CASS. CIV. 2e, 10 septembre 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 5321
CASS. CIV. 2e, 10 septembre 2015 : pourvoi n° 14-22669 ; arrêt n° 1278
Publication : Legifrance
Extrait : « Vu l’article 1134 du code civil, ensemble l’article L. 133-2 du code de la consommation ; […] ; Qu’en statuant ainsi, alors que les juges du fond ne jouissent du pouvoir d’interpréter les conventions que si celles-ci sont obscures ou ambiguës, la cour d’appel qui s’est bornée à relever que l’article 25 du contrat citait un article du code de la sécurité sociale qui n’existait pas, circonstance qui ne suffisait pas à le priver de clarté et ne nuisait pas à sa compréhension, la cour d’appel, sans s’attacher au sens clair et précis de la clause qui ne nécessitait aucune interprétation, a violé par refus d’application le premier des textes susvisé et par fausse application le second ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 10 SEPTEMBRE 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 14-22669. Arrêt n° 1278.
DEMANDEUR à la cassation : Société Quatrem assurances collectives
DÉFENDEUR à la cassation : Monsieur X.
Mme Flise (président), président. SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat(s).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu l’article 1134 du code civil, ensemble l’article L. 133-2 du code de la consommation ;
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X. a adhéré au contrat de groupe garantissant notamment le risque d’invalidité permanente totale souscrit par son employeur auprès de la société Quatrem (l’assureur) ; qu’une pension d’invalidité de deuxième catégorie lui ayant été accordée par la caisse primaire d’assurance maladie, l’assureur lui a versé la rente complémentaire prévue au contrat ; que cette pension d’invalidité ayant été remplacée par une pension de retraite allouée en cas d’inaptitude au travail à compter des 60 ans de M. X., l’assureur a cessé ses versements ;
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que pour condamner celui-ci à lui payer le montant de la rente invalidité due à compter du 1er septembre 2009 jusqu’à son 65e anniversaire s’il remplit toujours les conditions de la garantie, l’arrêt retient que l’article 13 du contrat prévoit que les garanties cessent notamment « au 31 décembre de l’année au cours de laquelle l’assuré atteint l’âge de 65 ans » ; que l’article 25 du contrat énonce que « les prestations sont payables, par trimestre échu, pendant toute la durée de l’incapacité-invalidité donnant lieu à la pension de la sécurité sociale et jusqu’à la date de liquidation des assurances vieillesse telle qu’elle est prévue notamment aux articles L. 304 et suivants du code de la sécurité sociale, sauf décès avant cette date » ; que ce texte faisant référence à un article du code de la sécurité sociale qui n’existe pas, l’adhérent n’est pas en mesure de savoir précisément à quoi correspond la notion de « liquidation des assurances vieillesse » ; qu’aux termes de l’article L. 132-2 du code de la consommation, les clauses des contrats proposés doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible, et s’interprètent en cas de doute dans le sens le plus favorable au consommateur ; que la pension de vieillesse s’est substituée, par application de l’article L. 341-15 du code de la sécurité sociale, à la pension d’invalidité sans que l’état d’invalidité de M. X. n’ait subi la moindre modification, puisqu’il était toujours inapte au travail ; que dans ces conditions la pension vieillesse allouée doit être assimilée à une pension d’invalidité ouvrant droit aux prestations dues par l’assureur, cette interprétation étant la plus favorable à l’assuré qui pourra recevoir celles-ci jusqu’à son 65ème anniversaire, conformément aux dispositions de l’article 13 du contrat ;
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Qu’en statuant ainsi, alors que les juges du fond ne jouissent du pouvoir d’interpréter les conventions que si celles-ci sont obscures ou ambiguës, la cour d’appel qui s’est bornée à relever que l’article 25 du contrat citait un article du code de la sécurité sociale qui n’existait pas, circonstance qui ne suffisait pas à le priver de clarté et ne nuisait pas à sa compréhension, la cour d’appel, sans s’attacher au sens clair et précis de la clause qui ne nécessitait aucune interprétation, a violé par refus d’application le premier des textes susvisé et par fausse application le second ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 3 juin 2014, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X. aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X., le condamne à payer à la société Quatrem assurances collectives une somme de 3.000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix septembre deux mille quinze, signé par Mme Flise, président, et par Mme Molle-de-Hédouville, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l’arrêt.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société Quatrem assurances collectives
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR infirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions et d’avoir condamné la société Quatrem à payer à M. X. le montant de la rente invalidité due entre le 1er septembre 2009 et la date du prononcé de l’arrêt, puis à lui verser cette rente jusqu’à son 65e anniversaire s’il remplit toujours les conditions de la garantie invalidité ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QU’aux termes de l’article 13 du contrat litigieux, les garanties faisant l’objet de la convention cessent pour chaque assuré, notamment, « au 31 décembre de l’année au cours de laquelle l’assuré atteint l’âge de 65 ans » ; que cette disposition, qui vise toutes les garanties, s’applique donc à la garantie invalidité ; que l’intimée demande l’application de l’article 25 du contrat, qui est ainsi rédigé : « Les prestations sont payables, par trimestre échu, pendant toute la durée de l’incapacité-invalidité donnant lieu à la pension de la sécurité sociale et jusqu’à la date de liquidation des assurances vieillesse telle qu’elle est prévue notamment aux articles L. 304 et suivants du Code de la sécurité sociale, sauf décès avant cette date » ; qu’aux termes de l’article L. 132-2 du Code de la consommation, les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non-professionnels doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible, et s’interprètent en cas de doute dans le sens le plus favorable au consommateur ou au non-professionnel ; que l’article 25 du contrat faisant référence à un article du Code de la sécurité sociale qui n’existe pas, l’adhérent n’est pas en mesure de savoir précisément à quoi correspond la notion de « liquidation des assurances vieillesse » ; que, en outre, à l’âge de 60 ans, M. X. s’est vu notifier par son organisme de sécurité sociale le remplacement de sa pension d’invalidité par une pension de vieillesse allouée en cas d’inaptitude au travail, conformément aux dispositions de l’article L. 341-15 du Code de la sécurité sociale ; que cette pension de vieillesse s’est ainsi substituée, par application de cette disposition légale, à la pension d’invalidité qu’il percevait jusqu’alors, et sans que son état d’invalidité n’ait subi la moindre modification, puisqu’il était toujours inapte au travail ; que, dans ces conditions, la pension de vieillesse qui lui a été allouée doit être assimilée à une pension d’invalidité, laquelle ouvre droit aux prestations dues par l’assureur pendant toute la durée de l’invalidité de l’adhérent ; que cette interprétation est la plus favorable à l’assuré, qui pourra recevoir les prestations prévues au contrat jusqu’à son 65e anniversaire, conformément aux dispositions de l’article 13 du contrat ; que le jugement doit donc être infirmé en ce qu’il a débouté M. X. de ses demandes ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
1°) ALORS QU’aux termes de l’article 13 des conditions générales du contrat d’assurance, la cessation des garanties « au 31 décembre de l’année au cours de laquelle l’Assuré atteint l’âge de 65 ans » s’effectuait « sous réserve, en ce qui concerne chaque garantie, des dispositions prévues au Titre correspondant », l’article 25 prévoyant, s’agissant spécialement de la garantie invalidité, que les prestations étaient versées à l’assuré « jusqu’à la date de liquidation des assurances vieillesse » ; qu’en jugeant que la société Quatrem serait tenue de verser à M. X. une prestation invalidité jusqu’à ses 65 ans, faisant ainsi prévaloir l’article 13 des conditions générales sur l’article 25, qui y dérogeait pourtant expressément, la Cour d’appel a dénaturé le contrat d’assurance et violé l’article 1134 du Code civil ;
2°o) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent interpréter les conventions que si celles-ci sont obscures ou ambiguës ; qu’en jugeant que « l’article 25 du contrat faisant référence à un article du Code de la sécurité sociale qui n’existe pas, l’adhérent n’est pas en mesure de savoir précisément à quoi correspond la notion de “liquidation des assurances vieillesse” » (arrêt, p. 3, in fine, p. 4, in limine) quand, nonobstant cette erreur, la notion de « liquidation des assurances vieillesse » ne pouvait correspondre qu’à la date à laquelle sont liquidés les droits à la retraite de l’assuré social et ne revêtait donc aucune ambiguïté, de sorte qu’il n’y avait pas lieu d’interpréter le contrat, la Cour d’appel a violé les articles 1134 du Code civil et L. 132-2 du Code de la consommation ;
3°) ALORS QUE l’article L. 341-5 du Code de la sécurité sociale prévoit qu’à l’âge légal de la retraite de l’assuré social, la pension d’invalidité est remplacée par la pension de vieillesse, qui lui est substituée ; qu’en jugeant que la pension de vieillesse versée à M. X. par la CPAM de Seine-et-Marne devait être « assimilée à une pension d’invalidité » (arrêt, p. 4, § 4), écartant en conséquence les stipulations du contrat prévoyant que les prestations étaient versées à l’assuré « jusqu’à la date de liquidation des assurances vieillesse » (arrêt, p. 3, pénult. §), la Cour d’appel a violé l’article L. 341-5 du Code de la sécurité sociale, ensemble l’article 1134 du Code civil.
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