CA ANGERS (ch. com. sect. A), 2 décembre 2014
CERCLAB - DOCUMENT N° 5055
CA ANGERS (ch. com. sect. A), 2 décembre 2014 : RG n° 13/00373
Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2014-032694
Extrait : « Attendu en premier lieu, que cette clause, figurant sous la rubrique « Responsabilité » est apparente et claire ; Qu'il n'est pas contesté qu'elle figurait au verso de chacune des factures mensuelles envoyées depuis avril 2008 par la société TFE Angers à la société Takabio, ainsi que lesdites factures le mentionnent, de sorte qu'en poursuivant les relations, l'intimée a implicitement mais nécessairement accepté cette limitation de responsabilité ;
Attendu en deuxième lieu que si la clause précitée porte sur une obligation essentielle de la société TFE Angers, elle doit aussi, pour être écartée, contredire la portée de cette obligation à tel point qu'elle viderait l'engagement du dépositaire de toute substance ; Que pour l'apprécier, il convient de prendre en considération le prix payé par le créancier ; Qu'en l'espèce, la facture du mois d'août 2010 était d'un montant de 2.643,76 euros hors taxes ; Que cependant, il est impossible de déterminer la part de ce prix correspondant à l'entreposage du conteneur endommagé, la facture visant un solde d'entrée de 40 et un solde de sortie de 60, sans aucune précision sur l'unité à laquelle il est ainsi fait référence ; Qu'en tout état de cause, à supposer même que le coût de la prestation soit intégralement lié au stockage de l'enzyme Sumizyne Cu-L, la fixation d'un plafond de garantie de 1.533,00 euros ne serait pas sans rapport avec le prix payé, de sorte qu'elle ne conduirait pas à vider l'obligation de la société TFE Angers de toute substance ;
Attendu en troisième lieu qu'il importe peu, à ce stade de la discussion, de savoir si la société Takabio avait ou non demandé la souscription d'une assurance ad valorem, dès lors qu'il s'agirait d'une assurance de dommages souscrite pour son compte, laquelle n'aurait pas pour effet d'écarter le plafond de garantie institué par l'article 4-3 précité, mais de permettre au client d'être indemnisé par son assureur sans que celui-ci ne s'interroge sur la responsabilité du prestataire, ce que la société Takabio reconnaît d'ailleurs dans ses conclusions ;
Attendu enfin qu'elle ne peut pas plus se prévaloir des dispositions de l'article L. 442-6-1 du code de commerce qui dispose que : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel [...]1°) D'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu » ;
Qu'en effet, elle ne démontre pas que la somme facturée chaque mois pour 1,17 % de la valeur des marchandises était disproportionnée au service rendu ; Que c'est à tort qu'elle compare le montant de l'assurance payée pour le mois d'août 2010, soit 787,00 euros avec le montant de l'indemnisation à laquelle elle peut prétendre, dès lors qu'en retenant un pourcentage de 1,17 %, la prime réclamée correspondait à des marchandises d'une valeur de plus de 67.000,00 euros, donc ne se limitant pas au seul conteneur litigieux ;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède, que si la responsabilité de la société TFE Angers dans l'avarie survenue au mois d'août 2010 n'est pas contestable ni d'ailleurs contestée, elle était fondée à invoquer le plafond de garantie conduisant à limiter à 1.533,34 euros hors taxe l'indemnisation dont elle est redevable (2.300 x 2/3) ; Que la société TFE Angers reste redevable de la différence entre cette somme et celle de 1.284,00 euros déjà réglée, soit 249,34 euros, outre la taxe sur la valeur ajoutée ;
Qu'elle sera par suite condamnée à la verser ; Que s'agissant des intérêts de retard, il convient de relever que la créance de la société TFE est une créance de dommages et intérêts et non une somme due au titre d'une facture émise pour le règlement d'une prestation contractuelle ; Que par suite, les dispositions de l'article L. 441-6 du code de commerce ne sont pas applicables ; Que conformément à l'article 1153-1 du code civil, les intérêts seront calculés, au taux légal à compter du jugement ».
COUR D’APPEL D’ANGERS
CHAMBRE A - COMMERCIALE
ARRÊT DU 2 DÉCEMBRE 2014
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 13/00373. Jugement du 12 décembre 2012, Tribunal de Commerce d'ANGERS : n° d'inscription au RG de première instance : R.G. n° 11/011909.
APPELANTE :
SAS STEF TRANSPORT ANGERS, exerçant sous l'enseigne TFE,
agissant poursuites et diligences de son Président, domicilié en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Daniel CHATTELEYN de la SCP CHATTELEYN ET GEORGE, avocat postulant au barreau d'ANGERS - N° du dossier 40733 et Maître MENARD, avocat plaidant au barreau de RENNES
INTIMÉEE :
SARL TAKABIO
prise en la personne de son représentant légal, Représentée par Maître Thierry BOISNARD de la SARL LEXCAP-BDH, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 40733
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue publiquement, à l'audience du 21 octobre 2014 à 14 H 00, Madame PORTMANN, Conseiller ayant été préalablement entendu en son rapport, devant la Cour composée de : Madame VAN GAMPELAERE, Conseiller, faisant fonction de Président, Madame MONGE, Conseiller, Madame PORTMANN, Conseiller, qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Monsieur BOIVINEAU
ARRÊT : Contradictoire ; Prononcé publiquement le 2 décembre 2014 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ; Signé par Véronique VAN GAMPELAERE, Conseiller, faisant fonction de Président et par Denis BOIVINEAU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
La société Takabio est en relation d'affaires avec la société TFE Angers depuis le 17 avril 2008 afin d'assurer le stockage et le transport de ses marchandises.
Courant août 2010, la société Takabio a confié à sa cocontractante le stockage et le transport d'un conteneur renfermant 1.000 kg d'une enzyme dénommée sumizyme Cu-L, entrant dans la composition de produits alimentaires et dont la valeur marchande est de 12,00 euros HT le kilogramme.
Ce conteneur a été endommagé suite à la mauvaise manipulation d'un transpalette par un salarié de la société TFE Angers. 107 kg de sumizyme ayant été détériorés, la société Takabio a émis une facture d'un montant de 1.535,66 euros qui a été réglée par la société TFE Angers.
Néanmoins, la société Takabio indiquait le 4 mars 2011 à cette dernière, qu'après plusieurs tentatives de transaction, son client refusait de recevoir le surplus du produit, le percement du conteneur l'ayant rendu impropre à sa consommation.
La société TFE Angers a refusé de payer le solde de la valeur marchande du produit, soit 10.716,00 euros HT, en invoquant la clause limitative de responsabilité figurant aux articles 4.3 et 4.5 de ses conditions générales, qui ne permettaient pas, selon elle, à sa cocontractante d'obtenir une somme supérieure à 1 533,34 euros HT.
Suivant exploit en date du 21 octobre 2011, la société Takabio a par suite fait assigner la société TFE Angers en paiement devant le tribunal de commerce d'Angers, lequel a, par jugement du 12 décembre 2012 :
- donné acte à la société TFE Angers qu'elle n'avait pas souscrit d'assurance ad valorem,
- dit que la prescription d'un an avait été interrompue par la reconnaissance de responsabilité de la société TFE Angers,
- condamné la société TFE Angers à payer à la société Takabio la somme de 10.716,00 euros HT, avec les intérêts au taux de la BCE majoré de 10 points de pourcentage à compter du 1er septembre 2010,
- débouté la société Takabio de ses demandes de remboursement des primes d'assurance, de publication du jugement, d'indemnité pour résistance abusive,
- condamné la société TFE Angers à payer à la société Takabio la somme de 800,00 euros sur le fondement l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement.
La société TFE Angers a interjeté appel de cette décision par une déclaration reçue le 1er février 2013 et enregistrée le 4 février suivant.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 septembre 2014.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du Code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement
- du 2 août 2013 pour l'appelante,
- du 25 juin 2013 pour l'intimée,
qui peuvent se résumer comme suit.
La société TFE Angers demande à la cour :
- de la recevoir en son appel, de l'y déclarer bien fondée et d'y faire droit,
- de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions lui portant grief, le confirmer pour le surplus,
- de lui décerner acte qu'elle n'a pas souscrit d'assurance ad valorem et donc de dire sans objet la demande d'injonction de produire une police d'assurance à ce titre,
- de dire prescrites et en tout cas infondées les demandes de la société Takabio au titre du défaut de souscription d'une assurance ad valorem,
- de dire et juger pleinement valables et opposables ses conditions générales et débouter son adversaire des demandes présentées sur le fondement de la responsabilité contractuelle,
- en conséquence, et en toute hypothèse, de déclarer la société Takabio irrecevable et en tout cas mal fondée en l'intégralité de ses demandes, l'en débouter,
- de la débouter de son appel incident,
- reconventionnellement, de condamner la société Takabio à lui payer une somme de 2.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et à supporter les dépens de première instance et d'appel, avec le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle prétend en premier lieu que la demande de prise en charge du sinistre motivée par le défaut de souscription par elle d'une assurance ad valorem est, par application de l'article 8 de la convention qui édicte une prescription annale, tardive, le sinistre ayant eu lieu en août 2010 et l'assignation ayant été délivrée en octobre 2011. Elle ajoute que si elle a admis sa responsabilité dans la survenance du sinistre, elle ne l'a pas reconnue pour ne pas avoir souscrit une assurance ad valorem, de sorte que la prescription n'a pas été interrompue.
En deuxième lieu, elle fait valoir que la société Takabio n'a formalisé aucune demande de souscription d'une telle assurance, soulignant que cet argument a été invoqué 'sur le tard', lorsque sa cocontractante a pris conscience des conséquences des clauses limitatives de responsabilité, que son adversaire n'a pas demandé de justificatif de ce qu'elle avait fait le nécessaire, ni demandé de précision sur les conditions de mise en oeuvre de la garantie.
Elle ajoute qu'il est rare qu'une telle assurance soit sollicitée, chaque client prenant en général le soin de s'assurer pour lui-même, et précise que si la société Takabio a dû régler chaque mois une assurance, c'était en remboursement de la cotisation qu'elle même verse pour garantir sa responsabilité, laquelle peut trouver à s'appliquer au delà des clauses limitatives.
Subsidiairement, elle s'oppose au remboursement des cotisations payées, s'agissant de la simple application des relations tarifaires convenues.
En troisième lieu, la société TFE Angers soutient que les clauses limitatives de responsabilité figurant aux conditions générales transmises chaque mois à la société Takabio, et qui sont de notoriété publique en matière de transport et d'entreposage, sont parfaitement visibles et claires, et partant opposables à la société Takabio, laquelle ne peut d'ailleurs sans se contredire se prévaloir d'autres articles des dites conditions.
Enfin, elle s'oppose à la publication du jugement, soulignant qu'elle ne se justifie pas dès lors que l'image de la société Tfe Angers aux yeux des tiers n'a pas été altérée.
La société Takabio sollicite :
A titre principal :
- que la cour prenne acte de la non souscription de l'assurance ad valorem qui lui a été facturée et qu'elle condamne la société TFE Angers à lui rembourser la somme de 4.975,00 euros, réformant en ce sens le jugement du 12 décembre 2012,
- qu'elle déclare la clause limitative de responsabilité inopposable et qu'elle condamne la société TFE Angers à lui payer la somme de 12. 816,33 euros au titre de sa responsabilité contractuelle, avec les intérêts au taux de la BCE majoré de 10 points de pourcentage à compter du 1er septembre 2010, en application de l'article L. 441-6 du code de commerce,
- à défaut, qu'elle condamne la société TFE Angers aux mêmes sommes au titre de sa responsabilité contractuelle pour avoir facturé sans la souscrire une assurance ad valorem,
- qu'elle autorise la publication de la décision à intervenir,
En tout état de cause,
- qu'elle condamne la société TFE Angers à lui payer la somme de 3.000,00 euros pour résistance abusive outre la même somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et à supporter les dépens.
Elle fait valoir en premier lieu que sa demande n'est pas prescrite, la reconnaissance même partielle par la société TFE Angers de sa responsabilité les 3 et 18 mai 2011 et le 8 juin 2011 ayant, en application de l'article 2240 du code civil, interrompu la prescription contractuelle d'un an, et cet effet interruptif ne pouvant se fractionner.
Elle prétend en deuxième lieu avoir demandé la souscription d'une assurance ad valorem, ainsi que cela résulterait d'un email du 17 avril 2008, mais surtout de la facturation chaque mois de 1,17 % de la valeur des marchandises entreposées et de la déclaration de valeur qu'elle a systématiquement effectuée.
Sur ce point, elle conteste qu'il s'agissait de rembourser à son adversaire une quote part de l'assurance de responsabilité par elle souscrite, soulignant que l'appelante ne produit aucun justificatif en ce sens et que cela conduirait à ce qu'elle paie des cotisations sans rapport avec le montant de l'indemnisation possible (787,64 euros d'assurance en août 2010 pour un plafond de garantie de 1.533,34 euros), ce qui poserait la question de la légalité des pratiques contractuelles de la société TFE Angers au regard de l'article L. 442-6-I du code de commerce.
La société Takabio demande par suite que la société TFE Angers soit tenue de lui rembourser la somme de 4.975,00 euros au titre des sommes indûment versées par elle à ce titre.
La société Takabio fait valoir en troisième lieu, que les clauses limitatives figurant au verso des factures émises par la société TFE Angers lui sont inopposables, dès lors qu'elle a souscrit une assurance ad valorem, que ces clauses ne sont pas mises en évidence, et qu'elles conduisent à une indemnisation dérisoire (moins de 15 % du montant de la marchandise) inférieure au prix de revient de l'assurance.
Si ces clauses étaient considérées comme opposables, la société TFE Angers devrait en tout état de cause, selon elle, lui rembourser le montant des marchandises perdues en raison de la faute qu'elle a commise en ne souscrivant pas l'assurance ad valorem sollicitée.
Elle justifie sa demande de dommages et intérêts et de publication par les pratiques de la société TFE Angers, qui facture une assurance non souscrite.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Sur la demande dirigée à l'encontre de la société TFE Angers en sa qualité de dépositaire :
Attendu qu'aux termes de l'article 1927 du code civil : « le dépositaire doit apporter, dans la garde de la chose déposée, les mêmes soins qu'il apporte dans la garde des choses qui lui appartiennent » ; Que l'article 1928 vient préciser que cette disposition est appliquée avec d'autant plus de rigueur que le dépôt est à titre onéreux ;
Attendu que la société TFE Angers ne conteste pas être responsable de la dégradation d'un conteneur dans lequel se trouvait une tonne d'une enzyme dénommée Sumizyne Cu-L suite à la mauvaise manipulation d'un engin, en août 2010 ; Que par un email du 3 mai 2011, elle a d'ailleurs indiqué : « Concernant ce sinistre et conformément à mes échanges avec M. T., TFE Angers prendra ses responsabilités dans les limites et conditions générales de notre contrat » ;
Attendu cependant qu'elle se prévaut de la clause limitative de responsabilité figurant dans ses conditions générales, à l'article 4-3 et ainsi rédigée : « Pour tous les dommages imputables à une prestation associée (notamment l'entreposage, la logistique, les systèmes d'information...) et toutes pertes et avaries et toutes conséquences pouvant en résulter, dans le cas où la responsabilité propre du prestataire serait engagée, elle est strictement limitée à la valeur nette de la marchandise déclarée mensuellement avec un plafond de 14,00 euros par kilogramme de poids brut de marchandise concernée, manquante ou non relivrée, sans pouvoir excéder 2.300,00 euros par tonne avec un maximum de 100.000,00 euros par événements, toutes causes confondues. Les préjudices indirects et/ou immatériels ne sont pas indemnisables » ;
Que l'article 4-5 précise encore : « L'indemnisation est réduite d'un tiers lorsque le donneur d'ordre impose la destruction de la marchandise laissée pour compte, pour autant consommable, ou en interdit le sauvetage » ;
Attendu en premier lieu, que cette clause, figurant sous la rubrique « Responsabilité » est apparente et claire ; Qu'il n'est pas contesté qu'elle figurait au verso de chacune des factures mensuelles envoyées depuis avril 2008 par la société TFE Angers à la société Takabio, ainsi que lesdites factures le mentionnent, de sorte qu'en poursuivant les relations, l'intimée a implicitement mais nécessairement accepté cette limitation de responsabilité ;
Attendu en deuxième lieu que si la clause précitée porte sur une obligation essentielle de la société TFE Angers, elle doit aussi, pour être écartée, contredire la portée de cette obligation à tel point qu'elle viderait l'engagement du dépositaire de toute substance ; Que pour l'apprécier, il convient de prendre en considération le prix payé par le créancier ; Qu'en l'espèce, la facture du mois d'août 2010 était d'un montant de 2.643,76 euros hors taxes ; Que cependant, il est impossible de déterminer la part de ce prix correspondant à l'entreposage du conteneur endommagé, la facture visant un solde d'entrée de 40 et un solde de sortie de 60, sans aucune précision sur l'unité à laquelle il est ainsi fait référence ; Qu'en tout état de cause, à supposer même que le coût de la prestation soit intégralement lié au stockage de l'enzyme Sumizyne Cu-L, la fixation d'un plafond de garantie de 1.533,00 euros ne serait pas sans rapport avec le prix payé, de sorte qu'elle ne conduirait pas à vider l'obligation de la société TFE Angers de toute substance ;
Attendu en troisième lieu qu'il importe peu, à ce stade de la discussion, de savoir si la société Takabio avait ou non demandé la souscription d'une assurance ad valorem, dès lors qu'il s'agirait d'une assurance de dommages souscrite pour son compte, laquelle n'aurait pas pour effet d'écarter le plafond de garantie institué par l'article 4-3 précité, mais de permettre au client d'être indemnisé par son assureur sans que celui-ci ne s'interroge sur la responsabilité du prestataire, ce que la société Takabio reconnaît d'ailleurs dans ses conclusions ;
Attendu enfin qu'elle ne peut pas plus se prévaloir des dispositions de l'article L. 442-6-1 du code de commerce qui dispose que : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel [...]
1°) D'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu » ;
Qu'en effet, elle ne démontre pas que la somme facturée chaque mois pour 1,17 % de la valeur des marchandises était disproportionnée au service rendu ; Que c'est à tort qu'elle compare le montant de l'assurance payée pour le mois d'août 2010, soit 787,00 euros avec le montant de l'indemnisation à laquelle elle peut prétendre, dès lors qu'en retenant un pourcentage de 1,17 %, la prime réclamée correspondait à des marchandises d'une valeur de plus de 67.000,00 euros, donc ne se limitant pas au seul conteneur litigieux ;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède, que si la responsabilité de la société TFE Angers dans l'avarie survenue au mois d'août 2010 n'est pas contestable ni d'ailleurs contestée, elle était fondée à invoquer le plafond de garantie conduisant à limiter à 1.533,34 euros hors taxe l'indemnisation dont elle est redevable (2.300 x 2/3) ; Que la société TFE Angers reste redevable de la différence entre cette somme et celle de 1.284,00 euros déjà réglée, soit 249,34 euros, outre la taxe sur la valeur ajoutée ;
Qu'elle sera par suite condamnée à la verser ; Que s'agissant des intérêts de retard, il convient de relever que la créance de la société TFE est une créance de dommages et intérêts et non une somme due au titre d'une facture émise pour le règlement d'une prestation contractuelle ; Que par suite, les dispositions de l'article L. 441-6 du code de commerce ne sont pas applicables ; Que conformément à l'article 1153-1 du code civil, les intérêts seront calculés, au taux légal à compter du jugement ;
Sur la demande dirigée à l'encontre de la société TFE Angers pour la non souscription d'une assurance ad valorem :
Attendu que l'article 8 des conditions générales applicables aux relations entre les parties précise :
« Toutes réclamations relatives à nos différentes prestations de services, quelles qu'elles soient, se prescrivent dans un délai d'un an » ;
Attendu que la société Takabio ne conteste pas que, comme le soutient son adversaire, cette prescription a commencé à courir à compter de la date du sinistre ;
Attendu que pour que la reconnaissance de responsabilité vienne, en application de l'article 2240 du code civil, interrompre le délai de prescription, encore faut-il qu'elle soit claire et non équivoque ; Que tel n'était pas le cas de celle contenue dans le courriel du 3 mai précité, dès lors qu'il y était expressément fait référence aux limites et conditions générales du contrat ;
Que dans son email du 18 mai 2011, la société TFE Angers propose certes d'étendre l'indemnisation, mais uniquement à titre de règlement amiable ;
Qu'enfin, si dans un courrier du 8 juin 2011, le conseil de l'appelante confirme que celle-ci 'ne conteste en aucun cas sa responsabilité dans ce sinistre', il ne peut en être déduit que la société TFE Angers a également reconnu sa responsabilité, recherchée sur un fondement différent, pour défaut de souscription d'une assurance ad valorem ;
Attendu en conséquence que la demande de la société Takabio tendant à être indemnisée de son préjudice pour un tel manquement est prescrite et par suite irrecevable ;
Attendu qu'il convient donc d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société TFE Angers à payer à la société Takabio la somme de 10.716,00 euros ;
Sur la demande en restitution des primes d'assurances versées :
Attendu qu'ainsi que l'a indiqué le tribunal de commerce d'Angers, la société Takabio a accepté les conditions tarifaires proposées par la société TFE Angers, et notamment le paiement d'une somme correspondant à 1,17 % de la valeur des marchandises au titre d'une assurance ; Qu'elle ne peut, dès lors, remettre en cause ces paiements sauf si elle démontre que cette somme était destinée à la souscription d'une assurance ad valorem qui n'a finalement pas été prise par sa cocontractante ;
Attendu que dans son courriel du 17 avril 2008 transmettant ses propositions tarifaires, la société TFE Angers mentionne « Assurance : 1,17 % de la valeur de la marchandise » ;
Qu'il est constant que cette somme a mensuellement été facturée à la société TFE Angers et que cette dernière a, chaque mois, fait une déclaration de valeur des marchandises confiées ;
Que pour justifier ces facturations, l'appelante soutient qu'il s'agirait du remboursement de la cotisation d'assurance qu'elle même doit régler pour garantir sa responsabilité ; Que cependant, elle ne produit aucune pièce de ce chef et notamment ne démontre pas qu'elle serait garantie même en cas de faute lourde comme elle le soutient, ce qui expliquerait l'importance de la cotisation versée ;
Que les déclarations de valeur faites chaque mois par la société Takabio ne sont prévues dans les conditions générales que dans le cas où il a été envisagé la souscription d'une assurance ad valorem et sont même exclues sinon, l'article 5 indiquant : « le prestataire n'accepte aucune déclaration de valeur ni aucune déclaration d'intérêt spécial à la livraison » ;
Attendu que tant le paiement d'une cotisation d'assurance mensuelle variable en fonction de la valeur des biens entreposés que les déclarations faites chaque mois ne peuvent se justifier que parce que la société Takabio avait demandé une assurance ad valorem ;
Que celle-ci n'ayant pas été souscrite, elle est fondée à réclamer le remboursement des cotisations versées à cet effet, soit 4.975,00 euros ;
Que le jugement du tribunal de commerce sera en conséquence infirmé de ce chef également ;
Sur les autres demandes :
Attendu qu'ainsi qu'il a été dit, l'action en responsabilité dirigée contre la société TFE Angers pour défaut de souscription d'une assurance ad valorem est prescrite ; Que par suite, la société Takabio est irrecevable à solliciter la publication du jugement en réparation du préjudice subi du fait du manquement ainsi commis ;
Attendu qu'elle ne peut reprocher à son adversaire une résistance abusive dans le remboursement des marchandises stockées, puisqu'elle a été déboutée de cette demande ; Que de même, elle ne peut prétendre que la société TFE Angers a commis une résistance abusive en ne lui remboursant pas le montant des cotisations d'assurance dans la mesure où cette demande a été rejetée en première instance ;
Attendu que compte tenu de l'infirmation du jugement du 12 décembre 2012 relativement à la demande principale de la société Takabio en paiement de la somme de 10.076,00 euros, il convient d'infirmer également cette décision en ce qu'elle a condamné la société TFE Angers à payer à son adversaire une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que les demandes de la société Takabio ont été en partie du moins accueillies ; Que par suite, il convient de mettre les dépens tant de première instance que d'appel à la charge de son adversaire et de condamner cette dernière au paiement d'une somme de 1.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
- INFIRME le jugement du tribunal de commerce d'Angers en date du 12 décembre 2012 en toutes ses dispositions,
STATUANT A NOUVEAU,
- DÉCLARE la demande en paiement de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de souscrire une assurance ad valorem irrecevable,
- CONDAMNE la société TFE Angers à payer à la société Takabio la somme de 298,21 euros, outre les intérêts calculés au taux légal à compter du 12 décembre 2012,
- CONDAMNE la société TFE Angers à rembourser à la société Takabio la somme de 4.975,00 euros,
- CONDAMNE la société la société TFE Angers à payer à la société Takabio la somme de 1.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- CONDAMNE la société TFE Angers aux dépens de première instance et d'appel, les derniers étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- REJETTE les demandes pour le surplus.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Denis BOIVINEAU Véronique VAN GAMPELAERE
- 6197 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par contrat - Dépôt
- 6224 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par contrat - Transport
- 6389 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs - Acceptation et opposabilité des clauses
- 6390 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs - Obligation essentielle