CA PARIS (pôle 2 ch. 5), 21 janvier 2014
CERCLAB - DOCUMENT N° 4674
CA PARIS (pôle 2 ch. 5), 21 janvier 2014 : RG n° 11/03986
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Considérant que le médecin conseil qui a examiné M. X. a reconnu qu'il était inapte à reprendre son activité professionnelle, mais a estimé qu'il pouvait exercer une autre activité à temps complet ; Considérant que, au vu de la clause litigieuse, l'appelant ne pouvait plus bénéficier de la garantie incapacité temporaire de travail, puisqu'il n'était pas dans l'impossibilité de reprendre une activité professionnelle rémunérée ;
Considérant que cette clause est rédigée en des termes parfaitement clairs et dénués de toute ambiguïté, l'emploi de l'article indéfini « une » signifiant que l'assuré doit être dans l'incapacité de reprendre une activité professionnelle quelconque, et non celle qu'il exerçait avant son arrêt de travail ;
Considérant qu'aux termes de l’article L. 132-1 du code de la consommation, l'appréciation du caractère abusif d'une clause ne peut porter sur la définition de l'objet principal du contrat, sous réserve que la clause en question soit rédigée de façon claire et compréhensible ; Considérant que la clause litigieuse, qui définit l'une des garanties du contrat, ne peut donc être jugée abusive, puisqu'elle est rédigée en des termes parfaitement clairs et compréhensibles ; Qu'en outre, elle ne crée pas un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat en conférant un avantage excessif à l'assureur, puisque le risque de se trouver dans l'impossibilité d'exercer une activité professionnelle quelconque existe bien ;
Considérant que les autres dispositions de la notice d'information ne contredisent pas la définition contractuelle de l'incapacité temporaire de travail, le chapitre « quand suis-je indemnisé » ayant pour seul but de fixer le point de départ de l'indemnisation, et le chapitre « que rembourse l'assurance » utilisant les termes « reprise du travail » de manière parfaitement neutre, sans préciser qu'il s'agit du travail qui était exercé par l'assuré avant son arrêt ; […]
Considérant, par conséquent, que la clause litigieuse est parfaitement valable et doit être opposée à l'appelant, qui n'était pas inapte à la reprise d'une activité professionnelle autre que celle qu'il exerçait avant son arrêt de travail ».
2/ « Considérant que, dans la mesure où l'assurance proposée par le prêteur était facultative, l'appelant était libre de ne pas y adhérer ou de choisir un autre assureur ; Que la définition de l'incapacité temporaire de travail qui figurait dans la notice était suffisamment claire pour lui permettre de comprendre que cette garantie n'avait qu'une portée limitée ; Qu'il ne démontre pas avoir demandé à l'organisme de crédit à bénéficier d'une garantie plus étendue que celle offerte par la CNP ; Que la société COFIDIS n'a donc commis aucune faute en lui proposant ce type de contrat d'assurance et en n'attirant pas son attention sur la définition contractuelle de l'incapacité temporaire de travail ; Qu'il doit donc être débouté de ses demandes dirigées contre cette société ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 2 CHAMBRE 5
ARRÊT DU 21 JANVIER 2014
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11/03986 (5 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 janvier 2009 -Tribunal d'Instance de PARIS 15e arrdt : R.G. n° 07/00167.
APPELANT :
Monsieur X.
[adresse]. Représenté par Maître Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque B0753. Assisté de Maître Thibault CASATI, avocat au barreau de PARIS, toque C642.
INTIMÉES :
CNP SA
ayant son siège Direction des clientèles bancaires, Direction des clientèles bancaires [adresse]. Représentée par Maître Pascale BETTINGER, avocat au barreau de PARIS, toque D0140. Assistée de Maître Thierry LACAMP, avocat au barreau de PARIS, toque D845.
SOCIÉTÉ COFIDIS
[adresse]. Représentée par Maître Lionel MELUN, avocat au barreau de PARIS, toque J139. Assistée de Maître Clarisse GARNIEL, avocat de la SELAS CLAUDE & SARKOZY, au barreau de PARIS, toque R175.
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 3 décembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre, Monsieur Christian BYK, Conseiller, Monsieur Michel CHALACHIN, Conseiller entendu en son rapport, qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Madame Joëlle BOREL
ARRÊT : - contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Catherine LE FRANCOIS, présidente et par Madame Aouali BENNABI, greffière présente lors du prononcé.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
M. X. a adhéré au contrat d'assurance de groupe souscrit par la société COFIDIS auprès de la société CNP ASSURANCES en garantie de deux contrats, un crédit « formule Libravou » souscrit en 2002 et un crédit classique souscrit en 2004.
Après avoir été placé en arrêt de travail le 9 octobre 2006, il a sollicité la prise en charge des mensualités des deux prêts au titre de la garantie incapacité temporaire de travail.
La CNP a accepté cette prise en charge à compter du mois de février 2007, mais a cessé ses prestations à compter du mois de juillet 2007, après avoir fait examiner l'assuré par son médecin conseil, qui a estimé qu'il était apte à reprendre une activité professionnelle.
Par acte des 16 et 19 novembre 2007, M. X. a assigné les sociétés CNP et COFIDIS devant le tribunal d'instance du 15ème arrondissement de Paris afin d'obtenir la reprise des prestations et des dommages-intérêts.
Par jugement du 28 janvier 2009 rectifié le 13 mai 2009, cette juridiction l'a débouté de ses demandes, l'a condamné à payer à la société COFIDIS les sommes de 6.354,70 euros avec intérêts au taux conventionnel de 18 % l'an à compter du 14 mai 2008 et de 752,77 euros avec intérêts au taux de 7,44 % l'an à compter de la même date, et a dit n'y avoir lieu à indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
M. X. a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 4 mars 2009.
Par dernières conclusions du 3 mars 2011, l'appelant demande à la cour de :
- infirmer le jugement,
- condamner la CNP à prendre en charge les mensualités des crédits pendant une durée de quinze mois à compter de février 2007,
- condamner COFIDIS à le faire radier du fichier des incidents de paiement sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement,
- condamner la CNP à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts,
- débouter COFIDIS de ses demandes ou, subsidiairement, la condamner au paiement de la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts,
- condamner la CNP à le garantir, le cas échéant, de toute condamnation prononcée à son encontre au profit de COFIDIS,
- condamner in solidum COFIDIS et la CNP au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions du 7 février 2013, la CNP sollicite la confirmation du jugement et le paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; subsidiairement, elle demande que l'éventuelle prise en charge ne s'opère que dans les termes et limites du contrat au profit de COFIDIS.
Par dernières conclusions du 22 juillet 2011, la société COFIDIS sollicite également la confirmation du jugement, outre le paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 novembre 2013.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la garantie incapacité temporaire de travail :
Considérant que la notice d'information du contrat litigieux définit ainsi le risque d'incapacité temporaire de travail : « Un assuré est en état d'ITT lorsque, à l'expiration du délai de franchise, il se trouve dans l'impossibilité totale de reprendre une activité professionnelle rémunérée, même à temps partiel. En outre, s'il est assuré social, il doit bénéficier des prestations en espèces de la Sécurité Sociale » ;
Considérant que l'appelant soutient que cette définition est contraire à la définition habituelle de l'incapacité temporaire de travail, telle qu'elle résulte de la législation du travail et de la législation sociale, qui exigent seulement que le salarié soit dans l'incapacité de reprendre son travail, et non une activité professionnelle quelconque ; il ajoute que, étant dans l'incapacité de marcher et de se tenir debout, il ne peut exercer la moindre activité professionnelle ; il affirme que la clause litigieuse est abusive au sens de l’article L. 132-1 du code de la consommation, et donc non écrite ;
Considérant que la CNP répond que la clause litigieuse est claire, précise, et ne présente aucune ambiguïté ; elle ajoute que les critères retenus par la Sécurité Sociale ou la COTOREP ne lui sont pas opposables ; elle affirme que cette clause ne peut être déclarée abusive car elle claire et compréhensible ;
Considérant que la société COFIDIS s'en rapporte à justice sur ce point, mais rappelle qu'en vertu de l'effet relatif des contrats, elle ne peut être condamnée à prendre en charge les mensualités des prêts à la place de l'assureur ;
[*]
Considérant que le médecin conseil qui a examiné M. X. a reconnu qu'il était inapte à reprendre son activité professionnelle, mais a estimé qu'il pouvait exercer une autre activité à temps complet ;
Considérant que, au vu de la clause litigieuse, l'appelant ne pouvait plus bénéficier de la garantie incapacité temporaire de travail, puisqu'il n'était pas dans l'impossibilité de reprendre une activité professionnelle rémunérée ;
Considérant que cette clause est rédigée en des termes parfaitement clairs et dénués de toute ambiguïté, l'emploi de l'article indéfini « une » signifiant que l'assuré doit être dans l'incapacité de reprendre une activité professionnelle quelconque, et non celle qu'il exerçait avant son arrêt de travail ;
Considérant qu'aux termes de l’article L. 132-1 du code de la consommation, l'appréciation du caractère abusif d'une clause ne peut porter sur la définition de l'objet principal du contrat, sous réserve que la clause en question soit rédigée de façon claire et compréhensible ;
Considérant que la clause litigieuse, qui définit l'une des garanties du contrat, ne peut donc être jugée abusive, puisqu'elle est rédigée en des termes parfaitement clairs et compréhensibles ;
Qu'en outre, elle ne crée pas un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat en conférant un avantage excessif à l'assureur, puisque le risque de se trouver dans l'impossibilité d'exercer une activité professionnelle quelconque existe bien ;
Considérant que les autres dispositions de la notice d'information ne contredisent pas la définition contractuelle de l'incapacité temporaire de travail, le chapitre « quand suis-je indemnisé » ayant pour seul but de fixer le point de départ de l'indemnisation, et le chapitre « que rembourse l'assurance » utilisant les termes « reprise du travail » de manière parfaitement neutre, sans préciser qu'il s'agit du travail qui était exercé par l'assuré avant son arrêt ;
Considérant, enfin, que les décisions prises par les organismes sociaux sont inopposables à l'assureur, qui demeure libre d'adopter sa propre définition des risques dans les contrats qu'il propose à ses clients ;
Considérant, par conséquent, que la clause litigieuse est parfaitement valable et doit être opposée à l'appelant, qui n'était pas inapte à la reprise d'une activité professionnelle autre que celle qu'il exerçait avant son arrêt de travail ;
Que le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté M. X. de ses demandes dirigées contre l'assureur ;
Sur la demande subsidiaire formée à l'encontre de la société COFIDIS :
Considérant que l'appelant soutient que la société COFIDIS a manqué à son obligation d'information et de conseil en n'appelant pas son attention sur l'inadéquation des risques couverts à sa situation et sur la nécessité de souscrire une assurance complémentaire ; il sollicite donc le rejet des demandes en paiement formées par le prêteur ou sa condamnation au paiement de la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts ;
Considérant que la société COFIDIS répond qu'elle n'a pas manqué à son devoir d'information de l'emprunteur, qui était à même de comprendre les termes clairs de la clause litigieuse ;
[*]
Considérant que, dans la mesure où l'assurance proposée par le prêteur était facultative, l'appelant était libre de ne pas y adhérer ou de choisir un autre assureur ;
Que la définition de l'incapacité temporaire de travail qui figurait dans la notice était suffisamment claire pour lui permettre de comprendre que cette garantie n'avait qu'une portée limitée ;
Qu'il ne démontre pas avoir demandé à l'organisme de crédit à bénéficier d'une garantie plus étendue que celle offerte par la CNP ;
Que la société COFIDIS n'a donc commis aucune faute en lui proposant ce type de contrat d'assurance et en n'attirant pas son attention sur la définition contractuelle de l'incapacité temporaire de travail ;
Qu'il doit donc être débouté de ses demandes dirigées contre cette société ;
Sur les sommes dues par M. X. au titre des prêts :
Considérant que l'appelant ne conteste pas le montant des sommes réclamées par la société COFIDIS au titre des deux prêts ;
Que le jugement doit donc être confirmé sur ce point ;
Sur l’article 700 du code de procédure civile :
Considérant que l'équité commande de débouter les trois parties de leurs demandes respectives fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Et y ajoutant, déboute Mr X. de ses demandes dirigées contre la société COFIDIS ;
Déboute les parties de leurs demandes respectives fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mr X. aux dépens de la procédure d'appel et dit qu'ils pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE
- 5751 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Autres effets - Réparation des préjudices - Consommateur - Clause imposée par un tiers
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- 6017 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Clauses sur l’objet principal ou le prix - Loi du 1er février 1995 - Notion d’objet principal
- 6018 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Clauses sur l’objet principal ou le prix - Loi du 1er février 1995 - Exceptions : clauses obscures
- 6363 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Assurance - Assurances de groupe - Assurance-crédit - Obligations de l’assureur - Incapacité temporaire de travail