CA RENNES (2e ch.), 13 mars 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 5138
CA RENNES (2e ch.), 13 mars 2015 : RG n° 13/00293 ; arrêt n° 144
Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2015-006018
Extraits : 1/ « Saisi d'une difficulté concernant l'exécution d'une décision exécutoire, le juge de l'exécution a le pouvoir d'interpréter les dispositions ambigües de celle-ci, concurremment avec la juridiction qui en est l'auteur, sous réserve de ne pas remettre en cause ce qui est clairement tranché, de ne pas modifier, retrancher ou ajouter à des dispositions précises. En l'espèce, il entre dans la compétence du juge de l'exécution, saisi de la demande de liquidation d'une astreinte, d'examiner le bien-fondé des demandes, et, ce faisant de se prononcer sur la durée de celle-ci. »
2/ « Saisi de la liquidation de l'astreinte prononcée par le tribunal d'instance de Lorient dans les termes suivants « ordonne à la société eBAY EUROPE de procéder à la publication du présent jugement sur le site eBAY dans sa rubrique décisions de justice, à peine d'astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification du présent jugement... », le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient devait nécessairement se prononcer sur la qualité et la durée de l'exécution de la mesure d'astreinte, aucune condamnation à exécution d'une injonction de faire, telle la publication, ne pouvant être perpétuelle, et devant correspondre à un délai raisonné pour permettre la réalisation concrète et efficace de l'obligation dans l'intérêt de celui qui en est le bénéficiaire. À cet égard, Monsieur X., qui dit obéir à un impératif de protection et d'avertissement des internautes contre les pratiques de la société qu'il critique, n'a pas qualité pour agir dans l'intérêt collectif de ceux-ci et ne peut donc s'en prévaloir pour justifier ses demandes de publication illimitée de la décision.
La décision de condamnation à publication sous astreinte sur le site de la société eBAY prévoyant un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision, effectuée le 25 juillet 2011, l'obligation de publication devait débuter le 2 août 2011. Par des motifs pertinents, que la cour adopte, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance a estimé à 60 jours le délai pendant lequel la publication devait être maintenue sur le site. Ce délai permettait ainsi une information complète et efficace de ceux auxquels la publication est destinée, et cette durée était suffisante à l'auteur des clauses abusives pour réformer les conditions de son règlement. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
DEUXIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 13 MARS 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 13/00293. ARRÊT n°144.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président, Madame Isabelle LE POTIER, Conseiller, Madame Béatrice LEFEUVRE, Conseiller, rédacteur,
GREFFIER : Monsieur Régis ZIEGLER, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS : À l'audience publique du 6 janvier 2015
ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 13 mars 2015 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats, après prorogation du délibéré
APPELANT :
Monsieur X.
né le [date] à [ville] ; Représenté par Maître Luc BOURGES de la SELARL AVOCAT LUC BOURGES, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉE :
SARL eBAY EUROPE
prise en la personne de son gérant domicilié audit siège ; Représentée par Maître Jean-Jacques BAZILLE de la SELARL BAZILLE/ TESSIER/PRENEUX, Postulant, avocat au barreau de RENNES ; Représentée par Maître Sarah KHONSARI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par jugement intervenu le 19 mai 2011 dans le cadre d'un litige de consommation, le tribunal d'instance de Lorient saisi par Monsieur X. a notamment jugé abusives et déclaré non écrites des clauses du règlement de la société eBAY EUROPE auquel adhèrent les utilisateurs du site, et ordonné à cette société de « procéder à la publication du jugement sur le site eBAY.fr dans sa rubrique décision de justice, à peine d’astreinte de 100 euros par jour de retard à partir du 8ème jour à compter de la signification du jugement. »
Le jugement en cause a été signifié au siège de la société eBAY au Luxembourg le 25 juillet 2011.
Par jugement du 8 janvier 2013, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient, devant lequel Monsieur X. a notamment sollicité la liquidation de l'astreinte provisoire arrêtée au 27 novembre 2012 à 47.500 euros et la condamnation de la société eBAY EUROPE au paiement de cette somme, ainsi que la fixation d'une nouvelle astreinte définitive de 300 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement, a :
- condamné la société eBAY EUROPE à payer à Monsieur X. la somme de 2.950 euros en liquidation d'astreinte,
- ordonné à la société eBAY EUROPE de procéder à la publication du jugement pendant une durée continue de 59 jours à compter du 15e jour qui suivra la signification du jugement, sous une astreinte définitive de 200 euros par jour de retard, et ce pendant un délai de 4 mois passé lequel il serait à nouveau statué,
- condamné en outre la société eBAY EUROPE à payer à Monsieur X. la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts,
- condamné la société eBAY EUROPE aux dépens ainsi qu'à verser à Monsieur X. la somme de 1.500 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
Monsieur X. a interjeté appel de cette décision par déclaration du 15 janvier 2013.
En l'état de ses dernières écritures récapitulatives du 5 novembre 2014, Monsieur X. demande à la cour :
- d'infirmer le jugement du juge de l'exécution de Lorient du 8 janvier 2013 en ce qu'il a liquidé l'astreinte provisoire à la somme de 2.950 euros ;
- d'infirmer le jugement du juge de l'exécution de Lorient du 8 janvier 2013 en ce qu'il a condamné eBAY à publier le jugement du tribunal d'instance de Lorient du 19 mai 2011 pendant une durée continue de 59 jours à compter du 15e jour suivant le signification du jugement du JEX de Lorient du 8 janvier 2013, sous astreinte définitive de 200 euros par jour de retard pendant un délai de 4 mois ;
- de confirmer le jugement du juge de l'exécution de Lorient du 8 janvier 2013 pour le surplus ;
Et substituant aux parties infirmées du dispositif, statuant à nouveau sur l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel :
- de liquider l'astreinte à l'encontre de la société eBAY EUROPE à la somme de 112.700 euros à la date du 6 janvier 2015 ;
- de porter le taux de l'astreinte journalière à l'encontre de la SARL eBAY EUROPE à 500 euros par jour de retard passé un délai de sept jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, s'agissant de la publication du jugement du Tribunal d'instance de Lorient du 19 mai 2011 à ce jour non effectuée,
- de condamner la SARL eBAY EUROPE à publier l'arrêt dans les conditions suivantes :
* publication sur le site internet d'eBAY France en page « décisions de justice » et en page « actualités eBAY » (menu « Communauté »), sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé un délai de 7 jours à compter de la signification de l'arrêt ;
* publication in extenso de l'arrêt à intervenir dans la revue « Que Choisir » dans un délai d'un mois à compter de la signification du jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai de 7 jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, et pour un montant d'insertion n'excédant pas 2.500 euros ;
- de condamner la SARL eBAY EUROPE à verser à Monsieur X. la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
- de condamner la SARL eBAY EUROPE à verser à Monsieur X. la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- de déclarer irrecevable la demande de la ARL eBAY EUROPE tendant à la remise en cause de l'ordonnance de taxation du TGI de Lorient du 12 novembre 2013 ;
- de condamner la SARL eBAY EUROPE aux entiers dépens d'appel ;
- de condamner la SARL eBAY à lui rembourser tous les constats d'huissier qu'il a fait établir tant dans les deux instances devant le juge lorientais (procédure au fond devant le tribunal d'instance et procédure en exécution devant le juge de l'exécution) que devant la cour d'appel.
Monsieur X. soutient en premier lieu que, dès lors que le jugement du tribunal d'instance avait ordonné la publication de la décision sans limitation de durée, le juge de l'exécution n'avait pas compétence pour modifier les termes de ce jugement, en limitant dans le temps le dispositif de cette décision passée en force de chose jugée, et ce faisant, a violé les termes de l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution.
Il fait valoir que, compte tenu du comportement de la société eBAY, la sanction de la publication a bien été voulue par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance comme étant destinée à être exécutée en continu, pour avertir les internautes et les prémunir ; qu'il appartenait à la société adverse, si elle estimait la sanction trop rigoureuse, de faire appel de la décision du tribunal d'instance, ou, pour en moduler les effets, de signer avec Monsieur X. un protocole d'accord fixant de façon contractuelle la durée de la publication, ce qui ne saurait s'analyser en une extorsion de fonds de la part de ce dernier, contrairement à ce que soutient la société eBAY.
Sur le fond, faisant valoir que la cour, en cas d'incompétence du juge de l'exécution, doit cependant statuer par suite de l'effet dévolutif de l'appel, Monsieur X. se prévaut du caractère probant des constats qu'il a fait dresser du 10 au 31 août 2011, du 1er septembre au 23 décembre 2011, du 6 juillet 2012, du 12 au 16 novembre 2012, du 23 au 26 novembre 2012, du 29 janvier 2013, du 12 avril 2013, du 30 mai 2013 et fait valoir qu'à exception des 10 août 2011, 21 juin, 15,19 et 24 juillet 2011, 6 août, 13 septembre et 10 octobre 2013, la décision n'a pas été publiée.
S'agissant de la liquidation de l'astreinte telle que réalisée par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient, Monsieur X. fait valoir que la mauvaise foi et la mauvaise volonté de la société eBAY à procéder à la publication, autrement que pendant 7 jours, justifie que les 1.127 jours de non-exécution, jusqu'au jour de l'audience devant la cour, permettent la liquidation de l'astreinte à hauteur de 112.700 euros (1.127 jours à 100 euros par jour).
Il estime que le comportement de la société eBAY justifie le prononcé d'une astreinte plus forte pour l'avenir, et, toujours dans le souci de l'avertissement aux autres internautes, la publication de la décision dans la presse
Il demande enfin la condamnation de la société eBAY à indemniser le préjudice qui en est résulté pour lui-même à hauteur de dommages et intérêts de 20.000 euros.
La société eBAY EUROPE, en l'état de ses dernières conclusions du 30 octobre 2014, demande à la cour :
Vu le constat d'huissier établi par la SCP Alain Saragoussi et Rémi Chavaudret le 10 août 2011,
Vu l'ensemble des constats établi par la SCP Alain Saragoussi et Rémi Chavaudret au cours de l'année 2013,
Vu l'ordonnance de mise en état du 6 décembre 2013 rendue par la Cour d'Appel de Rennes :
- de débouter Monsieur X. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- de constater que les constats dressés à la demande de Monsieur X. n'ont aucune valeur probante ;
- d'infirmer le jugement du 8 janvier 2013 en constatant qu'eBAY a pleinement exécuté ses obligations au titre du jugement rendu par le Tribunal d'Instance de Lorient ;
- de rejeter l'ensemble des demandes de Monsieur X. et le condamner à rembourser à eBAY l'ensemble des sommes qui lui ont été versées au titre du jugement rendu par le juge de l'exécution de Lorient, soit la somme 5.623 euros mais également au titre de l'ordonnance de taxe du 12 novembre 2013 soit la somme de 1.677,91 euros, ainsi qu'au titre de l'ensemble des constats d'huissier réalisés par la SCP Alain Saragoussi et Rémi Chavaudret ;
- Subsidiairement, la décision du Tribunal d'Instance de Lorient ayant été mise en ligne le 9 août 2011, il est demandé à la Cour si par impossible elle devait considérer qu'il y a lieu de procéder à la liquidation de l'astreinte à ce titre, de l'appliquer pour la seule période du 2 au 9 août 2011 tout en diminuant le montant dû, pour la porter à 50 euros compte tenu de la bonne foi d'eBAY qui a spontanément exécuté l'ensemble de ses obligations au titre du jugement rendu, soit la fixer à 350 euros.
- de constater la bonne foi d'eBAY qui a procédé à la publication sur son site de la décision du juge de l'exécution de Lorient du 8 janvier 2013 durant près de 90 jours mais également procédé postérieurement à la mise en ligne de la décision du tribunal d'instance de Lorient pour une période de quatre mois et rejeter la demande d'astreinte et de publication de Monsieur X. à ce titre ;
- de constater le refus de Monsieur X. de payer à eBAY EUROPE Sarl la somme de 1.000 euros au titre de l'ordonnance de mise en état du 6 décembre 2013 rendue par la cour d'appel de Rennes et le condamner à s'exécuter sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir outre 500 euros pour résistance abusive ;
- de condamner Monsieur X. à verser à eBAY EUROPE SARL la somme de 1.865,36 euros au titre des constats d'huissiers ;
- de condamner Monsieur X. à verser à la société eBAY EUROPE une somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- de condamner Monsieur X. aux entiers dépens.
La société eBAY, rappelle tout d'abord que Monsieur X. lui- même, en sollicitant dans un premier temps par courriel le paiement par elle de la somme de 1.100 euros au titre de l'astreinte qu'il estimait due du 2 août au 13 août 2011, a donc reconnu que la décision du tribunal d'instance avait bien été publiée en ligne à cette dernière date.
Elle rappelle par ailleurs les conditions, relevant selon elle du chantage, auxquelles Monsieur X. lui avait indiqué qu'il accepterait de transiger, soit notamment la publicité du jugement pendant deux ans, avec indemnité de 30.000 euros ou pendant un an avec indemnité de 60.000 euros etc..., avant que Monsieur X., dès lors qu'elle refusait les termes de cet accord, ne saisisse le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient.
Elle indique enfin avoir modifié les conditions d'utilisation de son site, de façon à satisfaire aux critiques dont elle avait fait l'objet et qui avaient donné lieu au jugement du tribunal d'instance de Lorient.
La société eBAY fait valoir qu'elle a exécuté ensemble de ses obligations au titre du jugement rendu par le tribunal d'instance de Lorient, en mettant en ligne cette décision dès le 9 août 2011 ;
Qu’une condamnation ne peut être perpétuelle et qu'une mesure de réparation doit correspondre au préjudice ; qu'il est excessif en matière civile que la durée de publication soit fixée à plus d'un mois, celle de deux mois correspondant au maximum prévu en matière pénale.
Elle soutient aussi que le juge de l'exécution n'avait pas compétence pour ajouter au retrancher au jugement dont l'exécution était en litige, et qu'en fixant la durée de publication à deux mois, il avait excédé ses compétence.
Subsidiairement, elle soutient qu'ayant exécuté le 9 août 2011 la publication, la liquidation ne pourrait intervenir que pour cette durée limitée et sur la base de 50 euros par jour, soit à hauteur de 350 euros.
Elle forme donc appel incident sur ces éléments.
La société eBAY conteste également la force probante des constats établis à le demande de Monsieur X., faute pour ceux-ci de respecter les règles techniques permettant de s'assurer que l'huissier s'est bien rendu sur les pages web annexées, faisant observer à titre d'exemple de l'absence de valeur probante des dits constats, que celui du 10 août 2011 est en contradiction avec celui qu'elle a elle-même fait réaliser le même jour.
Enfin à ce titre, elle soutient que les constats multiples effectués à la demande de Monsieur X. de sa propre initiative ne pouvaient être inclus dans les dépens, et demande à la cour de statuer par suite de l'effet dévolutif de l'appel et de condamner Monsieur X. à lui rembourser les sommes qu'elle lui a versées en vertu de l'ordonnance de taxe intervenue le 12 novembre 2013,qui avait rejeté sa demande de remboursement de ces frais mis à sa charge dans la cadre de la procédure de vérification des dépens.
Pour compléter l'exposé des demandes et moyens des parties, la cour se réfère expressément à leurs dernières écritures des 5 novembre 2014 et 30 octobre 2014.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Saisi d'une difficulté concernant l'exécution d'une décision exécutoire, le juge de l'exécution a le pouvoir d'interpréter les dispositions ambigües de celle-ci, concurremment avec la juridiction qui en est l'auteur, sous réserve de ne pas remettre en cause ce qui est clairement tranché, de ne pas modifier, retrancher ou ajouter à des dispositions précises.
En l'espèce, il entre dans la compétence du juge de l'exécution, saisi de la demande de liquidation d'une astreinte, d'examiner le bien-fondé des demandes, et, ce faisant de se prononcer sur la durée de celle-ci.
Saisi de la liquidation de l'astreinte prononcée par le tribunal d'instance de Lorient dans les termes suivants « ordonne à la société eBAY EUROPE de procéder à la publication du présent jugement sur le site eBAY dans sa rubrique décisions de justice, à peine d'astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification du présent jugement... », le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient devait nécessairement se prononcer sur la qualité et la durée de l'exécution de la mesure d'astreinte, aucune condamnation à exécution d'une injonction de faire, telle la publication, ne pouvant être perpétuelle, et devant correspondre à un délai raisonné pour permettre la réalisation concrète et efficace de l'obligation dans l'intérêt de celui qui en est le bénéficiaire.
À cet égard, Monsieur X., qui dit obéir à un impératif de protection et d'avertissement des internautes contre les pratiques de la société qu'il critique, n'a pas qualité pour agir dans l'intérêt collectif de ceux-ci et ne peut donc s'en prévaloir pour justifier ses demandes de publication illimitée de la décision.
La décision de condamnation à publication sous astreinte sur le site de la société eBAY prévoyant un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision, effectuée le 25 juillet 2011, l'obligation de publication devait débuter le 2 août 2011.
Par des motifs pertinents, que la cour adopte, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance a estimé à 60 jours le délai pendant lequel la publication devait être maintenue sur le site. Ce délai permettait ainsi une information complète et efficace de ceux auxquels la publication est destinée, et cette durée était suffisante à l'auteur des clauses abusives pour réformer les conditions de son règlement.
Il résulte des échanges de courriers des parties et de leurs conseils, et il n'est pas contesté par Monsieur X. que la publication n'a pas figuré sur le site du 2 au 9 août 2011, contrairement à ce qui a été indiqué par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient dans les motifs de sa décision.
Par la suite, il est justifié par le débiteur de l'obligation de publication qu'il a faite constater le 10 août 2011, et, selon les termes des échanges entre les parties, ainsi que le 13 août 2011.
Pour le surplus, la société eBAY, dont les constats suivants, réalisés pour prouver la publication du jugement sur son site, n'ont été effectués qu'en 2013, soit en cours de procédure devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient, n'établit donc pas qu'elle ait maintenu antérieurement sur son site jusqu'au 2 octobre 2011, date de la fin de son obligation, la diffusion du jugement du tribunal d'instance, à l'exception des deux jours visés ci-dessus, des 10 et 13 août 2011.
En conséquence, et sur la base retenue à juste titre par le premier juge de 50 euros par jour, la liquidation de l'astreinte doit être effectuée à hauteur de 2.900 euros pour les 58 jours manquants.
La preuve de ce que la société eBAY a renouvelé la publication en 2013, selon les constats du 24 janvier 2013, 21 juin 2013, 19 juillet 2013, 6 août 2013, 16 septembre 2013 et 10 octobre 2013 justifie qu'il ne soit pas fait droit à la demande de prononcé d'une nouvelle astreinte, et le jugement qui l'a condamnée à ce titre sera infirmé sur ce point.
Il ne sera pas non plus fait droit à la demande de publication du présent arrêt dans les différents journaux retenus par Monsieur X., qui n'est pas justifiée.
Le préjudice de Monsieur X., qui n'est constitué que des conséquences de l'absence d'exécution de la décision, a été exactement apprécié par le premier juge à 1.000 euros.
Il ne sera pas fait droit à la demande faite par la société eBAY de remboursement des frais arbitrés par l'ordonnance de taxe, qui est définitive.
De même, la cour, appelée à trancher des contestations, ne saurait se livrer à des constatations quant au refus prétendu de Monsieur X. de payer le montant de sa condamnation aux frais irrépétibles antérieurs autrement que par une formule de chèque entièrement de sa main, qui relève de la responsabilité de la banque.
Chacune des parties succombant partiellement sur ses prétentions, gardera à sa charge ses propres dépens, et il ne sera pas fait droit à leurs demandes formées au titre des frais irrépétibles.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour
Infirme le jugement déféré en ce qu'il a fixé à 2.950 euros le montant de la liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement du tribunal d'instance de Lorient du 19 mai 2011 ;
Statuant à nouveau sur ce point, fixe à 2.900 euros le montant de la liquidation de l'astreinte que la société eBAY EUROPE sera condamnée à verser à Monsieur X. ;
Infirme également le jugement déféré en ce qu'il a ordonné à la société eBAY EUROPE de procéder à nouveau sous astreinte à la publication du jugement du tribunal d'instance de Lorient du 19 mai 2011 ;
Le confirme pour le surplus ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes respectives ;
Rejette leurs demandes formées au titre des frais irrépétibles d'appel ;
Dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens exposés en appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
- 5756 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Conditions - Qualité des parties - Demandeur : association agréée
- 5777 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Effets de l’action - Suppression des clauses - Astreinte
- 5783 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Effets de l’action - Publication des décisions - Principes
- 5983 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Contrôle judiciaire - Juge de l’exécution (JEX)