CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA DOUAI (3e ch.), 22 mai 2014

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (3e ch.), 22 mai 2014
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 3e ch.
Demande : 13/01327
Décision : 14/409
Date : 22/05/2014
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 6/03/2013
Numéro de la décision : 409
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 4798

CA DOUAI (3e ch.), 22 mai 2014 : RG n° 13/01327 ; arrêt n° 14/409

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu que le 19 septembre 1998 monsieur X. s'est vu remettre un document intitulé « étude personnalisée option » et a signé le 22 septembre 1998 une demande d'adhésion au contrat collectif d'assurance-vie « option prévoyance » ; Qu'il ne résulte d'aucune des mentions de la demande d'adhésion que lui auraient été remises les conditions générales du contrat « option prévoyance » ; Que ce contrat prévoit, en cas de décès, le versement d'un capital à un bénéficiaire désigné, et en cas d'invalidité avec assistance d'une tierce personne le versement d'un capital à l'assuré lui-même ; Que la société GROUPAMA ne peut donc se prévaloir de l'application des conditions générales relatives au contrat « collective décès », qui n'a pas été souscrit, ni des conditions générales du contrat « option prévoyance » ; Qu'il convient donc de constater, comme l'a fait le tribunal, que le contrat «option prévoyance » s'est substitué au contrat initial à compter du 1er janvier 1999, mais seulement dans les stipulations figurant sur la demande d'adhésion ; […]

Que la compagnie GROUPAMA a envoyé le 20 décembre 2010 à son assuré un avis d'échéance faisant application d'une cotisation réduite pour l'année 2011 (315,60 euros au lieu de 875,96 euros l'année précédente), et d'un capital décès réduit (6.774 euros au lieu de 35.590 euros), lui proposant en outre de « faire le point » sur l'évolution de ce contrat, justement qualifié de contrat de prévoyance dans la lettre d'accompagnement ; Que ce simple envoi ne peut être considéré comme une modification régulièrement acceptée par l'assuré des conditions du contrat, en ce qu'il n'a pas été suivi de réponse de la part de ce dernier, et qu'en outre la lettre demeure particulièrement peu explicite sur la modification des garanties appliquée, de sorte qu'il n'a pu se renouveler par tacite reconduction qu'aux conditions initiales ;

Qu'il s'ensuit que la compagnie GROUPAMA devra verser aux consorts X. la somme de 28.816 euros avec intérêts au taux légal depuis la mise en demeure du 16 avril 2011 ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D'APPEL DE DOUAI

TROISIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 22 MAI 2014

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 13/01327. Arrêt n° 14/409. Jugement (R.G. n° 11/04395) rendu le 29 janvier 2013 par le Tribunal de Grande Instance de BÉTHUNE.

 

APPELANTE :

Madame X.

née [date] à [ville], de nationalité Française, demeurant [adresse], Représentée par Maître Antoine R., avocat au barreau de BETHUNE, Assistée de Maître Antoine R., avocat au barreau de BETHUNE substitué par Maître L., avocat au barreau de BETHUNE

 

INTIMÉE :

GROUPAMA GAN VIE, SA

ayant son siège social, Représentée par Maître Stéphane C., avocat au barreau de BETHUNE, Assistée de Maître Elie K., avocat au barreau de PARIS

 

DÉBATS à l'audience publique du 2 avril 2014 tenue par Thomas SPATERI magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Sylvie CROMBEZ

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Françoise GIROT, Président de chambre, Cécile ANDRE, Conseiller, Thomas SPATERI, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 22 mai 2014 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Françoise GIROT, Président et Sylvie CROMBEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 11 mars 2014

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Monsieur X., né le [date] et décédé le [date], avait souscrit le 14 avril 1976 un contrat d'assurance collectif sur la vie auprès de SORAVIE. Le 22 septembre 1998 il a rempli une demande d'adhésion au contrat collectif d'assurance-vie « Option prévoyance » auprès de GROUPAMA ASSURANCE. Le 21 décembre 1998 celle-ci lui envoyait un certificat d'adhésion au contrat d'assurance « collective décès » indiquant que celui-ci remplace le précédent à compter du 1er janvier 1999, avec une date d'effet des garanties au 1er janvier 1977 ;

Au décès de monsieur X., la compagnie GROUPAMA versait à madame X., en qualité de bénéficiaire du contrat, la somme de 6.774 euros.

Estimant que cette somme ne correspondait pas au capital garanti madame X. a fait assigner la compagnie GROUPAMA devant le tribunal de grande instance de Béthune par exploit d'huissier du 20 octobre 2011, afin d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 35.590 euros.

Madame X. a été déboutée de ses demandes par jugement du 29 janvier 2013, chacune des parties ayant conservé la charge de ses dépens respectifs.

Elle a interjeté appel de cette décision le 6 mars 2013 dans des conditions de forme et de délai non critiquées.

Madame X., madame C. X. et monsieur W. X., intervenants volontaires, sollicitent l'infirmation du jugement, qu'il soit jugé que la clause réservant à l'assurance le droit de modifier unilatéralement le capital garanti sans avoir informé l'assuré avant la conclusion du contrat des conditions et modalités de la réduction du contrat est une clause abusive, que la compagnie GROUPAMA soit condamnée à lui payer la somme de 35.590 euros représentant le capital garanti au 1er janvier 2010, à actualiser au 10 janvier 2011, sous déduction de celle de 6.774 euros, outre intérêts au taux légal depuis le 16 avril 2011 capitalisés. Subsidiairement ils demandent qu'il soit jugé que la réduction du capital garanti n'a pas été acceptée par l'assuré et qu'elle ne peut prendre effet, la condamnation de la compagnie GROUPAMA à leur payer la somme de 30.000 euros de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance résultant du défaut d'information et des préjudices moral et financier, et en tout état de cause la condamnation de la compagnie GROUPAMA à leur payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens.

Au soutien de leurs demandes ils font valoir que le contrat « Option prévoyance » qui s'est substitué au contrat initial à compter du 1er janvier 1999, ne prévoit aucune indication de réduction du capital, et que monsieur X. n'a jamais été mis en possession des conditions générales du contrat « collective décès » dont se prévaut la société GROUPAMA. Ils exposent encore que les « conditions spéciales » et les « modalités spécifiques » d'adhésion au-delà de 65 ans ne figurent pas dans les conditions générales et n'ont pas été portées à la connaissance de monsieur X., et qu'il n'est en particulier pas évoqué de réduction de capital. Ils ajoutent que monsieur X. est décédé dans l'année de ses 65 ans, de sorte qu'il n'y a pas lieu de lui appliquer les dispositions relatives aux assurés au-delà de cet âge.

Ils soutiennent également qu'une clause prévoyant une baisse du capital garanti est contraire aux dispositions de l'article L. 132-5 du Code des assurances, l'article 1134 du Code civil et de l'article L. 132-1 du Code de la consommation.

Ils soulignent qu'à l'époque où la réduction de capital a été notifiée à monsieur X. par l'envoi d'un relevé de situation annuelle, celui-ci était déjà diminué physiquement, de sorte qu'il n'a pu l'accepter et qu'elle n'a pu prendre effet en application de l'article L. 112-3 du Code des assurances, le paiement de la cotisation à l'aide d'un prélèvement automatique, le jour même du décès de l'assuré, ne pouvant valoir acceptation.

Ils indiquent encore que la compagnie GROUPAMA n'ayant pas informé monsieur X. de la réduction de capital à partir de 65 ans au moment de la conclusion du contrat, elle lui a fait perdre une chance de souscrire un contrat ne présentant pas cette réduction.

La compagnie GROUPAMA conclut à la confirmation du jugement, au rejet de la demande de dommages et intérêts et à la condamnation de madame X. à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens, aux motifs que le contrat « collective décès », puis le contrat « collective prévoyance » prévoient tous deux qu'à compter de 65 ans l'assuré qui souhaite conserver les garanties peut rester dans l'assurance mais selon des modalités particulières. Elle explique encore que le contrat en vigueur à compter du 1er janvier 1999 est bien le contrat « collective décès » en dépit du titre de l'imprimé d'adhésion, et ainsi qu'il résulte de la mention d'une garantie décès, de la désignation d'un bénéficiaire, du certificat d'adhésion et des relevés de situation annuels. Elle indique que le contrat « option prévoyance », à le supposer conclu, prévoit également des modalités particulières pour les assurés de plus de 65 ans.

Elle soutient avoir rempli son obligation d'information dès lors qu'elle a averti monsieur X. de la réduction de capital avant la fin de l'année au cours de laquelle il a atteint 65 ans. La compagnie GROUPAMA affirme également que la réduction de capital ne constitue pas une limitation de garantie, mais la simple application des stipulations du contrat.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Attendu que le 19 septembre 1998 monsieur X. s'est vu remettre un document intitulé « étude personnalisée option » et a signé le 22 septembre 1998 une demande d'adhésion au contrat collectif d'assurance-vie « option prévoyance » ;

Qu'il ne résulte d'aucune des mentions de la demande d'adhésion que lui auraient été remises les conditions générales du contrat « option prévoyance » ;

Que ce contrat prévoit, en cas de décès, le versement d'un capital à un bénéficiaire désigné, et en cas d'invalidité avec assistance d'une tierce personne le versement d'un capital à l'assuré lui-même ;

Que la société GROUPAMA ne peut donc se prévaloir de l'application des conditions générales relatives au contrat « collective décès », qui n'a pas été souscrit, ni des conditions générales du contrat « option prévoyance » ;

Qu'il convient donc de constater, comme l'a fait le tribunal, que le contrat «option prévoyance » s'est substitué au contrat initial à compter du 1er janvier 1999, mais seulement dans les stipulations figurant sur la demande d'adhésion ;

Que cette demande n'indique pas que des modalités spécifiques sont appliquées à compter de la fin de l'année d'assurance au cours de laquelle l'assuré atteint 65 ans, consistant notamment en une diminution du capital garanti en cas de décès, ni que celui-ci peut être modifié à chaque échéance annuelle ;

Qu'au surplus les « modalités particulières » évoquées aux conditions générales ne sont pas spécifiées ;

Que la compagnie GROUPAMA a envoyé le 20 décembre 2010 à son assuré un avis d'échéance faisant application d'une cotisation réduite pour l'année 2011 (315,60 euros au lieu de 875,96 euros l'année précédente), et d'un capital décès réduit (6.774 euros au lieu de 35.590 euros), lui proposant en outre de « faire le point » sur l'évolution de ce contrat, justement qualifié de contrat de prévoyance dans la lettre d'accompagnement ;

Que ce simple envoi ne peut être considéré comme une modification régulièrement acceptée par l'assuré des conditions du contrat, en ce qu'il n'a pas été suivi de réponse de la part de ce dernier, et qu'en outre la lettre demeure particulièrement peu explicite sur la modification des garanties appliquée, de sorte qu'il n'a pu se renouveler par tacite reconduction qu'aux conditions initiales ;

Qu'il s'ensuit que la compagnie GROUPAMA devra verser aux consorts X. la somme de 28.816 euros avec intérêts au taux légal depuis la mise en demeure du 16 avril 2011 ;

Qu'en application de l'article 1154 du Code civil les intérêts échus du principal produiront eux-mêmes des intérêts dès lors qu'ils seront dus pour au moins une année entière ;

Attendu que la compagnie GROUPAMA succombe à l'instance et en supportera les dépens, tant de première instance que d'appel ;

Qu'elle sera en outre condamnée à payer aux consorts X. la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Infirme le jugement ;

Condamne la compagnie GROUPAMA GAN VIE SA à payer à madame X., madame C. X. et monsieur W. X. la somme de 28.816 euros avec intérêts au taux légal depuis le 16 avril 2011, capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du Code civil ;

Condamne la société GROUPAMA GAN VIE à payer à madame X., madame C. X. et monsieur W. X. la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne la société GROUPAMA GAN VIE aux dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier                Le Président

S. CROMBEZ           F. GIROT