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CA ROUEN (ch. prox.), 17 décembre 2015

Nature : Décision
Titre : CA ROUEN (ch. prox.), 17 décembre 2015
Pays : France
Juridiction : Rouen (CA), ch. proxim.
Demande : 15/03358
Date : 17/12/2015
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 8/07/2015
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5382

CA ROUEN (ch. prox.), 17 décembre 2015 : RG n° 15/03358

Publication : Jurica

 

Extrait : « Ainsi que le soutient justement la SA BNP Paribas Personal Finance sous le visa de l'article L. 534-1 du code de la consommation qui définit les attributions de la commission des clauses abusives comme la vocation à connaître des modèles de conventions habituellement proposés par les professionnels à leurs contractants non professionnels ou consommateurs, la Sci [Sarl ?] Argentifolia ne peut se prévaloir de l'avis de cette commission, n'ayant pas la qualité de consommateur.

En tout état de cause cet avis du 27 mai 2004 considère comme abusive la clause ayant pour objet de laisser croire que le prêteur peut prononcer la déchéance du terme en cas d'inobservation d'une quelconque obligation ou en cas de déclaration fausse ou inexacte relative à une demande de renseignements non essentiels à la conclusion du contrat et sans que le consommateur puisse recourir au juge pour contester le bien fondé de cette déchéance ; il ne vise pas la clause prévoyant la déchéance du terme dans l'hypothèse précise de la défaillance de l'emprunteur dans le remboursement des échéances à leur date d'exigibilité. »

 

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE DE LA PROXIMITÉ

ARRÊT DU 17 DÉCEMBRE 2015

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 15/03358. DÉCISIONS DÉFÉRÉES : Jugement du JUGE DE L'EXECUTION DE ROUEN du 22 mai 2015 ET 11 juin 2015.

 

APPELANTE :

SARL ARGENTIFOLIA [N.B. l’arrêt vise tantôt une Sci, tantôt une Sarl]

Représentée et assistée par Maître Marie-Christine COUPPEY, avocat au barreau de ROUEN

 

INTIMÉE :

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

Représentée par Maître Olivier BODINEAU de la SCP SILIE VERILHAC ET ASSOCIES SOCIETE D'AVOCATS, avocat au barreau de ROUEN, assistée de Maître VALLET, avocat au barreau de Rouen

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 786 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 19 novembre 2015 sans opposition des avocats devant Madame BRYLINSKI, Président, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de : Madame BRYLINSKI, Président, Madame LABAYE, Conseiller, Madame GIRARD, Conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme NOEL-DAZY, Greffier

DÉBATS : A l'audience publique du 19 novembre 2015, où l'affaire a été mise en délibéré au 17 décembre 2015

ARRÊT : Contradictoire, Prononcé publiquement le 17 décembre 2015, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, Signé par Madame BRYLINSKI, Président et par Mme NOEL-DAZY, Greffier présent à cette audience.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Rouen, par jugement rendu le 22 mai 2015 et jugement rectificatif du 11 juin 2015, saisi sur assignation délivrée à la requête de la société BNP Paribas Personal Finance faisant suite à la signification le 12 mars 2014 d'un commandement aux fins de saisie immobilière publié le 28 avril 2014 volume 2014 XX au service de la publicité foncière de Rouen 1, a, notamment :

- dit que le montant retenu de la créance de la partie poursuivante est de 367.547,31 euros outre les intérêts au taux fixe de 4,88 % l'an sur 303.686,98 euros à compter du 23 juillet 2013 et les intérêts au taux légal sur l'indemnité d'exigibilité de 7 %, de 37.243,30 euros à compter du 28 avril 2014 ;

- dit que le bien saisi dans un ensemble immobilier a [...], cadastré section ZZ volume 6 pour une contenance de 1 ha 75 a 20 ca : 6 appartements de type F 2 au 3ème étage de l'immeuble :

LOT n° 1 : (lots 61 et 14 de la copropriété : appartement n° 307 de 37,43 m² et parking

LOT n° 2 : (lots 60 et 13 de la copropriété : appartement n° 306 de 37,39 m² et parking

LOT n° 3 : (lot 56 de la copropriété : appartement n° 302 de 37,33 m²

LOT n° 4 : (lots 55 et 16 de la copropriété : appartement n° 301 de 39,13 m² et parking

LOT n° 5 (lot 59 de la copropriété : appartement n° 305 de 39,87 m²

LOT n° 6 (lots 62 et 15 de la copropriété : appartement n° 308 de 39,17 m² et parking

pourra faire l`objet d'une vente amiable ;

- suspendu le cours de la procédure pour une duré maximum de quatre mois ;

- fixé les mises à prix minimum pour chacun des lots ainsi que les frais de poursuite ;

- fixé la date d'audience à laquelle l'affaire sera rappelé au 11 septembre 2015 à 9 h 30 pour que soit constaté la vente amiable ou ordonné la reprise de la procédure de vente forcée.

La Sci Argentifolia a interjeté appel par déclaration du 8 juillet 2015 et, autorisée sur sa requête en date du 16 juillet 2015, a assigné la société BNP Paribas Personal Finance à jour fixe pour être statué sur son appel ; aux termes de son assignation, elle demande à la cour de :

- dire que le commandement valant saisie qui lui a été délivré le 12 mars 2014 ne peut porter que sur la somme en principal de 230.938,58 euros ;

- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle l'a autorisée à vendre les biens saisis à l'amiable ;

- la réformer sur le délai et suspendre la procédure pour un délai minimum d'un an à compter de l'arrêt à intervenir de quatre mois ;

- statuer ce que de droit quant aux dépens avec droit de recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

* * *

La société BNP Paribas Personal Finance, assignée dans le délai imparti par acte signifié le 24 juillet 2015, aux termes de ses dernières écritures en date du 12 octobre 2015 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, demande à la cour de déclare l'appel de la société Argentifolia recevable mais mal fondé, confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et condamner la société Argentifolia aux dépens d'appel.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DISCUSSION :

La SA BNP Paribas Personal Finance justifie par les pièces produites aux débats venir aux droits de la société UCB.

Le prêt dont le recouvrement est poursuivi a été consenti par UCB à la Sci Argentifolia par acte authentique du 24 août 1998 suivant offre du 17 août 1998, pour le financement de l'acquisition par cette dernière d'appartements meublés dans une résidence en copropriété, destinés à la location.

Il porte sur un capital de 3.490.000 F (532.047,07 euros), remboursable sur une durée de 16 ans et 6 mois ; les intérêts sont stipulés à un taux initial de 4,90 % l'an, révisable tous les trois mois suivant la variation du TIOP publié dans le journal de la banque de France, cette variation ayant une incidence sur le montant des intérêts et du solde du compte, mais les règlements mensuels ne variant qu'annuellement ; l'option est offerte à l'emprunteur d'opter pour un taux fixe, calculé suivant deux composantes, l'une fixe de 2,05, l'autre égale au TME publié par la Caisse des Dépôts et Consignations.

Pour remettre en cause le montant de la créance de la société BNP Paribas Personal Finance tel que retenu par le premier juge, la Sci Argentifolia conteste la déchéance du terme en janvier 2003, faute par la banque d'avoir adressé un courrier en ce sens postérieurement à la mise en demeure reçue le 8 janvier 2003. Elle prétend que la clause du contrat de prêt sur laquelle se fonde la banque est nulle, la commission des clauses abusives ayant suivant avis du 30 septembre 2004 considéré comme abusive la clause permettant de prononcer l'inobservation d'une quelconque obligation sans possibilité pour l'emprunteur de recourir au juge. Elle fait valoir que l'attestation délivrée par la BNP Paribas Personal Finance à l'occasion de la cession de parts de la Sci Argentifolia le 11 janvier 2008 ne fait nullement mention d'une déchéance du terme intervenue en janvier 2003, que la banque lui a envoyé un plan d'amortissement en février 2008 et a continué à prélever des échéances, de sorte que de toutes façons elle aurait renoncé au bénéfice de cette déchéance, dont elle ne s'est prévalue qu'à l'occasion de la présente procédure de saisie immobilière.

Elle en déduit que la société BNP Paribas Personal Finance ne peut convertir le taux conventionnel variable prévu au contrat de prêt en taux fixe à 4,88 % et exiger une indemnité de 7 %.

Elle fait également valoir que le décompte fait état de règlements antérieurs à la prétendue déchéance du terme qui sont totalement imputés sur les intérêts contrairement au contrat alors qu'ils auraient du être imputés environ pour moitié sur le capital conformément à l'échéancier ; elle en déduit que faute de produire un décompte de créance conforme la société BNP Paribas Personal Finance doit être déboutée de sa demande en paiement des intérêts.

* * *

Ainsi que le soutient justement la SA BNP Paribas Personal Finance sous le visa de l'article L. 534-1 du code de la consommation qui définit les attributions de la commission des clauses abusives comme la vocation à connaître des modèles de conventions habituellement proposés par les professionnels à leurs contractants non professionnels ou consommateurs, la Sci Argentifolia ne peut se prévaloir de l'avis de cette commission, n'ayant pas la qualité de consommateur.

En tout état de cause cet avis du 27 mai 2004 considère comme abusive la clause ayant pour objet de laisser croire que le prêteur peut prononcer la déchéance du terme en cas d'inobservation d'une quelconque obligation ou en cas de déclaration fausse ou inexacte relative à une demande de renseignements non essentiels à la conclusion du contrat et sans que le consommateur puisse recourir au juge pour contester le bien fondé de cette déchéance ; il ne vise pas la clause prévoyant la déchéance du terme dans l'hypothèse précise de la défaillance de l'emprunteur dans le remboursement des échéances à leur date d'exigibilité.

Le contrat de prêt sous l'intitulé « définition et conséquences de la défaillance » stipule que : « l'emprunteur est réputé défaillant sans qu'il soit besoin d'adresser une mise en demeure, en cas notamment de (...) non paiement à bonne date d'une somme quelconque due par lui (...)

En cas de défaillance de l'emprunteur le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du solde du compte. Jusqu'à la date du règlement effectif, ce solde produit intérêts de retard au taux du crédit en vigueur lors de la défaillance, outre une indemnité de 7 % calculée sur le montant du solde rendu exigible

si le prêteur n'exige pas le remboursement immédiat du solde débiteur du compte, le taux du crédit en vigueur est majoré de trois points jusqu'à reprise du paiement normal des règlements. »

La BNP Paribas Personal Finance a adressé à la Sci Argentifolia une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 8 janvier 2003, d'avoir à régler dans le délai de 8 jours le solde débiteur de 35.227,63 euros, l'avisant qu'à défaut de règlement elle prononcerait la déchéance du terme en raison de laquelle la Sci aurait à régler l'intégralité du capital restant dû, les indemnités et autres pénalités prévues au contrat et les intérêts sur le capital restant dû jusqu'à parfait paiement.

Si aux termes du contrat, la mise en œuvre de la déchéance du terme n'est nullement conditionnée par l'envoi d'une mise en demeure préalable ni d'une quelconque formalité, la banque n'est pas pour autant dispensée, si elle y procède, de faire connaître à l'emprunteur le montant et la composition de la créance qui en résulte.

Il ressort des pièces produites aux débats que la Sarl Argentifolia, le 29 septembre 2008, est intervenue auprès de sa banque le Crédit Agricole pour faire opposition aux prélèvements opérés sur son compte ; elle expliquait que les prélèvements anciennement opérés par UCB, pour celui d'août 2008, été effectué par Cetelem sans qu'elle ait été informée de ce changement de fournisseur, et qu'au 10 septembre 2008 le prélèvement de Cetelem avait été de 4.812,27 euros sans aucune justification de cette majoration.

Le 14 janvier 2009, elle a reçu de la SA BNP Paribas Personal Finance l'information de ce que l'UCB avait fait l'objet d'une fusion absorption par Cetelem ayant pris le nom de la SA BNP Paribas Personal Finance avec précision que cela ne modifiait en rien le contrat de prêt. Par le même courrier la banque rappelait que le dernier versement datait du 10 octobre 2008 et que sauf à recevoir la somme de 19.251,08 euros à venir en déduction de la créance et la reprise des versements par prélèvements de 4.812,77 euros dès le 10 février 2009, elle n'aurait d'autre alternative que d'engager la saisie immobilière.

Par un courrier en réponse du 6 février 2009, indiquait avoir ordonné la suspension des prélèvements mensuels dès le 10 octobre 2008 en attendant des explications sur les modifications du nom du bénéficiaire et du montant de ces prélèvements ; elle rappelait qu'elle aurait du recevoir les arrêtés de compte périodiques prévus au contrat de prêt, et réclamait et demandait à la SA BNP Paribas Personal Finance de lui faire parvenir un échéancier complet depuis l'origine du prêt portant indication de tous les versements mais également du solde dû, ainsi que les justificatifs annuels de modification de taux en application du prêt, de faire ressortir séparément et d'une manière détaillée l'incidence financière ressortant des retards déchéances, intérêts et capital.

La SA BNP Paribas Personal Finance par courrier de son conseil du 12 juin 2009, a interrogé la Sarl Argentifolia sur la façon dont elle comptait s'acquitter de ses obligations, observant que depuis le mois d'octobre 2008 le prêt n'avait fait l'objet d'aucun versement, annonçant des mesures plus contraignantes à défaut de réponse sous quinzaine.

C'est seulement par courrier du 10 septembre 2009 que la SA BNP Paribas Personal Finance a indiqué à la Sarl Argentifolia que reprenant la gestion du dossier, elle constatait que la créance était exigible depuis le 10 février 2003 et s'élevait à la somme de 456.074,60 euros.

Ces éléments ne permettent pas de retenir que la Sarl Argentifolia aurait eu connaissance d'une mise en œuvre effective de la déchéance du terme avant réception de ce courrier du 10 septembre 2009, et c'est à cette date qu'a été établi le premier décompte de créance sur déchéance du terme, soit plus de six ans après sa date d'effet au 10 février 2003 telle que la SA BNP Paribas Personal Finance s'en prévaut.

La date du 10 février 2003 à laquelle la SA BNP Paribas Personal Finance situe la déchéance du terme correspond à la date d'exigibilité de la première échéance suivant l'expiration du délai de 8 jours imparti pour régularisé l'arriéré.

La SA BNP Paribas Personal Finance ne prétend nullement ni à plus forte raison n'établit que, cette déchéance du terme ayant été mise en œuvre, un accord aurait été conclu pour la mise en place d'un échéancier permettant l'apurement de la totalité de la créance devenue exigible.

Le premier décompte produit aux débats, de la créance résultant de cette déchéance du terme, établi le 10 septembre 2009, mentionne notamment :

* le total du découvert utilisé ;

* des intérêts échus, sans aucune indication de leur calcul, et des versements de l'emprunteur, sans indication de leur mode d'imputation sur les intérêts et le capital ; aucun élément ne permet leur vérification, étant observé que les arrêtés de compte qui devaient être adressés chaque année en mars, juin, septembre et décembre en raison de la variabilité du taux d'intérêts ne sont pas produits aux débats, pas même celui de décembre 2002 précédant immédiatement la mise en demeure ;

* une indemnité forfaitaire de 7 %.

La créance à la date d'exigibilité anticipée est ainsi fixée à la somme de 532.047,08 euros en principal et 55.547,97 euros en intérêts.

Sont ensuite comptabilisés des intérêts sur le principal dû, au taux fixe de 4,88 %, sur chaque période écoulée entre les règlements successifs, lesquels sont imputés en priorité sur les intérêts.

La créance est ainsi arrêtée au 10 septembre 2009 à la somme de 456.074,60 euros ; le décompte actualisé au 22 juillet 2013 est arrêté à la somme de 367.547,31 euros dont 323.126,73 euros en principal.

Mais la Sarl Argentifolia produit aux débats un « tableau d'amortissement valant facture » établi et adressé par l'UCB le 10 février 2008 pour les trois mois suivants, prévoyant 3 échéances fixes de 4.721,20 euros ayant chacune une part d'intérêts différente, le taux d'intérêts annoncé étant de 6,54 % et la somme restant due après échéance du 10 mai 2008 était portée pour 309.739,14 euros ; or selon le décompte de déchéance du terme produit par l'UCB elle serait à cette date de 386.638,82 euros et le taux serait fixe de 4,88 % depuis février 2003 en conséquence de la déchéance du terme.

Interrogée sur le montant de sa créance à l'occasion d'une cession de parts de la Sarl Argentifolia, l'UCB a indiqué que les sommes dues au 10 janvier 2008 étaient de « retard 74.041,88 euros, capital 321.654,79 euros » ; il n'est nullement fait état de l'exigibilité acquise de ce capital, et la créance totale indiquée est de 395.696,67 euros, alors que selon le décompte de déchéance du terme produit par l'UCB elle serait à cette date de 399.145,55 euros.

la SA BNP Paribas Personal Finance produit elle-même une « situation de compte au 9 décembre 2011 » établie par ses soins, qui reprend les opérations enregistrées depuis l'origine jusqu'au 11 décembre 2008. Ce document récapitule sur toute cette période les sommes régulièrement portées au débit le 10 de chaque mois (date d'exigibilité des échéances mensuelle prévue au contrat), celles-ci sont toujours qualifiées d'échéances avec indication du mois correspondant.

Les montants portés au débit chaque mois sous cette qualification ne comportent aucune distinction principal/intérêts. Le montant en est fixe, de 4.721,20 euros et ce depuis l'échéance de septembre 2002, ce qui ne correspond pas à la date de déchéance du terme revendiquée par la SA BNP Paribas Personal Finance, jusqu'au mois de septembre 2008 date à laquelle il passe à 4.812,77 euros.

Aucun élément n'est produit sur l'évolution du taux variable depuis l'origine. La fixité de ces échéances à compter de cette date ne permet nullement d'établir que le taux d'intérêt serait devenu fixe en conséquence d'une déchéance du terme ; elle peut s'expliquer simplement par une baisse des taux de référence sur cette période, car il est stipulé au contrat qu'en cas de baisse de taux le montant du règlement ne baissera pas ainsi l'emprunteur remboursera plus rapidement le crédit.

A partir de l'échéance de décembre 2002, sont débitées chaque mois des indemnités de retard correspondant à 10% du montant de l'échéance, que les stipulations du contrat de prêt ne permettent pas de justifier ; trois d'entre elles sont annulées après un versement de 30.520,31 euros en janvier 2004 ; elles ne sont plus appliquées à partir de janvier 2004 et jusqu'à la dernière opération figurant sur ce relevé, du 11 décembre 2008, période pendant laquelle la Sarl Argentifolia jusqu'en septembre 2008, a repris le paiement régulier des échéances mensuelles, et ce alors même que le solde demeure débiteur.

Le solde débiteur porté chaque mois sur la dernière colonne du tableau correspond toujours exclusivement au cumul des échéances impayées et indemnités de retard, sans aucune modification de ce mode de calcul au mois de février 2003 ni à aucun autre moment avant la dernière opération portée sur ce document en décembre 2008, date à laquelle le solde débiteur est mentionné pour 88.480,19 euros ; ce qui exclut toute exigibilité anticipée, puisque selon le décompte de déchéance du terme produit par l'UCB sa créance en principal serait alors de 373 937,97 euros.

L'ensemble des éléments ci-dessus réunis suffit à démontrer qu'en réalité la déchéance du terme n'a pas eu lieu en février 2003.

Pour autant la SA BNP Paribas Personal Finance dispose indiscutablement d'une créance permettant le recours à la présente procédure.

Les retards de règlements et le solde débiteur existant et non discuté en son principe n'est pas discuté justifient la mise en œuvre de la déchéance du terme telle que la SA BNP Paribas Personal Finance en a manifesté clairement la volonté et à laquelle elle peut recourir sans formalité ; mais au vu de ces mêmes éléments, celle-ci doit être fixée au 10 septembre 2009.

Il en résulte que la SA BNP Paribas Personal Finance doit rétablir un décompte de sa créance,

- en reprenant jusqu'au 10 septembre 2009, le détail du montant des échéances mensuelles déterminé conformément aux conditions définies par le contrat, avec justification de l'évolution du taux d'intérêt, et imputant à leur date chacun des règlements reçus, permettant de justifier des sommes restant dues en principal et intérêts à la date du 10 septembre 2009 ;

- en appliquant les sanctions de la défaillance de la Sarl Argentifolia telles que précisément stipulées au contrat ;

- en imputant à partir du 10 septembre 2009 chacun des règlements reçus en priorité sur les intérêts, par application des dispositions de l'article 1254 du code civil.

* * *

La Sci Argentifolia soutient que le délai de quatre mois est insuffisant pour parvenir à la vente amiable, dans le contexte particulier du bien se trouvant au sein d'une copropriété pour laquelle des administrateurs provisoires ont été désignés et ont accompli leurs missions dans des conditions chaotiques justifiant l'engagement d'une procédure actuellement en cours en vue de la désignation d'un administrateur ad'hoc.

Statuant sur la seule demande d'autorisation de vente amiable qui lui était soumise, le premier juge y a fait droit, dans les limites imposées par l'article R. 322-21 du code des procédures civiles d'exécution, qui prévoit que le juge qui autorise la vente amiable (...) fixe la date de l'audience à laquelle l'affaire sera rappelée dans un délai qui ne peut excéder quatre mois, et qu'à cette audience le juge ne peut accorder un délai supplémentaire que si le demandeur justifie d'un engagement écrit d'acquisition et qu'à fin de permettre la rédaction et la conclusion de l'acte authentique de vente, pour un délai qui ne peut excéder trois mois.

Ce délai pour parvenir à la vente amiable ne peut être prolongé en dehors des conditions ci-dessus rappelées qui ne sont pas remplies ; le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'ayant autorisé la vente amiable, il a suspendu le cours de la procédure pour une durée maximum de quatre mois.

Les dépens d'appel seront réservés.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire partiellement avant dire droit,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le montant retenu de la créance de la partie poursuivante est de 367.547,31 euros outre les intérêts au taux fixe de 4,88 % l'an sur 303.686,98 euros à compter du 23 juillet 2013 et les intérêts au taux légal sur l'indemnité d'exigibilité de 7 %, de 37.243,30 euros à compter du 28 avril 2014 ;

Confirme le jugement entrepris pour le surplus ;

Statuant à nouveau du chef infirmé,

Dit que la SA BNP Paribas Personal Finance dispose à l'encontre de la SA BNP Paribas Personal Finance d'une créance permettant le recours à la présente procédure de saisie immobilière ;

Avant dire droit sur la fixation de son montant, ordonne la réouverture des débats ;

Fait injonction à la SA BNP Paribas Personal Finance de communiquer et produire, un décompte de sa créance,

- en reprenant jusqu'au 10 septembre 2009, le détail du montant des échéances mensuelles déterminé conformément aux conditions définies par le contrat, avec justification de l'évolution du taux d'intérêt, et imputant à leur date chacun des règlements reçus, permettant de justifier des sommes restant dues en principal et intérêts à la date du 10 septembre 2009 ;

- en appliquant les sanctions de la défaillance de la Sarl Argentifolia telles que précisément stipulées au contrat ;

- en imputant à partir du 10 septembre 2009 chacun des règlements reçus en priorité sur les intérêts, par application des dispositions de l'article 1254 du code civil ;

Renvoie la cause et les parties à la conférence du 24 février 2016 - 13 h 30 ;

Réserve les dépens.

Le Greffier                Le Président