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CA CHAMBÉRY (2e ch.), 20 juin 2013

Nature : Décision
Titre : CA CHAMBÉRY (2e ch.), 20 juin 2013
Pays : France
Juridiction : Chambery (CA), 2e ch.
Demande : 12/01512
Date : 20/06/2013
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 12/07/2012
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2013-016993
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4499

CA CHAMBÉRY (2e ch.), 20 juin 2013 : RG n° 12/01512

Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2013-016993

 

Extrait : « L'article L. 121-22,4° du code de la consommation exclut du champ d'application des dispositions relatives au démarchage à domicile, les ventes, locations ou locations ventes de biens, ou les prestations de service lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale, ou de toute autre profession.

En l'espèce, en première page du contrat, le client reconnaît que l'objet du contrat de licence d'exploitation de site internet a un lien direct avec son activité professionnelle et que ce faisant le code de la consommation ne s'applique pas. Cette mention pré imprimée, ne prive pas les juges saisis d'un litige de la vérification de ce lien avec l'activité professionnelle. Monsieur X. est un charpentier, sa démarche en souscrivant ce contrat, est indiscutablement de se faire connaître d'une plus large clientèle afin d'accroître les commandes et d'augmenter son potentiel commercial. A ce titre, compte tenu du lien direct avec sa profession, il ne peut bénéficier des dispositions protectrices du consommateur en matière de démarchage à domicile énoncées par les articles L. 121-23 à L. 121-29 du code de la consommation qu'il invoque dans ses écritures. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 20 JUIN 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 12/01512. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal d'Instance de BONNEVILLE en date du 20 juin 2012 : R.G. n° 11-10-000663.

 

Appelant :

M. X.,

demeurant [adresse], assisté du CABINET RIBES ET ASSOCIÉS, avocats au barreau de BONNEVILLE

 

Intimées :

SAS LOCAM,

dont le siège social est sis [adresse] prise en la personne de son représentant légal, assistée de la SCP MICHEL FILLARD & JULIETTE COCHET-BARBUAT, avocats postulants au barreau de CHAMBERY et la SELARL DUBY DELANNOY, avocats plaidants au barreau de CHAMBERY,

Maître Simon LAURE - Liquidateur judiciaire de SARL ICARE,

dont le siège social est situé [adresse], sans avocat constitué

 

COMPOSITION DE LA COUR : Lors de l'audience publique des débats, tenue le 21 mai 2013 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffier,

Et lors du délibéré, par : - Madame Chantal MERTZ, Conseiller faisant fonction de Président, à ces fins désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président - Madame Evelyne THOMASSIN, Conseiller, qui a procédé au rapport - Monsieur Franck MADINIER, Conseiller,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits, procédure et prétentions des parties :

Le 7 janvier 2010, monsieur X. a signé avec la SARL ICARE un contrat de licence d'exploitation de site internet moyennant le paiement de 48 mensualités de 170 euros HT. Il a signé un procès verbal de réception le 19 janvier 2010. La société ICARE a cédé le contrat à la société LOCAM qui l'a financé.

En mars 2010, monsieur X. a contesté la bonne formation du contrat et en particulier la signature du procès verbal de réception et de conformité.

Le 7 septembre 2010, la société LOCAM a saisi le Tribunal d'instance de Bonneville pour obtenir paiement des sommes lui restant dues. Monsieur X. a attrait à la cause la société ICARE.

Le Tribunal de commerce de Marseille a prononcé le 4 avril 2011, le redressement judiciaire de la société ICARE avec désignation de Maître LAURE comme mandataire judiciaire, procédure convertie le 16 avril 2012 en liquidation judiciaire.

Le Tribunal d'instance de Bonneville, dans un jugement en date du 20 juin 2012 a :

- déclaré irrecevables les demandes en garantie dirigées à l'encontre de Maître LAURE, es qualité, par monsieur X.,

- déclaré recevables les demandes en paiement de la société LOCAM,

- dit n'y avoir lieu à prononcer la nullité du contrat de licence d'exploitation,

- constaté la résiliation du contrat le 12 juin 2010,

- condamné monsieur X. à payer à la société LOCAM la somme de 9.357.96 euros avec intérêt au taux légal à compter de la décision,

- rejeté toute autre demande.

Monsieur X. a fait appel de la décision par déclaration au greffe en date du 12 juillet 2012.

Ses moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions du 5 octobre 2012, il demande à la Cour de :

- réformer la décision déférée,

A titre principal,

- dire irrecevables les demandes de la société LOCAM, faute d'intérêt à agir,

A titre subsidiaire,

- prononcer la résolution du contrat pour nullité ou manquement contractuel,

En conséquence,

- débouter la société LOCAM de ses demandes,

- la condamner à lui rembourser 2.392 euros au titre des frais techniques, et 406.64 euros au titre des échéances des 10 et 20 février 2010,

A titre encore plus subsidiaire,

- fixer la créance de monsieur X. à l'égard de la société ICARE au montant des condamnations prononcées à son encontre au profit de la société LOCAM ;

En tout état de cause,

- condamner la société LOCAM à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société LOCAM aux dépens.

Monsieur X. indique qu'il avait été démarché de manière très énergique par la société ICARE et que dès le 11 mars 2010, par l'intermédiaire de son conseil, il avait contesté la validité de la convention. Il conteste avoir signé quoique ce soit avec la société LOCAM et admet seulement un contrat bipartite de licence d'exploitation avec la société ICARE. Si elle se prétend étrangère au contrat de sorte qu'on ne peut lui opposer d'exception d'inexécution, la société LOCAM n'aurait aucun intérêt à agir. Il soutient que la cession du contrat ne lui a pas été notifiée et que la société LOCAM ne justifie pas du paiement. S'agissant d'un contrat signé à la suite d'un démarchage à domicile, monsieur X. indique qu'il n'a pas de lien direct avec sa profession dans le domaine de la charpente, la couverture et l'isolation, de sorte que les articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation sont applicables et que certaines mentions obligatoires ne figurent pas au contrat qui est donc nul.

Au visa des articles 1107 et suivants du code civil, monsieur X. soutient que le contrat n'a pas d'objet puisqu'il n'avait aucune idée de ce qu'il voulait, et que la fiche technique nécessaire à préciser son projet n'a jamais été établie. Les manœuvres de la société ICARE l'auraient même conduit à signer le jour même de la commande, le bon de réception du matériel pour une installation pourtant non terminée et non conforme. Il y aurait également dol, dans la mesure où la société ICARE a présenté à son client les documents signés comme un simple projet et non un engagement ferme et définitif dont elle s'est ensuite servi comme l'obligeant définitivement. Il explique que le site encore au 9 mars 2010 n'était pas fini, pas satisfaisant, comportait de nombreuses erreurs et incohérences.

Dans des conclusions du 4 décembre 2012, la société LOCAM demande à la Cour de :

- confirmer le jugement déféré,

- condamner monsieur X. à lui payer la somme de 9.457.96 euros avec intérêt au taux légal à compter du 20 juin 2012, date du jugement dont appel,

- dire que les intérêts courront au taux majoré de 5 points sur la somme de 715.20 euros et au taux légal sur celle de 8.742.76 euros,

- condamner monsieur X. à lui verser la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et le condamner aux dépens avec distraction au profit de la SCP FILLARD COCHET BARBUAT ;

La société LOCAM se prévaut d'une cession de la convention à son profit, laquelle était prévue à l'article 1er des conditions générales sans nécessité d'une signification d'autant qu'elle a adressé à monsieur X. ses factures, levant toute équivoque. Or, de son côté il a signé un document attestant de la livraison de sa commande et de sa conformité. La société LOCAM rappelle qu'elle n'est pas tenue des obligations contractuelles et qu'il revenait à monsieur X. d'agir en résiliation contre la société ICARE s'il estimait qu'elle manquait à l'exécution de la convention. Monsieur X. aurait engagé sa responsabilité en signant les procès verbaux de conformité s'ils ne correspondaient pas à la réalité dans le cadre de manoeuvres qu'il dénonce aujourd'hui.

Elle expose que la résiliation a été faite à la suite d'impayés de loyers et non à l'initiative de monsieur X., depuis le 13 juin 2010.

Maître LAURE, liquidateur judiciaire de la société ICARE a écrit le 17 décembre 2012, pour indiquer à la Cour qu'il ne constituerait pas avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 mai 2013.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Motivation de la décision :

* Sur l'intérêt à agir de la société LOCAM :

Le contrat de licence d'exploitation signé par monsieur X. le 7 janvier 2010 comporte en son article 1er, une stipulation selon laquelle, le client reconnaît à la société ICARE la possibilité de céder ses droits au profit d'un cessionnaire, ce qu'il accepte dès la signature du contrat, sans faire du cessionnaire une condition de son accord, tandis qu'il en sera informé par tout moyen, et notamment par le libellé de la facture échéancier ou de l'avis de prélèvement qui sera émis. L'article se poursuit en énonçant certaines sociétés susceptibles de devenir cessionnaire à savoir la PARFIP, KBC Lease ou LOCAM.

Par courrier du 22 janvier 2010 adressé à monsieur X. et qu'il produit lui même aux débats, il a été informé de l'intervention dans l'exécution du contrat, de la société LOCAM qui lui a adressé la facture unique de loyer.

La société LOCAM en tant que cessionnaire qui a repris les droits de la société ICARE a donc un intérêt certain à agir en paiement au sens de l’article 31 du code de procédure civile.

Elle doit être déclarée recevable.

 

* Sur la mise en œuvre du droit de la consommation :

L'article L. 121-22,4° du code de la consommation exclut du champ d'application des dispositions relatives au démarchage à domicile, les ventes, locations ou locations ventes de biens, ou les prestations de service lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale, ou de toute autre profession.

En l'espèce, en première page du contrat, le client reconnaît que l'objet du contrat de licence d'exploitation de site internet a un lien direct avec son activité professionnelle et que ce faisant le code de la consommation ne s'applique pas.

Cette mention pré imprimée, ne prive pas les juges saisis d'un litige de la vérification de ce lien avec l'activité professionnelle. Monsieur X. est un charpentier, sa démarche en souscrivant ce contrat, est indiscutablement de se faire connaître d'une plus large clientèle afin d'accroître les commandes et d'augmenter son potentiel commercial. A ce titre, compte tenu du lien direct avec sa profession, il ne peut bénéficier des dispositions protectrices du consommateur en matière de démarchage à domicile énoncées par les articles L. 121-23 à L. 121-29 du code de la consommation qu'il invoque dans ses écritures.

 

* Sur la nécessité de notifier une cession de créance :

Dans le rappel des stipulations contractuelles ci dessus, il a été relevé que l'intervention d'un cessionnaire de créance avait, dès la signature du contrat, été agréée par monsieur X., qui a été informé par la société LOCAM de son intervention dans l'exécution du contrat quelques semaines plus tard.

Cette contestation ne peut davantage prospérer.

 

* Sur l'absence de livraison du matériel :

La société LOCAM communique un procès verbal de conformité signé le 19 janvier 2010 au nom de monsieur X. Bien que celui ci conteste avoir signé un tel document en toute connaissance de cause, les clauses contractuelles étaient claires.

Or, selon l'article 2-4 du contrat, la signature du procès verbal par le client vaut reconnaissance par ce dernier de la conformité du site internet au cahier des charges et à ses besoins, et déclenche l'exigibilité des échéances.

Monsieur X. qui souhaite aujourd'hui soutenir le contraire, a signé ce procès verbal de conformité de manière imprudente alors que les photocopies d'écran informatique du 9 mars 2010 et le courriel de la société ICARE du 20 janvier 2010 témoignent du fait que le site n'était pas mis en ligne de manière satisfaisante à ces dates, ce pourquoi, la société ICARE sera condamnée à garantir monsieur X. des condamnations prononcées contre lui afin de sanctionner ses pratiques illégales consistant à faire signer au client avant livraison le bon correspondant.

 

* Sur le vice du consentement :

La démonstration de ce vice du consentement incombe à monsieur X. qui ne produit aucune pièce en ce sens.

Concernant l'objet du contrat, il consiste en la création d'un site internet afin d'élargir sa clientèle, cet objet existe, le contrat est valide même si par la suite l'exécution n'a pas été satisfaisante.

Ces contestations seront écartées.

 

* Sur le montant de la créance :

Monsieur X. ne conteste pas l'absence de paiement des loyers réclamés, les effets de la clause résolutoire sont donc acquis de sorte que la société LOCAM est fondée à réclamer les loyers impayés et les loyers à échoir jusqu'au terme du contrat soit :

Loyers impayés :          715.20 euros

Loyers à échoir :          8.742.76 euros

9.457.96 euros

Outre intérêts à compter du 20 juin 2012 conformément à la demande au taux d'intérêt légal majoré de 5 points sur la somme de 715,20 euros (article 9.6 de la convention) et au taux légal pour le surplus.

 

* Sur les autres demandes :

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la société LOCAM les frais irrépétibles engagés dans l'instance. Il ne sera pas fait application de l’article 700 du code de procédure civile.

La partie perdante supporte les dépens, ils seront à la charge de monsieur X. qui est condamné au paiement.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement et par décision réputée contradictoire,

RÉFORME partiellement le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

DÉCLARE la société LOCAM recevable en son action,

CONDAMNE monsieur CONTI à lui payer la somme de 9.457,96 euros outre intérêts à compter du 20 juin 2012 au taux d'intérêt légal majoré de 5 points sur la somme de 715.20 euros et au taux légal pour le surplus,

FIXE au titre de son recours en garantie à la somme de 9.457.96 euros outre intérêts à compter du 20 juin 2012 au taux d'intérêt légal majoré de 5 points sur la somme de 715.20 euros et au taux légal pour le surplus, la créance de monsieur CONTI dans la procédure collective de la société ICARE,

DIT n'y avoir lieu à frais irrépétibles,

REJETTE toute autre prétention,

LAISSE les dépens d'instance à la charge de monsieur CONTI avec distraction au profit de la SCP FILLARD COCHET BARBUAT.

Ainsi prononcé publiquement le 20 juin 2013 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Chantal MERTZ, Conseiller faisant fonction de Président et Madame Sylvie DURAND, Greffier.