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CA ANGERS (ch. com. sect. A), 2 décembre 2014

Nature : Décision
Titre : CA ANGERS (ch. com. sect. A), 2 décembre 2014
Pays : France
Juridiction : Angers (CA), ch. com. A
Demande : 13/03350
Date : 2/12/2014
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 24/12/2013
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4982

CA Angers (ch. A com.), 2 décembre 2014 : RG n° 13/03350

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Attendu qu'aux termes de l'article L. 442-6-II du code de commerce : « Sont nuls les clauses ou contrats prévoyant pour un producteur, un commerçant, une personne immatriculée à la chambre des métiers, un industriel la possibilité : [...] b) d'obtenir le paiement d'un droit d'accès au référencement préalablement à la passation de toute commande » ; Attendu qu'en l'espèce, ce texte n'a pas vocation à s'appliquer dès lors que la commission versée à la société P. n'est pas préalable à la passation de toute commande, mais au contraire calculée et payée après l'émission par l'entrepreneur de sa facture ; Que ce moyen doit donc être rejeté ; Que la société P. sera donc déboutée de sa demande en restitution des sommes déjà versées à ses adversaires ».

2/ « Attendu qu'il incombe à la société P. d'établir que le paiement de commissions aux sociétés Pierre de Loire et Prim'habitat est sans contrepartie ou manifestement disproportionné au service rendu ; que cette preuve n'est aucunement rapportée en l'espèce, dès lors que la commission dont s'agit était limitée à 3 % des marchés obtenus grâce à la mise en relation par les maîtres d'œuvre de la société P. avec des maîtres de l'ouvrage et que les factures produites démontrent que l'intervention des sociétés Pierre de Loire et Prim'habitat a généré, pour l'entreprise d'électricité, un volume d'affaires substantiel ; Que le premièrement de l'article L. 442-6-I n'a donc pas vocation à s'appliquer ;

Qu'il en est de même du deuxièmement, la société P. ne démontrant ni qu'elle a été contrainte d'accepter les pratiques de les sociétés Pierre de Loire et Prim'habitat, ni qu'il en est résulté un déséquilibre significatif ;

Attendu s'agissant du troisièmement, que ce texte n'est pas applicable en l'espèce, dès lors que les sociétés Pierre de Loire et Prim'habitat ne passent pas de commandes à la société P. et n'ont exigé le versement d'aucune somme avant de soumettre sa candidature à des clients potentiels ».

 

COUR D'APPEL D'ANGERS

CHAMBRE A - COMMERCIALE

ARRÊT DU 2 DÉCEMBRE 2014

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 13/03350. Jugement du 11 décembre 2013 Tribunal de Commerce d'ANGERS : R.G. n° 2012009159.

 

APPELANTE :

SARL P.

Représentée par Maître Philippe PAPIN, avocat postulant au barreau d'ANGERS - n° du dossier 1200221 et Maître DUPUIS, avocat plaidant au barreau du MANS

 

INTIMÉES :

SARL PIERRE DE LOIRE

Agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité à son siège

SARL PRIM'HABITAT

agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité à son siège,

SARL FONCIER 49

agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité à son siège,

Représentées par Maître Louis René PENNEAU, avocat postulant au barreau d'ANGERS - n° du dossier 20130231 et Maître VASNIER, avocat plaidant au barreau d'ANGERS

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue publiquement, à l'audience du 21 octobre 2014 à 14H00, Madame PORTMANN, Conseiller ayant été préalablement entendu en son rapport, devant la Cour composée de : Madame VAN GAMPELAERE, Conseiller, faisant fonction de Président, Madame MONGE, Conseiller, Madame PORTMANN, Conseiller, qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Monsieur BOIVINEAU

ARRÊT : Contradictoire, Prononcé publiquement le 2 décembre 2014 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ; Signé par Véronique VAN GAMPELAERE, Conseiller, faisant fonction de Président et par Denis BOIVINEAU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

La société P. était en relations commerciales depuis de nombreuses années avec les sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat pour lesquelles elle effectuait des travaux d'électricité dans la cadre de marchés de travaux dont celles-ci avaient la maîtrise d'œuvre.

Elle intervenait également pour effectuer des travaux d'électricité sur les chantiers de la société Foncier 49, constructeur de maisons individuelles, qui a les mêmes cogérants que les sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat.

Des factures de travaux étant restées impayées, la société P. a saisi le président du tribunal de commerce d'Angers lequel a, par ordonnances en date du 19 juin 2012, condamné la société Foncier 49 à payer à la société P. les sommes de 3.055,98 euros et de 15.000,00 euros.

La société Foncier 49 a formé opposition à l'encontre de ces décisions.

Parallèlement, les sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat ont fait assigner la société P. devant le tribunal de commerce d'Angers en paiement de factures impayées.

Ces différentes instances ont fait l'objet d'une jonction.

Par un jugement en date du 11 décembre 2013, le tribunal de commerce d'Angers a :

- Concernant la société Pierre de Loire contre la société P. :

* condamné la société P. à payer à la société Pierre de Loire la somme de 12.125,43 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2012,

* condamné la société P. aux dépens,

* condamné la société P. à payer à la société Pierre de Loire la somme de 1.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* débouté la société Pierre de Loire de sa demande d'exécution provisoire,

- Concernant la société Prim'Habitat contre la société P. :

* condamné la société P. à payer à la société Prim'Habitat la somme de 17.987,62 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2012,

* condamné la société P. aux dépens,

* condamné la société P. à payer à la société Prim'Habitat la somme de 1.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* débouté la société Prim'Habitat de sa demande d'exécution provisoire,

- Concernant la société P. contre la société Foncier 49 :

* condamné la société Foncier 49 à payer à la société la société P. la somme de 5.272,98 euros au titre du chantier de la [...], celle de 9.102,39 euros au titre du chantier de […] à [ville B.], celle de 8.375,37 euros au titre du chantier [...], outre les intérêts au taux légal à compter du 13 février 2012,

* condamné la société Foncier 49 aux dépens,

* condamné la société Foncier 49 à payer à la société P. la somme de 2.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

* débouté la société P. de sa demande d'exécution provisoire.

Par déclaration reçue le 24 décembre 2013 et enregistrée le 26 décembre suivant, la société P. a formé appel de ce jugement.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 septembre 2014.

 

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du Code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement :

- du 19 mars 2014 pour la société P.,

- du 17 juin 2014 pour les intimées,

qui peuvent se résumer comme suit.

La société P. demande à la cour :

À titre principal,

- de prononcer la nullité des conventions cadres d'apporteurs d'affaires conclues avec les sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat,

- de débouter ces dernières de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- de condamner en conséquence la société Pierre de Loire à lui restituer la somme de 32.113,27 euros,

À titre subsidiaire,

- de dire et juger que les sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat sont responsables à son égard de pratiques commerciales restrictives de concurrence,

- de condamner en conséquence les sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat respectivement à lui verser, à titre de dommages et intérêts, les sommes de 12.125,43 euros et de 17.987,62 euros,

- de prononcer la compensation de ces sommes avec celles sollicitées par les sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat,

En tout état de cause,

- de condamner la société Foncier 49 à lui payer la somme de 19.102,48 euros au titre du solde de ses factures, avec les intérêts au taux de la BCE majoré de 10 points de pourcentage à compter du 13 février 2012, en application de l'article L. 441-6 du code de commerce, outre sept indemnités forfaitaires de 40,00 euros chacune, ainsi que 2.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- de condamner les sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat à lui verser une somme de 10.000,00 euros en raison du préjudice que lui ont créé ces sociétés qui ont brusquement rompu les relations commerciales,

- de rejeter toutes demandes contraires ou plus amples,

- de condamner chacun de ses adversaires à lui verser une somme de 3.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la société Foncier 49, les sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat aux dépens.

Concernant la société Foncier 49, pour la [...], la société P. soutient que son adversaire ne démontre pas qu'elle a abandonné le chantier, ni que les travaux étaient entachés de malfaçons et enfin que les vols et dégradations constatés en septembre 2011 lui sont imputables. L'appelante ajoute que l'article 1788 du code civil ne s'applique pas lorsque la responsabilité de l'un des cocontractants est mise en cause dans la perte ou la détérioration de la chose, que l'entrepreneur, comme le sous-traitant est tenu d'une obligation de moyens s'agissant de la garde du chantier, que la société Foncier 49 a été négligente sur ce point et qu'elle aurait dû souscrire une assurance.

Elle ajoute que l'intimée ne démontre pas qu'elle aurait refusé de lui faire parvenir le consuel, qu'en tout état de cause, il s'agirait de la mise en œuvre de l'exception d'inexécution, sa facture étant restée impayée et qu'il n'est pas établi qu'il en est résulté, pour l'entrepreneur principal, un préjudice.

S'agissant du chantier de la [...], elle fait valoir qu'elle ne pouvait le terminer fin juillet, début août 2011, compte tenu de la période de congés, que les travaux que la société Foncier 49 dit avoir fait effectuer ne sont pas établis par les pièces produites, qu'en tout état de cause, leur montant ne pourrait être retenu pour une somme supérieure à 372,66 euros et qu'elle était fondée à se prévaloir de l'exception d'inexécution.

Sur le chantier des […], elle prétend qu'elle avait établi un devis, que des travaux supplémentaires avaient bien été commandés et ont été exécutés, ce qui n'a pas été contesté pendant plus de deux ans, que les consuels ont été transmis et qu'il n'est pas démontré que le retard, dont elle a dû indemniser ses clients, lui était imputable.

Trois factures d'un montant respectif de 6.841,93 euros, 8.966,75 euros et 8.375,37 euros ont été émises les 22 juin, 5 juillet et 7 juillet 2011. La société P. précise qu'un acompte de 9.184,05 euros a été réglé le 2 septembre 2011 et que la société Foncier 49 a accepté une traite de 24.184,05 euros revenue impayée pour 15.000,00 euros.

En outre, il lui serait dû une somme de 4.102,48 euros correspondant à d'autres factures.

Elle demande donc le paiement des dites sommes.

En réponse aux prétentions de les sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat, elle soutient :

- que les contrats d'apporteurs d'affaires passés avec ces sociétés doivent être annulés par application de l'article L. 442-6-II du code de commerce, au motif que ces conventions conclues préalablement à la passation des marchés, sont constitutives d'un droit d'accès lui permettant d'être référencée parmi les entreprises prestataires de services en électricité que ces sociétés de maîtrise d'œuvre présentent aux maîtres de l'ouvrage, de sorte qu'il conviendrait de condamner la société Pierre de Loire à lui rembourser les sommes perçues, s'élevant à 32.113,27 euros et de débouter ses adversaires de leurs prétentions,

- subsidiairement, que la responsabilité des dites sociétés doit être retenue en raison de la mise en œuvre de pratiques restrictives de concurrence, prohibées par l'article L. 442-6-I du code de commerce, ses adversaires ne démontrant pas la réalité des « frais de dossier » dont elles demandent le paiement, n'établissant pas qu'ils ne créent pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et n'ayant pas fait précéder cet avantage d'un écrit contenant un volume de commandes qu'elles s'engageaient à respecter, peu important à cet égard que les commandes soient passées avec des tiers, ce qui justifierait la condamnation des sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat à lui payer des dommages et intérêts d'un montant équivalent aux sommes qui lui sont réclamées,

- qu'en tout état de cause, les sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat ont commis une faute engageant leur responsabilité en rompant brutalement les relations commerciales établies, dès lors que la société P. a demandé à la société Foncier 49 le paiement de ses factures, soutenant que ses adversaires ne peuvent se retrancher derrière le fait qu'elle n'avait pas exécuté les conventions conclues avec elles, celles-ci étant nulles ou du moins engageant leur responsabilité, et ajoutant que les différentes sanctions édictées à l'article L. 442-6 du code de commerce peuvent se cumuler.

La société Foncier 49 et les sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat demandent à la cour :

- de dire la société P. irrecevable et en tout cas mal fondée en son appel ; en conséquence de l'en débouter, ainsi que de toutes demandes, fins et conclusions,

- de confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce d'Angers en ce qu'il a :

* condamné la société P. à payer à la société Pierre de Loire la somme de 12.125,43 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2012,

* condamné la société P. aux dépens,

* condamné la société P. à payer à la société Pierre de Loire la somme de 1.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

* condamné la société P. à payer à la société Prim'Habitat la somme de 17.987,62 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2012,

* condamné la société P. aux dépens,

* condamné la société P. à payer à la société Prim'Habitat la somme de 1.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la société P. à verser aux sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat une somme de 3.000,00 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de dire et juger la société Foncier 49 recevable et bien fondée en son appel incident, y faisant droit et infirmant la décision entreprise :

* pour le chantier situé [...] : de débouter la société P., de la condamner à lui verser la somme de 4.116,63 euros, outre celle de 5.000 euros en réparation de son préjudice ; à titre subsidiaire de compenser les créances,

* pour le chantier situé [...] : de débouter la société P., de la condamner à lui verser la somme de 372,66 euros, outre celle de 5.000,00 euros en réparation de son préjudice ; à titre subsidiaire de compenser les créances,

* pour le chantier situé [...] : de lui décerner acte qu'elle reconnaît devoir à la société P. la somme de 3.915,34 euros HT, soit 4.682,74 euros TTC, de condamner la société P. à lui verser la somme de 1.274,52 euros en remboursement des frais acquittés, de prononcer la compensation des créances entre les parties,

- de condamner la société P. à payer à la société Foncier 49 la somme de 3.000,00 euros sur le fondement l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la société P. aux dépens de première instance et d'appel, avec le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

Les sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat rappellent que depuis au moins l'année 2005, il s'est instauré un partenariat avec la société P., qu'elles ont été amenées à conseiller à leurs clients, étant précisé qu'il avait été convenu que si cette société était retenue, elle leur rétrocéderait 3 % du marché considéré. Jusqu'en 2009, les relations se sont correctement passées, la société P. n'ayant remis en cause ni le principe ni le montant de leur créance, qui a même été payée s'agissant de la société Pierre de Loire. La preuve de la convention d'apporteur d'affaires se trouverait donc suffisamment démontrée au sens de l'article L. 110-3 du code de commerce.

Elles prétendent :

- qu'il n'y pas lieu d'annuler ces conventions par application de l'article L. 442-6-II du code de commerce, qui vise à sanctionner les pratiques abusives entre fournisseurs et distributeurs, notamment en matière de référencement, et qui n'aurait donc pas vocation à s'appliquer en l'espèce, et ce d'autant plus que le paiement par elles de commissions n'a jamais été sollicité préalablement à la passation d'une commande, mais seulement après que la société P. a facturé sa prestation à son client,

- que la société P. ne rapporte pas la preuve, dont la charge lui incombe, que les « commissions » qui lui sont facturées ne correspondent à aucun service rendu, sont manifestement disproportionnées à celui-ci ou créent un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, ajoutant qu'il ne peut être question d'un engagement sur un volume d'achat et au surplus que la société P. ne justifie pas de son préjudice,

- qu'elles étaient fondées à rompre les relations commerciales avec la société P., dès lors que celle-ci n'avait pas payé les factures émises, certaines depuis 2009, malgré les mises en demeure qui lui avaient été envoyées.

La société Foncier 49 forme un appel incident en exposant que les relations avec la société P. se sont dégradées au cours de l'été 2011, ce qui a conduit son adversaire à cesser de paraître sur les chantiers.

Pour les travaux de la [...], elle prétend que la société P. a abandonné les travaux alors qu'ils étaient inachevés et affectés de malfaçons, qu'en outre, le chantier a été vandalisé entre le 13 et le 14 septembre 2011, relevant que seul le lot électricité a été affecté, qu'elle a donc dû faire intervenir en urgence une autre société qui lui a facturé une somme de 4.116,63 euros dont elle sollicite le paiement, s'opposant au règlement des factures correspondant à des travaux non livrés. Elle ajoute que la société P. a refusé de fournir le certificat de conformité de l'installation électrique, de sorte qu'elle a dû indemniser les maîtres d'ouvrage pour le retard dans la livraison des logements, ce qui a, au surplus, affecté son image et sa réputation, préjudice qu'elle chiffre à 5.000,00 euros.

Pour le chantier de [ville B.], la société Foncier 49 affirme que des réserves à la réception ont été relevées et que la société P. n'est pas intervenue pour effectuer les travaux nécessaires à leur levée, ce qui l'a contrainte à faire appel à d'autres sociétés. Elle s'oppose donc au paiement de la facture de la société P., demande qu'elle soit tenue de lui verser la somme de 372,66 euros qu'elle a dû débourser et de lui payer une somme de 5.000,00 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires.

Pour le chantier des [P.], elle fait valoir que la société P. ne produit pas de facture, ni même de devis signé, mais reconnaît malgré tout devoir une somme de 4.682,74 euros TTC. Elle conteste en revanche devoir les travaux supplémentaires dont le paiement lui est réclamé, au motif que, soit ils n'ont pas été commandés, soit ils sont inclus dans le marché.

La société P. n'aurait pas non plus fourni le consuel, de sorte qu'elle a dû livrer des logements sans électricité le 30 juin 2011 et payer à ses clients les frais d'hébergement et de garde meuble le temps de réaliser un branchement provisoire. Elle réclame donc à ce titre la condamnation de la société P. à lui rembourser ces frais, qui se sont élevés à 1.274,52 euros.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

I - Sur le litige opposant la société P. à la société Foncier 49 :

Attendu qu'il convient, à titre liminaire, de relever qu'il n'est pas contesté que la société Foncier 49, constructeur de maisons individuelles, a sous-traité à la société P. le lot électricité pour l'ensemble des chantiers litigieux ;

 

1/ Pour le chantier [ville A.] :

Attendu que la société P. produit, de ce chef, trois factures :

- facture du 22 juin 2011 pour 6.841,93 euros

- facture du 26 juillet 2011 pour 837,20 euros

- facture du 25 août 2011 pour 1.710,48 euros

Attendu en premier lieu que la société Foncier 49, qui se borne à produire un courriel du 6 septembre 2011 faisant état de défauts de conformité et de non façons très limités (absence des embouts dans le boîtier colonne électrique et de barrettes pour les câbles RJ45) ne démontre pas que la société P. a abandonné le chantier au cours de l'été 2011 ;

Attendu en second lieu, qu'elle établit en revanche par la production d'un constat dressé le 16 septembre 2011 par Maître A., huissier de justice à Angers, et d'une plainte du 19 septembre suivant, que deux boîtiers électriques situés dans la pièce principale et sept radiateurs ont été dérobés et que les fils du tableau électrique situé dans le garage ont été coupés :

Qu'aux termes de l'article 1788 du code civil : « Si, dans le cas où l'ouvrier fournit la matière, la chose vient à périr, de quelque manière que ce soit, avant d'être livrée, la perte en est pour l'ouvrier, à moins que le maître ne fut en demeure de recevoir la chose »;

Que ce texte concerne également les relations entre le sous-traitant et l'entrepreneur ; qu'il est bien applicable en l'espèce dès lors qu'il ne s'agit pas de se prononcer sur les responsabilités encourues mais de savoir qui doit supporter les pertes subies ;

Que la société P. doit donc assumer les dégradations commises courant septembre 2011 sur le lot électrique ; que mise en demeure par courrier du 16 septembre 2011 de reposer ce qui a été volé ou vandalisé, elle ne s'est pas exécutée ; qu'elle n'est pas fondée à opposer une exception d'inexécution, alors que ses factures étaient très récentes et n'avaient pas fait l'objet de mises en demeure ; que compte tenu la date prévue pour la livraison de l'immeuble (le 19 septembre 2011), la société Foncier 49 n'avait d'autre choix que de faire réaliser les travaux par un autre entrepreneur auquel elle justifie avoir réglé la somme de 4.116,63 euros ;

Attendu que si tous les travaux effectués par la société P. n'ont pas été détériorés ou perdus, de sorte qu'elle est fondée à solliciter le paiement de ceux qui ont été utiles, il y a lieu d'en déduire le montant de ceux qui ont fait l'objet de dégradations ou de vols ; que les factures produites ne permettant pas de les isoler, ils seront évalués à la somme payée par la société Foncier 49 pour précéder aux reprises s'imposant ;

Attendu par suite, que la somme à laquelle la société P. peut prétendre s'élève à 5.272,98 euros ;

Attendu en outre, que la société Foncier 49 justifie qu'elle a dû intervenir auprès d'Erdf pour obtenir une copie du consuel que la société P. a refusé de lui fournir ; Que le 30 septembre 2011, elle n'avait toujours pas ce document, alors qu'il n'est pas contesté que le couple devant aménager avait un nourrisson ;

Que si la société Foncier 49 ne démontre pas avoir dû indemniser les maîtres de l'ouvrage, cette situation a porté atteinte à son image et à sa réputation et lui a causé un préjudice qui sera justement évalué à 150,00 euros ;

 

2/ Pour le chantier de [ville B.] :

Attendu que la société P. produit deux factures :

- une facture du 5 juillet 2011 d'un montant de 8.966,75 euros,

- une facture du 16 juillet 2011 d'un montant de 508,30 euros,

Qu'il s'agissait des dernières situations de travaux, ce qui supposait donc que ceux-ci soient terminés ;

Attendu cependant que les nombreux emails envoyés fin juillet et courant août et septembre 2011 à la société P. démontrent qu'il y avait des non façons ou malfaçons :

- lot A : branchements non terminés, la VMC cuisine et les volets roulants ne fonctionnent pas, il manque deux prises dans la cuisine,

- lot C : l'éclairage du rez-de-chaussée ne fonctionne pas,

- lot D : la sonnette et la pompe de relevage ne fonctionnent pas,

- lot E : de nombreuses prises ne fonctionnent pas, il manque un sèche-serviette,

- lot F : il manque une prise 20 A dans la cuisine, et dans la salle de bain, la prise électrique au-dessus des vasques n'a pas été déplacée,

Qu'il est constant que malgré ces demandes, la société P. n'a pas procédé aux reprises nécessaires ; que pour les mêmes motifs que ceux invoqués ci-dessus, elle n'est pas fondée à se prévaloir de l'exception d'inexécution ;

Qu'il ne peut être reproché à la société Foncier 49 d'avoir fait procéder à certaines réparations courant août 2011, notamment la pompe de relevage et une recherche de panne, compte tenu de la période de vacances de la société P. ;

Que ces malfaçons ou non façons ne justifient pas le non-paiement de l'intégralité des sommes dues à la société P. ; qu'en revanche, doivent être déduites les prestations mal ou non exécutées ; qu'au regard des factures produites par la société Foncier 49 et de la nature des travaux restant à effectuer, celles-ci seront chiffrées à 1.200 euros ;

Que les sommes restant dues à la société P. s'élèvent donc à 8.275,05 euros ;

Que si la société Foncier 49 ne démontre pas avoir dû indemniser les maîtres de l'ouvrage, cette situation a porté atteinte à son image et à sa réputation et lui a causé un préjudice qui sera justement évalué à 150,00 euros ;

 

3/ Pour le chantier des [P.] :

Attendu qu'en application de l'article 1315 du code civil, il incombe à la société P. de rapporter la preuve de l'obligation dont elle sollicite le paiement, soit en l'espèce, du contrat de marché dont elle se prévaut ; que cette preuve ne saurait résulter de la seule réalisation de travaux ;

Attendu que le devis produit par la société P., d'un montant total de 25.495,98 euros pour trois lots n'a pas été signé par la société Foncier 49 ; que l'entrepreneur ne verse pas aux débats la facture d'un montant de 8.375,37 euros dont il réclame le paiement ;

Que par suite, l'obligation à paiement de la société Foncier 49 n'est pas démontrée au-delà de la somme de 4.682,74 euros qu'elle reconnaît devoir ;

Attendu que si la société Foncier 49 justifie par la production de courriers, qu'elle a, pour ces logements, également eu des difficultés à obtenir le consuel, elle n'établit pas, en revanche, qu'elle a, de ce fait, dû supporter le coût de l'hébergement et du garde meuble de l'un de ses clients, les factures produites ne permettant pas de déterminer l'identité des personnes concernées ;

 

4/ Sur les comptes à faire entre les parties :

Attendu qu'il résulte de ce qui précède que les sommes dues à la société P. s'établissent comme suit :

- chantier [ville A.] : 5.272,98 euros

- chantier de [ville B.] : 8.275,05 euros

- chantier des [Pville A.] : 4.682,74 euros

- à déduire versement effectué par traite : 9.184,05 euros

Solde : 9.046,72 euros.

Qu'il sera relevé que les mises en demeure des 6 janvier, 20 janvier de 13 février 2012 visent aussi une facture du 22 octobre 2009 d'un montant de 1.046,50 euros, laquelle n'est pas produite et ne sera donc pas retenue ;

Attendu qu'il y a lieu, par suite, infirmant de ce chef le jugement entrepris, de condamner la société Foncier 49 à payer à la société P. la somme de 9.046,72 euros, avec les intérêts calculés au taux de la BCE majoré de 10 points de pourcentage, en application de l'article L. 441-6 du code de commerce, et ce, à compter du 13 février 2012, la cour ne pouvant, de ce chef, excéder la demande ; Qu'en revanche, les indemnités forfaitaires, dont le principe a été créé par la loi du 20 novembre 2012, ne peuvent être mises à la charge de la société Foncier 49 dès lors qu'elles ne sont pas prévues par les conditions générales de vente ;

Que la demande de la société P. ayant été réduite en cause d'appel, la résistance de son adversaire ne saurait être qualifiée d'abusive ; Que la demande de dommages et intérêts complémentaires qu'elle présente sera donc rejetée ;

Attendu que pour sa part, la société P. devra payer à la société Foncier 49 la somme de 300,00 euros à titre de dommages et intérêts ;

Attendu que les dettes et créances respectives des parties se compenseront ;

 

II - Sur le litige opposant la société P. aux sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat :

Attendu qu'il est constant que les sociétés Pierre de Loire et Prim'habitat exercent toutes les deux une activité de maîtrise d'œuvre ;

Attendu qu'il résulte des factures émises par les sociétés Pierre de Loire et Prim'habitat et celles établies par la société P., également produites par les sociétés intimées :

- que depuis 2005, M. P., puis la société P. s'est vu facturer par la société Pierre de Loire et la société Prim'Habitat des sommes correspondant à 3 % des sommes payées par le maître d'ouvrage,

- que ces factures ont été réglées jusqu'en 2009 ;

Que si certaines des factures portent, de manière inappropriée, la mention « Frais de dossier », elles visent le nom des maîtres de l'ouvrage et le montant des travaux facturés par la société P. ; qu'elles ont donc manifestement pour objet le paiement de commissions ;

Que ces éléments établissent suffisamment que les sociétés Pierre de Loire et Prim'habitat sont intervenues en qualité d'apporteur d'affaires pour la société P. moyennant le versement d'une somme correspondant à 3 % des sommes facturées par l'électricien à ses clients ;

Attendu qu'il n'est pas contesté que sont restées impayées :

- les factures émises à compter du 30 juin 2009 par la société Pierre de Loir pour un total de 12.125,43 euros,

- les factures émises à compter du 30 avril 2009 par la société Prim'Habitat pour un montant total de 17.987,62 euros,

 

1/ Sur la nullité du contrat :

Attendu qu'aux termes de l'article L. 442-6-II du code de commerce : « Sont nuls les clauses ou contrats prévoyant pour un producteur, un commerçant, une personne immatriculée à la chambre des métiers, un industriel la possibilité : [...] b) d'obtenir le paiement d'un droit d'accès au référencement préalablement à la passation de toute commande » ;

Attendu qu'en l'espèce, ce texte n'a pas vocation à s'appliquer dès lors que la commission versée à la société P. n'est pas préalable à la passation de toute commande, mais au contraire calculée et payée après l'émission par l'entrepreneur de sa facture ;

Que ce moyen doit donc être rejeté ; Que la société P. sera donc déboutée de sa demande en restitution des sommes déjà versées à ses adversaires ;

 

2/ Sur l'existence de pratiques restrictives de concurrence :

Attendu que l'article L. 442-6-I du code de commerce dispose :

« Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :

1°) D'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu [...] ;

2°) De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ;

3°) D'obtenir ou de tenter d'obtenir un avantage, condition préalable à la passation de commandes, sans l'assortir d'un engagement écrit sur un volume d'achat proportionné et, le cas échéant, d'un service demandé par le fournisseur et ayant fait l'objet d'un accord écrit ;[...]

5°) De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels » ;

Attendu qu'il incombe à la société P. d'établir que le paiement de commissions aux sociétés Pierre de Loire et Prim'habitat est sans contrepartie ou manifestement disproportionné au service rendu ; que cette preuve n'est aucunement rapportée en l'espèce, dès lors que la commission dont s'agit était limitée à 3 % des marchés obtenus grâce à la mise en relation par les maîtres d'œuvre de la société P. avec des maîtres de l'ouvrage et que les factures produites démontrent que l'intervention des sociétés Pierre de Loire et Prim'habitat a généré, pour l'entreprise d'électricité, un volume d'affaires substantiel ; Que le premièrement de l'article L. 442-6-I n'a donc pas vocation à s'appliquer ;

Qu'il en est de même du deuxièmement, la société P. ne démontrant ni qu'elle a été contrainte d'accepter les pratiques de les sociétés Pierre de Loire et Prim'habitat, ni qu'il en est résulté un déséquilibre significatif ;

Attendu s'agissant du troisièmement, que ce texte n'est pas applicable en l'espèce, dès lors que les sociétés Pierre de Loire et Prim'habitat ne passent pas de commandes à la société P. et n'ont exigé le versement d'aucune somme avant de soumettre sa candidature à des clients potentiels ;

Attendu en ce qui concerne la rupture des relations commerciales, que l'article L. 442-6-I-5°) précité réserve expressément la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ; qu'en l'espèce, la société P. ne justifie pas de la date à laquelle elle a cessé de bénéficier des services des sociétés Pierre de Loire et Prim'habitat ; qu'il résulte des relevés des factures que celles-ci sont demeurées impayées au cours d'année 2009 ; que la société P. a néanmoins continué à se voir apporter des affaires en 2011 et 2012 puisque des factures ont été émises ces années-là ;

Que compte tenu de l'ancienneté et de l'importance des impayés, les sociétés Pierre de Loire et Prim'habitat étaient fondées à rompre les relations courant 2012 ;

Attendu que, par suite, la société P. doit être déboutée de ses demandes de dommages et intérêts ;

Attendu qu'il convient, en conséquence, de confirmer le jugement rendu le 11 décembre 2013 par le tribunal de commerce d'Angers concernant le litige opposant la société P. aux sociétés Pierre de Loire et Prim'Habitat ;

Attendu qu'y ajoutant, il n'apparaît pas inéquitable de condamner la société P. à payer à chacune de celles-ci une somme complémentaire de 1.000,00 euros au titre de leurs frais non répétibles d'appel ;

 

III - Sur les dépens d'appel :

Attendu que l'appel de la société P. n'a pas prospéré ; qu'au contraire la dette de la société Foncier 49 à son égard a été réduite ; qu'elle sera, par suite, condamnée aux dépens d'appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement,

Dans le litige opposant la société P. à la société Foncier 49 :

- Infirme le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Angers le 11 décembre 2013 sauf du chef de la condamnation pour frais irrépétibles et aux dépens,

Statuant à nouveau des seuls chefs infirmés et y ajoutant,

- Condamne la société Foncier 49 à payer à la société P. la somme de 9.046,72 euros, avec les intérêts au taux de la BCE majoré de 10 points de pourcentage, en application de l'article L. 441-6 du code de commerce, et ce, à compter du 13 février 2012,

- Condamne la société P. à payer à la société Foncier 49 la somme de 300,00 euros à titre de dommages et intérêts,

- Rappelle que les dettes et créances respectives des parties se compenseront,

Dans le litige opposant la société P. aux sociétés Pierre de Loire et Prim'habitat :

- Confirme le jugement du tribunal de commerce d'Angers en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

- Condamne la société P. à payer à la société Pierre de Loire et Prim'Habitat une somme de 1.000,00 euros chacune au titre de leurs frais non-répétibles d'appel,

- Rejette les demandes pour le surplus,

- Condamne la société P. aux dépens d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER                     LE PRÉSIDENT

Denis BOIVINEAU              Véronique VAN GAMPELAERE