6103 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Modification du contenu du contrat - Modification d’un commun accord
- 5835 - Code de la consommation - Domaine d’application - Contrat - Existence d’une clause
- 6104 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Modification du contenu du contrat - Modification unilatérale - Présentation générale
- 6084 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Consentement - Obligations d’information - Mise en garde - Conseil
- 6100 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Détermination des obligations - Obligations monétaires - Détermination du prix
- 6108 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Modification du contenu du contrat - Modification unilatérale - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 - Caractéristiques du bien ou du service - Principe
- 6110 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Modification du contenu du contrat - Modification unilatérale - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 - Prix
- 6111 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Modification du contenu du contrat - Modification unilatérale - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 - Conditions générales
- 6127 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Suspension du contrat - Suspension volontaire
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6103 (24 septembre 2022)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CLAUSE
MODIFICATION DU CONTENU DU CONTRAT - MODIFICATION D’UN COMMUN ACCORD
Rappel du droit commun. Depuis la réforme du Code civil par l’ordonnance du 10 février 2016, le contenu de l’ancien art. 1134 C. civ. a été transféré, avec des modifications, dans trois articles différents :
* L’art. 1103 C. civ. dispose « Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits » (ancien art. 1134 C. civ., alinéa 1er : « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. »)
* L’art. 1104 C. civ. dispose : « Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. [alinéa 1] Cette disposition est d'ordre public [alinéa 2] » (ancien art. 1134 C. civ., alinéa 1er : « Elles doivent être exécutées de bonne foi »).
* Enfin, l’art. 1193 C. civ. dispose : « Les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties, ou pour les causes que la loi autorise » (ancien art. 1134 al. 2« elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise »).
L’art. 1134 al. 2 C. civ. consacrait un tempérament totalement conforme à l’alinéa premier : ce que l’accord des parties pouvait faire, l’accord des parties pouvait le défaire. Ce texte ne visait littéralement que la révocation des conventions, mais il avait été interprété a fortiori comme pouvant aussi s’appliquer à une simple modification du contrat (la pratique utilise parfois le terme d’avenant pour désigner une convention modificative). La nouvelle rédaction de l’art. 1193 C. civ. consacre explicitement cette extension.
Si le principe est applicable en droit de la consommation, sa mise en œuvre soulève parfois des difficultés tenant aux modalités ou aux conséquences que le contrat attache à la conclusion d’un avenant, d’autant plus que ces modifications sont parfois obligatoires (ex. obligation du consommateur d’informer le professionnel sur l’évolution des données personnelles) ou résultent de l’utilisation par le consommateur d’une option offerte par le professionnel.
Sur la distinction entre annulation et résiliation : le fournisseur de gaz qui gère de nombreux contrats avec sa clientèle ne peut ignorer la distinction entre l'annulation qu'elle a proposé à son concontractant et la résiliation aux torts du client engendrant des frais pour ce dernier et elle ne peut en conséquence se prévaloir du caractère interchangeable de ces termes alors qu'annulation concertée et résiliation induisent des conséquences juridiques très différentes pour le client. CA Montpellier (2e ch.), 5 juin 2018 : RG n° 15/09598 ; Cerclab n° 7578 (contrat jugé professionnel ; fourniture en vrac de propane à l’exploitant d’un camping ; rejet de la demande de versement d’une indemnité de résiliation anticipée ; solution confortée par le fait que la durée du contrat, de six ans, partait de la première livraison qui n’a jamais eu lieu), sur appel de T. com. Montpellier, 18 novembre 2015 : RG n° 2014020513 ; Dnd.
A. PRINCIPES
Licéité des clauses prévoyant une modification d’un commun accord. N’est pas abusive la clause stipulant que le nombre d’heures de formation prévu initialement est susceptible d’être révisé dès lors que le contrat impose l’accord des deux parties pour cette révision. TGI Grenoble (4e ch. civ.), 7 juin 2010 : RG n° 08/03679 ; site CCA ; Cerclab n° 4078 (auto-école), confirmé par CA Grenoble (1re ch. civ.), 28 janvier 2013 : RG n° 10/02867 ; Cerclab n° 4192 (n’est pas abusive la clause prévoyant que le volume de formation peut être révisé d’un commun accord : dès lors que l’accord des deux parties est nécessaire pour effectuer la révision du contrat, ce dernier n’opère aucun déséquilibre).
Modalités et preuve d’une modification d’un commun accord. Acceptation de plusieurs modifications du contrat, pour ajouter des options ou changer de forfait, dès lors que, même si elles n’ont pas été matérialisées par des avenants, le client en a été averti pas SMS puis par des mentions sur ses factures, qui n’ont pas fait l’objet de contestations. CA Rennes (1re ch. B), 11 mars 2010 : RG n° 08/08385 ; Cerclab n° 3012 (téléphonie mobile).
Le simple envoi d’un avis d’échéance faisant application d’une cotisation réduite et d’un capital décès réduit, tout en proposant en outre à l’assuré de « faire le point » sur l’évolution de ce contrat, ne peut être considéré comme une modification régulièrement acceptée par l’assuré des conditions du contrat, en ce qu’il n’a pas été suivi de réponse de la part de ce dernier, et qu’en outre la lettre demeure particulièrement peu explicite sur la modification des garanties appliquée, de sorte qu’il n’a pu se renouveler par tacite reconduction qu’aux conditions initiales. CA Douai (3e ch.), 22 mai 2014 : RG n° 13/01327 ; arrêt n° 14/409 ; Cerclab n° 4798 (contrat collectif d’assurance-vie « option prévoyance » prévoyant, en cas de décès, le versement d’un capital à un bénéficiaire désigné, et en cas d’invalidité avec assistance d’une tierce personne, le versement d’un capital à l’assuré lui-même), sur appel de TGI Béthune, 29 janvier 2013 : RG n° 11/04395 ; Dnd. § Le contrat d'assurance étant un contrat consensuel, parfait dès la rencontre des volontés, l'absence de signature d'un avenant ne fait pas obstacle à son application ; la preuve du caractère contractuel de l'avenant est cependant subordonnée à la rédaction d'un écrit et cette preuve peut en être rapportée par la signature de cet avenant ou dans les conditions prévues par les anc. art. 1347 s. C. civ. : en l’espèce, le caractère contractuel de l'avenant n'est pas démontré, dès lors que, si l’envoi et la réception non contestée d’un courrier de l’assureur indiquant que le contrat serait modifié pour supprimer la garantie vol pendant deux ans, le seul exemplaire des nouvelles conditions particulières conforme à la modification annoncée par l'assureur est postérieur de plusieurs mois à l'appel de l'échéance acquittée par l’assurée ; dès lors il n'est pas rapporté la preuve que celle-ci aurait eu connaissance de l'avenant avant d'acquitter la cotisation d'assurance, et il ne saurait être retenu qu'elle a, par ce paiement, acquiescé aux termes de cet avenant. CA Paris (pôle 4 ch. 9-A), 24 juin 2021 : RG n° 18/07416 ; Cerclab n° 9092 (solution rendant sans intérêt l’examen du caractère abusif), infirmant TI Pantin, 8 janvier 2018 : RG n° 11-16-000659 ; Dnd.
N’est pas abusive la clause prévoyant que si le client refuse ou empêche à deux reprises une livraison programmée par le fournisseur, il sera considéré contractuellement comme ayant renoncé à ce régime particulier et ayant opté de ce seul fait pour le régime général de livraison à la commande », dès lors que le comportement du consommateur, qui n’est sanctionné qu’au deuxième refus, revient à ne pas exécuter le contrat conformément à son option, et qu’en tout état de cause il peut revenir à tout moment à son premier régime de livraison, si sa situation passagère est modifiée. CA Versailles (3e ch.), 20 mai 2005 : RG n° 03/07266 ; arrêt n° 265 ; site CCA ; Cerclab n° 3945 (pour les situations particulières visées par absence de longue durée, cuves restées pleines hospitalisation du client, la formule de retour automatique à la commande ne fait pas grief), confirmant TGI Nanterre (6e ch.), 2 septembre 2003 : RG n° 01/14479 ; Cerclab n° 3946 (clause non abusive : le double refus montre que l’option choisie d’une livraison programmée n’est plus adaptée et la modification qui en résulte n’est pas la conséquence d’un pouvoir unilatéral de modification du contrat par le fournisseur).
Limitation anticipée du contenu des avenants ultérieurs. La clause prévoyant que toute demande de modification, options ou de travaux supplémentaires, doit faire l'objet d'un avenant écrit signé des parties et entrainera pour l'acquéreur acceptation d'une prorogation du délai de livraison d'un trimestre, n'a ni pour objet ni pour effet de créer au détriment des acquéreurs non professionnels, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat et partant n'est pas abusive. CA Chambéry (ch. civ. 1re sect.), 12 décembre 2017 : RG n° 16/00570 ; Cerclab n° 7292 (vente en l'état futur d'achèvement dans un ensemble immobilier d’un appartement, d’une cave, d’un garage et d’une place de stationnement), sur appel de TGI Thonon-les-Bains, 19 février 2016 : RG n° 15/00592 ; Dnd. § N.B. La solution adoptée n’emporte pas la conviction. Au vu de la clause reproduite par l’arrêt, la réalisation de la modification supposait l’accord du vendeur et la rédaction d’un avenant, par conséquent un nouvel accord de volontés permettant d’adapter très exactement le report du délai à l’ampleur de la modification demandée. La clause limite donc par avance la liberté contractuelle, en imposant un délai préfixé détaché de l’ampleur des travaux, ce qui paraît constituer un déséquilibre significatif.
V. aussi : CA Paris (pôle 4 ch. 1), 25 mai 2018 : RG n° 16/15676 ; Cerclab n° 7576 (clause stipulant qu’« en cas de réalisation des travaux modificatifs, le délai de livraison sera automatiquement reporté d'un mois minimum, étant précisé que la convention de travaux modificatifs pourra prévoir un report plus important en fonction de la nature des modifications demandées » : la clause doit recevoir application sans que le juge puisse soumettre son application à l'impact réel des travaux sur le délai d'exécution, ce que le contrat ne prévoit pas), sur appel de TGI Paris, 4 juillet 2016 : RG n° 15/09488 ; Dnd. § N.B. La solution appelle ici aussi des réserves, puisqu’en imposant un délai minimal d’un mois pour toute modification, qui peut être purement esthétique (exemple : choix de couleur), le vendeur peut s’accorder un délai supplémentaire nullement nécessaire et diminuer d’autant la liberté de négociation des parties pour la modification du contrat, en dissuadant par exemple l’acheteur de solliciter des modifications mineures (alors que celles-ci pourraient être prévues au bénéfice du vendeur de façon unilatérale).
Reprise d’un bien. La reprise amiable d’un bien pour une cause autre que son caractère défectueux ou non conforme, qui engagerait la responsabilité du professionnel, n’est pas obligatoire (ex. double-emploi, mauvais choix, etc.). Si le professionnel l’accepte, il s’agit d’une modification ou d’une résiliation d’un commun accord, pour laquelle le professionnel peut imposer des conditions comme par exemple l’octroi d’un avoir et non d’un remboursement. § Sur la nature de l’« avoir », V. dans le cadre d’un contrat professionnel : l'avoir est une créance destinée au règlement d'une opération ultérieure et n'est ainsi exigible, à défaut de convention contraire, que lors de ce règlement, et non au moment de la constitution de l'avoir. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 27 septembre 2018 : RG n° 17/01099 ; Cerclab n° 8014 (contrat professionnel de fourniture de semences et bulbes par un fournisseur à un distributeur), sur appel de T. com. Valenciennes, 19 mai 2015 : RG n° 2014001587 ; Dnd.
Information en cours de contrat sur l’opportunité d’une modification. Ayant à bon droit retenu qu’il n’incombait pas au fournisseur d’énergie de vérifier spontanément, en cours de contrat, l’adéquation du tarif pratiqué à l’évolution des besoins de son client, mais uniquement de répondre aux sollicitations de celui-ci, la cour d’appel en a exactement déduit que la clause stipulant qu’il « appartient au client, en cours de contrat, de s’assurer de l’adéquation de son tarif à ses besoins » et que « le fournisseur s’engage à répondre à titre gracieux à toute demande du client qui souhaiterait disposer d’éléments d’information généraux pour s’assurer que son contrat est bien adapté à son mode de consommation », n’était pas abusive. Cass. civ. 1re, 26 septembre 2019 : pourvoi n° 18-10891 ; arrêt n° 753 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 8153 (fourniture de gaz naturel), rejetant sur ce point le pourvoi contre CA Versailles, 16 novembre 2017 : Dnd. § Il serait excessif d’exiger de l’opérateur qu’il se renseigne de manière permanente et exhaustive sur la situation de son client, alors que celle-ci est par définition susceptible d’évoluer et de changer à tout moment en termes de modifications et de remplacement de ses installations et de ses exacts besoins de consommation ; l’obligation de conseil et de loyauté du fournisseur professionnel reste préservée dès lors qu’il est expressément prévu au contrat que celui-ci informe le consommateur que le fournisseur pourra être contacté tout au long du contrat en fonction des éléments d’information que seul l’utilisateur est à même de préciser. TGI Paris (ch. 1-4 soc.), 30 octobre 2018 : RG n° 13/03227 ; Cerclab n° 8256 (IV-B-1 - art. 4.3 ; le jugement estime aussi qu’en mentionnant la possibilité d’obtenir des « éléments d’information généraux », il apparaît suffisamment clair que l’opérateur s’engage, non pas de manière parcellaire à délivrer des éléments d’information simplement généraux, mais à répondre de manière adéquate à toutes demandes des clients qui souhaiteraient bénéficier de l’ensemble des éléments généraux nécessaires à l’un quelconque des aspects de leur contrat ; N.B. si ce motif peut paraître en lui-même insuffisant, il convient de mentionner que la clause s’intitule bien « conseil tarifaire » et mentionne bien que le client peut contacter l’opérateur « pour s’assurer de l’adéquation du tarif souscrit en cas d’évolution de ses besoins »).
Comp. pour la Commission des clauses abusives : Recomm. n° 2014-01/2 : Cerclab n° 5000 (fourniture de gaz naturel et d'électricité ; caractère abusif des clauses ayant pour objet ou pour effet de mettre à la charge du consommateur le devoir de s’assurer que le tarif souscrit correspond à ses besoins, alors que le devoir de conseil incombe au professionnel, en ce qu’elle exonère le professionnel de son obligation de conseil au détriment du consommateur ; N.B. la Commission aurait aussi pu s’appuyer sur un renversement illicite de la charge de la preuve).
B. PORTÉE DE LA MODIFICATION
Présentation : licéité d’un accord sur une modification isolée. La modification du contrat d’un commun accord relève de la liberté contractuelle des deux parties. Il leur incombe de déterminer si une ou plusieurs clauses doivent être modifiées. Une modification convenue peut donc tout à fait laisser le reste du contrat inchangé.
V. pour un jugement erroné, reprochant au propriétaire d’un navire, ayant conclu un contrat d’affrètement à temps pour une croisière, d’avoir accepté à la demande du client de reporter la date du voyage sans modifier les conditions de prix en conséquence, alors qu’elle proposait une prestation de qualité sensiblement inférieure, le tribunal considérant que le propriétaire avait ainsi modifié unilatéralement les caractéristiques du service à rendre, contrairement à l’ancien art. R. 132-2 C. consom. (rédaction antérieure au décret de 2009). T. com. Paris (21 ch.), 4 février 2004 : RG n° 2003/001040 ; Cerclab n° 3622 ; Juris-Data n° 2004-268917.
Clauses portant atteinte au contrat modifié. Un professionnel et un consommateur peuvent modifier leur contrat. En revanche, les clauses par lesquelles le professionnel profite de ce consentement pour modifier les engagements du consommateur peuvent créer un déséquilibre significatif. Les illustrations sont assez variées et il importe d’être particulièrement vigilant sur l’origine de la modification.
* Modification résultant d’une obligation du consommateur. Dans certains cas, le consommateur est obligé de modifier certaines données contractuelles, concernant par exemple la modification de sa situation personnelle (adresse, situation familiale, compte bancaire, etc.). L’exécution d’une telle obligation, en vertu du contrat initial, ne peut autoriser le professionnel à modifier à cette occasion le contrat sur d’autres aspects (conditions générales), le consommateur ayant le droit de voir le contrat qu’il a conclu exécuté jusqu’à son terme conformément à l’accord initial, qu’il s’est contenté d’exécuter rigoureusement.
* Modification résultant d’une option offerte au consommateur. Lorsque le contrat offre une faculté de modification qui ne dépend, pour entrer en vigueur, que de sa seule volonté, sans nécessiter un nouvel accord du professionnel, le contenu initial ne peut être modifié à cette occasion. En toute rigueur, le contrat offre de donner effet à une manifestation unilatérale de volonté du consommateur, qui ne donne aucune prise au professionnel.
* Assimilation de toute modification à une annulation. Est abusive la clause stipulant que toute modification de commande est assimilée à une annulation suivie d’une nouvelle commande entraînant les frais d’annulation en vigueur, alors que si la modification est possible, elle peut donner lieu à un avenant et que par ailleurs, une modification n’est pas une annulation dès lors que le client reste acquis et paye le prix de sa commande. TGI Bobigny (7e ch. sect. 2), 21 mars 2006 : RG n° 04/04295 ; Cerclab n° 3067 (agence de voyages ; modification proposée jugée insatisfaisante, distinguant de façon ambiguë entre les « modifications substantielles imputables au client » continuant à être assimilées à une annulation et les modifications « non substantielles », la clause ne donnant aucun exemple ni aucune précision sur la nature d’une modification substantielle ce qui laisse toute latitude au voyagiste pour en décider).
* Perte d’un avantage lié à l’ancienneté du contrat modifié. La clause selon laquelle « toute opération de renouvellement d’un modem annule l’ancienneté de l’abonné » doit être déclarée abusive car elle est contraire à la réalité, dans la mesure où l’usager se trouve ramené à une situation de nouvel abonné ce qui lui est préjudiciable notamment sur le plan financier s’il envisage à nouveau de changer de matériel ; cette clause est donc nulle et doit être réputée non écrite. Jur. prox. Villejuif, 19 décembre 2006 : RG n° 91-06-000232 ; site CCA ; Cerclab n° 1618 (fourniture d’accès internet).
Selon l’art. L. 112-12 CMF, « le bénéficiaire ne peut appliquer de frais pour l'utilisation d'un instrument de paiement donné. Il ne peut être dérogé à cette interdiction que dans des conditions définies par décret, pris après avis de l'Autorité de la concurrence, compte tenu de la nécessité d'encourager la concurrence et de favoriser l'utilisation de moyens de paiement efficaces » ; est illicite au regard de ce texte, la clause qui exige en cours d'exécution du contrat le versement d'un dépôt de garantie au profit de l'opérateur « en cas de changement de mode de paiement pour un mode autre que le prélèvement », l’insertion d’une telle clause prohibée étant nécessairement constitutive d'un désavantage significatif au détriment du consommateur. CA Paris (pôle 5 ch. 11), 30 mars 2018 : RG n° 16/16694 ; Cerclab n° 7534 (B.3- art. 4 ; texte invoqué en appel), infirmant TGI Paris, 17 mai 2016 : RG n° 12/09999 ; Dnd.
* Modification du contenu du contrat. Plus délicate est l’hypothèse où le consommateur sollicite une modification du contrat supposant l’accord du professionnel. Celui-ci peut-il en profiter pour étendre les effets de la modification ?
La Cour de cassation a eu l’occasion d’aborder cette question dans un contrat d’assurance. En l’espèce, un assureur avait profité de la conclusion d’un avenant à un contrat d’assurance de responsabilité civile des parents du fait de leur enfant visant, pour le père, à modifier l'adresse des biens assurés, et pour la mère à souscrire en plus une assurance de protection juridique, pour ajouter discrètement une clause d'exclusion aux conditions générales, ayant pour effet d'exclure la garantie lorsque le mineur était propriétaire et gardien de son véhicule. Le mineur de 17 ans, sans permis, ayant eu un accident en utilisant la moto qu’il avait acheté seul, en dépit des réticences de sa mère, c’est précisément le risque visé par la clause d’exclusion qui s’était produit, alors qu’il était couvert dans la version initiale des conditions générales. Les décisions de la cour d’appel et de la Cour de cassation ont abordé la situation sous un triple fondement : le dol, les clauses abusives et le manquement à l’obligation d’information.
1/ Nullité pour dol. Le manquement à une obligation précontractuelle d’information ne peut suffire à caractériser le dol par réticence si ne s’y ajoute la constatation du caractère intentionnel de ce manquement et d’une erreur déterminante provoquée par celui-ci ; rejet du pourvoi contre l’arrêt qui a retenu que les souscripteurs d’un contrat d’assurance responsabilité civile ont signé les avenants et certifié à cette occasion avoir reçu un exemplaire des conditions générales dont la référence était précisée, dans laquelle la condition de garantie litigieuse était mentionnée en caractères gras et suffisamment apparents et qu’ils ne peuvent plus soutenir que l’assureur a fait preuve d’une réticence dolosive les ayant induit en erreur, dans la mesure où la modification du contrat était somme toute, à l’échelle de celui-ci, minime et n’était pas censée concerner une situation courante, qu’elle ne pouvait donc revêtir pour les assurés un caractère substantiel qui aurait déterminé leur consentement. Cass. civ. 2e, 25 juin 2015 : pourvois n° 14-18486 et n° 14-19786 ; arrêt n° 981 ; Cerclab n° 5221 (de ces constatations et énonciations, découlant de son appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve soumis à son examen, la cour d’appel a exactement déduit que le consentement n’avait pas été vicié), rejetant le pourvoi contre CA Caen (1re ch. civ.), 1er avril 2014 : RG n° 12/00287 ; Cerclab n° 4761 ; Juris-Data n° 2014-008413 (refus également du dol, au motif que la modification serait minime), infirmant TGI Cherbourg, 5 décembre 2011 : RG n° 09/00651 ; Dnd. § N.B. Les deux décisions omettent que l’un des avenants n’était que l’exécution d’une obligation de l’assuré pour modifier son adresse et pour l’autre l’adjonction d’une protection juridique, dont le caractère secondaire avait une influence sur le caractère déterminant de l’erreur, puisque la modification des clauses d’exclusion n’avait rigoureusement aucun rapport avec les modifications ayant justifié la conclusion d’avenants.
2/ Clause de reconnaissance abusive (non). La clause relative à la garantie des accidents de la circulation causés par un enfant mineur ou toute autre personne dont l’assuré est reconnu civilement responsable prévoit que l’enfant ou la personne dont l’assuré est civilement responsable ne doit pas avoir la propriété ou la garde habituelle du véhicule, rédigée de façon claire et compréhensible, définit l’objet principal du contrat et ne peut être déclarée abusive, en application de l’ancien art. L. 132-1 al. 7 [L. 212-1, al. 3] C. consom. Cass. civ. 2e, 25 juin 2015 : pourvois n° 14-18486 et n° 14-19786 ; arrêt n° 981 ; Cerclab n° 5221 (motif de pur droit substitué à celui critiqué par le moyen, après avis donné aux parties), rejetant le pourvoi contre CA Caen (1re ch. civ.), 1er avril 2014 : RG n° 12/00287 ; Cerclab n° 4761 ; Juris-Data n° 2014-008413 (s’il est certain que, lors de la modification d'un contrat, il appartient à l'assureur de faire la preuve qu'une nouvelle condition de garantie a été précisément portée à la connaissance de l'assuré, cette preuve est suffisamment rapportée lorsque les souscripteurs du contrat ont signé les avenants et certifié à cette occasion avoir reçu un exemplaire des conditions générales dont la référence était précisée, dans lesquelles cette condition de garantie était mentionnée en caractères gras suffisamment apparents ; arrêt estimant au surplus que les documents contractuels ne sont pas contradictoires, source de confusion ou difficilement compréhensibles, dès lors qu'il est clairement indiqué que l'avenant s'est substitué au contrat initial et que les termes de cet avenant sont particulièrement clairs et dénués d'ambiguïté ; par ailleurs, cette clause qui dispose que la garantie n’est acquise que si l'enfant n’est pas propriétaire ou gardien habituel du véhicule, ne procure pas un avantage excessif à l'assureur et si le premier juge a à bon droit indiqué que doivent être considérées comme abusives les clauses conférant à l'assureur le droit de réduire unilatéralement les garanties promises, tel n'est pas le cas en l'espèce, puisque la modification du contrat résulte d'un avenant qui a été accepté ; N.B. 1 la notion d’avantage excessif est inapplicable à un contrat conclu en 2002 -N.B. 2 l’arrêt retient plus loin, de façon totalement contradictoire, un manquement à l’obligation d’information de l’assureur l’obligeant à prendre en charge la moitié des conséquences du sinistre), infirmant TGI Cherbourg, 5 décembre 2011 : RG n° 09/00651 ; Dnd. § N.B. Le relevé de ce motif de pur droit suppose que la Cour de cassation contrôle elle-même le respect de la condition d’une rédaction « claire et compréhensible », ce qui ne va pas forcément de soi. Ensuite, la position de la Cour de cassation est loin d’emporter la conviction. L’arrêt ne semble pas examiner le caractère abusif sous le bon angle. Il est couramment admis, lors de la conclusion du contrat initial, que la clause par laquelle le consommateur reconnaît avoir pris connaissance, tant de l’existence que du contenu de conditions générales figurant sur le document qu’il signe ou dans un document annexe qui lui est remis, n’est pas abusive. Néanmoins, la validité de cette clause qui conditionne l’opposabilité des conditions générales est le plus souvent admise pour la conclusion du contrat initial. Lors de la conclusion d’un avenant, la situation est totalement différente. S’il est possible, bien que difficile, de prendre effectivement connaissance des conditions générales, il est en revanche totalement irréaliste, pour ne pas dire impossible, de comparer la version initiale (souvent indisponible lors de la conclusion de l’avenant) avec la version nouvelle, clause par clause. Lors de la conclusion d’un avenant, la teneur des modifications apportées au contrat est une caractéristique essentielle dont le consommateur doit être informé (on pourrait même dire que les modifications sont l’objet de l’avenant et qu’ils n’ont pas été stipulés clairement). Les deux arrêts l’ont d’ailleurs admis, en retenant un manquement à l’obligation d’information, mais il est surprenant que cette asymétrie d’information n’ait pas été prise en compte en amont, pour apprécier le caractère abusif de la clause de reconnaissance et d’acceptation des conditions générales. § N'est pas abusive la clause par laquelle l’assuré reconnaît avoir reçu un exemplaire des conditions générales lors de la souscription d’un avenant, dès lors qu’elle est destinée à permettre à l’assureur de prouver qu’il s’est acquitté de son obligation d’information à l’égard de l’assuré, qu’elle est d’un usage courant et validée par l’art. R. 112-3 C. assur., lequel dispose que la remise des documents visés au deuxième alinéa de l’article L. 112-2 du même code (la notice d’information) est constatée par une mention signée et datée par le souscripteur apposée au bas de la police, par laquelle celui-ci reconnaît avoir reçu au préalable ces documents et précisant leur nature et la date de leur remise. CA Colmar (2e ch. civ. sect. A), 4 décembre 2015 : RG n° 14/01776 ; arrêt n° 737/2015 ; Cerclab n° 5528, infirmant sur ce point TGI Mulhouse, 21 janvier 2014 : Dnd.
3/ Portée de la clause. Est abusive la clause qui prévoit que, lorsque l'abonné sollicite la modification de son contrat, il adhère aux conditions générales d'abonnement en vigueur à la date de la modification, alors qu’il ne résulte pas de cette stipulation que les nouvelles conditions sont portées à sa connaissance et que, dès lors, cette clause qui entraîne l’acceptation automatique des nouvelles conditions d'abonnement a pour effet de constater son adhésion à des clauses dont il n'a pas effectivement connaissance, contrairement aux dispositions de l’art. R. 212-1-1° C. consom. CA Versailles (1re ch. 1re sect.), 8 février 2019 : RG n° 17/05367 : Cerclab n° 8243 (art. 9.4 CG abon.), infirmant TGI Nanterre (pôle civ. ch. 7), 30 mai 2017 : RG n° 13/01009 ; Dnd.
La clause par laquelle l’assuré reconnaît, lors de la conclusion d’un avenant, avoir reçu un exemplaire des conditions générales, n’institue qu’une présomption simple, destinée à établir le fait que l’assuré a pris connaissance de ses conditions et qu’il les a approuvées, présomption qui peut donc être combattue par la preuve contraire. CA Colmar (2e ch. civ. sect. A), 4 décembre 2015 : RG n° 14/01776 ; arrêt n° 737/2015 ; Cerclab n° 5528, infirmant sur ce point TGI Mulhouse, 21 janvier 2014 : Dnd. § En l’espèce, cette présomption est valablement contredite par le caractère équivoque de la clause en ce qu’elle vise l’exemplaire des conditions générales reçues « le jour de la souscription », cette expression pouvant aussi bien signifier la date de la souscription initiale du contrat que celle de l’avenant, et par plusieurs indices : l’agent de recherche commis par l’assureur pour enquêter sur les circonstances du sinistre atteste que les conditions générales du contrat qui lui ont été remises par l’assuré étaient celles du contrat initial ; ensuite, l’avenant conclu à l’initiative de l’assuré, avait pour objet d’améliorer la garantie, en supprimant les franchises responsabilité civile et dommages aux biens, seuls points sur lequel les conditions particulières de l’avenant diffèrent de celles du contrat initial ; enfin, le courrier qui a été adressé par l’assureur pour informer l’assurédes modifications du contrat précise les garanties accordées sans aucune mention d’une réduction du plafond de garantie. Même arrêt (conséquence : réduction inopposable).
4/ Manquement à l’obligation d’information. Pour le principe : manque à son obligation d’information l’agent général d’assurance qui, lors de la souscription par l’assuré d’une nouvelle police remplaçant la précédente, n’attire pas son attention sur une réduction de garantie. Cass. civ. 2e, 8 mars 2006 : pourvoi n° 05-11319 ; Dnd ; D. 2006. 1941, note Noguéro ; RDC 2007. 308, obs. Viney.
Rejet du pourvoi contre l’arrêt qui retient que l’assureur a manqué à son obligation d’information, lorsqu’à l’occasion de la conclusion d’avenants de contrats d’assurance, visant essentiellement pour le père, à modifier l’adresse des biens assurés et pour la mère, à souscrire en sus une assurance de protection juridique, dès lors que l’assureur a ajouté aux conditions générales une clause qui a eu pour effet d’exclure la garantie d’un sinistre survenu quelques mois plus tard alors qu’il appartenait à l’assureur d’informer clairement les assurés de la modification pratiquée quant aux conditions de la garantie responsabilité civile des parents. Cass. civ. 2e, 25 juin 2015 : pourvois n° 14-18486 et n° 14-19786 ; arrêt n° 981 ; Cerclab n° 5221 (charge de la preuve pesant sur l’assureur ; « en l’état de ces constatations et énonciations d’où il ressortait que l’assureur n’avait pas attiré l’attention des assurés sur la réduction des garanties pratiquée, la cour d’appel a pu décider, sans se contredire, qu’il n’avait pas satisfait à son obligation d’information qui ne se limitait pas à la remise des conditions générales » ), rejetant le pourvoi contre CA Caen (1re ch. civ.), 1er avril 2014 : RG n° 12/00287 ; Cerclab n° 4761 ; Juris-Data n° 2014-008413, infirmant TGI Cherbourg, 5 décembre 2011 : RG n° 09/00651 ; Dnd.
* Modification du contenu du contrat avant sa prise d’effet. En fonction de la nature du contrat, il est d’usage d’autoriser le client, consommateur ou pas, à solliciter une modification de son contrat tant que l’exécution de celui-ci n’a pas commencé. Dès lors que cet ajustement ne cause aucun préjudice au professionnel (ex. changement d’horaire de train), notamment parce qu’il n’a pas encore exposé de frais irréversibles (ex. commande de matériels), cette modification n’est normalement pas onéreuse.
V. pour la Commission des clauses abusives : la Commission recommande l’élimination, dans les contrats de transport international régulier par autocar, des clauses ayant pour objet ou pour effet d’exclure tout remboursement au voyageur qui souhaite modifier sa réservation dans les conditions prévues au contrat, sans réserver le cas d’un motif légitime. Recomm. n° 08-03/D-23 : Cerclab n° 2207 (transport international régulier par autocar ; clause de nature à créer un déséquilibre significatif au détriment du consommateur dès lors qu’elle est générale et ne réserve pas les cas où le consommateur aurait un motif légitime de modifier sa réservation et qu’elle concerne aussi des modifications qui ne sont pas de dernière minute).
Réitération d’un compromis. Pour ne prendre que l’exemple le plus courant, la vente d’un immeuble construit peut être conclue par un acte sous seing privé (compromis). Afin de rendre l’acte opposable aux tiers, il est en revanche nécessaire de le publier, ce qui impose sa réitération par acte authentique. Il n’est pas contestable que l’intervention du notaire conduit à l’insertion de mentions supplémentaires dans l’acte, afin de respecter toutes les dispositions légales nécessaires et pouvant être absentes de l’acte sous seing privé. Il semble toutefois qu’en pratique, les modifications ne se limitent pas toujours à cela et que le contrat réitéré contienne d’autres modifications. L’opposabilité de celles-ci pourrait parfaitement se discuter, dès lors que la réitération ne peut porter atteinte au contenu de l’acte sous seing privé, qui est obligatoire entre les parties. Les dispositions nouvelles ne peuvent être analysées que comme des propositions de modification, susceptibles d’être refusées. Toute la discussion risque alors de porter sur l’acceptation sans équivoque de celles-ci, ce qui nécessite une information claire du notaire (y compris sur la possibilité de les refuser).
Rappr. une décision repoussant une demande tendant à contester la validité d’un acte authentique sur le fondement de l’ancien art. L. 132-1 [212-1] C. consom., au motif que le lien entre le texte et la demande était insuffisamment explicité. CA Nîmes (1re ch. B), 31 janvier 2006 : RG n° 03/04077 ; Legifrance ; Cerclab n° 1333 ; Lamyline (N.B. les demandeurs contestaient en premier lieu le respect des règles imposées pour reconnaître à l’acte son caractère authentique, en sollicitant sa nullité complète, sans réduction à un acte sous seing privé, puis invoquaient ensuite le point 1.j de l’annexe : or, ce point concerne les clauses autorisant « le professionnel à modifier unilatéralement les termes du contrat sans raison valable et spécifiée dans le contrat » ; il est permis de se demander si la contestation ne portait pas sur la modification du contenu de l’acte réitéré par rapport au contenu initial), sur appel de TGI Carpentras, 13 mai 2003 : RG n° 01/00463 ; jugt n° 03/00176 ; Cerclab n° 2142 (problème non abordé).
C. CLAUSES D’ADAPTATION DU CONTRAT
Absence de clause d’adaptation du contrat. Les contrats ne contiennent le plus souvent aucune clause d’adaptation du contrat en cas de modification des conditions économiques au profit du consommateur. En tout état de cause, cette absence de clause ne pourrait être contestée au titre des clauses abusives (Cerclab n° 5835), sauf à ce qu’éventuellement cette absence soit indirectement contestée au titre de l’absence de réciprocité si le professionnel s’est accordé une telle prérogative. § Comp. dans le cadre de l’art. L. 442-6-I-2° C. com. : contribue également au déséquilibre significatif créé par cette clause de paiement anticipé des remises, le fait que la stipulation ne contienne aucune clause de modification des acomptes de ristournes si le volume d’achat, initialement envisagé pour fixer le taux de remise, diminue en cours d’année de manière significative, contraignant ainsi le fournisseur à payer une dette qui n’est pas certaine, liquide et exigible et à agir pour obtenir une régularisation en fin d’année qui sera au demeurant tardive. T. com. Lille, 6 janvier 2010 : RG n° 2009/5184 ; Cerclab n° 4251 ; D. 2010. p. 1000, note J. Sénéchal ; JCP G. 2010. 516, obs. M. Chagny ; Contr. conc. consom. 2010/3. Comm. n° 71, note N. Mathey ; RDC 2010/3. p. 928, obs. M. Behar- Touchais ; Rev. Lamy conc. 2010, n° 23, p. 43, note M. Behar- Touchais ; Lettre distrib. n° 1-2010, note J.-M. Vertut (le déséquilibre ne disparaît pas du seul fait que l’acheteur a, en fait, accepté certaines modifications).
Existence d’une clause d’adaptation. Avant la réforme du Code civil, une clause d’adaptation, même stipulée au profit du professionnel, ne posait pas de problème au regard de la protection contre les clauses abusives, en tout cas si la modification ne pouvait être imposée au consommateur.
Depuis l’ordonnance du 10 février 2016, la possibilité de réviser le contrat en cas de situation imprévue est entrée dans le Code civil. Selon le nouvel art. 1195 C. civ., « Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l'exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n'avait pas accepté d'en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation. [alinéa 1] En cas de refus ou d'échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu'elles déterminent, ou demander d'un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d'accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d'une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu'il fixe. [alinéa 2] ».
Le nouveau dispositif va donc désormais servir de norme de référence supplétive au droit des clauses d’adaptation. Il conviendra de préciser la latitude dont disposent les professionnels pour aménager celui-ci. Serait sans doute abusive une clause écartant toute intervention du juge en cas de désaccord, ou imposant une résolution à des conditions établies par le seul professionnel.
D. RÉVISION POUR IMPRÉVISION
Principe. Avant la réforme du Code civil, il était constamment admis que l’apparition en cours d’exécution du contrat de circonstances extérieures déséquilibrant la convention ne faisait pas perdre à celle-ci son caractère obligatoire (Aff. Canal de Craponne, Cass. 6 mars 1876). Le fait que l’exécution d’une obligation devienne plus onéreuse pour un contractant ne permettait pas à celui-ci de s’y soustraire, ne l’autorisait pas à solliciter une rénégociation de l’accord en l’absence de clause la prévoyant. Ces solutions étaient complétées par le refus de considérer que le renchérissement du coût d’exécution d’une prestation puisse être assimilé à une impossibilité d’exécuter, caractéristique de la force majeure.
L’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 a renversé cette solution en insérant dans le Code civil un nouvel article 1195 qui dispose : « Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l'exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n'avait pas accepté d'en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation. [alinéa 1] En cas de refus ou d'échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu'elles déterminent, ou demander d'un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d'accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d'une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu'il fixe. [alinéa 2] ».
Domaine. Le nouvel article 1195 C. civ. exclut de champ d'application les contrats aléatoires puisqu'il prévoit que « si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l'exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n'avait pas accepté d'en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat », solution applicable à un contrat de swap, dans lequel chaque partie assume un risque, accepte de perdre, afin d'obtenir la chance de gagner. CA Paris (pôle 5 ch. 6), 16 février 2018 : RG n° 16/08968 ; Cerclab n° 7535 (contrat de swap conclu par un syndicat mixte regroupant des communes pour la gestion des eaux), sur appel de TGI Paris, 23 mars 2016 : RG n° 12/14157 ; Dnd.
Validité des clauses en droit de la consommation. L’art. 1195 n’est pas explicitement présenté comme un texte d’ordre public. Il contient même une disposition qui implique la possibilité pour les parties d’écarter le texte : « pour une partie qui n'avait pas accepté d'en assumer le risque ». Il en résulte, en droit de la consommation, plusieurs interrogations.
Tout d’abord, une clause prohibant toute renégociation imposée par le professionnel est-elle abusive ? La réponse est certainement négative lorsque le contrat inclut par nature un risque, comme pour les contrats aléatoires. Dans les autres cas, la question reste ouverte, d’autant que les hypothèses risquent d’être rares lorsque le consommateur se contente de payer un prix. Mais, elles ne sont pas pour autant inexistantes (cas de clauses d’indexation ou de clauses de monnaie de compte rendant la prestation beaucoup plus onéreuse pour le consommateur, même si dans ce second cas, il pourrait être soutenu que le risque de change a été accepté).
En revanche, la stipulation de clauses asymétriques, plus favorables pour le professionnel que pour le consommateur, dans leurs modalités et a fortiori dans leur principe (révision possible pour le professionnel, pas pour le consommateur) pourrait être considérée comme créant un déséquilibre significatif.
Reste enfin le sort des clauses qui encadreraient de façon restrictive le texte (ex. : condition de délai, imposition d’un seuil inatteignable sauf cas exceptionnel, restriction des pouvois du juge) qui pourraient, le cas échéant, être jugée déséquilibrées si elles s’appliquent à un consommateur n’ayant pas accepté le risque encouru.