CA VERSAILLES (1re ch. 2e sect.), 29 mars 2016
CERCLAB - DOCUMENT N° 5565
CA VERSAILLES (1re ch. 2e sect.), 29 mars 2016 : RG n° 14/08673
Publication : Jurica
Extrait : « La SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXIS, qui allègue n'être qu'une centrale de recherche de taxi et non de réservation de taxi et n'être tenue que d'une obligation de moyens, ne justifie pas de l'impossibilité de trouver un taxi, alors que la demande de course vers l'aéroport de Roissy lui avait été présentée plus de treize heures avant le départ, ni en particulier avoir répercuté la demande de la course de Monsieur X. auprès des chauffeurs de taxi affiliés à son groupe et des réponses négatives qui lui auraient été apportées.
Elle ne démontre pas que les conditions générales de vente ont été portées à la connaissance de Monsieur X. et lui seraient opposables. Elle n'explique pas non plus, la raison pour laquelle elle n'a averti Monsieur X. de son impossibilité d'exécuter la commande, que quatre minutes avant le départ. En tout état de cause, la clause exonératoire de responsabilité figurant à l'article 4 des conditions générales de vente est réputée non écrite, conformément aux articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de la consommation. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
PREMIÈRE CHAMBRE DEUXIÈME SECTION
ARRÊT DU 29 MARS 2016
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 14/08673. Code nac : 56C. CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 octobre 2014 par le Tribunal d'Instance d'ASNIERES : R.G. n° 11-13-002.
LE VINGT NEUF MARS DEUX MILLE SEIZE, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANT :
Monsieur X.
représenté par Maître Véronique B.-R. de la SCP B.-R.-DE C., Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 32514, assisté de Maître Dimitri B., Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1817
INTIMÉE :
SA SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXI (SNGT)
prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège, N° SIRET : XXX, représentée par Maître Raphaël M. de la SELARL M. & P., Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 393 - N° du dossier 14RM1838 ; assistée de Maître Michel B. de la SCP B.--I. ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0260
Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 3 septembre 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Mme Claire MORICE, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : M. Serge PORTELLI, Président, Mme Claire MORICE, Conseiller, Mme Véronique CATRY, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Pierre QUINCY,
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Le 19 juin 2013, Monsieur X. a commandé par téléphone un taxi auprès de la SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXIS (SNGT), exploitant l'enseigne TAXIS G 7, pour le lendemain matin, à 7 heures 45, pour prendre un vol à destination de Saint-Pétersbourg à l'aéroport ROISSY-CHARLES DE GAULLE.
Le matin même, un téléconseiller de la société G7 l'a prévenu à 7 heures 41, soit 4 minutes avant le départ prévu, qu'aucun taxi n'était disponible dans son secteur, puis l'a informé à 8 heures 19, qu'il était mis fin aux recherches de taxi.
L'annulation était confirmée par courriel à midi 53.
Le 29 novembre 2013, Monsieur X. a fait assigner la SNGT aux fins d'obtenir, sous bénéfice de l'exécution provisoire, la nullité de la clause exonératoire de responsabilité figurant dans les conditions générales de service de la SNGT, car abusive et que la responsabilité de la SNGT soit engagée sur le plan contractuel, à défaut d'avoir fourni la prestation attendue. Il a sollicité sa condamnation à lui payer la somme de 7.605 euros à titre de dommages avec capitalisation des intérêts, celle de 500 euros, « au titre du préjudice liée au contrôle et au traitement des consommations non contractualisées » et celle de 2.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sa condamnation aux dépens.
La SNGT a conclu au débouté, en se fondant sur les conditions générales acceptées tacitement par Monsieur X. et sur les intempéries survenues en Ile de France, qui constituaient un cas de force majeure. A titre subsidiaire, elle a demandé de limiter le préjudice de celui-ci à la somme de 605 euros.
Le tribunal d'instance d'Asnières, par jugement du 28 octobre 2014, a débouté Monsieur X. de toutes ses demandes. Il a considéré que la SNGT n'était tenue que d'une obligation de moyens de rechercher un taxi, conformément aux conditions générales de service accessibles sur son site internet et que sa responsabilité contractuelle ne pouvait être engagée. Il a ajouté que les intempéries sévissant ce jour là avaient constitué un cas de force majeure, l'exonérant de toute responsabilité, conformément à l'article 4 des mêmes conditions générales ; il a estimé que ladite clause n'était pas abusive, ne s'agissant pas d'une exclusion totale de responsabilité. Il a condamné Monsieur X. à payer à la société nouvelle groupement taxis (SNGT) la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamné aux dépens de l'instance.
Monsieur X. a interjeté appel de cette décision le 3 décembre 2014.
Par conclusions du 3 mars 2015, il demande à la Cour de :
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Et statuant à nouveau,
- dire et juger nulle comme abusive la clause exonératoire de responsabilité figurant dans les conditions générales de service de la société SNGT,
- dire et juger qu'en étant incapable de fournir la prestation prévue, la société SNGT a commis une faute de nature à engager sa responsabilité contractuelle,
- en conséquence, condamner la société SNGT à payer à Monsieur X. la somme de 7.605 euros à titre de dommages et intérêts,
- ordonner la capitalisation des intérêts échus pour une année entière conformément à l'article 1154 du code civil et ce à compter de la date de signification de l'assignation,
- condamner la société SNGT à payer à Monsieur X. une somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens, en ce compris les coûts de constat de l'huissier qui seront recouvrés par Maître Véronique B.-R., avocat associé de la SCP B.-R. et de C. conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions du 27 avril 2015, la SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXIS (SNGT) demande à la Cour de :
A titre principal :
- confirmer le jugement rendu le 9 septembre 2014 par le tribunal d'instance d'Asnières,
- débouter Monsieur G. de l'ensemble de ses demandes en l'y déclarant mal fondé,
A titre subsidiaire et si par extraordinaire la Cour considérait que la responsabilité de la SNGT est engagée :
- dire et juger que le préjudice subi par Monsieur G. ne saurait être supérieur à la somme de 605 euros,
- condamner la SNGT à ne payer qu'une somme de 605 euros au profit de Monsieur G.,
En tout état de cause :
- condamner Monsieur G. au paiement d'une indemnité de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 juin 2015.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Monsieur X., qui demande l'infirmation du jugement, allègue, au soutien de son appel, qu'il pensait avoir commandé un taxi pour prendre un vol à Roissy, puisque la SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXIS (SNGT) se présentait comme un service de réservation. Il prétend qu'il n'a su, à aucun moment, que cette société n'était tenue que d'une obligation de moyen de rechercher un taxi, puisqu'il n'avait pas accepté les conditions générales de service, qui n'étaient accessibles que sur internet. Il estime que lesdites conditions générales de service qui excluent totalement la responsabilité de la société, constituent une clause abusive. Il demande réparation de ses préjudices, ayant dû racheter un billet d'avion le lendemain et payer une la nuit d'hôtel et perdu une journée sur place et des rendez-vous programmés, lui causant un préjudice d'image et financier dans ses relations commerciales.
De son côté, la SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXIS (SNGT) qui demande la confirmation du jugement affirme qu'elle n'est tenue que d'une obligation de moyen, à savoir celle de rechercher un taxi, comme il est indiqué dans ses conditions générales de service, aisément accessibles sur internet et donc opposables à l'appelant. Elle fait valoir qu'en tout état de cause, les mauvaises conditions météorologiques le jour du vol constituaient un cas de force majeure, l'exonérant de toute responsabilité. Enfin, elle soutient que cette clause d'exonération de responsabilité n'est pas abusive, puisqu'elle n'est pas totale.
Il ressort des éléments du dossier, en particulier du constat d'huissier du 20 juin 2013 dressé à 14 heures 30 que Monsieur X., qui avait acheté le 4 avril 2013 un vol pour Saint Pétersbourg partant de Roissy le 20 juin à 10 heures 20, avait réservé un taxi à 7 heures 45 auprès de la centrale téléphonique de la SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXIS la veille à 18 heures 03 et s'était acquitté auprès d'elle d'une somme de deux euros.
Ce n'est que quatre minutes avant l'heure du départ programmé que la SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXIS l'a informé qu'elle n'avait pas taxi disponible, ce qui l'a privé de la possibilité de trouver un autre taxi auprès des autres compagnies de taxis qu'il a alors contactées ce qui lui a fait manquer son vol et l'a obligé à acheter un nouveau billet et une nouvelle nuit d'hôtel.
La SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXIS, qui allègue n'être qu'une centrale de recherche de taxi et non de réservation de taxi et n'être tenue que d'une obligation de moyens, ne justifie pas de l'impossibilité de trouver un taxi, alors que la demande de course vers l'aéroport de Roissy lui avait été présentée plus de treize heures avant le départ, ni en particulier avoir répercuté la demande de la course de Monsieur X. auprès des chauffeurs de taxi affiliés à son groupe et des réponses négatives qui lui auraient été apportées.
Elle ne démontre pas que les conditions générales de vente ont été portées à la connaissance de Monsieur X. et lui seraient opposables. Elle n'explique pas non plus, la raison pour laquelle elle n'a averti Monsieur X. de son impossibilité d'exécuter la commande, que quatre minutes avant le départ. En tout état de cause, la clause exonératoire de responsabilité figurant à l'article 4 des conditions générales de vente est réputée non écrite, conformément aux articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de la consommation.
La SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXIS doit donc être tenue d'indemniser Monsieur X. à hauteur de 605 euros, pour le billet d'avion et la première nuit d'hôtel. Le jugement entrepris est donc infirmé sur ce point.
Il convient de débouter Monsieur X. de sa demande d'allocation de la somme de 7.000 euros en réparation d'un préjudice d'image et financier dans ses relations commerciales locales, qui n'est pas justifiée.
La SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXIS, qui succombe, doit être condamnée à payer Monsieur X. une somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ainsi qu'aux dépens des deux instances.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Et statuant à nouveau,
Déclare nulle comme abusive la clause exonératoire de responsabilité figurant à l'article 4 des conditions générales de service de la SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXIS,
Dit que la SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXIS a engagé sa responsabilité contractuelle, en n'exécutant pas la prestation prévue,
Condamne la SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXIS à payer à Monsieur X. la somme de 605 euros à titre de dommages et intérêts,
Ordonne la capitalisation des intérêts échus pour une année entière conformément à l'article 1154 du code civil et ce à compter de la date de signification de l'assignation,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Condamne la SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXIS à payer à Monsieur X. une somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais exposés en première instance et en cause d'appel,
Condamne la SOCIÉTÉ NOUVELLE GROUPEMENT TAXIS aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les coûts de constat de l'huissier qui seront recouvrés par Maître Véronique B.-R., avocat associé de la SCP B.-R. et de C., conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Serge PORTELLI, Président et par Madame QUINCY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,
- 5741 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Conséquences sur l’issue du litige - Droits et obligations du professionnel
- 6086 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Opposabilité des conditions générales - Clauses inconnues du consommateur
- 6114 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du professionnel - Clauses limitatives et exonératoires - Droit postérieur au décret du 18 mars 2009 (R. 212-1-6° C. consom.)
- 6459 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Transport - Transport routier de voyageurs - Taxi