5927 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Fourniture d’électricité ou de gaz
- 5926 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Fourniture d’eau
- 5871 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Notion d’activité professionnelle - Activité administrative
- 5928 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Fourniture de chaleur ou de froid
- 5925 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Immeubles - Contrats d’installation de panneaux photovoltaïques
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 5927 (18 juin 2023)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION
DOMAINE D’APPLICATION - PERSONNES BÉNÉFICIAIRES DE LA PROTECTION
PROFESSIONNELS CONTRACTANT À L’OCCASION DE LEUR ACTIVITÉ
ILLUSTRATIONS - CONTRATS CONCLUS PENDANT L’ACTIVITÉ – CONTRATS RELATIFS À L’ÉNERGIE : FOURNITURE D’ÉLECTRICITÉ OU DE GAZ, MATÉRIELS DE PRODUCTION ET DE STOCKAGE
Présentation. Les contrats de fourniture de gaz ou d’électricité constituent des contrats de vente à livrer ou immédiate (gaz en bouteille ou en citerne). Ils appellent des remarques, a priori, similaires à celles faites pour les contrats d’approvisionnement en eau (Cerclab n° 5926). L’énergie peut être nécessaire à l’activité spécifique du professionnel (alimentation de machines, chauffage de bâtiments d’élevage). Dans ce premier cas, notamment pour l’électricité, l’importance des tensions demandées ou la continuité spécifique de l’alimentation requises confèrent un caractère professionnel à l’objet même du contrat, dont le type est très différent de ceux proposés aux consommateurs. La fourniture d’énergie est également indispensable pour tous les locaux professionnels hébergeant le personnel de l’entreprise (éclairage, alimentation des ordinateurs et du réseau de communication, etc.). Pour les travailleurs à domicile, l’usage domestique sera sans doute considéré, là encore, comme prépondérant (sauf contrat dissociable ou alimentation d’intensité incompatible avec un usage domestique).
Article liminaire (ord. du 14 mars 2016 - loi du 21 février 2017). À compter de l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 14 mars 2016 (1er juillet 2016), la protection consumériste, notamment des clauses abusives, n’est éventuellement applicable que dans deux cas : 1/ la personne physique ou morale a une activité professionnelle autre qu’une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ; 2/ la personne physique ou morale exerce l’une de ces cinq activités, mais le contrat à été conclu à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de celle-ci. A compter de l’entrée en vigueur de la loi de ratification n° 2017-203 du 21 février 2017, les personnes morales ayant une activité professionnelle, quelle qu’elle soit, ne peuvent plus bénéficier d’une telle extension (sauf dérogation particulière telle que celle prévue à l’art. L. 221-3. C. consom.).
Les contrats de fourniture de l’énergie nécessaire à l’activité spécifique entrent dans le cadre de toutes les activités concernées. Contrairement à l’eau à usage domestique, la solution risque d’être identique pour l’énergie (exemple de l’électricité indispensable à la téléphonie, à l’informatique et à la bureautique).
Cas particulier de l’art. L. 221-3 C. consom., anciennement art. L. 121-16-1-III (droit postérieur à la loi du 17 mars 2014). S’agissant de l’application l’art. L. 221-3 C. consom., modifiant l’ancien art. L. 121-16-1 C. consom., créé par la loi du 17 mars 2014, qui étend partiellement mais explicitement la protection « aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l’objet de ces contrats n’entre pas dans le champ de l’activité principale du professionnel sollicité », il semble que de tels contrats correspondent à l’activité principale lorsque l’énergie a une fonction dans sa réalisation, alors qu’une solution inverse pourrait être retenue lorsque tel n’est pas le cas (bureau ou siège social d’une entreprise industrielle ou agricole, par exemple). § Pour la jurisprudence prise en application de ce texte, V. Cerclab n° 5889. § Pour une exclusion de la protection : la fourniture de propane visant à assurer la cuisson des aliments dans le cadre de l'activité de restauration et à chauffer les locaux et l'eau dans le cadre de l'activité d'hôtellerie entre dans le champ d’une activité principale qui est l'hôtellerie et la restauration. CA Versailles (12e ch.), 6 mai 2021 : RG n° 19/06439 ; Cerclab n° 8937 (fonds de commerce d'hôtel et de restaurant, de plats à emporter et de traiteur), sur appel de T. com. Nanterre, 26 juillet 2019 : RG n° 2018F01628 ; Dnd. § V. aussi : CA Lyon (3e ch. A), 9 juin 2022 : RG n° 19/06093 ; Cerclab n° 9656 (batterie de condensateur pour un restaurant dont la société exploitante admet… qu’elle ne peut bénéficier du texte, ce que la cour considère comme exact sans autre explication), sur appel de T. com. Saint-Étienne, 9 juillet 2019 : RG n° 2016j00659 ; Dnd - CA Limoges (ch. écon. soc.), 25 mai 2023 : RG n° 22/00200 ; Cerclab n° 10284 (location longue durée d’une batterie de condensateur et d’un kit Led par un restaurateur ; texte inapplicable dès lors que le restaurateur, « de son propre aveu, indique avoir contracté pour les besoins de son activité commerciale » afin de réduire sa consommation en énergie électrique), sur appel de T. com. Limoges, 7 mars 2022 : Dnd.
En sens contraire, admettant la protection : CA Rennes (2e ch.), 4 mars 2022 : RG n° 20/04424 ; arrêt n° 152 ; Cerclab n° 9477 (fourniture et installation d'une batterie de condensateurs à un Gaec ayant une activité d'élevage de vaches laitières ; cette fourniture n'entre pas dans le champ de compétence du GAEC qui n’a pas de connaissance professionnelle particulière dans le domaine de ce contrat et dont l'économie n'apparait pas indispensable à l'exercice de son activité d'exploitant agricole et d'éleveur de vaches laitières), sur appel de TI Brest, 18 septembre 2018 : Dnd - CA Rennes (2e ch.), 27 janvier 2023 : RG n° 20/00074 ; arrêt n° 44 ; Cerclab n° 10051 (fourniture et installation d'une batterie de condensateur et de dix néons pour un GAEC en vue de réduire la consommation d'électricité de l'exploitation ; contrat n'entrant pas dans le champ de compétence du GAEC et dont l'économie n'apparaissait pas indispensable à l'exercice de son activité d'exploitant agricole et d'éleveur de vaches laitières), sur appel de TGI Brest, 4 décembre 2019 : Dnd - CA Lyon (6e ch.), 9 mars 2023 : RG n° 21/02216 ; Cerclab n° 10118 (location d’un « régulateur » par l’exploitant d’un débit de boissons pour économiser l’énergie ; « la fourniture de l'équipement électrique n'entrait pas dans le champ d'activité du restaurateur »), confirmant T. com. Saint-Étienne, 9 février 2021 : RG n° 2017J00036 ; Dnd.
N.B. Contrairement à l’eau, la fourniture d’énergie pourrait même être considérée comme se rattachant à l’activité spécifique des pures entreprises de services (banques, assurances, agences de voyages, etc.), y compris dans le cadre de l’ancien art. L. 121-16-1 C. consom.
Rappel de la situation (avant l’ord. du 14 mars 2016). Sur le plan des critères, comme pour l’eau, l’exclusion de la protection est certaine pour les critères étroits (contrats étrangers à l’activité, contrats conclus dans le cadre de celle-ci). S’agissant du critère du rapport direct, voire de celui des besoins de l’activité, l’exclusion est certaine pour la première fonction précédemment évoquée (en lien avec l’activité spécifique). Contrairement à l’eau, elle pourrait l’être aussi pour l’alimentation des immeubles des entreprises de services (pour les autres, la solution dépend du sort réservé à l’activité administrative de l’entreprise, Cerclab n° 5871). Le critère ancien de la compétence, quant à lui, pouvait aussi autoriser l’admission de la protection consumériste (dans les deux usages, de façon sans doute plus fréquente compte tenu de la technicité supérieure des prestations, notamment en matière électrique).
A. CONTRATS DE FOURNITURE
Cour de cassation : exclusion de la protection. Les dispositions de l’art. 35 de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978, devenu les anciens art. L. 132-1 et L. 133-1 C. consom. et l’art. 2 du décret du 24 mars 1978 ne s’appliquent pas aux contrats de fournitures de biens ou de services qui ont un rapport direct avec l’activité professionnelle exercée par le cocontractant ; rejet du pourvoi par substitution de motifs à ceux de la Cour d’appel qui avait exclu pour d’autres raisons l’application de la protection à un contrat de fourniture d’électricité haute-tension à un héliograveur. Cass. civ. 1re, 24 janvier 1995 : pourvoi n° 92-18227 ; arrêt n° 186 ; Bull. civ. I, n° 54 ; Cerclab n° 2083 ; D. 1995. 327, note Paisant ; D. 1995. somm. 239, obs. Delebecque ; ibid. 310, obs. Pizzio ; JCP 1995. I. 3893, n° 28, obs. Viney ; Contrats conc. consom. 1995, n° 84, note Leveneur (clauses abusives ; fourniture d’électricité haute-tension à un héliograveur).
Juges du fond : exclusion de la protection. Dans le même sens, pour les juges du fond, exluant l’application de la protection contre les clauses abusives (avant l’ordonnance du 14 mars 2016) ou le démarchage à domicile (avant la loi du 17 mars 2014) : CA Montpellier (2e ch.), 5 juin 2018 : RG n° 15/09598 ; Cerclab n° 7578 (démarchage et clauses abusives ; besoins de l'exploitation ; fourniture en vrac de propane à l’exploitant d’un camping), sur appel de T. com. Montpellier, 18 novembre 2015 : RG n° 2014020513 ; Dnd - CA Caen (2e ch. civ. et com.), 22 mai 2014 : RG n° 13/00300 ; Cerclab n° 4794 ; Juris-Data n° 2014-015603 (démarchage ; rapport direct ; fourniture de gaz, avec location de citerne, destinées au chauffage des bâtiments d'élevage d’une exploitation avicole ; la circonstance que l’éleveur ne soit plus en relation d’affaires avec son intégrateur est jugée inopérante, tout comme le fait que l’élevage ait subi une hécatombe), sur appel de TI Lisieux, 10 décembre 2012 : RG n° 11-12-000524 ; Dnd - CA Paris (1re ch. B), 14 juin 1996 : RG n° 95-14424 ; Cerclab n° 1279 ; Juris-Data n° 1996-021999 ; BRDA 1996, n° 18, p. 11 ; RJDA 1996/11, n° 1406 ; Gaz. Pal. 6 avril 1997 somm. (clauses abusives ; rapport direct et besoins de l’activité ; pisciculteur ; fourniture de courant nécessaire aux pompes électriques permettant la fourniture d’eau de mer pour les bassins de poissons), sur appel de TGI Paris (1re ch. 2e sect.), 30 mars 1995 : RG n° 5659/94 ; jugt n° 5 ; Cerclab n° 1641 (problème non abordé, application stricte de la clause limitative), pourvoi rejeté par Cass. civ. 1re, 30 juin 1998 : pourvoi n° 96-18713 ; Cerclab n° 3289 ; Cah. Jur. Élec. Gaz 1999. 158, note Camax-Morice (problème non examiné) - CA Rennes (2e ch.), 10 avril 1996 : RG n° 9405455 ; arrêt n° 421 ; Cerclab n° 1825 ; Juris-Data n° 1996-044661 (clauses abusives, L. 10 janvier 1978 ; rapport direct ; fourniture d’électricité pour un aviculteur élevant des poussins), confirmant T. com. Saint-Brieuc, 13 juin 1994 : RG n° 92/000836 ; Cerclab n° 254 (D. 24 mars 1978 ; conclusion en qualité de professionnel et non de profane) - CA Grenoble, 18 janvier 1996 : Cerclab n° 3102 ; Cah. Jur. Élec. Gaz 1997. 319 (clauses abusives, L. 10 janvier 1978 et D. 24 mars 1978 ; aviculteur concluant un contrat domestique de fourniture de courant pour une utilisation industrielle - élevage de poussins - sans prévenir EDF) - CA Bourges (1re ch.), 25 novembre 1992 : RG n° 1475/91 ; arrêt n° 892 ; Cerclab n° 3290 ; Juris-Data n° 1992-045997 (clauses abusives, L. 10 janvier 1978 ; PDG d’une SA exploitant une laiterie contractant en qualité de professionnel avisé et compétent, pour l’exercice de son activité), sur appel de T. com. Châteauroux, 27 février 1991 : RG n° 12343 ; Cerclab n° 194 (problème non abordé) - CA Nîmes (2e ch.), 8 mars 1990 : RG n° 88-1496 ; arrêt n° 211 ; Cerclab n° 1077 ; Petites affiches 15 août 1990, note L. Boy (clauses abusives, L. 10 janvier 1978 ; rapport direct et compétence ; usine de moulinage), infirmant T. com. Aubenas, 9 février 1988 : RG n° 84/633 ; jugt n° 97 ; Cerclab n° 2740 (protection accordée).
Juges du fond : admission de la protection. V. en sens contraire pour des décisions des juges du fond admettant la protection : CA Colmar (2e ch. civ.), 21 avril 2021 : RG n° 19/03988 ; arrêt n° 199/2021 ; Cerclab n° 8898 (clauses abusives ; identité de spécialité ; livraison de gaz naturel pour un exploitant agricole cultivant du tabac ; clause limitative de responsabilité abusive ; N.B. l’arrêt ajoute que si l’article préliminaire avait été applicable, l’agriculteur aurait eu la qualité de consommateur, puisque l’activité agricole n’était pas mentionnée), sur appel de TGI Colmar, 1er août 2019 : Dnd - CA Rennes (1re ch. B), 11 septembre 1998 : RG n° 9600313 ; arrêt n° 775 ; Cerclab n° 1814 ; Juris-Data n° 1998-047858 (clauses abusives ; rapport direct et besoins de l’activité ; fourniture de propane en vrac à un aviculteur, jugé nécessaire mais accessoire à l’activité d’élevage de volailles) - CA Bordeaux (1re ch. A), 2 juin 1997 : RG n° 04/006692 ; arrêt n° 3079 ; Cerclab n° 1040 ; Juris-Data n° 1997-048868 ; Bull. inf. C. cass. 1997, n° 1490 (clauses abusives, L. 10 janvier 1978 ; commune consommatrice ayant contracté avec une régie d’électricité en situation de monopole), sur appel de TGI Bordeaux (4e ch. civ.), 6 septembre 1994 : RG n° 3283/93 ; Cerclab n° 1008, (problème non examiné) - CA Angers (1re ch. B), 16 décembre 1987 : RG n° 658/86 ; arrêt n° 783 ; Cerclab n° 654 (clauses abusives, D. 24 mars 1978 ; compétence ; agriculteurs et horticulteurs utilisant le courant pour leurs serres), confirmant TGI Angers, 11 mars 1986 : RG n° 1906/1985 ; JCP 1987. II. 20789, note Gridel ; Cerclab n° 657. § Rappr. CA Rennes, 11 décembre 1997 : Creclab n° 1820 ; Cah. Jur. Élec. Gaz 1998. 358 (clause jugée « manifestement abusive », sans référence au droit de la consommation dans la version consultée, dans un contrat de maîtrise d’œuvre conclu pour la mise en place d’une nouvelle installation électrique ; fourniture permettant le chauffage du poulailler d’un aviculteur).
B. AUTRES CONTRATS
Dispositifs de stockage. V. aussi, dans le sens de l’exclusion de la protection pour des dispositifs de stockage d’énergie : CA Paris (pôle 5 ch. 10), 18 septembre 2017 : RG n° 15/06977 ; arrêt n° 17/268 ; Cerclab n° 7041 ; Juris-Data n° 2017-018977 (installation d'une batterie de condensateurs par une brasserie exploitée en SNC ; la nullité du contrat de commande rend caduc le contrat de « prêt » - N.B. en réalité location financière - s'agissant de contrats interdépendants), sur appel de T com. Créteil, 3 mars 2015 : RG n° 2014F00567 ; Dnd - CA Poitiers (1re ch. civ.), 12 octobre 2021 : RG n° 19/02998 ; arrêt n° 506 ; Cerclab n° 9173 (code de la consommation, démarchage ; besoins et cadre de l’activité ; location de matériel « contrôle Box et LED » pour un Gaec qui entendait rechercher une économie de sa consommation électrique ; N.B. l’arrêt vise l’anc. art. L. 121-22 alors que le contrat, conclu le 16 juin 2014, relevait de la loi du 17 mars 2014), sur appel de TGI Poitiers, 7 mai 2019 : Dnd.
Groupes électrogènes. V. aussi, dans le sens de l’exclusion de la protection pour l’achat de groupes électrogènes : CA Paris (25e ch. A), 6 décembre 2002 : RG n° 2001/18023 ; arrêt n° 503 ; Cerclab n° 900 ; Juris-Data n° 2002-196811 (clause abusives ; besoins de l’activité ; commande par une SA de groupes électrogènes pour exécuter un lot d’un marché de construction), sur appel de T. com. Paris (10e ch.), 3 mars 2000 : RG n° 98/036082 et n° 98/036327 ; Cerclab n° 302 (problème non abordé).
Panneaux photovoltaïques. V. Cerclab n° 5925.