CA BESANÇON (1re ch. civ. et com.), 25 novembre 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 5351
CA BESANÇON (1re ch. civ. et com.), 25 novembre 2015 : RG n° 14/00858
Publication : Jurica
Extrait : « Il résulte de la pièce 1 communiquée par l'intimée que M. X. est enregistré dans le répertoire sirène comme exerçant une activité de commerce de détail alimentaire sur éventaires et marchés. Par ailleurs il peut être déduit des écritures de l'appelant, bien qu'il indique être maintenant retraité, qu'il faisait le négoce de vin, puisqu'il fait notamment le reproche à son adversaire d'avoir mis en place un site qui n'était ni opérant, ni attractif, de sorte qu'il n'a drainé aucune clientèle et n'a jamais provoqué la moindre transaction.
Dès lors M. X. est mal fondé à se prévaloir de la nullité du contrat pour inobservation des règles édictées par le code de la consommation puisqu'il résulte des dispositions de l'article L.121-22-4° que ne sont pas soumises aux dispositions sur le démarchage à domicile les ventes, locations ou locations-vente de biens ou les prestations de service ayant un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession. »
COUR D’APPEL DE BESANÇON
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
- 172 501 116 00013 -
ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 14/00858. Contradictoire. S/appel d'une décision du tribunal d'instance de VESOUL en date du 7 mars 2014 [R.G. n° 13-000473]. Code affaire : 50B Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix.
PARTIES EN CAUSE :
APPELANT :
Monsieur X.
né le [date] à [ville] demeurant [adresse], Représenté par Maître Ludovic PAUTHIER de la SCP DUMONT - PAUTHIER, avocat au barreau de BESANCON
ET :
INTIMÉE :
SA FIDEL
dont le siège est sis [adresse], Représentée par Maître Isabelle TOURNIER, avocat au barreau de BESANCON et Maître Dominique CHEVANCHE, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats :
PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre.
ASSESSEURS : Mesdames D. ECOCHARD (magistrat rapporteur), et H. BITTARD, Conseillers.
GREFFIER : Madame D. BOROWSKI, Greffier.
lors du délibéré :
PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre
ASSESSEURS : Mesdames D. ECOCHARD et H. BITTARD, Conseillers.
L'affaire, plaidée à l'audience du 21 octobre 2015 a été mise en délibéré au 25 novembre 2015. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits et prétentions des parties :
M. X. a souscrit le 26 juin 2012 auprès de la société Linkeo.com un contrat de licence et d'exploitation d'un site internet, pour une durée de 48 mois, moyennant le paiement d'échéances mensuelles égales à 190,16 Euros ttc.
Aucune des échéances n'ayant été honorée, la SA Fidel, venant aux droits de la société Linkeo.com ensuite d'une cession de contrat, a procédé à la résiliation du contrat. Elle en a informé M. X. par courrier recommandé du 8 février 2013, et lui a réclamé le paiement des sommes dues au titre des échéances impayées et de celles restant à courir.
En l'absence d'exécution, elle a assigné M. X. en paiement de la somme totale s'élevant à 9.127,68 euros.
Par jugement réputé contradictoire du 7 mars 2014 le tribunal d'instance de Vesoul a condamné M. X. à payer à la SA Fidel la somme de 9.127,68 euros outre intérêts au taux légal à compter du 5 avril 2013, débouté cette dernière de sa demande faite au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné M. X. aux dépens.
M. X. a régulièrement interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 14 avril 2014. Il en sollicite l'infirmation intégrale et demande à la cour, sur le fondement des articles L.121-21 et suivants du code de la consommation et de l'article 1184 du code civil, de :
- prononcer l'annulation du contrat ou à défaut sa résolution pour manquement du prestataire à ses obligations contractuelles, aux torts exclusifs de la SA Fidel ;
- condamner la SA Fidel à restituer la somme de 466,44 euros ;
- condamner la SA Fidel à lui payer une indemnité de 1.500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;
- débouter la SA Fidel de sa demande de dommages et intérêts.
Au soutien de son recours il fait valoir que :
- il n'a pas été en mesure de développer ses arguments en défense devant le tribunal d'instance, l'affaire ayant été retenue malgré sa demande de renvoi,
- le contrat litigieux a été conclu à l'occasion d'un démarchage à domicile et il ne respecte pas les dispositions impératives prévues dans ce cas par le code de la consommation (absence de formulaire de rétractation et non respect de la faculté de renonciation) de sorte qu'il est nul en application de l'article L. 121-33 du code de la consommation,
- il ne s'agit pas d'un litige entre commerçants mais bien d'un contrat conclu entre un simple consommateur et une société pratiquant le démarchage à domicile,
- le premier prélèvement bancaire a été opéré avant même la réalisation du site internet,
- le site mis en ligne par la société linkeo.com comporte des erreurs grossières tant en ce qui concerne les coordonnées téléphoniques de M. X. que les produits vendus et leur prix ; il n'est de ce fait ni opérant ni attractif de sorte qu'il n'a drainé aucune clientèle,
- M. X. a contesté cette façon de procéder à la fois en s'opposant au prélèvement bancaire et en écrivant au prestataire pour dénoncer la mauvaise qualité du travail effectué,
- la demande de dommages et intérêts présentée par l'intimée est non fondée, l'existence de la demande de renvoi adressée au premier juge étant incontestable.
La SA Fidel conclut à la confirmation intégrale du jugement attaqué et réclame en outre la condamnation de M. X. à lui payer les sommes de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts et de 2.500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont le montant pourra être recouvré directement par Me Isabelle Tournier, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle expose en réponse à l'argumentation adverse les éléments suivants :
- le contrat litigieux est parfaitement valable s'agissant d'un contrat, non pas conclu avec un simple consommateur mais dans le cadre de l'activité professionnelle de caviste exercée par M. X., de sorte que ce dernier, en sa qualité d'artisan, ne peut se prévaloir du bénéfice des dispositions protectrices du code de la consommation, comme le précise l'article L. 122-22,
- le site a bien été crée et mis en ligne conformément à la commande passée par le client,
- les mentions qu'il comportait n'étaient pas erronées mais correspondaient à celles portées sur les conditions particulières du contrat ; il appartenait à M. X. de compléter ou d'enrichir par la suite le site,
- le site était régulièrement consulté comme en témoigne les statistiques,
- le fournisseur du site n'est tenu que d'une obligation de moyen et non d'une obligation de résultat et il ne peut donc être reproché à la SA Fidel l'absence de retombées commerciales consécutive à la consultation du site,
- la somme de 466,44 euros dont la restitution est réclamée par M. X. correspond aux frais de mise en service du site acquittés par le client le 12 juillet 2012 et en aucun cas à toute ou partie des échéances, dont le paiement a été réclamé par la suite,
- les dommages et intérêts réclamés en application des dispositions de l'article 560 du code de procédure civile sont justifiés du fait du défaut de comparution de l'appelant en première instance sans motif légitime.
Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises à la cour par voie électronique :
- le 28 janvier 2015 pour M. X.,
- le 23 avril 2015 pour la SA Fidel.
L'instruction de l'affaire a été clôturée par ordonnance en date du 30 septembre 2015.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Motifs de la décision :
I) Sur la demande d'annulation du contrat :
Il résulte de la pièce 1 communiquée par l'intimée que M. X. est enregistré dans le répertoire sirène comme exerçant une activité de commerce de détail alimentaire sur éventaires et marchés. Par ailleurs il peut être déduit des écritures de l'appelant, bien qu'il indique être maintenant retraité, qu'il faisait le négoce de vin, puisqu'il fait notamment le reproche à son adversaire d'avoir mis en place un site qui n'était ni opérant, ni attractif, de sorte qu'il n'a drainé aucune clientèle et n'a jamais provoqué la moindre transaction.
Dès lors M. X. est mal fondé à se prévaloir de la nullité du contrat pour inobservation des règles édictées par le code de la consommation puisqu'il résulte des dispositions de l'article L.121-22-4° que ne sont pas soumises aux dispositions sur le démarchage à domicile les ventes, locations ou locations-vente de biens ou les prestations de service ayant un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession.
Il sera donc débouté de son exception tendant à l'annulation du contrat.
II) Sur les obligations mises à la charge de la société Linkeo.com :
Aux termes du contrat de licence d'exploitation de site internet conclu le 26 juin 2012 entre l'appelant et la société Linkeo.com, cette dernière s'était engagée à créer un site informatique comportant un catalogue de vente en ligne et à le mettre à la disposition de M. X.
Les conditions financières étaient les suivantes :
- frais de mise en service : 466,44 euros
- abonnement : 48 mensualités à : 190,16 euros
Il résulte du procès verbal de réception établi le 11 juillet 2012, signé par M. X., que ce dernier a pris livraison du site crée par Linkeo.com, en a vérifié la conformité et le bon fonctionnement et l'a accepté sans réserve.
Il est dès lors mal venu à reprocher à la partie adverse d'avoir fait figurer des renseignements inexacts sur ce site internet, d'autant qu'en comparant les données apparaissant sur les impressions écran dudit site, la cour observe que les mentions prétendument erronées correspondent en réalité aux indications portées sur le contrat (pièces 2 et 9 de l'intimée), s'agissant notamment des coordonnées téléphoniques.
En outre M. X. ne justifie pas avoir présenté spontanément une quelconque réclamation à la société linkeo.com à propos de difficultés de fonctionnement ou d'autres inexactitudes, concernant le prix ou la nature des produits notamment. En effet la seule pièce qu'il verse aux débats à ce sujet est un courrier adressé le 28 février 2014 à la société Fidel, après délivrance de diverses mises en demeure et de l'assignation en justice.
Il doit en être déduit que contrairement à ce que soutient l'appelant, la société linkeo.com a rempli toutes ses obligations. Dès lors la demande présentée par l'appelant tendant à la restitution de la somme de 466,44 euros correspondant aux frais de mise en service du site internet doit être rejetée.
III) Sur les obligations incombant à M. X. :
M. X. s'était engagé à s'acquitter des mensualités relatives à la location du site internet. Il a sollicité et obtenu dans un premier temps le report de la première mensualité au mois d'octobre 2012, mais n'allègue pas avoir par la suite payé les sommes dont il était redevable.
La société Fidel justifie que la société linkeo.com lui a cédé ses droits. Elle est donc fondée à se prévaloir de l'inexécution des obligations incombant à M. X.
Par des motifs pertinents que la cour adopte, le premier juge a relevé que la résiliation du contrat opérée par l'intimée est conforme aux stipulations contractuelles, de même que le décompte des sommes réclamées.
Il convient donc de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a condamné l'appelant à payer la somme de 9.127,68 euros correspondant aux échéances impayées et à celles restant à courir.
IV) Sur les autres demandes :
L'intimée reproche à M. X. d'avoir omis de se présenter en première instance sans motif légitime et justifie ainsi la demande de dommages et intérêts qu'elle présente sur le fondement de l'article 560 du code de procédure civile, en sus de celle formée au titre des frais irrépétibles.
Si M. X. démontre avoir effectivement adressé le 2 décembre 2012 au tribunal d'instance une demande de renvoi en raison d'une prétendue indisponibilité le 7 mars 2014, il lui appartenait de s'assurer que cette demande, qui n'était pas spécialement motivée ni assortie d'une pièce justificative, serait prise en compte. A défaut il s'exposait à ce qu'une décision soit rendue en son absence, ainsi que cela s'est produit. Par sa négligence, il a contraint la partie adverse à engager des frais pour se défendre à hauteur d'appel.
Ces circonstances justifient qu'il soit fait intégralement droit à la demande d'indemnité formée par la SA Fidel en application de l'article 700 du code de procédure civile. En revanche en l'absence d'un préjudice distinct, et d'un abus caractérisé à l'encontre de l'appelant compte tenu de la demande de renvoi formée par M. X., il n'y a pas lieu d'accorder à l'intimée les dommages et intérêts réclamés.
L'appelant, qui succombe en son recours, sera condamné aux dépens d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
Déclare l'appel de M. X. non fondé.
Rejette toutes les demandes présentées par M. X..
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 7 mars 2014 par le tribunal d'instance de Vesoul.
Y ajoutant,
Rejette la demande de dommages et intérêts formée par la SA Fidel en cause d'appel.
Condamne M. X. à payer à la SA Fidel la somme de deux mille cinq cents euros (2.500 euros) au titre des frais non compris dans les dépens exposés en cause d'appel.
Condamne M. X. aux dépens d'appel, avec droit pour Me Isabelle Tournier, avocat, de se prévaloir des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LEDIT ARRÊT a été signé par Monsieur Edouard Mazarin, Président de Chambre, Magistrat ayant participé au délibéré, et Madame Dominique Borowski, Greffier.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE,
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