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CA AIX-EN-PROVENCE (1re ch. C), 15 septembre 2016

Nature : Décision
Titre : CA AIX-EN-PROVENCE (1re ch. C), 15 septembre 2016
Pays : France
Juridiction : Aix-en-provence (CA), 1re ch. C
Demande : 15/21061
Décision : 2016/862
Date : 15/09/2016
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 30/11/2015
Numéro de la décision : 862
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2016-018851
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5961

CA AIX-EN-PROVENCE (1re ch. C), 15 septembre 2016 : RG n° 15/21061 ; arrêt n° 2016/862

Publication : Jurica

 

Extrait : « Cependant, le bail a été résolu entre le bailleur et Mme Y. à compter du 23 mars 2015, par l'effet du commandement de payer qui lui a été délivré le 23 janvier 2015, resté sans suite. À compter de cette date, seule une indemnité d'occupation était due par Mme Y. qui s'est maintenue dans les lieux. Pour solliciter la condamnation solidaire de M. X. à l'ensemble de la créance arrêtée au 31 août 2015, le bailleur ne peut se prévaloir de l'avenant signé par Mme Y. après le congé donné par M. X., qui, faute d'avoir été signé par lui, ne lui est pas opposable.

Le bailleur se prévaut également à cette fin d'une annexe du bail, portant engagement de solidarité, rédigée de façon manuscrite par chacun des cotitulaires du bail, qui prévoit que chacun d'entre eux resterait tenu solidairement pendant toute la durée du bail « des loyers, charges et indemnité d'occupation » et deux ans après le congé donné par l'un d'entre eux seulement.

Cependant, s'il n'appartient pas au juge des référés de déclarer une clause abusive et non écrite au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, devenu L. 212-1 du même code, l'application en référé de cette clause de solidarité s'oppose à une contestation sérieuse, dès lors qu'elle fait peser sur le locataire ayant régulièrement donné congé et ayant quitté les lieux, pendant une longue période (deux années), une charge qui peut être jugée excessive, au regard de la durée exceptionnellement courte du bail (trois mois renouvelables), et du fait qu'elle porte non seulement sur les conséquences de manquements contractuels mais également sur celles du maintien indu dans les lieux de l'autre locataire. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

PREMIÈRE CHAMBRE C

ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2016

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 15/21061. Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Tribunal d’Instance d’Aubagne du 3 novembre 2015 enregistré au répertoire général sous le R.G. n° 000193.

 

APPELANT :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], demeurant chez [adresse], représenté et assisté par Maître Frédéric A. substitué par Maître Prisca V., avocats au barreau de MARSEILLE, plaidant

 

INTIMÉE :

LA SOCIÉTÉ NOUVEAU LOGIS PROVENÇAL

dont le siège est [adresse], représentée et assistée par Maître Paul G. substitué par Maître Cécile B., avocats au barreau de MARSEILLE, plaidant

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 juin 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Lise LEROY-GISSINGER, conseiller, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de Monsieur Serge KERRAUDREN, président ; Mme Danielle DEMONT, conseiller ; Madame Lise LEROY-GISSINGER, conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MASSOT

ARRÊT : contradictoire, par mise à disposition de l'arrêt au greffe le 15 septembre 2016, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. Signé par Madame Lise LEROY-GISSINGER, conseiller ayant participé au délibéré et Madame Sylvie MASSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Exposé du litige :

Par acte sous seing privé du 21 février 2014, la SOCIÉTÉ NOUVEAU LOGIS PROVENÇAL a consenti à M. X. et Mme Y. un bail d'habitation portant sur un bien situé [adresse].

Le 23 janvier 2015, le bailleur a délivré à M. X. et Mme Y. un commandement de payer la somme de 1.663,33 euros en principal arrêtée au 31 décembre 2014, visant la clause résolutoire insérée au bail. Le commandement de payer a été délivré à l'adresse du bien loué et selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile à M. X.

Le 7 juillet 2015, la SOCIÉTÉ NOUVEAU LOGIS PROVENÇAL a assigné M. X. et Mme Y. devant le juge des référés du tribunal d'instance d'Aubagne aux fins, notamment, de faire constater la résiliation du bail par application de la clause résolutoire et de voir ordonner l'expulsion des locataires et de tous occupants de leur chef et de voir prononcer leur condamnation à lui verser une provision de 3.783,12 euros au titre des loyers impayés et indemnités d'occupation dues au 30 juin 2015.

 

Par ordonnance réputée contradictoire, faute de comparution de M. X., du 3 novembre 2015, le juge des référés a :

- Constaté l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation du bail à compter du 23 mars 2015,

- Ordonné l'expulsion de M. X. et Mme Y. et de tous occupants de leur chef des lieux loués avec le concours d'un serrurier et de la force publique si besoin était,

- Condamné solidairement M. X. et Mme Y. à payer à la SOCIÉTÉ NOUVEAU LOGIS PROVENÇAL la somme provisionnelle de 5.198,72 euros, comptes arrêtés au 31 août 2015, avec intérêts au taux légal à compter du 23 janvier 2015,

- Fixé l'indemnité d'occupation au montant du loyer et charges qui auraient été payés si le bail avait continué (y compris l'indexation) et condamné solidairement M. X. et Mme Y. à payer cette indemnité d'occupation à titre de provision tous les mois jusqu'à libération effective des lieux,

- Condamné M. X. et Mme Y. aux dépens, y inclus le coût du commandement de payer.

Par déclaration du 30 novembre 2015, M. X. a formé un appel général contre cette décision, n'intimant que la SOCIÉTÉ NOUVEAU LOGIS PROVENÇAL.

 

Par conclusions du 9 juin 2016, M. X. demande à la cour, à titre principal, de débouter la SOCIÉTÉ NOUVEAU LOGIS PROVENÇAL de l'ensemble de ses demandes, de condamner exclusivement Mme Y. au paiement de la dette locative et des indemnités d'occupation, d'ordonner la restitution des meubles et effets personnels de M. X.

À titre subsidiaire, il demande de condamner solidairement Mme Y. et M. X. au paiement de la dette locative en ce compris les loyers dus jusqu'au 23 mars 2015, date d'effet de la clause résolutoire du bail, de lui accorder les plus larges délais de paiement en vertu de l'article 1244-1 du code civil et de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, de constater que Mme Y. est seule occupante sans droit ni titre à compter du 25 mars 2015 et de la condamner exclusivement aux indemnités d'occupation à compter de cette date et d'ordonner son expulsion. Il demande encore la condamnation solidaire de Mme Y. et de la SOCIÉTÉ NOUVEAU LOGIS PROVENÇAL à lui verser la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il expose qu'il a quitté le logement avec les enfants du couple le 11 octobre 2014 et en a informé le bailleur le 3 novembre 2014, lui indiquant sa nouvelle adresse. Il fait valoir que l'avenant signé après son départ par Mme Y. seule, indiquant qu'il reste tenu solidairement de la dette locative, ne lui est pas opposable. Par ailleurs, il soutient que la clause prévoyant que le colocataire reste solidairement tenu du paiement du bail durant une période de deux années suivant le congé donné est abusive et demande qu'il soit fait application de l'article 8-1 de la loi du 6 juillet 1989 tel que modifié par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, qui limite à 6 mois ce délai.

 

Par ses conclusions du 7 juin 2016, la SOCIÉTÉ NOUVEAU LOGIS PROVENÇAL conclut à la confirmation du jugement. Elle demande qu'il soit jugé que M. X. est solidairement tenu à la dette locative conformément aux dispositions du contrat de bail et qu'il soit débouté de toutes ses demandes. Elle sollicite sa condamnation à lui verser la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le bailleur fait valoir que la validité de l'avenant est indifférente dès lors que le contrat de bail signé par M. X. prévoyait une clause de solidarité s'étendant deux années après la fin du bail concernant l'un des cotitulaires. Il soutient par ailleurs que la lettre que lui a adressée M. X. ne vaut pas congé car il n'est pas établi qu'elle ait été adressée en recommandé avec demande d'avis de réception, contrairement aux dispositions légales (article 15 de la loi du 6 juillet 1989). Il s'oppose enfin à la demande de délai au motif que M. X. est artisan et ne supporte plus de loyer puisqu'il réside chez sa mère.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Motifs de la décision :

La cour n'est pas saisie des dispositions de la décision attaquée concernant Mme Y., qui n'a pas été intimée et bien que les M. X. ait conclu contre Mme Y. également.

M. X. est cotitulaire du contrat de bail signé le 21 février 2014. Le contrat stipule qu'il est conclu pour une durée de 3 mois [N.B. conforme à la minute Jurica, lire sans doute 3 ans] renouvelable par tacite reconduction et les conditions générales prévoient que le délai de préavis en cas de congé est de trois mois. Les conditions particulières, signées par M. X., stipulent qu'en cas de congé donné par l'un des deux cotitulaires du bail, l'autre resterait solidairement tenu du paiement du loyer pendant deux ans suivant le congé donné.

M. X. justifie avoir donné régulièrement congé au bailleur par l'envoi d'une lettre recommandée du 3 novembre 2014 dont l'avis de réception a été signé par ce dernier le 5 novembre 2014 (pièce 13) et avoir quitté les lieux en novembre 2014. Ainsi, au jour de l'assignation en référé, la demande d'expulsion de M. X. était sans objet. Par ailleurs, si à compter du 3 février 2015, date d'expiration du préavis, M. X. n'était plus locataire, il était tenu au paiement du loyer jusqu'à cette date. Il n'existe donc pas de contestation sérieuse quant au fait que M. X. soit tenu du paiement de la somme de 1.663,33 euros en principal concernant des impayés arrêtés au 31 décembre 2014 figurant au commandement de payer.

Le bailleur sollicite la confirmation de l'ordonnance qui a condamné M. X. à une provision de 5.198,72 euros, correspondant, selon la décision, aux loyers et charges afférents au logement au 31 août 2015.

Cependant, le bail a été résolu entre le bailleur et Mme Y. à compter du 23 mars 2015, par l'effet du commandement de payer qui lui a été délivré le 23 janvier 2015, resté sans suite. À compter de cette date, seule une indemnité d'occupation était due par Mme Y. qui s'est maintenue dans les lieux.

Pour solliciter la condamnation solidaire de M. X. à l'ensemble de la créance arrêtée au 31 août 2015, le bailleur ne peut se prévaloir de l'avenant signé par Mme Y. après le congé donné par M. X., qui, faute d'avoir été signé par lui, ne lui est pas opposable.

Le bailleur se prévaut également à cette fin d'une annexe du bail, portant engagement de solidarité, rédigée de façon manuscrite par chacun des cotitulaires du bail, qui prévoit que chacun d'entre eux resterait tenu solidairement pendant toute la durée du bail « des loyers, charges et indemnité d'occupation » et deux ans après le congé donné par l'un d'entre eux seulement.

Cependant, s'il n'appartient pas au juge des référés de déclarer une clause abusive et non écrite au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, devenu L. 212-1 du même code, l'application en référé de cette clause de solidarité s'oppose à une contestation sérieuse, dès lors qu'elle fait peser sur le locataire ayant régulièrement donné congé et ayant quitté les lieux, pendant une longue période (deux années), une charge qui peut être jugée excessive, au regard de la durée exceptionnellement courte du bail (trois mois renouvelables), et du fait qu'elle porte non seulement sur les conséquences de manquements contractuels mais également sur celles du maintien indu dans les lieux de l'autre locataire.

En conséquence, M. X. ne peut être tenu solidairement qu'au paiement des loyers dus jusqu'à la résiliation du bail, à l'exclusion des indemnités d'occupation dues postérieurement à celle-ci. La résiliation ayant été effective au 23 mars 2015, la créance du bailleur n'est pas sérieusement contestable pour les trois premiers mois de loyers et charges de l'année 2015 correspondant à la somme de 2.133,48 euros, étant rappelé qu'il est constant qu'aucun loyer n'a été versé depuis le mois de janvier 2015 par Mme Y.

Dès lors, il y a lieu de condamner M. C. à verser à la SOCIÉTÉ NOUVEAU LOGIS PROVENÇAL une provision de 3.796,81 euros (1.663,33euros au titre de l'année 2014 + 2.133,48euros au titre de l'année 2015).

Cette somme ne peut porter intérêts à compter du commandement de payer, dès lors que celui-ci n'a pas été délivré régulièrement à M. X., puisqu'il n'a pas été signifié à la dernière adresse connue du destinataire mais à l'adresse du bien loué, à laquelle le bailleur savait qu'il n'habitait plus. En effet, M. X. avait transmis sa nouvelle adresse à la SOCIÉTÉ NOUVEAU LOGIS PROVENÇAL dans la lettre de résiliation reçue par ce dernier le 5 novembre 2014. Les intérêts courront donc à compter de la signification de l'ordonnance de première instance, au nouveau domicile de M. X. Pour la même raison, M. X. ne sera pas tenu, au titre des dépens de première instance, de supporter le coût du commandement de payer.

Il sera accordé à M. X. au regard de sa bonne foi et du fait qu'il assure l'éducation de deux enfants mineurs un délai de 12 mois pour s'acquitter de cette somme, dans les termes du dispositif ci-après.

Enfin, la demande de restitution des meubles et effets personnels formée par M. X. se heurte à une contestation sérieuse, dès lors que la preuve de ce que ces biens seraient en la possession du bailleur n'est pas rapportée, étant rappelé que Mme Y. n'est pas en cause à hauteur d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

- Infirme l'ordonnance, mais seulement en ce qu'elle a condamné solidairement M. X. à provision et à une indemnité d'occupation provisionnelle, a ordonné son expulsion et l'a condamné à supporter le coût du commandement de payer,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- Déclare la demande d'expulsion de M. X. sans objet,

- Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de restitution de mobiliers,

- Condamne M. X., solidairement avec Mme Y., à verser à la SOCIÉTÉ NOUVEAU LOGIS PROVENÇAL une provision de 3.796,81 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la signification de l'ordonnance de référé du 3 novembre 2015,

- Dit que M. X. pourra payer cette somme en 12 mois, par 11 mensualités, payable le 5 de chaque mois, de 316 euros chacune, la dernière du solde, et qu'en cas de non-paiement d'une seule échéance à son terme, l'intégralité de la provision sera immédiatement exigible,

- Dit que M. X. n'est pas tenu du paiement du coût du commandement délivré le 23 janvier 2015,

- Rejette les demandes formées par les parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne M. X. aux dépens d'appel.

Le greffier,                Pour le président empêché,

Lise Leroy-Gissinger