CA VERSAILLES (13e ch.), 6 août 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 5260
CA VERSAILLES (13e ch.), 6 août 2015 : RG n° 13/05783
Publication : Jurica
Extrait : « En sa qualité de caution de la société crédit-preneuse, Mme X. est recevable à opposer des exceptions inhérentes à la dette. Elle demande à ce titre que la clause précitée soit jugée abusive.
Mais comme le souligne la société GE Money bank, le champ d'application de l'article L. 132-1 du code de la consommation est limité aux contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs. En l'espèce, la clause contestée est insérée dans le contrat de crédit-bail conclu entre deux sociétés commerciales en rapport avec leurs activités professionnelles respectives. Dans ces conditions, le texte précité ne peut recevoir application et la clause se trouve dès lors faire la loi des parties et être opposable à la caution ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
TREIZIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 6 AOÛT 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. N° 13/05783. Code nac : 53I. CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 mai 2013 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE (5e chambre) R.G. n° 12F01701.
LE SIX AOUT DEUX MILLE QUINZE, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANTE :
Madame X.
Représentée par Maître Emmanuel JULLIEN de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat Postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20130551 et par Maître EYROLLES, avocat plaidant au barreau de PARIS
INTIMÉE :
SCA GE MONEY BANK
agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. N° SIRET : 784 XXX, Représentée par Maître Aurélie DEVAUX, avocat Postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 417 et par Maître Philippe DOUCHET, avocat plaidant au barreau de PARIS
Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 mai 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Annie VAISSETTE, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Marie-Laure BELAVAL, Présidente, Madame Annie VAISSETTE, Conseiller, Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Conseiller.
Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Par acte sous seing privé du 24 avril 2007, la société GE Money bank a consenti à la société Celisol internationale un crédit-bail mobilier portant sur un véhicule Porsche Cayenne Turbo n° série YY d'une valeur de 93.880 euros, pour une durée de 49 mois moyennant des loyers mensuels de 1.980,86 euros.
La gérante, Mme X., s'est portée caution solidaire par acte du même jour dans la limite de 80.000 euros.
La société Celisol Internationale a été mise en redressement judiciaire le 7 janvier 2009. Elle a cessé le paiement des loyers à compter du 25 janvier 2009. Par jugement du 1er juillet 2009, la procédure a été convertie en liquidation judiciaire.
Les parties indiquent à la cour qu'à la suite du vol du véhicule objet du crédit-bail, l'assurance a réglé directement la somme de 34.400 euros à GE Money Bank, laissant un solde impayé, intérêts compris, de 12.827,84 euros.
La société GE Money bank a déclaré sa créance au passif de la liquidation judiciaire le 14 août 2009 à concurrence de 12.392,83 euros et elle a mis en demeure la caution de payer cette somme par lettre recommandée du 4 janvier 2012 puis l'a assignée par acte d'huissier du 16 avril 2012 devant le tribunal de commerce de Nanterre lequel, par jugement rendu le 28 mai 2013, a :
- condamné Mme X. à payer à la société GE Money Bank la somme de 12.392,83 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 août 2009,
- condamné Mme X. à payer à la société GE Money Bank la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mme X. aux dépens.
Cette dernière a relevé appel en date du 22 juillet 2013. Elle a conclu le 15 octobre 2013 pour demander à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris,
- dire que la clause dont se prévaut la société GE Money bank est abusive,
- débouter cette dernière de l'ensemble de ses demandes,
- la condamner aux entiers dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle expose que l'une des clauses du contrat d'assurance auquel GE Money bank avait demandé à Celisol internationale d'adhérer prévoit qu'en cas de vol, l'assureur règle par délégation du locataire le montant de la valeur de remplacement du bien au crédit-bailleur, le locataire restant tenu vis à vis du bailleur pour la part non couverte des risques ou non indemnisée par son assurance, à moins qu'il ne rapporte la preuve que ces risques ne sont pas dus à son fait ; elle estime ne pas avoir à prouver que le vol n'est pas dû de son fait.
Elle se prévaut de l'article 2274 du code civil pour dire que sa bonne foi est présumée et qu'il appartient à l'intimée de prouver sa mauvaise foi.
Elle soutient que la clause précitée est abusive, qu'elle doit être réputée non écrite car elle met à la charge du crédit-preneur une preuve impossible, alors que GE Money bank n'établit nullement que le vol serait dû au fait de Mme X.
Interrogé par la cour à l'audience sur le défaut de production des pièces visées par le bordereau annexé à ses conclusions, le conseil de Mme X. a indiqué que ces documents ne seraient pas et ne pouvaient être produits en raison de difficultés entre l'appelante et son avocat plaidant.
La société GE Money bank, par conclusions du 5 décembre 2013, demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris,
En conséquence,
- condamner Mme X. à lui payer la somme de 12.392,83 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 août 2009 (date du décompte produit aux débats) jusqu'à parfait paiement, au titre du contrat de crédit-bail,
- ordonner la capitalisation des intérêts, conformément aux termes de l'article 1154 du code civil,
- condamner la défenderesse au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux dépens.
La crédit-bailleresse fait valoir que les articles L. 132-1 et suivants du code de la consommation relatifs aux clauses abusives ne s'appliquent pas aux contrats conclus entre deux professionnels, que le contrat a été conclu entre elle-même et la société Celisol internationale, que l'appelante étant la gérante de cette dernière société, elle a qualité de caution commerciale, qu'en conséquence la convention formée tient lieu de loi entre elles.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DISCUSSION ET MOTIFS DE LA DÉCISION :
Le contrat d'assurance-groupe souscrit par la société Celisol internationale n'est pas produit au dossier pour les raisons précédemment indiquées.
Mais, en tout état de cause, la clause contestée par l'appelante n'est pas une clause du contrat d'assurance, mais correspond à l'article 8 des conditions générales du contrat de crédit-bail, versé au dossier par la société GE Money bank, qui stipule : « le locataire a la garde matérielle et juridique du véhicule. Il supporte la totalité des risques courus par le véhicule, les tiers et le bailleur. Il souscrit à cet effet et maintient jusqu'à la restitution du véhicule toutes assurances nécessaires, couvrant tant la responsabilité civile illimitée que tous les dommages subis par le véhicule, quelle qu'en soit l'origine, y compris le cas fortuit ou de force majeure dans la mesure où ces risques sont assurables en France, le bailleur étant désigné comme bénéficiaire dans les limites de sa créance contractuelle. En cas de sinistre total ou de vol, l'assureur règle, par délégation du locataire, le montant de la valeur de remplacement du bien. Le locataire reste tenu vis-à-vis du bailleur pour la part éventuellement non couverte des risques ou non indemnisée par son assurance à moins qu'il rapporte la preuve que ces risques ne sont pas dus à son fait ».
En sa qualité de caution de la société crédit-preneuse, Mme X. est recevable à opposer des exceptions inhérentes à la dette.
Elle demande à ce titre que la clause précitée soit jugée abusive.
Mais comme le souligne la société GE Money bank, le champ d'application de l'article L. 132-1 du code de la consommation est limité aux contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs.
En l'espèce, la clause contestée est insérée dans le contrat de crédit-bail conclu entre deux sociétés commerciales en rapport avec leurs activités professionnelles respectives. Dans ces conditions, le texte précité ne peut recevoir application et la clause se trouve dès lors faire la loi des parties et être opposable à la caution.
En conséquence, le jugement doit être confirmé en toutes ses dispositions, étant précisé que le quantum du solde de la créance arrêté par le tribunal par des motifs que la cour adopte n'est pas critiqué.
Il y a lieu d'y ajouter la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil sollicitée par l'intimée.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Déboute Mme X. de toutes ses demandes,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
Condamne Mme X. à payer à la société GE Money bank la somme complémentaire de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme X. aux dépens et accorde aux avocats de la cause qui peuvent y prétendre, le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Marie-Laure BELAVAL, Présidente et par Monsieur Jean-François MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, La présidente,
- 5853 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de consommateur - Particulier personne physique - Consommateur tiers au contrat
- 5858 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Exclusion explicite
- 5933 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Véhicules et engins
- 5938 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Financement de l’activité - Crédit-bail et location financière