CA PARIS (pôle 2 ch. 5), 3 juin 2014
CERCLAB - DOCUMENT N° 7366
CA PARIS (pôle 2 ch. 5), 3 juin 2014 : RG n° 12/08459
Cassé par Cass. civ. 2e, 10 septembre 2015 : pourvoi n° 14-22669 ; arrêt n° 1278
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Considérant qu'aux termes de l'article L. 141-4 du code des assurances, l'obligation de remettre la notice d'information du contrat d'assurance de groupe à l'adhérent pèse sur le souscripteur du contrat, la preuve de cette remise lui incombant ; Considérant qu'en l'espèce, Mr X. ne démontre pas que son ancien employeur, souscripteur du contrat litigieux, ait manqué à cette obligation ;
Qu'il reconnaît d'ailleurs dans ses conclusions avoir reçu les notes au personnel des 31 décembre 1996 et 8 janvier 1997, qui indiquaient que les conditions du contrat d'assurance seraient prochainement distribuées sous forme de plaquette aux salariés ; Considérant, en outre, qu'en demandant à la cour de faire application des articles 13 et 24 du contrat, il ne peut en même temps lui demander d'écarter l'application d'autres dispositions du même contrat ; Que toutes les dispositions de ce contrat lui sont donc opposables ».
2/ « Considérant que l'article 25 du contrat faisant référence à un article du code de la sécurité sociale qui n'existe pas, l'adhérent n'est pas en mesure de savoir précisément à quoi correspond la notion de « liquidation des assurances vieillesse » ;
Considérant, en outre, que, à l'âge de 60 ans, Mr X. s'est vu notifier par son organisme de sécurité sociale le remplacement de sa pension d'invalidité par une pension de vieillesse allouée en cas d'inaptitude au travail, conformément aux dispositions de l'article L. 341-15 du code de la sécurité sociale ; Que cette pension de vieillesse s'est ainsi substituée, par application de cette disposition légale, à la pension d'invalidité qu'il percevait jusqu'alors, et sans que son état d'invalidité n'ait subi la moindre modification, puisqu'il était toujours inapte au travail ;
Considérant que, dans ces conditions, la pension de vieillesse qui lui a été allouée doit être assimilée à une pension d'invalidité, laquelle ouvre droit aux prestations dues par l'assureur pendant toute la durée de l'invalidité de l'adhérent ;
Que cette interprétation est la plus favorable à l'assuré, qui pourra recevoir les prestations prévues au contrat jusqu'à son 65ème anniversaire, conformément aux dispositions de l'article 13 du contrat ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 2 CHAMBRE 5
ARRÊT DU 3 JUIN 2014
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 12/08459 (5 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 avril 2012 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - R.G. n° 10/14554.
APPELANT :
Monsieur X.
Représenté par Maître Jean-Claude RADIER, avocat au barreau de PARIS, toque : B0213
INTIMÉE :
SA QUATREM ASSURANCES COLLECTIVES
Entreprise régie par le code des assurances, Représentée par Maître Eric NOUAL de la SCP NOUAL HADJAJE DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0493
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 avril 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre, et Monsieur Michel CHALACHIN, Conseiller entendu en son rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente, Monsieur Michel CHALACHIN, Conseiller, Madame Françoise MARTINI, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Nicole BEAUSSEAUX
ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Catherine LE FRANCOIS, président et par Madame Aouali BENNABI, greffier présente lors du prononcé.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le 1er janvier 1997, Mr X. a adhéré au contrat d'assurance de groupe prévoyance souscrit par la banque THEMIS auprès de la société QUATREM à l'effet de couvrir notamment le risque d'invalidité permanente totale ; la société GMC GESTION était chargée de gérer ce contrat.
Le 1er septembre 1998, une pension d'invalidité de 2ème catégorie lui a été accordée par la CPAM, et la société QUATREM lui a versé la rente complémentaire prévue au contrat.
Le 29 octobre 1998, suite à son licenciement pour inaptitude, l'assureur a continué à lui verser la rente d'invalidité.
En juin 2009, la CPAM a informé Mr X. qu'à compter de ses 60 ans, la pension d'invalidité serait remplacée par une pension de retraite.
L'assuré en a avisé la société GMC GESTION qui, par lettre du 3 août 2009, l'a informé que le versement de cette prestation mettait fin au bénéfice des indemnités versées jusque-là au titre du contrat d'assurance.
Par acte des 1er et 5 octobre 2010, Mr X. a assigné les sociétés QUATREM et GMC GESTION devant le tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement du 12 avril 2012, a mis la société GMC GESTION hors de cause et a débouté Mr X. de ses demandes.
Ce dernier a interjeté appel du jugement par déclaration du 7 mai 2012.
Par dernières conclusions du 30 octobre 2013, il sollicite l'infirmation du jugement et le paiement de la somme de 93.098,81 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation et capitalisation, outre celle de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; à titre subsidiaire, il demande à la cour de condamner la société QUATREM au paiement des indemnités dues à la date de l'arrêt et d'ordonner la reprise du versement des indemnités jusqu'à l'âge limite de ses 65 ans, aussi longtemps que les conditions de la garantie incapacité et/ou invalidité seront remplies, sous astreinte de 500 euros par jour à compter de la signification de l'arrêt.
Par dernières conclusions du 1er octobre 2013, la société QUATREM sollicite la confirmation du jugement et le paiement de la somme de 2.700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur l'opposabilité de la notice d'information valant conditions générales :
Considérant que Mr X. soutient qu'aucune notice d'information mentionnant une limitation de garantie ne lui a été remise au moment de son adhésion, si bien que cette limitation ne lui est pas opposable ;
Considérant que la société QUATREM répond que la preuve de la remise de la notice à l'adhérent incombe au souscripteur, et que l'appelant avait reconnu avoir eu en sa possession la note au personnel faisant référence à l'accord d'entreprise du 20 décembre 1996 et une note au personnel du 8 janvier 1997, auxquelles était jointe la notice d'information ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 141-4 du code des assurances, l'obligation de remettre la notice d'information du contrat d'assurance de groupe à l'adhérent pèse sur le souscripteur du contrat, la preuve de cette remise lui incombant ;
Considérant qu'en l'espèce, Mr X. ne démontre pas que son ancien employeur, souscripteur du contrat litigieux, ait manqué à cette obligation ;
Qu'il reconnaît d'ailleurs dans ses conclusions avoir reçu les notes au personnel des 31 décembre 1996 et 8 janvier 1997, qui indiquaient que les conditions du contrat d'assurance seraient prochainement distribuées sous forme de plaquette aux salariés ;
Considérant, en outre, qu'en demandant à la cour de faire application des articles 13 et 24 du contrat, il ne peut en même temps lui demander d'écarter l'application d'autres dispositions du même contrat ;
Que toutes les dispositions de ce contrat lui sont donc opposables ;
Sur l'interprétation du contrat :
Considérant que Mr X. demande l'application de l'article 13 du contrat, qui prévoit que les garanties cessent au 31 décembre de l'année au cours de laquelle l'assuré atteint l'âge de 65 ans, et de l'article 24, qui prévoit que l'assuré peut bénéficier des garanties incapacité temporaire totale de travail ou invalidité permanente totale jusqu'à son 65ème anniversaire ; il affirme que, si certaines garanties devaient cesser à 60 ans, les primes auraient dû également baisser, ce qui n'était pas le cas ; il ajoute que les dispositions de l'article 25, qui prévoient que les prestations sont payables jusqu'à la date de liquidation des assurances vieillesse telle qu'elle est prévue notamment aux articles L. 304 et suivants du code de la sécurité sociale, sont en contradiction avec les articles 13 et 24, car, d'une part, l'article L. 304 du code de la sécurité sociale n'existe pas, et, d'autre part, l'article 25 ne vise pas le cas particulier de l'article L. 341-15 du même code, qui prévoit une liquidation impérative de l'assurance vieillesse ; à titre subsidiaire, il soutient que les dispositions de l'article 25 doivent être jugées abusives ;
Considérant que la société QUATREM répond qu'il n'existe aucune contradiction entre les articles 13 et 25 du contrat, le service de la rente invalidité étant lié à celui de la pension d'invalidité versée par la sécurité sociale et devant cesser en même temps que ce dernier, à la date de liquidation de l'assurance vieillesse ; elle ajoute que l'article 24 ne prévoit le versement d'indemnités jusqu'à 65 ans que pour la garantie incapacité de travail, et non pour la garantie invalidité ; elle conteste le prétendu caractère abusif de l'article 25;
Considérant qu'aux termes de l'article 13 du contrat litigieux, les garanties faisant l'objet de la convention cessent pour chaque assuré, notamment, « au 31 décembre de l'année au cours de laquelle l'assuré atteint l'âge de 65 ans » ;
Que cette disposition, qui vise toutes les garanties, s'applique donc à la garantie invalidité ;
Considérant que l'intimée demande l'application de l'article 25 du contrat, qui est ainsi rédigé : « Les prestations sont payables, par trimestre échu, pendant toute la durée de l'incapacité-invalidité donnant lieu à la pension de la sécurité sociale et jusqu'à la date de liquidation des assurances vieillesse telle qu'elle est prévue notamment aux articles L. 304 et suivants du code de la sécurité sociale, sauf décès avant cette date » ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 132-2 du code de la consommation, les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non-professionnels doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible, et s'interprètent en cas de doute dans le sens le plus favorable au consommateur ou au non-professionnel ;
Considérant que l'article 25 du contrat faisant référence à un article du code de la sécurité sociale qui n'existe pas, l'adhérent n'est pas en mesure de savoir précisément à quoi correspond la notion de « liquidation des assurances vieillesse » ;
Considérant, en outre, que, à l'âge de 60 ans, Mr X. s'est vu notifier par son organisme de sécurité sociale le remplacement de sa pension d'invalidité par une pension de vieillesse allouée en cas d'inaptitude au travail, conformément aux dispositions de l'article L. 341-15 du code de la sécurité sociale ;
Que cette pension de vieillesse s'est ainsi substituée, par application de cette disposition légale, à la pension d'invalidité qu'il percevait jusqu'alors, et sans que son état d'invalidité n'ait subi la moindre modification, puisqu'il était toujours inapte au travail ;
Considérant que, dans ces conditions, la pension de vieillesse qui lui a été allouée doit être assimilée à une pension d'invalidité, laquelle ouvre droit aux prestations dues par l'assureur pendant toute la durée de l'invalidité de l'adhérent ;
Que cette interprétation est la plus favorable à l'assuré, qui pourra recevoir les prestations prévues au contrat jusqu'à son 65ème anniversaire, conformément aux dispositions de l'article 13 du contrat ;
Que le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a débouté Mr X. de ses demandes ;
Sur le calcul des indemnités :
Considérant que Mr X. demande le paiement de la somme de 93.098,81 euros en se fondant sur le dernier état de la rente invalidité qu'il percevait jusqu'au mois d'août 2009 ;
Considérant que la société QUATREM conteste le calcul opéré par l'appelant, faute de connaître le montant des prestations de base et de la retraite complémentaire qu'il perçoit ; elle ajoute qu'il ne peut réclamer le paiement d'échéances d'une rente non encore échue ;
Considérant que l'appelant justifie percevoir une somme mensuelle de 1.798,19 euros au titre de la pension de vieillesse pour inaptitude au travail qui lui est versée par son organisme de sécurité sociale ;
Considérant qu'il appartiendra à la société QUATREM de calculer, sur cette base, le montant de la rente invalidité à laquelle l'appelant avait droit du 1er septembre 2009 jusqu'à la date du présent arrêt, puis de lui verser le montant de cette rente jusqu'à son 65ème anniversaire ;
Considérant qu'il n'est pas utile d'assortir cette condamnation d'une astreinte ;
Sur les demandes accessoires :
Considérant que Mr X., qui ne justifie pas avoir subi le moindre préjudice moral, doit être débouté de ce chef de demande ;
Considérant que l'équité commande de lui allouer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de débouter l'intimée de sa demande fondée sur ce texte ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Et statuant à nouveau, condamne la société QUATREM à payer à Mr X. le montant de la rente invalidité due entre le 1er septembre 2009 et la date du prononcé du présent arrêt, puis à lui verser cette rente jusqu'à son 65ème anniversaire s'il remplit toujours les conditions de la garantie invalidité ;
Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte ;
Déboute Mr X. de sa demande en paiement de dommages-intérêts ;
Condamne la société QUATREM à payer à Mr X. la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la société QUATREM de sa demande fondée sur ce texte ;
Condamne la société QUATREM aux dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE
- 6003 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Rédaction et interprétation - Rédaction claire et compréhensible (L. 212-1, al. 1, C. consom.) - Clause confuses
- 6086 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Opposabilité des conditions générales - Clauses inconnues du consommateur
- 6357 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Assurance - Assurances de groupe - Assurances sans lien avec un crédit