CA PARIS (pôle 2 ch. 5), 15 octobre 2013
CERCLAB - DOCUMENT N° 4532
CA PARIS (pôle 2 ch. 5), 15 octobre 2013 : RG n° 07/15560 ; arrêt n° 269
Publication : Jurica
Extrait : « Considérant que l'appelante estime que « la condition » exigeant un taux d'IPP de 100 % ne saurait s'ajouter à l'existence d'une incapacité de se livrer à toute occupation procurant un gain dans la mesure où, pour les raisons ci-dessus énumérées, cette seconde « condition » constituerait une clause abusive ;
Considérant que suivant l’article L. 132-1 du code de la consommation « […] » ; Considérant que le fait d'exiger que le taux d'incapacité soit fixé à 100 % pour caractériser une invalidité absolue et définitive ne crée pas un tel déséquilibre dès lors que cette exigence n'implique pas, contrairement à ce qu'allègue l'appelante, que la réalisation du risque soit quasiment impossible ; Qu'en effet, en se référant au barème des accidents du travail de la sécurité sociale, le contrat ouvre la possibilité de reconnaître un tel risque dans un nombre significatif de situations (blocage des deux hanches, amputation du membre inférieur, syndrome de Parkinson...), qui n'impliquent pas que la personne se trouve dans un état de mort cérébrale ou de coma profond maintenu, comme le prétend Mme X. ; Qu'il existe bien ainsi une cause au contrat et qu'il ne saurait pas plus être soutenu que « la condition » litigieuse serait contraire à l'économie du contrat, Mme X. ayant pris cette garantie pour se protéger du développement définitivement invalidant de sa maladie dès lors que, sous réserve de la « condition » litigieuse mais licite, l'article 13 offre bien une garantie correspondant à la prime versée et que, si Mme X., souhaitait bénéficier d'autres garanties, au demeurant prévues à titre d'option par le contrat, il lui appartenait d'y souscrire ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 2 CHAMBRE 5
ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2013
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 07/15560. Arrêt n° 269 (4 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 juillet 2007 - Tribunal de Grande Instance de PARIS : RG n° 05/12205.
APPELANTE :
Madame X. épouse Y.
Représentée par Maître Patricia HARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056, Assistée de Maître Mathieu BOURGEOIS, avocat au barreau de PARIS, toque : B0688.
INTIMÉE :
SA AXA FRANCE VIE
[prise] en la personne de ses représentants légaux, Représentée par Maître Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151, Assisté de Maître Guy-claude ARON, avocat au barreau de PARIS, toque : A0383
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l’article 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 septembre 2013, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine LE FRANCOIS, présidente de chambre, et Monsieur Christian BYK, conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre, Monsieur Christian BYK, Conseiller, Madame Annick HECQ-CAUQUIL, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Joëlle BOREL
ARRÊT : - contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Catherine LE FRANCOIS, présidente et par Madame Joëlle BOREL, greffière présente lors du prononcé.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Contestant le refus de l'association AGIPI de lui verser les prestations du contrat d'assurance de groupe, auquel elle a souscrit le 21 février 1991, Mme X. a, par acte du 25 juillet 2005, assigné cette association devant le Tribunal de grande instance de PARIS.
Par jugement du 10 juillet 2007, celui-ci a donné acte de son intervention volontaire à la société AXA FRANCE VIE, mis hors de cause l'AGIPI, déclaré irrecevable la demande de versement de la rente invalidité à compter du 1er janvier 2000, débouté Mme X. de sa demande de versement du capital invalidité absolue et définitive et l'a condamnée à verser la somme de 500 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à chacune des défenderesses.
Par déclaration du 5 septembre 2007, Mme X. a fait appel de cette décision et, dans ses dernières écritures du 23 mai 2013, elle sollicite de la cour qu'elle déclare non-écrite l'article 13 des conditions générales du contrat, qu'elle condamne l'assureur à lui payer la somme de 201 232,70 euros, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation et capitalisation, outre une rente d'invalidité de 75 euros par jour sous réserve de réévaluation et 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions du 16 novembre 2012, la société AXA sollicite que soit déclarée irrecevable la demande de paiement d'une rente d'invalidité, que le jugement déféré soit confirmé et réclame à l'appelante la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
CE SUR QUOI, LA COUR :
Sur l'irrecevabilité de la demande au titre de la rente invalidité :
Considérant que la société AXA soutient que cette demande est irrecevable, la cour de céans l'ayant déjà rejetée dans un précédent arrêt ;
Considérant que Mme X. ne répond pas sur ce point ;
Considérant qu'il résulte de l'arrêt, non soumis à pourvoi, du 7 septembre 2010 de la cour de céans que celle-ci a, dans son dispositif, « confirmé le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté Mme Y. (X.) de sa demande de versement du capital invalidité absolue et définitive » ;
Qu'il en résulte que se trouve ainsi confirmée la décision du premier juge, ci-dessus rappelée, concernant cette rente de sorte qu'en vertu de l'autorité de chose jugée de cet arrêt sur le point litigieux, il y a lieu de recevoir l'exception et de dire la demande irrecevable ;
Au fond : sur le capital invalidité absolue et définitive :
Considérant qu'à l'appui de son appel, Mme X. fait valoir que les deux conditions de mise en œuvre de cette garantie, prévue à l'article 13 des conditions générales, ne sauraient être cumulatives, qu'au demeurant, la seule condition, qui exige un taux d'IPP de 100 %, est abusive et doit être déclarée non écrite, conformément à l’article L. 132-1 et suivants du code de la consommation, une telle clause, dont la réalisation est quasi impossible et ne correspondant pas à l'économie du contrat, privant celui-ci de cause ;
Qu'elle ajoute que l'expert judiciaire ayant conclu à ce qu'elle était inapte à l'exercice de toute activité professionnelle, elle est en droit d'obtenir le versement du capital réclamé ;
Considérant que l'assureur réplique que Mme X., qui reconnaît ne pas satisfaire à la seconde condition visée par l'article 13, aurait pu choisir de garantir un risque d'invalidité permanente partielle, qu'au demeurant, le barème des accidents du travail prévoit de nombreux cas d'incapacité fonctionnelle de 100 % ;
Considérant qu'aux termes de l'article 13 des conditions générales : « En cas d'IAD de l'assuré avant l'âge de 60 ans, l'assureur assimile cet état au décès et verse à l'assuré... les prestations prévues aux articles 9A, 9C, 10 et 11...
Est considéré comme atteint d'invalidité absolue et définitive tout assuré reconnu définitivement incapable de se livrer à la moindre occupation, ni au moindre travail lui procurant gain ou profit, et dont le taux d'incapacité fonctionnelle est égal à 100 % par référence au barème des accidents du travail ; le recours à une tierce personne n'est pas exigée » ;
Considérant que l'appelante estime que « la condition » exigeant un taux d'IPP de 100 % ne saurait s'ajouter à l'existence d'une incapacité de se livrer à toute occupation procurant un gain dans la mesure où, pour les raisons ci-dessus énumérées, cette seconde « condition » constituerait une clause abusive ;
Considérant que suivant l’article L. 132-1 du code de la consommation « sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat » ;
Considérant que le fait d'exiger que le taux d'incapacité soit fixé à 100 % pour caractériser une invalidité absolue et définitive ne crée pas un tel déséquilibre dès lors que cette exigence n'implique pas, contrairement à ce qu'allègue l'appelante, que la réalisation du risque soit quasiment impossible ;
Qu'en effet, en se référant au barème des accidents du travail de la sécurité sociale, le contrat ouvre la possibilité de reconnaître un tel risque dans un nombre significatif de situations (blocage des deux hanches, amputation du membre inférieur, syndrome de Parkinson...), qui n'impliquent pas que la personne se trouve dans un état de mort cérébrale ou de coma profond maintenu, comme le prétend Mme X. ;
Qu'il existe bien ainsi une cause au contrat et qu'il ne saurait pas plus être soutenu que « la condition » litigieuse serait contraire à l'économie du contrat, Mme X. ayant pris cette garantie pour se protéger du développement définitivement invalidant de sa maladie dès lors que, sous réserve de la « condition » litigieuse mais licite, l'article 13 offre bien une garantie correspondant à la prime versée et que, si Mme X., souhaitait bénéficier d'autres garanties, au demeurant prévues à titre d'option par le contrat, il lui appartenait d'y souscrire ;
Considérant que la validité de ladite « condition » reconnue, force est de constater que si l'expert judiciaire conclut bien, au vu des conditions contractuelles, à l'existence d’« une inaptitude à l'exercice de toute activité professionnelle », il fixe son taux d'IPP à 70 %, ce qui ne permet pas de dire que l'IAD est caractérisée ;
Qu'il convient, en conséquence, de confirmer le jugement déféré de ce chef ;
Sur l’article 700 du CPC :
Considérant que l'équité commande de condamner Mme X. à payer à la société AXA la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, qu'en revanche, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de Mme X. de ce chef ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe,
Déclare irrecevable la demande au titre de la rente invalidité,
Confirme le jugement sur le capital invalidité absolue et définitive,
Condamne Mme X. à payer à la société AXA FRANCE VIE la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et la déboute de sa demande à ce titre,
La condamne aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
LA [GREFFIÈRE] LA PRÉSIDENTE
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