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CA ROUEN (ch. prox. sect. surend.), 5 février 2015

Nature : Décision
Titre : CA ROUEN (ch. prox. sect. surend.), 5 février 2015
Pays : France
Juridiction : Rouen (CA), ch. proxim.
Demande : 14/01604
Date : 5/02/2015
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 31/03/2014
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5111

CA ROUEN (ch. prox. sect. surend.), 5 février 2015 : RG n° 14/01604 et n° 14/01741

Publication : Jurica

 

Extrait : « Le tribunal a indiqué que les contrats contenaient une clause de suspension/résiliation non conforme sans préciser aucunement le contenu de cette clause, l'examen des contrats peut laisser penser que la clause visée est celle qui prévoit le remboursement immédiat des sommes dues, sans formalité ni mise en demeure, en cas de décès d'un emprunteur ou d'un co-emprunteur, de fausses déclarations ou de déclarations inexactes lors de la demande de crédit. Toutefois, si cette clause pourrait être qualifiée de clause abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation dès lors qu'elle peut aggraver la situation du débiteur pour une raison autre que celle tirée d'un défaut de paiement, la sanction d'une clause abusive est la non opposabilité de cette clause qui est réputée non écrite et ne peut être la nullité du contrat.

Toutefois, il résulte de l'article L. 311-33 du code de la consommation alors applicable qu'au cas d'une offre de crédit qui ne satisfait pas aux conditions fixées par les articles L. 311-8 à L. 311-13, parce qu'elle contient des clauses ajoutées aux mentions imposées par le modèle type, le prêteur est déchu du droit aux intérêts et l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital. En l'espèce, la déchéance du droit aux intérêts doit être prononcée pour non-conformité des offres de prêt au modèle type. »

 

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE DE LA PROXIMITÉ - SECTION SURENDETTEMENT

ARRÊT DU 5 FÉVRIER 2015

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 14/01604 et n° 14/01741. DÉCISION DÉFÉRÉE : Jugement du TRIBUNAL D'INSTANCE DE DIEPPE du 14 mars 2014.

 

APPELANTES :

Société GROUPE SOFEMO

Représentée par Maître Jean-Pierre H., avocat au barreau d'ESSONNE substitué par Maître Christophe X.,

CRÉDIT IMMOBILIER DE FRANCE - ILE DE FRANCE

Représenté par Maître Benoît D. de la SCP D., avocat au barreau de DIEPPE

 

INTIMÉS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville]

Représenté par Maître Stéphane B. de la SCP M. & B., avocat au barreau de DIEPPE substitué par Maître L., avocat au barreau de DIEPPE

Madame Y.

née le [date] à [ville]

Représentée par Maître Stéphane B. de la SCP M. & B., avocat au barreau de DIEPPE substitué par Maître L., avocat au barreau de DIEPPE

BANQUE ACCORD

Non comparante ni représentée bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée

BANQUE DU GROUPE CASINO

Non comparante ni représentée bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée

BRED BANQUE POPULAIRE

Non comparante ni représentée bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée

CARREFOUR BANQUE

Non comparante ni représentée bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée

CRCAM NORMANDIE SEINE

Non comparante ni représentée bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée

FRANFINANCE UCR DE ROUEN

Non comparante ni représentée bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée

TRÉSORERIE GOURNAY-EN-BRAY

Non comparante ni représentée bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 18 décembre 2014 sans opposition des parties devant Madame LABAYE, Conseiller, magistrat chargé d'instruire l'affaire ; Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de : Mme BRYLINSKI, Président, Madame LABAYE, Conseiller, Madame POITOU, Conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme NOEL-DAZY, Greffier

DÉBATS : À l'audience publique du 18 décembre 2014, où l'affaire a été mise en délibéré au 5 février 2015

ARRÊT : Réputé contradictoire ; Prononcé publiquement le 5 février 2015, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, signé par Mme BRYLINSKI, Président et par Mme NOEL-DAZY, Greffier présent à cette audience.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le 19 novembre 2012, M. X. et Mme Y. ont déposé un dossier en vue de bénéficier des dispositions applicables en matière de surendettement.

Leur demande a été déclarée recevable par décision du 11 décembre 2012. Après échec de la phase amiable, les débiteurs ont, le 7 mars 2013, demandé à bénéficier de mesures recommandées ou imposées.

Par décision notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception du 25 mai 2013, la commission de surendettement des particuliers de la Seine-Maritime a élaboré des mesures recommandées consistant en un moratoire de 24 mois sur l'ensemble des créances, sauf sur les deux crédits immobiliers, avec une mensualité de remboursement de 547,43 euros, et ce afin de permettre la vente du bien immobilier, dont la valeur était estimée par la commission à 155.000 euros.

Le 3 juin 2013, les débiteurs ont contesté les recommandations.

Par jugement du 29 novembre 2013, le tribunal d'instance de Dieppe a :

- déclaré recevable la contestation élevée par M. X. et Mme Y.

- ordonné une réouverture des débats

- ordonné la vérification de l'ensemble des créances

- demandé aux créanciers de fournir l'ensemble des justificatifs de leur créance (contrat, avis de renouvellement, historique de compte, décompte précis)

- relevé d'office des moyens de droit, sanctionnés par une possible déchéance du droit aux intérêts ou nullité :

* pour les contrats antérieurs au 30 avril 2011 :

> clauses aggravant la situation de l'emprunteur par rapport au modèle-type applicable (L. 311-13 et R. 311-6 C. Consom. - numérotation en vigueur avant le 1er mai 2011) - notamment clauses imposant une obligation d'information, ou des cas de suspension/résiliation du contrat non prévus

> absence d'avis de renouvellement conformes pour les crédits renouvelables

* pour les contrats postérieurs au 30 avril 2011 loi dite « Lagarde », la production des éléments suivants et la possible déchéance du droit aux intérêts à défaut :

>. relevé de consultation du FICP et / ou éléments concernant la solvabilité

> fiche d'information standardisée

> justification de la proposition d'un crédit non renouvelable

> explications adaptées à la situation de l'emprunteur

> sur ces points, le possible caractère abusif des clauses de reconnaissance de l'exécution des obligations par le prêteur (Avis CCA 6 juin 2013)

* pour tous les contrats :

> possible nullité du contrat ou déchéance du droit aux intérêts pour violation de l'article R. 311-6 du code de la consommation : peu lisible et/ou non-respect du corps 8 (production du contrat en original demandée pour cette vérification)

> possible nullité du contrat : déblocage des fonds dans le délai de rétractation de 7 jours (sans compter celui de la signature) sans respect des conditions posées par les textes

- demandé aux créanciers de produire un décompte actualisé, faisant apparaître, pour application de l'éventuelle déchéance du droit aux intérêts, le total des sommes prêtées (en capital, hors assurances, frais, etc.) et le total des sommes remboursées depuis l'origine

- demandé aux débiteurs de produire leur propre décompte des sommes qu'ils ont remboursées à chacun

 

Par jugement en date du 14 mars 2014, le tribunal d'instance de Dieppe a :

- fixé à 113.861,12 euros et 13.246,07 euros respectivement les créances n° 124005 et 124007 de la Société Centrale de Crédit Immobilier

- fixé à 200 euros la créance de Banque Accord

- fixé à 100 euros respectivement les créances de la Bred

- fixé à 0 euro les créances du Trésor Public, de Carrefour banque, Banque du Groupe Casino, Franfinance, Sofemo

- infirmé la décision prise par la commission de surendettement dans le dossier de Mme Y. et M. X.

- adopté le plan d'apurement suivant, sans taux d'intérêts, le montant indiqué étant le remboursement mensuel dû au créancier

Paliers 1 - 95 :

Société Centrale de Crédit Immobilier (124.007 puis, après complet remboursement 124.005) : 1.074 euros,

Autres créanciers : 0

Palier 96 :

Bred Crédit renouvelable : 100 euros

Bred Compte courant : 100 euros

Banque Accord : 200 euros

Société Centrale de Crédit Immobilier (124.005) : 774 euros

Autres Créanciers : 0

Paliers 97-119 :

Société Centrale de Crédit Immobilier : 1.074 euros

Autres créanciers : 0

- dit que le solde déclaré des créances de l'ensemble des créanciers fera l'objet d'un effacement en fin de plan

- rappelé qu'en cas de respect du plan, le Trésor Public, Carrefour Banque, Banque du Groupe Casino, Franfinance, Sofemo, Bred, Banque Accord ne pourront poursuivre le recouvrement des créances initialement déclarées au-delà des montants retenus par le tribunal et indiqués ci-dessus

- laissé les dépens à charge de l'État

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit

- dit que la présente décision sera notifiée aux parties par le greffe par lettre recommandée avec accusé de réception et qu'une copie en sera adressée.

Après avoir examiné et fixé les créances, le tribunal estime que la capacité de remboursement s'élève à 498,79 euros, toutefois ce montant inclut les 668 euros de « logement », qui correspondent au remboursement du prêt immobilier. La capacité de remboursement effective de M. X. et Mme R. doit être évaluée à 1.163,79 euros ramenée à 1.074,69 euros, arrondie à 1.074 euros, en application du barème de saisie des rémunérations prenant en compte l'ensemble des revenus du foyer.

Le tribunal a considéré que le coût du relogement d'une famille de 4 personnes serait équivalent au coût du crédit immobilier, et qu'ils auraient, en outre, à supporter des frais de relogement, qu'il convenait en conséquence de mettre en place des mesures permettant l'apurement du passif sans cession du bien immobilier.

Le jugement a été notifié le 17 mars 2014 à la société Sofemo qui a interjeté appel par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 31 mars 2014, reçue au greffe de la cour le 1er avril 2014, l'appel est recevable comme formé dans le délai de quinze jours de l'article R. 331-9-3 du code de la consommation. L'appel a été enregistré sous le numéro de rôle 14/01604.

 

La société Crédit Immobilier de France, Ile de France (dénommée Société Centrale de Crédit Immobilier dans la procédure de première instance) a interjeté appel du jugement par déclaration du 9 avril 2014. Le jugement lui avait été notifié le 17 mars 2014. Si aux termes de l'article R. 331-9-3 du code de la consommation, le délai est de quinze jours pour interjeter appel, il convient de noter que la notification du jugement reçue par la société créancière lui indiquait que le délai d'appel était de un mois à compter de la signature de l'avis de réception de la lettre recommandée, dès lors, l'appel interjeté par le Crédit Immobilier de France est recevable. Il a été enregistré sous le numéro de rôle 14/01741.

Il s'agit de deux appels formés à l'encontre du même jugement concernant les mêmes débiteurs, il convient dès lors de joindre les procédures n° 14/01604 et n° 14/01741 pour que soit rendue une seule décision.

 

Dans ses dernières écritures en date du 11 décembre 2014, développées oralement à l'audience, le Crédit Immobilier de France demande à la cour de :

- le déclarer recevable et bien fondé en son appel,

Y faisant droit :

- réformer le jugement entrepris rendu le 14 mars 2014 par le juge d'instance de Dieppe, statuant en qualité de juge de l'exécution,

En conséquence :

- constater que la situation de surendettement de M. X. et Mme R. n'est pas établie

et, en ce qui concerne, ordonner le maintien des conditions contractuelles,

À titre subsidiaire, pour le cas où la Cour estimerait qu'est établie la situation de surendettement des débiteurs :

- statuer ce que de droit quant à l'adoption d'un plan de surendettement

- statuer ce que de droit quant à l'octroi au profit de M. X. et de Mme Y. d'un délai pour vendre leur bien immobilier

- ordonner le maintien des conditions contractuelles du fait de la capacité de remboursement des débiteurs

- statuer ce que de droit quant aux dépens.

La société Crédit Immobilier de FRANCE rappelle avoir consenti deux prêts aux débiteurs, selon acte notarié du 10 juillet 2006 :

- un prêt principal n° 124005 d'un montant de 122.194,13 euros au taux de 3,40 %, remboursable à compter du 5 février 2009 en 180 mensualités avec un différé d'amortissement de 36 mois

- un prêt à taux zéro de 16.500 euros remboursable à compter du 5 février 2009 en 300 mensualités avec un différé d'amortissement de 36 mois prêts consentis pour l'acquisition d'un terrain et la construction d'une maison dans un lotissement à Gournay en Bray, cet immeuble étant affecté par privilège et hypothèque à la garantie des emprunts.

La société Crédit Immobilier de France affirme que la situation de surendettement n'est pas établie en l'espèce puisque les prêts sur la résidence principale sont à jour et que la valeur du bien affecté à la garantie de la créance du Crédit Immobilier de France (entre 155.000 euros selon la commission et 165.000 euros pour l'expert du Crédit Immobilier) est supérieure à la dette, arrêté à la somme de 127.107,19 euros, l'actif excède donc largement le passif.

Disposant d'une capacité de remboursement mensuel de 1.009,35 euros, M. X. et Mme R. sont parfaitement en possibilité de rembourser leur dette de 400 euros en deux mensualités, tout en poursuivant le remboursement de leurs prêts immobiliers.

Subsidiairement, si la cour venait à considérer que la situation de surendettement est établie, notamment si les crédits à la consommation de la procédure étaient écartés et un plan de remboursement intégrant le maintien du bien immobilier ou d'un délai pour permettre la vente de ce bien affecté à la garantie de sa créance, le Crédit Immobilier de France considère qu'il conviendrait, en toute hypothèse de maintenir les conditions d'amortissement fixées contractuellement du fait de la capacité de remboursement des débiteurs et de la valeur du bien couvrant intégralement la créance.

 

M. X. et Mme R. demandent à la cour de :

- déclarer irrecevable la demande du Crédit Immobilier de France, Ile de France tendant à voir constater que leur situation d'endettement ne serait pas établie et en conséquence, la demande de maintien des conditions contractuelles

- en tout état de cause, déclarer mal fondé l'ensemble des demandes, fins et conclusions du Crédit Immobilier de FRANCE, Ile de FRANCE

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal d'instance de Dieppe en date du 14 mars 2014

- condamner le Crédit Immobilier de France, Ile de France à leur payer la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner le Crédit Immobilier de France, Ile de France aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP M., B.

M. X. et Mme Corinne L. font valoir avoir rencontré des difficultés financières et avoir alors privilégié le remboursement des crédits immobiliers au détriment des crédits à la consommation, avant finalement de devoir déposer un dossier de surendettement.

M. X. et Mme L. font valoir que le Crédit Immobilier de France n'a pas contesté la décision de recevabilité de leur demande de traitement de leur situation de surendettement dans le délai de 15 jours de la notification de ladite décision de la commission de surendettement. À défaut d'avoir contesté la décision de recevabilité, sa demande, à ce stade de la procédure, est irrecevable. En outre, le Crédit Immobilier de France n'a pas comparu en première instance, ni formulé devant le premier juge de demande tendant à faire constater leur absence d'état d'endettement, la demande est donc également irrecevable comme étant une demande nouvelle en appel.

Ils remarquent que, dans la mesure où ils disposent de la capacité financière pour rembourser leurs créanciers et préserver leur résidence principale, ils se sont justement opposés aux recommandations de la commission sollicitant toutefois du tribunal une modification des dispositions contractuelles telles qu'initialement prévues.

Ainsi, les mesures telles que prévues par le jugement entrepris sont conformes à leur situation et respectent les droits des créanciers ayant justifié de l'existence et du montant de leur créance.

Le Crédit Immobilier de France Île de France réplique que la demande tendant à voir constater que la situation de surendettement de M. X. et Mme R. n'est pas établie relève des exceptions prévues par l'article 564 du code de procédure civile en ce qu'elle vise à faire écarter les prétentions adverses. Au surplus, le jugement, en retenant un montant total de créances tierces pour 400 euros et un total de mensualités à charge des débiteurs de 665,31 euros, a constitué un élément nouveau conduisant à une nouvelle étude de la situation des débiteurs et à la recevabilité des prétentions de l'appelant.

 

Par conclusions du 18 décembre 2014 développées oralement à l'audience, la société Sofemo demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel

- infirmer le jugement rendu en ce qu'il a fixé ses créances à zéro euro

Statuant à nouveau :

- dire et juger que, dans le cadre du plan de surendettement de M. X. et Mme L., ses créances seront prises en compte et admises pour les sommes de :

* 765,71 euros au titre du prêt d'un montant d'origine de 3.000 euros

* 12.223,07 euros (12.027,07 + 196) au titre du prêt à l'origine de 14.000 euros

- voir condamner solidairement M. X. et Mme R. à lui payer la somme de 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

- les voir condamner aux dépens.

La société Sofemo rappelle avoir consenti deux prêts à M. X. et Mme R. :

- un prêt de 3.000 euros le 27 décembre 2007 destiné à financer une cuisine équipée remboursable selon un taux effectif global de 6,96 % l'an, avec solde dû de 765,71 euros au 9 décembre 2013 dont 750,24 euros en principal

- un prêt de 14.000 euros le 6 octobre 2008, destiné à financer l'acquisition d'une pompe à chaleur remboursable selon un taux effectif global de 6,97 % l'an, avec solde dû de 12.227,94 euros au 9 décembre 2013 dont 12.027,07 euros en principal.

La société souligne que le tribunal a, à tort, écarté les documents justificatifs de sa créance, qui avaient été transmis par lettres aux débiteurs et au tribunal qui a considéré qu'il n'avait pas l'assurance ce que les débiteurs les avaient eus. Toutefois, ceux-ci étant comparants, pouvaient en prendre connaissance à l'audience et les discuter. En outre, les pièces avaient été reçues par la juridiction qui devait les examiner et ne pouvait fixer les créances à zéro.

La société Sofemo qui souligne avoir à nouveau communiqué ses pièces par lettre recommandée avec demande d'avis de réception aux débiteurs et à la cour, demande admission de ses créances pour les soldes dus à décembre 2013.

En tout état de cause, et si la cour considérait que les contrats contenaient une clause de suspension non conforme, il ne pourrait y avoir nullité du contrat mais seulement déchéance du droit aux intérêts.

Autorisée par la cour, la société Sofemo a transmis en cours de délibéré, le montant de ses créances, intérêts déduits, soit selon elle :

- 730,40 euros - 599,06 euros = 131,34 euros

- 12.027,07 euros - 3.571,78 euros = 10.343,23 euros (8.455,29 euros en réalité).

M. X. et Mme Y. demandent à la cour de :

- déclarer mal fondé l'ensemble des demandes, fins et conclusions de la société Sofemo

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal d'instance de Dieppe en date du 14 mars 2014

- condamner la société Sofemo à leur payer la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner la société Sofemo aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP M.-B.

Les débiteurs remarquant que le tribunal, s'agissant de la conformité des contrats de prêts aux dispositions d'ordre public du code de la consommation, a relevé qu'il appartenait au prêteur de la démontrer, ajoutant que, conformément à l'article R. 332-4 du code de la consommation, les créances dont la validité n'est pas reconnue, sont écartées de la procédure.

En l'espèce, la copie des contrats de prêts Sofemo n'était pas lisible et la conformité aux dispositions d'ordre public ne pouvait pas être appréciée, en outre, le tribunal a noté la présence d'une clause de suspension non conforme. Dès lors, il y a lieu, selon les débiteurs, de confirmer l'effacement des créances Sofemo.

 

Par courrier, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Normandie Seine indique qu'elle n'a pas d'observation à formuler et qu'elle ne détient plus de créance à l'encontre des débiteurs.

La Bred Banque Populaire a, par lettre, indiqué que les encours de son client M. X. étaient de :

- prêt de restructuration n° 1000717 du solde débiteur : 1.500 euros

- prêt de restructuration n° 1000718 du Champ Libre : 724,99 euros

la banque ajoute que M. X. est titulaire d'un contrat d'assurance vie d'un montant de 3.192,91 euros à août 2014.

 

La Direction Générale des Finances Publiques précise dans son courrier que M. X. et Mme R. restent redevables de la somme de 1.620 euros au titre de l'impôt sur les revenus de 2010.

La société Banque du Groupe Casino indique ne pas avoir retrouvé de dossier au nom des débiteurs.

Les autres créanciers, régulièrement convoqués, ne se présentent pas à l'audience et n'ont pas fait parvenir d'observations écrites.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Seuls le Crédit Immobilier de France et la société Sofemo critiquent le jugement ; la fixation à 200 euros de la créance de Banque Accord, à 100 euros des deux créances de la Bred, à zéro euros des créances du Trésor Public, des sociétés Carrefour banque, Banque du Groupe Casino et Franfinance sera confirmée.

Le tribunal a noté que les débiteurs ne contestaient pas les créances du Crédit Immobilier de France qui dès lors étaient fixées à 113.861,12 euros et 13.246,07 euros respectivement pour les créances n° 124005 et n° 124007, étant précisé que la société n'avait pas comparu. La réformation du jugement n'est pas sollicitée sur ce point.

S'agissant de la société Sofemo, non comparante, les débiteurs avaient indiqué à l'audience au tribunal ne pas avoir reçu les pièces de la société. Le premier juge a considéré que s'il avait reçu le contrat, la société Sofemo le lui avait envoyé sans respect du principe du contradictoire alors en outre que ce contrat contenait une clause de suspension non conforme (clause aggravant la situation du débiteur, non prévue au contrat type, cas de résiliation du contrat non prévus au contrat type). Considérant que la société n'apportait en conséquence pas la preuve du respect des règles impératives en matière de crédit à la consommation, le tribunal a écarté les créances de la société Sofemo de la procédure.

Selon l'article R. 331-9-2 du code de la consommation :

Le juge du tribunal d'instance statue par jugement ou, en vertu d'une disposition spéciale, par ordonnance.

Dans les cas où il statue par jugement, le juge convoque les parties intéressées ou les invite à produire leurs observations, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Les convocations et demandes d'observations sont régulièrement faites à l'adresse préalablement indiquée par le destinataire. (...)

Si les parties sont convoquées, la procédure est orale. En cours d'instance, toute partie peut aussi exposer ses moyens par lettre adressée au juge à condition de justifier que l'adversaire en a eu connaissance avant l'audience par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. La partie qui use de cette faculté peut ne pas se présenter à l'audience, conformément au second alinéa de l'article 446-1 du code de procédure civile.

Le tribunal a demandé aux créanciers de fournir l'ensemble des justificatifs de leur créance : contrat en original, avis de renouvellement le cas échéant, historique de compte, décompte précis, ce que la société Sofemo a fait par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 11 décembre 2013. Il n'est pas justifié de ce que les débiteurs auraient reçu ces pièces avant l'audience, mais ils les ont examinées lors de l'audience (comme le confirme la mention de leur main sur la lettre de Sofemo « pas reçu, original, à restituer »). Les contrats étaient produits en original à l'audience du 14 janvier 2014, comme sollicité par le tribunal, les débiteurs ne peuvent soutenir avoir dû examiner des copies non lisibles. La procédure étant orale, ils pouvaient présenter leurs observations, étant précisé que la présence d'une clause de suspension non conforme a été relevée d'office par le tribunal, non par eux.

Le tribunal ne pouvait donc écarter les créances de la société Sofemo et se devait d'examiner les pièces qui lui étaient fournies.

Le tribunal a indiqué que les contrats contenaient une clause de suspension/résiliation non conforme sans préciser aucunement le contenu de cette clause, l'examen des contrats peut laisser penser que la clause visée est celle qui prévoit le remboursement immédiat des sommes dues, sans formalité ni mise en demeure, en cas de décès d'un emprunteur ou d'un co-emprunteur, de fausses déclarations ou de déclarations inexactes lors de la demande de crédit. Toutefois, si cette clause pourrait être qualifiée de clause abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation dès lors qu'elle peut aggraver la situation du débiteur pour une raison autre que celle tirée d'un défaut de paiement, la sanction d'une clause abusive est la non opposabilité de cette clause qui est réputée non écrite et ne peut être la nullité du contrat.

Toutefois, il résulte de l'article L. 311-33 du code de la consommation alors applicable qu'au cas d'une offre de crédit qui ne satisfait pas aux conditions fixées par les articles L. 311-8 à L. 311-13, parce qu'elle contient des clauses ajoutées aux mentions imposées par le modèle type, le prêteur est déchu du droit aux intérêts et l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital.

En l'espèce, la déchéance du droit aux intérêts doit être prononcée pour non-conformité des offres de prêt au modèle type.

Au vu des contrats, des tableaux d'amortissement et des décomptes produits par la société Sofemo, il résulte que ses créances s'élèvent à :

- au titre du prêt de 3.000 euros : un solde en capital de 131,34 euros

- au titre du prêt de 14.000 euros : un solde en capital de 8.455,29 euros.

sans tenir compte des frais de procédure et des primes d'assurance, la société ne justifiant pas en avoir fait l'avance.

Selon l'article L. 330-1 du code de la consommation, la situation de surendettement des personnes physiques est caractérisée par l'impossibilité manifeste pour le débiteur de bonne foi de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir.

La situation de surendettement de M. X. et Mme L. est caractérisée au vu des ressources, charges et du montant du passif, même si les dispositions contractuelles sont maintenues pour les crédits immobiliers.

Lorsque les ressources ou l'actif réalisable du débiteur le permettent, des mesures de traitement peuvent être prescrites devant la commission de surendettement des particuliers dans les conditions prévues aux articles L. 331-6, L. 331-7, L. 331-7-1 et L. 331-7-2.

Selon l'article L. 331-7 :

En cas d'échec de sa mission de conciliation, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, imposer tout ou partie des mesures suivantes :

1° Rééchelonner le paiement des dettes de toute nature, y compris, le cas échéant, en différant le paiement d'une partie d'entre elles, sans que le délai de report ou de rééchelonnement puisse excéder huit ans ou la moitié de la durée de remboursement restant à courir des emprunts en cours ; en cas de déchéance du terme, le délai de report ou de rééchelonnement peut atteindre la moitié de la durée qui restait à courir avant la déchéance ; (...)

La durée totale des mesures ne peut excéder huit années. Elles peuvent cependant excéder ce délai lorsqu'elles concernent le remboursement de prêts contractés lors d'achat d'un bien immobilier constituant la résidence principale et dont les mesures de la commission permettent d'éviter la cession. Les dettes fiscales font l'objet d'un rééchelonnement dans les mêmes conditions que les autres dettes.

Le passif s'établit à : 200 euros pour la créance de Banque Accord, à 200 euros pour les créances de la Bred, 131,34 euros et 8.455,29 euros pour les créances de la société Sofemo, 113.861,12 euros et 13.246,07 euros pour les créances du Crédit Immobilier de France soit un total de 136.093,82 euros, ou 8.986,63 euros hors crédits immobiliers.

Le tribunal avait évalué les ressources du couple à 2.720,79 euros, l'actualisation des pièces financières permet de les fixer à : 10.633,79 euros : 6 = 1.772,30 (à juin 2014) + 769,48 euros + 157,61 euros = 2.699,39 euros.

S'agissant des charges, les débiteurs remboursent mensuellement deux prêts immobiliers pour des montants de 614,12 + 51,19 = 665,31 euros, le tribunal a évalué les autres charges à 1.557 euros soit un total de 2.222 euros dont il n'est pas justifié qu'il serait aujourd'hui supérieur. La capacité théorique de remboursement est de 2.699,39 euros - 1.557 euros = 1.142,39 euros soit déduction faite des crédits immobiliers la somme de 477,08 euros, la capacité de remboursement effective étant évaluée à 250 euros par mois.

Un plan peut être établi en prévoyant le maintien des dispositions contractuelles pour les deux prêts immobiliers et le paiement du passif de 8.986,63 euros en 36 mensualités de 280 euros, sans vente du bien immobilier, selon les modalités figurant au dispositif. Il n'y a pas lieu à effacement de dettes.

Il n'y a pas lieu en l'espèce à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, les dépens étant laissés à la charge du Trésor Public.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire,

Ordonne la jonction des procédures enrôlées sous les numéros R.G. n° 14/01604 et R.G. n° 14/01741.

Confirme le jugement du tribunal d'instance de Dieppe en date du 14 mars 2014 en ce qu'il a fixé à 113.861,12 euros et 13.246,07 euros les créances du Crédit Immobilier de France Ile de France, à 200 euros la créance de Banque Accord, à 200 euros les créances de la société Bred, à zéro euros les créances du Trésor Public, de Carrefour banque, Banque du Groupe Casino, Franfinance, en ce qu'il a laissé les dépens à la charge du Trésor Public.

L'infirme sur les autres dispositions.

Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées.

Fixe les créances de la société Sofemo aux sommes de 131,34 euros et 8.455,29 euros.

Fixe la capacité de remboursement, hors crédits immobiliers, à la somme de 250 euros.

Ordonne le rééchelonnement des dettes au taux de 0 % selon les modalités suivantes :

- remboursement des crédits immobiliers selon les modalités prévues aux contrats

- remboursement des autres dettes sur 36 mois :

du 1er au 5e mois inclus :

* Banque Accord : 40 euros x 5 = 200 euros

* société Bred : 40 euros x 5 = 200 euros

* société Sofemo : 26,27 euros x 5 = 131,35 euros

* société Sofemo : 143,73 x 5 = 718,65 euros

du 6e au 35e mois inclus :

* société Sofemo : 250 euros x 30 = 7.500 euros

36e mois :

* société Sofemo : 236,64 euros

Dit que les premiers versements devront intervenir au plus tard le 15 mars 2015 puis ensuite au plus tard le quinze de chaque mois.

Dit qu'à défaut de respect de la présente décision, les sommes dues deviendront immédiatement exigibles et les créanciers pourront exercer des poursuites individuelles.

Dit que pendant l'exécution des mesures de redressement, M. X. et Mme Y. ne pourront pas contracter de nouvelles dettes, ni de manière générale aggraver leur endettement, sous peine de déchéance du bénéfice des dispositions du présent jugement.

Rappelle que la présente décision s'impose tant aux créanciers qu'aux débiteurs et que sont suspendus les effets de toutes les voies d'exécution qui pourraient être pratiquées par l'un des créanciers auxquels ces mesures sont opposables.

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Laisse les dépens de la procédure d'appel à la charge du Trésor Public.

Le Greffier                Le Président