312-1 et L. 132-1 du Code de la Consommation.

- de dire que le fait de prévoir un taux majoré en cas de non domiciliation des revenus équivaut à stipuler deux taux d'intérêts applicables alternativement et qu'un crédit consenti ne peut comporter deux taux effectifs globaux et au regard des dispositions de l’article L. 321-8 du Code de la Consommation.

- par conséquent, de prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts.

- de dire que la banque Crédit Agricole Alpes Provence a failli à ses obligations contractuelles d'information et de mise en garde.

- de la condamner au paiement de la somme de 332.500,00 euros à titre de dommages-intérêts au regard de la violation des obligations d'information et de conseil.

- de la condamner au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

- de la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans le dernier état de ses conclusions notifiées et déposées par voie électronique le 31 janvier 2013, la CRCAM Alpes Provence demande au visa des articles L. 312-1 et suivants, L. 313-1 et R. 313, R. 132-1 et 2 du Code de la Consommation, 64 et 70 du Code de Procédure Civile, 1134, 1135, 1315 alinéa 2 du Code Civil, 564 du Code de Procédure Civile :

- de constater la parfaite régularité du tableau d'amortissement joint à l'offre préalable de crédit.

- de constater que le taux de période parfaitement déterminable au vu des éléments contenus dans l'offre de crédit a donc été communiqué aux emprunteurs.

- de constater que l'offre de crédit ne stipule qu'un seul taux.

- de débouter, en conséquence, les époux X. de leur demande de nullité de la stipulation d'intérêts.

- de constater que la clause de domiciliation n'est pas abusive et de dire, en tout état de cause, dans le cas contraire, qu'elle sera réputée non écrites.

- de dire la demande d'allocation de dommages-intérêts irrecevable comme présentée pour la première fois en cause d'appel et de débouter,

en tout état de cause, les époux X. de leur demande de dommages-intérêts.

- de confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu le 6 septembre 2012 par le Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON.

- de condamner les époux X. à lui payer la somme de 411.907,12 euros outre intérêts au taux de 4,88 % sur la somme de 386.679,66 euros à compter du 9 septembre 2011.

- de condamner les époux X. à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile et aux entiers dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Les appelants font grief au Tribunal de n'avoir pas fait droit à leur demande d'annulation de la stipulation d'intérêts, ce qui était l'objet de leur assignation introductive de la présente instance, alors que le tableau d'amortissement joint à l'offre préalable de prêt était incomplet et erroné, que le taux de période ne figurait pas dans l'offre de crédit et que le fait de prévoir un taux majoré en cas de non domiciliation des revenus, clause abusive, équivaut à stipuler deux taux d'intérêts alternativement applicables et qu'un crédit ne peut comporter deux taux effectifs globaux.

Après avoir constaté que le prêt immobilier en cause est un prêt relais habitat consenti pour une durée de 24 mois remboursable in fine par une seule échéance le 24ème mois en capital et intérêts, ce que détaille complètement le « tableau d'amortissement théorique » joint à l'offre préalable de prêt, le Tribunal a exactement retenu que le tableau d'amortissement respectait les exigences de l’article 318-8-2 bis du Code de la Consommation, que les intérêts ont été capitalisés par période d'un mois avant d'être capitalisés au terme d'une année, que le taux de période résultait nécessairement des éléments contenus dans l'offre de crédit et qu'un seul taux d'intérêt était stipulé, celui de 4,88 % l'an, sans que l'on puisse déduire des termes de la clause de domiciliation des revenus que l'offre préalable comportait deux taux d'intérêt applicables alternativement, de sorte que la nullité de la stipulation d'intérêt tirée de l'ensemble des irrégularités alléguées n'était pas encourue.

Par sa Recommandation n° 2004-3 émise le 24 mai 2004 relative aux contrats de crédit immobilier, dont se prévalent les appelants, la Commission des clauses abusives recommande d'éliminer des contrats de prêt immobilier la clause ayant pour objet « d'obliger l'emprunteur, pendant toute la durée du prêt, à verser l'ensemble de ses revenus sur un même compte dans l'établissement prêteur, sous peine de déchéance du terme, alors même que l'emprunteur aura ponctuellement satisfait à ses remboursements et de ne prévoir aucune contrepartie individualisée à cette obligation au profit de l'emprunteur » (pièce n° 3 des appelants).

En l'espèce il est stipulé aux conditions particulières de l'offre préalable de prêt immobilier que « le taux consenti aux conditions financières particulières est un taux préférentiel lié à l'engagement de l'emprunteur de domicilier ses revenus et qu'en cas de non-respect par l'emprunteur de son engagement, le prêteur se réserve le droit de revenir au taux annuel standard, celui-ci étant égal au taux préférentiel majoré de 0,75 %. »

Cette clause d'engagement de domiciliation des revenus en contrepartie d'un taux préférentiel de prêt, n'est pas stipulée à peine de déchéance du terme alors même que l'emprunteur aura satisfait à ses remboursements et comporte une contrepartie individualisée au profit de l'emprunteur qui bénéficie d'un taux préférentiel.

Le Tribunal a donc exactement retenu que cette clause qui ne créait pas un déséquilibre significatif au détriment de l'emprunteur n'est pas une clause abusive, qui en tout état de cause, si elle était reconnue comme telle, serait réputée non écrite et n'emporterait pas la nullité de la stipulation d'intérêts.

Les appelants formulent pour la première fois en appel une demande de déclaration de responsabilité du prêteur pour manquement à ses obligations contractuelles d'information et de mise en garde, et demandent la condamnation la CRCAM Alpes Provence à leur payer en réparation une somme équivalente à celle prêtée.

Mais la CRCAM Alpes Provence leur oppose à juste titre que cette prétention nouvelle est irrecevable au regard des dispositions de l’article 564 du Code de Procédure Civile, pour n'avoir pas été formulée devant le Tribunal qu'ils ont saisi à titre principal d'une demande de nullité de la stipulation d'intérêts et devant lequel ils n'ont pas formé de demande en déclaration de responsabilité du prêteur lorsque celui-ci a formulé une demande reconventionnelle, à leur action, en remboursement de prêt.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris.

Y ajoutant,

Vu l’article 564 du Code de Procédure Civile,

Déclare irrecevable la demande de Monsieur et Madame X. en déclaration de responsabilité et condamnation de la CRCAM Alpes Provence au paiement de dommages-intérêts pour manquement à ses obligations d'information et de mise en garde.

Condamne Monsieur et Madame X. aux dépens d'appel.

Vu l’article 700 du Code de Procédure Civile,

Les condamne à payer à la CRCAM Alpes Provence la somme de 1.500 euros.

Arrêt signé par M. BRUZY, Président et par Mme LAURENT-VICAL, Greffier.

LE GREFFIER,        LE PRÉSIDENT,