5886 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères combinés : rapport direct et compétence juridique
- 5880 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères alternatifs : compétence
- 5881 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères alternatifs : identité de spécialité
- 5885 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères combinés : rapport direct et compétence
- 5913 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus en vue d’une activité - Adjonction d’une activité supplémentaire : principes
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 5886 (4 février 2022)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION
DOMAINE D’APPLICATION - PERSONNES BÉNÉFICIAIRES DE LA PROTECTION
PROFESSIONNELS CONTRACTANT À L’OCCASION DE LEUR ACTIVITÉ
CRITÈRES- CLAUSES ABUSIVES - CRITÈRES COMBINÉS - RAPPORT DIRECT ET COMPÉTENCE JURIDIQUE
Présentation. Certaines des décisions consultées combinent rapport direct ou besoins de l’activité, avec le critère de la compétence, mais en adoptant une conception plus étroite et plus juridique de celui-ci. Ces décisions posent en effet, sous des formulations différentes, le principe selon lequel tout commerçant ou tout professionnel dispose d’une compétence minimale pour gérer ses affaires, ce qui lui donne une certaine aptitude pour apprécier l’opportunité, le contenu juridique ou encore le prix du contrat, même en dehors de son domaine de spécialité. Logiquement, ces décisions refusent souvent l’octroi de la protection. N.B. En matière de clauses abusives, elles peuvent aboutir à un raisonnement visant une clause particulière et non plus le contrat dans son ensemble.
Juges du fond : exclusion de la protection. V. pour les juges du fond, excluant la protection contre les clauses abusives (avant 2016) ou le démarchage (avant la loi du 17 mars 2014) au motif que le professionnel disposait d’une compétence juridique suffisante pour apprécier l’opportunité et le contenu du contrat : CA Versailles (13e ch.), 27 novembre 2018 : Dnd (clauses abusives ; prêt « toxique » souscrit par un centre hospitalier universitaire, qui ne peut être qualifié de non-professionnel, dès lors que les emprunts ont été contractés dans le cadre de son activité professionnelle pour la réalisation de ses investissements et que, compte tenu des compétences qu'il a acquises, de ses facultés d'analyse et d'expertise et de ses pouvoirs de négociations vis-à-vis de la banque, qui n'était pas son seul prêteur, il ne peut être considéré comme étant dans une situation d'infériorité à l'égard de cet organisme bancaire), moyen non admis par Cass. com., 3 février 2021 : pourvoi n° 19-13015 : arrêt n° 114 ; Cerclab n° 8802 - CA Aix-en-Provence (3e ch. A), 1er décembre 2016 : RG n° 15/05893 ; arrêt n° 2016/437 ; Cerclab n° 6561 (clauses abusives ; location de deux grues et d’une nacelle par un professionnel de la ferraille, afin de procéder au démontage de matériels en exécution d’un marché conclu avec le port de Marseille ; « il est établi, que peut être considéré comme non-professionnel, le professionnel qui sort de son domaine d'activité, « quand il se trouve dans le même état d'ignorance que n'importe quel autre consommateur » » ; caractère abusif écarté dès lors que la clause prévoyant l'application d'un intérêt de retard en cas de facture impayée, n'est pas en relation avec l'activité de chacune des entreprises concernées et est à même d'être appréhendée, s'agissant de sanction en cas de non-paiement d'une facture dans les délais, par n'importe quel consommateur ou professionnel), sur appel de T. com. Marseille, 5 janvier 2015 : RG n° 2014/00431 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 11), 15 janvier 2010 : RG n° 07/17425 ; arrêt n° 9 ; Cerclab n° 2477 (clauses abusives ; SCP d’avocat envoyant un Chronopost ; la clause ayant pour effet de limiter les effets de la perte de l'objet transporté ne suppose pas d’interprétation pour être comprise par le client ; de plus ce dernier est un professionnel lequel, même dans un domaine qui n'est pas strictement le sien, était compétent pour comprendre le sens et la portée de la clause) - CA Orléans, 22 janvier 2009 : RG n° 08/02693 ; Cerclab n° 2680 (clauses abusives ; contrat conclu entre sociétés commerciales ; location d’espace publicitaire sur le parking d’un centre commercial par un marchand de meubles de cuisines et salles de bains ; la location d'espaces publicitaires, dépourvue de toute technicité, entre dans le domaine usuel des prestations auxquelles recourent les professionnels de l'agencement de cuisines et salles de bains) - CA Paris (7e ch. A), 14 novembre 2006 : RG n° 05/04490 ; Cerclab n° 779 ; Juris-Data n° 2006-326695 (clauses abusives ; cadre de l’activité et compétence ; souscription d’une assurance complémentaire santé par une grande enseigne de vente de meubles, pour ses salariés ; dotée de services juridiques et en raison du nombre de ses salariés, la société ne peut prétendre être ignorante dans le domaine de la protection contre les risques de santé) - CA Aix-en-Provence (2e ch.), 20 septembre 2006 : RG n° 05/09886 ; arrêt n° 2006/444 ; Cerclab n° 719 ; Juris-Data n° 2006-325835 (clauses abusives ; rapport direct et compétence ; télésurveillance d’un bar-café ; la prise en compte de l’état d'ignorance concerne uniquement les aspects techniques de la prestation de services offerte ou du bien fourni et non la nature et la portée des engagements exclusivement juridiques souscrits par le commerçant ; contractant compétent pour apprécier la clause d’une durée de 48 mois) - T. com. Lyon, 6 juin 2006 : RG n° 2004/01548 ; Cerclab n° 3255 (clauses abusives ; télésurveillance des locaux d’une société ; la signature de contrats de télésurveillance et de location de matériel destiné à la surveillance de ses locaux professionnels fait partie des connaissances que doit avoir l'entreprise locataire ; contractant compétent pour apprécier la clause d’une durée de 48 mois), sur appel CA Lyon (3e ch. civ. section B), 15 novembre 2007 : RG n° 06/05870 ; Legifrance ; Cerclab n° 1208 ; Lamyline (argument non repris ; exclusion de la protection, le contrat ayant été conclu pour les besoins de l’activité) - CA Dijon (ch. civ. B), 28 février 2006 : RG n° 05/00484 ; arrêt n° 148 B ; Cerclab n° 627 ; Juris-Data n° 2006-294745 (clauses abusives ; rapport direct, conclusion en qualité de commerçante et compétence ; télésurveillance d’un débit de boissons ; l'appelante qui est une professionnelle de la vente et qui a contracté en cette qualité ne peut prétendre être dans la même situation de déséquilibre économique qu'un consommateur ordinaire vis-à-vis de son co-contractant vendeur professionnel ; en sa qualité de commerçante elle était tout à fait apte à apprécier, avant de signer les contrats, l'étendue des obligations réciproques des parties qui en découleraient) - CA Paris (8e ch. A), 26 novembre 2002 : RG n° 2001/22335 ; Cerclab n° 901 ; Juris-Data n° 2002-209301 (clauses abusives : rapport direct, besoins de l’activité, conclusion en qualité de commerçant ; télésurveillance d’une librairie papeterie ; l'argument selon lequel le client n'aurait pas été un spécialiste de la télésurveillance est spécieux, des connaissances techniques dans ce domaine n'ayant aucun caractère déterminant pour la conclusion d'un contrat dont il convenait seulement d'examiner l'opportunité et les contraintes financières et juridiques qu'il comportait, examen qui entrait dans la sphère de compétence du commerçant concerné) - T. com. Paris (7e ch.), 12 mars 2002 : RG n° 2000046116 ; Cerclab n° 309 ; Juris-Data n° 2002-176650 (clauses abusives ; location d’un distributeur de boissons par un comité d’entreprise ; clauses litigieuses usuelles, le comité ne pouvant invoquer l'incompétence juridique du secrétaire ayant signé le contrat, pour prétendre que sa bonne foi a été surprise, alors qu’il lui appartenait en cas de doute de prendre conseil) - T. com. Paris (1re ch.), 24 juin 2002 : RG n° 2001/002125 ; Cerclab n° 311 (clauses abusives ; télésurveillance des locaux d’une société ; il n’est pas nécessaire d’être un professionnel du secteur de la sécurité pour pouvoir évaluer les conséquences juridiques d’un engagement dans un contrat de location d’un équipement de télésurveillance), sur appel CA Paris (5e ch. B), 12 juin 2003 : RG n° 2002/19722 ; Cerclab n° 876 (existence d’un rapport direct) - CA Montpellier (2e ch. A), 25 mars 1999 : RG n° 98/0001264 ; Cerclab n° 948 ; Lamyline (démarchage ; rapport direct et compétence ; location d’un lecteur de chèques par un vendeur d’informatique ; il n'était pas nécessaire de disposer de compétences particulières pour pouvoir apprécier, compte tenu de la simplicité du matériel loué, l'opportunité ou le prix du contrat proposé) - CA Montpellier (2e ch. A), 3 décembre 1998 : RG n° 97/0006242 ; Cerclab n° 949 ; Lamyline (démarchage ; rapport direct et compétence ; location d’un lecteur de chèques par un restaurant ; même argument), infirmant T. com. Perpignan 27 octobre 1997 : RG n° 96/841 ; Cerclab n° 247 (cadre de l’activité spécifique) - CA Montpellier (2e ch. A), 1er octobre 1998 : RG n° 98/0001724 ; Cerclab n° 950 ; Lamyline (démarchage ; télésurveillance d’un snack-bar ; même argument), infirmant T. com. Rodez, 13 janvier 1998 : RG n° 97/000313 ; Cerclab n° 252 (besoins de l’activité et compétence ; client dans le même état d’ignorance d’un consommateur) - CA Rennes (2e ch.), 19 mars 1997 : RG n° 95/04296 ; arrêt n° 301 ; Cerclab n° 1823 ; Juris-Data n° 1997-045870 ; Bull. inf. C. cass. 15 septembre 1997, n°457, p.30 (démarchage ; télésurveillance d’un salon de coiffure ; rejet de l’argument tiré de l’incompétence, « un commerçant étant nécessairement conduit à souscrire des contrats échappant à sa compétence professionnelle »), infirmant T. com. Saint-Nazaire, 22 février 1995 : RG n° 94/0417 ; Cerclab n° 262 (compétence) - CA Paris (5e ch. B), 30 mars 1995 : RG n° 93-24116, 94-17543 et 95-1318 ; Cerclab n° 1294 ; Juris-Data n° 1995-021356 (démarchage ; boulanger souscrivant un contrat d’aide à l’organisation de l’entreprise ; l'activité professionnelle d'un artisan ne se limite pas à la simple mise en œuvre de ses connaissances techniques ; l'artisan gère une entreprise ; il doit avoir la compétence nécessaire pour prendre les initiatives de gestion indispensables telles que le recours à l'assistance d'un comptable ou d'un conseil en organisation de son activité professionnelle), confirmant T. com. Montereau, 20 juillet 1993 : RG n° 92/1550 ; Cerclab n° 234 (rapport direct, besoins de l’activité et compétence ; mission essentiellement pragmatique accessible aux dirigeants d'entreprises)..
Une commune, qui a acheté un terrain en friche à une entreprise, en acceptant la charge de sa dépollution, ne peut être assimilée à un non-professionnel ou à un novice alors qu'elle bénéficie de services techniques et juridiques compétents pour réaliser ce type de transaction en toute connaissance de cause, étant relevé que la friche industrielle acquise a été mise en vente dans une agence immobilière à plus de 300.000 euros, après avoir été achetée pour un franc. CA Amiens (1re ch. sect. 1), 15 novembre 2012 : RG n° 11/04121 ; Cerclab n° 4047 (terrain intégré dans le domaine privé de la commune avant d’être revendu à une communauté de communes ; clause au surplus non abusive), sur appel de TGI Soissons (réf.), 2 septembre 2011 : ord. n° 11/60 ; Dnd.
V. aussi sous l’empire de la loi du 10 janvier 1978, qui exigeait que la clause ait été imposée par un abus de puissance économique : T. com. Paris (15e ch.), 8 septembre 1995 : RG n° 92/27844 ; Cerclab n° 291 (clauses abusives, L. 10 janvier 1978 ; évaluation de biens immobilier d’une société spécialisée dans la vente de cycles ; le contrat ayant été conclu entre deux professionnels dont la puissance économique est comparable, il n'y a pas lieu de faire application de la loi sus-visée, même si la compétence de l’une des parties est étrangère au domaine de l'assurance, la compréhension des clauses du contrat ne nécessitant aucune technicité particulière), sur appel CA Paris (25e ch. B), 19 décembre 1997 : RG n° 95/26819 ; arrêt n° 304 ; Cerclab n° 1106 (existence d’un rapport direct), arrêt cassé pour un motif procédural concernant un autre moyen, préalable, par Cass. civ. 1re, 26 avril 2000 : pourvoi n° 98-14212 ; Cerclab n° 2044 - CA Bourges (1re ch.), 25 novembre 1992 : RG n° 1475/91 ; arrêt n° 892 ; Cerclab n° 3290 ; Juris-Data n° 1992-045997 (clauses abusives, L. 10 janvier 1978 ; PDG d’une SA exploitant une laiterie concluant un contrat de fourniture d’électricité ; PDG contractant en qualité de professionnel avisé et compétent, pour l’exercice de son activité).
Rappr. pour la connaissance des conditions générales : CA Nancy (2e ch. com.), 24 septembre 2008 : RG n° 06/02072 ; arrêt n° 2115/08 ; Cerclab n° 1476 (l’appelant, qui exploite un cabinet d'assurances, placements, prêts immobiliers, est nécessairement un professionnel averti en matière de droit des contrats et de comptabilité ; il lui appartenait donc s'il avait à se plaindre d'un vice caché ou du mauvais fonctionnement du photocopieur loué, d'exercer tous droits et actions en garantie contre le constructeur ou le fournisseur, comme le stipulait les conditions générales du contrat), sur appel de T. com. Épinal, 13 juin 2006 : RG n° 05/1863 ; Cerclab n° 2741 (problème non abordé).
Juges du fond : admission de la protection. V. cependant, pour les juges du fond, admettant l’application de la protection contre les clauses abusives ou le démarchage, sans retenir une compétence juridique minimale, par exemple : CA Toulouse (3e ch. correct.), 12 mai 1999 : RG n° 99/00074 ; arrêt n° 583 ; Cerclab n° 834 ; Juris-Data n° 1999-042731 (rapport direct et compétence ; publicité pour la vente de fonds de commerce de bars ou restaurants ; situation assimilable à des consommateurs, les spécialités des professionnels démarchés ne leur permettant pas d’évaluer les exigences des démarcheurs), confirmant sur ce point TGI Toulouse (3e ch. correct), 7 décembre 1998 : RG n° 96107930 ; jugt n° 1260/98 ; Cerclab n° 796 (idem).
Influence de la conclusion antérieure de contrats similaires. Certaines décisions, pour retenir la compétence, évoquent le fait que des contrats du même type avaient été déjà conclus précédemment. V. par exemple : CA Angers (1re ch. A), 27 septembre 2005 : RG n° 04/02266 ; arrêt n° 345 ; Cerclab n° 677 ; Juris-Data n° 2005-289883 (clauses abusives ; besoins de l’activité et compétence ; télésurveillance d’une boulangerie ; examen à titre subsidiaire de la compétence pour conclure à la compétence s’agissant du renouvellement d’un précédent contrat) - T. com. Nanterre (8e ch.), 24 février 2000 : RG n° 99/00558, n° 99/00559 et n° 99/02130 ; Cerclab n° 239 (démarchage ; compétence ; télésurveillance d’un hôtel restaurant ou d’un bar-tabac selon la cour ; déjà protégée par un système d’alarme, elle ne peut soutenir son incompétence professionnelle en la matière), confirmé avec d’autres motifs par CA Versailles (12e ch. A), 28 mars 2002 : RG n° 2000-3287 ; Cerclab n° 1724 ; Juris-Data n° 2002-249549 (existence d’un rapport direct) - CA Paris (25e ch. B), 6 octobre 1995 : RG n° 11280/94 ; Cerclab n° 1288 ; D. 1995. IR. 268 (clauses abusives ; compétence ; insertion d’annonce publicitaire ; une société, qui traite de manière habituelle et depuis plusieurs années avec une autre, en qualité de professionnelle de la téléphonie et pour les besoins de son entreprise, ne peut être considérée comme un profane ou un simple consommateur non averti des usages en matière de publicité), sur appel de T. com. Paris (1re ch. B), 7 février 1994 : RG n° 92/058697 ; Cerclab n° 279 (problème non abordé) - T. com. Paris (1re ch. B), 26 juin 1995 : RG n° 93/86761 ; Cerclab n° 289 ; Lamyline (clauses abusives, L. 10 janvier 1978 ; crédit-bail de matériel informatique conclu par une société commerciale avec son fournisseur habituel depuis plusieurs années ; refus de prendre en compte l’absence prétendue de compétence invoquée par le crédit-preneur). § V. aussi : CA Montpellier (2e ch. A), 22 octobre 2002 : RG n° 02/00289 ; Cerclab n° 932 ; Lamyline (démarchage ; rapport direct ; télésurveillance pour un garagiste ; rapport direct admis en constatant notamment l’existence de contrats antérieurs similaires, alors que le jugement avait admis la protection au motif que le contrat n’avait rien à voir avec son activité), infirmant T. com. Perpignan, 29 octobre 2001 : RG n° A0-2080 ; jugt n° 544.
Mais l’argument n’est pas systématiquement retenu : CA Versailles (1re ch. 2e sect.), 2 décembre 2008 : RG n° 07/06888 ; arrêt n° 582 ; Cerclab n° 2730 (démarchage ; rapport direct et compétence ; télésurveillance du siège social d’une entreprise individuelle de nettoyage situé au domicile personnel ; contrat en dehors de la compétence professionnelle, même s’il y en a eu d’autres avant).