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5940 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Financement de l’activité - Garanties et sûretés

Nature : Synthèse
Titre : 5940 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Financement de l’activité - Garanties et sûretés
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 5940 (13 mars 2023)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION

DOMAINE D’APPLICATION - PERSONNES BÉNÉFICIAIRES DE LA PROTECTION

PROFESSIONNELS CONTRACTANT À L’OCCASION DE LEUR ACTIVITÉ

ILLUSTRATIONS - CONTRATS CONCLUS PENDANT L’ACTIVITÉ

CONTRATS DE FINANCEMENT DE L’ACTIVITÉ - CONTRATS DE SÛRETÉ ET DE GARANTIE

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2023)

 

Présentation. Les professionnels sont fréquemment (pour ne pas dire systématiquement) tenus de fournir des garanties permettant de rassurer leur contractant. Présentée ainsi, la fourniture de sûretés semble être au cœur de l’activité du professionnel et en lien direct avec celle-ci. Néanmoins, la question se pose souvent différemment pour les sûretés personnelles, dès lors que le souscripteur de la sûreté n’est pas le professionnel, mais un tiers plus ou moins intéressé : dirigeant, associé, conjoint.

N.B. l’applicabilité de la protection contre les clauses abusives au contrat de cautionnement permet de contester les clauses déséquilibrées du contrat de cautionnement (Cerclab n° 6296), hypothèse qui doit être distinguée de l’invocation par une caution poursuivie, comme moyen de défense à l’action du créancier, du caractère abusif de clauses figurant dans le contrat principal (Cerclab n° 5853).

Article liminaire (ord. du 14 mars 2016 - loi du 21 février 2017). À compter de l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 14 mars 2016 (1er juillet 2016), la protection consumériste, notamment des clauses abusives, n’est éventuellement applicable que dans deux cas : 1/ la personne physique ou morale a une activité professionnelle autre qu’une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ; 2/ la personne physique ou morale exerce l’une de ces cinq activités, mais le contrat à été conclu à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de celle-ci. A compter de l’entrée en vigueur de la loi de ratification n° 2017-203 du 21 février 2017, les personnes morales ayant une activité professionnelle, quelle qu’elle soit, ne peuvent plus bénéficier d’une telle extension (sauf dérogation particulière telle que celle prévue à l’art. L. 221-3. C. consom.).

Les contrats constatant des garanties fournies par le professionnel sont conclus à des fins qui entrent dans le cadre de l’activité et la protection est inapplicable si cette activité est visée dans la liste légale de l’article liminaire.

La question est en revanche ouverte pour les sûretés personnelles et la réponse peut sans doute varier selon la qualité du garant (dirigeant, associé, tiers) et la nature de son intérêt.

Cas particulier de l’art. L. 221-3 C. consom., anciennement art. L. 121-16-1-III (droit postérieur à la loi du 17 mars 2014). S’agissant de l’art. L. 221-3 C. consom., anciennement l’art. L. 121-16-1-III C. consom., l’exclusion de principe de l’extension peut céder le cas échéant si le cantonnement d’une activité secondaire est admis ou si l’activité principale est prise dans un sens étroit. § Pour la jurisprudence prise en application de ce texte, V. Cerclab n° 5889.

Appréciation autonome par rapport au contrat principal ? Les décisions recensées apprécient le caractère professionnel de la sûreté de manière autonome, en analysant notamment la situation de la caution au regard du débiteur principal.

La CJCE, dans le cadre de la directive 85/577/CEE, a adopté une position contraire, en calquant la nature du contrat de cautionnement sur celle du contrat principal : l'art. 2, premier tiret, de la directive 85/577/CEE, du 20 décembre 1985, concernant la protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en dehors des établissements commerciaux doit être interprété en ce sens qu'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique n'agissant pas dans le cadre d'une activité professionnelle est exclu du champ d'application de la directive lorsqu'il garantit le remboursement d'une dette contractée par une autre personne agissant, quant à elle, dans le cadre de son activité professionnelle. CJCE (5e ch.), 17 mars 1998, Bayerische Hypotheken : Aff. C-45/96 ; Cerclab n° 4386 (selon l’arrêt si le contrat de cautionnement n’est pas exclu en tant que tel de la protection contre le démarchage à domicile, il découle du libellé de l'art. 1er de la directive ainsi que du caractère accessoire du cautionnement que seul peut relever de la directive un cautionnement accessoire à un contrat par lequel un consommateur s'est engagé, lors d'un démarchage à domicile, envers un commerçant en vue d'obtenir de lui des biens ou des services, point n° 22).

Dans le même sens, en droit interne : il ne saurait être soutenu, que les clauses du contrat principal de crédit-bail seraient abusives à l'égard de la caution du seul fait qu'elle n'en aurait pas eu connaissance au moment de son engagement, ni que celle-ci n'était pas une caution avertie faute d’être « un professionnel du cautionnement », alors qu'elle était dirigeant de la société cautionnée au moment ou il a signé son cautionnement, et décidait des engagements de la débitrice principale, que le contrat de crédit-bail avait un rapport direct avec l'activité de son entreprise, dont il avait parfaitement connaissance. CA Amiens (ch. écon.), 5 juin 2012 : RG n° 10/01094 ; Cerclab n° 3892 ; Juris-Data n° 2012-020381, sur appel de T. com. Saint-Quentin, 19 février 2010 : RG n° 2008/12270-1 ; Dnd. § Rappr. pour l’assurance garantissant la caution : CA Paris (pôle 2 ch. 5), 17 octobre 2017 : RG n° 16/17422 ; arrêt n° 2017/293 ; Cerclab n° 7103 (clauses abusives ; rapport direct avec l’activité ; application de la protection à l’assurance souscrite par la caution de l’engagement principal, en l’espèce un prêt à une SCI familiale en vue de l’acquisition des murs d’un restaurant et des parties communes d’un hôtel ; société constituée entre le mari, l’épouse et leurs enfants, l’épouse étant gérante et le mari caution, avec statut de conjoint collaborateur), sur appel de TGI Paris, 4 juillet 2016 : RG n° 13/12643 ; Dnd.

Cautionnement : exclusion de la protection. V. pour la Cour de cassation sous l’empire du droit antérieur à la loi du 17 mars 2014 : ayant relevé que le demandeur avait adhéré au contrat d'assurance de groupe litigieux en raison de l'engagement de caution qu'il avait souscrit pour garantir le prêt d'équipement consenti à la société dont il était le gérant, de sorte que ce contrat présentait un lien direct avec son activité professionnelle, la cour d'appel en exactement déduit, peu important la date d'immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés, que celui-ci n'avait pas la qualité de consommateur. Cass. civ. 1re, 7 décembre 2022 : pourvoi n° 20-21968 ; arrêt n° 880 ; Cerclab n° 9977 (gérant se portant caution en souscrivant une assurance de groupe pour des risques de décès, d'invalidité et d'incapacité de travail ; contrat d’assurance souscrit le 18 février dans la perspective d’un cautionnement personnel d’une société immatriculée le 24 mars, le prêt étant accordé le 5 mai), rejet du pourvoi contre CA Versailles (3e ch. civ.), 17 septembre 2020 : RG n° 19/03298 ; Dnd.

V. en ce sens, sous l’empire de l’art. 35 de la loi du 10 janvier 1978 : la loi n’est pas applicable à des cautions ayant la qualité d’associées de la société débitrice principale et ayant agi dans le cadre de leur activité professionnelle pour assurer le fonctionnement de la société dans laquelle elles avaient leurs intérêts. CA Riom (ch. civ. et com.), 2 octobre 1996 : RG n° 198/96 et 199/96 ; arrêt n° 427/96 ; Cerclab n° 608 ; JCP G 1997. I. 4033, chron. Droit des sûretés, n° 9, obs. Ph. Simler et Ph. Delebecque, sur appel de TI Vichy, 24 octobre 1995 : RG n° 344/95 ; jugt n° 432 ; Cerclab n° 169 (problème non abordé, clause écartée sur le fondement du droit commun en raison d’une absence d’acceptation expresse, explicite et sans équivoque) - CA Riom (ch. civ. et com.), 2 octobre 1996 : RG n° 200/96 ; arrêt n° 428/96 ; Cerclab n° 609 ; JCP G 1997. I. 4033, chron. Droit des sûretés, n° 9, obs. Ph. Simler et Ph. Delebecque, sur appel de TI Vichy, 26 décembre 1995 : RG n° 462/95 ; jugt n° 546 ; Cerclab n° 3288 (problème non abordé, clause écartée sur le fondement du droit commun en raison d’une absence d’acceptation expresse, explicite et sans équivoque).

Dans le même sens, sous l’empire de la loi du 1er février 1995 : CA Lyon (6e ch.), 18 novembre 2021 : RG n° 21/02539 ; Cerclab n° 9260 (clauses abusives ; caution d’un prêt pour l'acquisition d’un appartement avec garage par une SCI ayant une activité d'achat et de mise en location de bien immobilier, comme mentionné dans son objet social, la preuve n’étant pas rapportée qu’il était destiné à l’habitation des associés), sur appel de TJ Lyon (4e ch.), 16 mars 2021 : RG n° 20/03790 ; Dnd - CA Bourges (ch. civ.), 9 février 2012 : RG n° 11/00438 ; Cerclab n° 3624 (clauses abusives ; rapport direct ; contrat de renseignements commerciaux et de cautionnement des pertes en cas d’inexactitude des renseignements), sur appel de T. com. Nevers, 12 janvier 2011 : Dnd.

V. aussi : CA Chambéry (2e ch.), 25 janvier 2018 : RG n° 16/02793 ; Cerclab n° 7409 (ancien art. L. 341-4 C. consom. ; cautionnement par une brasserie de nature professionnelle, comme ayant un rapport direct avec l'activité professionnelle de celle-ci, puisque le cautionnement est la contrepartie d’un engagement d’approvisionnement exclusif et qu’au surplus la brasserie a exigé une caution des gérants et associés, ce qui la rendait parfaitement avisée de l'opération financière qu'elle réalisait, tant en amont qu'en aval de son cautionnement), sur appel de T. com. Annecy, 15 juillet 2014 : RG n° 2013J00254 ; Dnd.

V. pour la définition du consommateur au sens de l’art. 18.2 du Règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale : si les deux engagements de caution ont effectivement été souscrits par des personnes physiques, et qu’il n'est pas mentionné dans ces deux conventions, que les cautions agissent en qualité de dirigeant de la société, une location avec option d'achat est considérée comme une opération de crédit, et un navire, même s'il a un statut particulier relevant du droit maritime, est un meuble ; cette opération de location avec option d'achat était destinée à refinancer l'achat du navire, ce qui n'avait rien à voir avec l'objet social de la société dont la sphère d'activité était le BTP ; néanmoins, dès lors qu’il est établi que le navire n’a pas été utilisé à des fins promotionnelles pour la société ou pour les autres sociétés du groupe, mais utilisé à des fins personnelles dites récréatives par la famille des cautions, et que la banque a sollicité leur engagement de caution parce qu'ils étaient dirigeants et seuls actionnaires de cette société, ils ne peuvent prétendre avoir la qualité de consommateur au regard de la législation européenne, dans la mesure où ils se sont portés caution d'une obligation de la société qu'ils dirigent et détiennent, même si cet engagement est contraire à l'objet social, compte tenu de leurs liens professionnels avec cette société. CA Aix-en-Provence (ch. 3-4), 4 novembre 2021 : RG n° 18/16945 ; Cerclab n° 9228, sur appel de T. com. Nice, 24 juillet 2018 : RG n° 2017/00760 ; Dnd.

Cautionnement : admission de la protection. Certaines décisions admettent l’application de la protection contre les clauses abusives (avant l’ordonnance du 14 mars 2016), même si, in fine, la clause n’est pas jugée abusive. V. en ce sens : TGI Nancy (1re ch. civ.), 26 février 2007 : RG n° 05/05157 ; jugt n° 188 ; Cerclab n° 1438 ; Juris-Data n° 339771 (caution d’un crédit-bail de véhicule utilitaire souscrit par… un salarié de la société cautionnée (!) ; domaine d’application non discuté ; clause non abusive) - CA Chambéry (ch. com.), 3 juillet 2007 : RG n° 06/01083 ; Cerclab n° 2407 (caution d’un compte courant d’une entreprise, la qualité de la caution n’étant pas précisée ; clause de variation d’intérêts dans le contrat principal de compte courant jugée non abusive), sur appel de TGI Annecy, 7 décembre 2005 : Dnd - CA Rennes (1re ch. B), 18 mars 2011 : RG n° 10/00755 ; arrêt n° 200 ; Cerclab n° 3460 (caution d’un emprunt souscrit par un commerçant ; absence de caractère abusif de la clause d’un contrat de cautionnement étendant à la caution l’exigibilité anticipée de l’obligation principal ; clause portant au surplus sur la définition de l'objet principal du contrat), sur appel de TGI Quimper, 15 décembre 2009 : Dnd - CA Aix-en-Provence (8e ch. B), 23 novembre 2017 : RG n° 15/19756 ; arrêt n° 2017/398 ; Cerclab n° 7246 (cautionnement à durée déterminée d’une convention de compte courant professionnel et d’un prêt professionnel souscrit par la gérante de la Sarl emprunteuse ; clause de préavis de dénonciation non abusive), sur appel de T. com. Aix-en-Provence, 6 octobre 2015 : RG n° 2014/7484 ; Dnd.

V. aussi, apparemment implicitement dans le même sens : CA Aix-en-Provence (8e ch. C), 11 décembre 2014 : RG n° 12/19961 ; arrêt n° 2014/582 ; Cerclab n° 4966 (clauses abusives ; caution par un couple d’un prêt destiné à l'acquisition de matériel à usage professionnel par une Eurl ; arrêt validant l’obligation imposée aux cautions « dont il n'est pas allégué qu'il constituerait une clause abusive »), sur appel de T. com. Manosque, 4 septembre 2012 : Dnd.

Rappr. pour l’assurance garantissant la caution : CA Paris (pôle 2 ch. 5), 17 octobre 2017 : RG n° 16/17422 ; arrêt n° 2017/293 ; Cerclab n° 7103 (clauses abusives ; rapport direct avec l’activité ; application de la protection à l’assurance souscrite par la caution de l’engagement principal, en l’espèce un prêt à une SCI familiale en vue de l’acquisition des murs d’un restaurant et des parties communes d’un hôtel ; société constituée entre le mari, l’épouse et leurs enfants, l’épouse étant gérante et le mari caution, avec statut de conjoint collaborateur), sur appel de TGI Paris, 4 juillet 2016 : RG n° 13/12643 ; Dnd.

Cautionnement : art. L. 341-1 s. C. consom. Un « créancier professionnel » doit s'entendre comme celui dont la créance est née dans l'exercice de sa profession ou se trouve en rapport direct avec son activité professionnelle, même si celle-ci n'est pas principale et n'a pas pour objet la délivrance de crédit ; en l'espèce, il ressort des statuts de la société que les associés ont décidé de constituer la société en vue de constituer par croissance organique et externe un groupe intégrant notamment des activités d'imprimerie traditionnelles et nouvelles ; même si le gérant a été encouragé à s'associer en raison des liens personnels qu’il entretenait avec les gérants d'autres sociétés associées, il ne peut pas éluder le fait qu'en devenant associée, sa société a entendu intégrer une société ayant vocation à regrouper diverses activités au sein desquelles la sienne pouvait trouver sa place, avec une vocation au partage des bénéfices ; aux termes de la convention de cautionnement, il est précisé que l'avance en compte courant, qui s'analyse comme une forme de prêt consenti à la société, a été faite pour permettre à la société de disposer d'une trésorerie plus aisée et donc qu’elle est en rapport direct avec son activité professionnelle. CA Angers (ch. A com.), 21 février 2017 : RG n° 14/00562 ; Cerclab n° 6754 (obligation pour la société associée de respecter les dispositions des art. L. 341-2 et L. 341-3 C. consom. à l’égard de la caution), sur appel de T. com. Angers du 5 février 2014 : RG n° 13/03169 ; Dnd.