6002 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Rédaction et interprétation - Présentation - Articulation des protections (droit commun et droit de la consommation)
- 5985 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Contrôle judiciaire - Ordre logique des sanctions - Présentation générale
- 6001 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Rédaction et interprétation - Présentation - Évolution des textes
- 6073 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Interprétation du contrat
- 6093 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Lisibilité - Présentation générale
- 6008 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Rédaction et interprétation - Interprétation en faveur du consommateur (L. 212-1, al. 1, C. consom.) - Articulation avec les clauses abusives
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6002 (10 juillet 2020)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION
NOTION DE CLAUSE ABUSIVE - RÉDACTION ET INTERPRÉTATION DES CLAUSES
PRÉSENTATION GÉNÉRALE - ARTICULATION DES DISPOSITIFS DE PROTECTION
Présentation. La loi du 1er février 1995 et les textes ultérieurs soulèvent plusieurs problèmes d’articulation entre les différents dispositifs qu’elles mettent en place et le droit commun (A), mais aussi entre les dispositions propres aux contrats de consommation (B).
A. ARTICULATION DES RÈGLES D’INTERPRÉTATION DE DROIT COMMUN ET DES RÈGLES SPÉCIALES
Particularisme des textes (avant l’ordonnance du 14 mars 2016 modifiée). La loi du 1er février 1995 comporte un particularisme de rédaction qui mérite d’être signalé et qui pourrait même être considéré comme une curiosité, voire une anomalie. L’ancien art. L. 133-2 C. consom. fixe en effet une règle originale d’interprétation des contrats de consommation en cas de doute, qui rappelle l’ancien art. 1162 C. civ. [1190 nouveau], tout en posant une règle différente de ce texte de droit commun. Or, ce texte ne comporte aucune référence générale aux autres textes du Code civil relatifs à l’interprétation et c’est au contraire dans l’article concernant spécifiquement les clauses abusives qu’un tel renvoi a été ajouté : « sans préjudice des règles d’interprétation prévues aux art. 1156 à 1161, 1163 et 1164 du code civil… ». Cette rédaction diffère de l’art. 4 § 1 de la directive qui commence de la même manière (« sans préjudice… »), mais qui ne pouvait bien sûr pas citer des textes nationaux et qui vise une disposition très différente (l’art. 7 de la directive concernant l’efficacité de la protection et l’action des groupements). § N.B. Le placement du renvoi au Code civil, dans l’ancien art. L. 132-1, au surplus en tête de phrase, pourrait laisser croire que ce texte concerne globalement l’interprétation du contrat. Or, la suite de l’alinéa 5, qui fixe des éléments de méthode (date, appréciation globale, etc.) dans l’appréciation du caractère abusif concerne l’interprétation et l’application de la notion légale de « déséquilibre significatif », plutôt que l’interprétation du contrat stricto sensu, même si celle-ci peut s’avérer nécessaire.
En dépit de ce qui semble n’être qu’une maladresse de rédaction, il semble que, faute d’une disposition l’excluant expressément et d’incompatibilité avérée entre les deux (V. d’ailleurs Cerclab n° 6001, pour les art. 1157 et 1161), les principes d’interprétation applicables en droit commun peuvent être utilisés par les juges, même dans les contrats de consommation, sous réserve de respecter la disposition particulière de l’ancien art. L. 133-2 C. consom. qui remplace l’ancien art. 1162 C. civ. Dès lors, en dépit de son contexte particulier, le renvoi opéré par l’ancien art. L. 132-1 C. consom. a une portée générale.
Pour une décision présentant les principes applicables en la matière : le juge doit veiller à concilier la volonté réelle et la volonté déclarée par une application littérale des clauses claires et une interprétation loyale des clauses obscures. TGI Nanterre (6e ch.), 3 mars 2006 : RG n° 04/03016 ; site CCA ; Cerclab n° 3181 ; Juris-Data n° 2006-308052 (accès internet ; « si les [anciens] art. 1134 [1103 nouveau] et 1341 C. civ. [1359 nouveau], de caractère impératif, attachent force de loi aux conventions et interdisent d’en rechercher la portée hors du texte écrit lorsqu’il en existe un, les anciens art. 1135 [1194 nouveau] et 1156 [1188 nouveau] du même code, de caractère interprétatif, suggèrent de rechercher la véritable pensée des parties et les suites que l’équité lui confère, au-delà de « ce qui est exprimé » voire au-delà « du sens littéral du terme »).
Particularisme des textes (après l’ordonnance du 14 mars 2016 modifiée). La rédaction du nouvel art. L. 212-1 al. 2 C. consom. n’a pas fondamentalement modifié la situation puisque le texte continue de renvoyer, au sein d’une disposition consacrée aux clauses abusives, à des modes généraux d’interprétation des contrats qui pourraient s’appliquer aussi à tous les contrats de consommation. Par ailleurs, l’équivalent de l’ancien art. 1162 C. civ., le nouvel art. 1190, est également absent de l’art. L. 212-1 C. consom. Cependant, il convient de souligner que cette disposition s’est rapprochée de l’art. L. 211-1 C. consom. : « Dans le doute, le contrat de gré à gré s'interprète contre le créancier et en faveur du débiteur, et le contrat d'adhésion contre celui qui l'a proposé ». Néanmoins, les textes demeurent différents, notamment lorsque le contrat n’a pas été rédigé par le contractant (mais par exemple par son mandataire).
Convergence entre l’ancien art. L. 132-1 al. 4 [L. 212-1 al. 6] C. consom. et l’ancien art. 1161 C. civ. [1189 nouveau). L’approche globale visée par l’ancien art. L. 132-1, al. 4, [L. 212-1 al. 6] C. consom. pour l’appréciation du déséquilibre significatif, condition légale, rappelle l’approche de l’ancien art. 1161 C. civ. [1189 nouveau] pour l’interprétation du contrat, qui dispose que « toutes les clauses des conventions s’interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l’acte entier ». Cependant, en théorie, les deux textes appliquent une idée similaire à deux recherches différentes : la signification d’une clause et son caractère abusif. § Pour une décision distinguant clairement les deux : TI Nîmes, 9 octobre 2001 : RG n° 11-01-000509 ; Cerclab n° 1043 (ancien art. 1161 utilisé préalablement pour déterminer la nature de la clause, en l’espèce de révision unilatérale des conditions financières d’un contrat de téléphonie mobile, le caractère abusif étant examiné ensuite). § Pour d’autres décisions, se référant à l’ancien art. 1161 [1189 nouveau], V. par exemple : CA Orléans (ch. civ.), 31 août 1999 : RG n° 98/00019 ; arrêt n° 1463 ; Cerclab n° 699 (développement de pellicules ; interprétation de la clause d’indemnisation forfaitaire en cas de perte de pellicules par référence au contrat pris dans son entier, notamment pour tenir compte de la possibilité de déclarer la valeur exceptionnelle des travaux et de la réserve d’un recours judiciaire), infirmant TI Tours, 23 janvier 1997 : RG n° 11-95-00631 ; Cerclab n° 161 (clause d’indemnisation forfaitaire abusive), pourvoi rejeté par Cass. civ. 1re, 5 février 2002 : pourvoi n° 00-10250 ; arrêt n° 218 ; Cerclab n° 2037 ; JCP 2002. IV. 1476 (appréciation souveraine après interprétation du contrat dans son ensemble) - CA Versailles (3e ch.), 20 février 2004 : RG n° 2002-03374 ; Cerclab n° 1711 ; Juris-Data n° 2004-285339 (clause ambiguë interprétée par référence à l’ancien art. 1161 C. civ. et en faveur du consommateur, s’agissant d’un contrat d’adhésion, sans référence à l’ancien art. L. 133-2 C. consom.) - CA Grenoble (1re ch. civ.), 12 janvier 2016 : RG n° 13/02909 ; Cerclab n° 5478 (contrat de fourniture de propane ; interprétation par référence unique à l’ancien art. 1161 C. civ.), sur appel de TGI Grenoble, 6 mai 2013 : RG n° 11/00541 ; Dnd, pourvoi rejeté par Cass. civ. 1re, 6 septembre 2017 : pourvoi n° 16-13242 ; arrêt n° 931 ; Cerclab n° 3606 (appréciation souveraine).
Articulation entre l’ancien art. L. 133-2 al. 2 C. consom. et l’ancien art. 1162 C. civ. L’ancien art. L. 133-2 C. consom., al. 2, et l’ancien art. 1162 C. civ. ont en commun une condition d’application : l’existence d’un doute sur l’interprétation d’une clause. En revanche, alors que l’ancien art. 1162 est d’application générale, sauf exception (telle que l’art. 1602 C. civ.), l’ancien art. L. 133-2 C. consom. n’est applicable qu’aux clauses figurant dans un contrat conclu entre un professionnel et un non-professionnel ou un consommateur. Par ailleurs, les textes se séparent sur les conséquences qu’ils tirent d’une telle situation. Alors que l’art. 1162, dans son interprétation littérale, protège le débiteur, quel qu’il soit, l’art. L. 133-2 impose une interprétation en faveur du consommateur ou du non-professionnel, quelle que soit sa position dans le contrat, débiteur ou créancier, et quelle que soit la nature de l’obligation (le consommateur est parfois débiteur d’une prestation non monétaire).
Compte tenu de ces éléments, un visa de l’ancien art. 1162 C. civ. est-il encore pertinent en droit de la consommation ? Le renvoi opéré par l’ancien art. L. 132-1 C. consom. permet d’en douter, puisque le texte a soigneusement omis de viser l’ancien art. 1162, ce qui sous-entend qu’une telle référence n’a plus d’intérêt depuis la création de l’ancien art. L. 133-2, al. 2 C. consom. Une référence exclusive à l’ancien art. L. 133-2 est d’ailleurs plus rigoureuse, puisque l’interprétation extensive de l’ancien art. 1162 parfois retenue contre le rédacteur d’un contrat d’adhésion n’est pas conforme à la lettre de ce texte. Au fond, d’ailleurs, l’interprétation contre le rédacteur peut s’appuyer beaucoup plus efficacement sur l’art. 1602 C. civ., que sur l’ancien art. 1162 dont l’objectif est différent : éviter d’alourdir les obligations du débiteur. Autant par conséquent fonder une solution sur la disposition légale qui l’autorise littéralement, plutôt que sur une autre qui n’aboutit à la même solution que par une interprétation déformante. § Comp. pour l’établissement d’un lien explicite entre les deux textes : l’ancien art. 1162 C. civ. est repris et adapté au contexte du droit de la consommation par l’ancien art. L. 133-2 C. consom. TGI Nancy (2e ch. civ.), 19 avril 2007 : RG n° 07/00109 ; jugt n° 413 ; Cerclab n° 1437 (jugement visant l’ancien art. 1162 dans son sens extensif, plutôt que l’art. L. 133-2 dans son sens littéral), infirmé sur un autre point par CA Nancy (1re ch. civ.), 9 février 2009 : RG n° 07/01083 ; Juris-Data n° 2009-003626 ; Dnd (infirmation du jugement en ce qu’il a exclu dans son dispositif une garantie, en contradiction avec ses motifs).
Certaines décisions des décisions recensées continuent pourtant d’évoquer simultanément l’ancien art. L. 133-2 C. consom. et l’ancien art. 1162 C. civ. (N.B. dans son sens littéral, l’ancien art. 1162 aboutit à la même solution que l’ancien art. L. 133-2 uniquement lorsque l’interprétation vise une obligation du consommateur). V. par exemple : CA Aix-en-Provence (10e ch.), 14 mai 2002 : RG n° 00/15561 ; arrêt n° 331 ; Cerclab n° 749 ; Juris-Data n° 2002-211557 (assurance ; clause concernant le professionnel : contradiction entre deux clauses plus ou moins exigeantes pour déclencher la garantie) - CA Nancy (2e ch. civ.), 10 juin 2004 : RG n° 02/02365 ; arrêt n° 1338/2004 ; Cerclab n° 1560 ; Juris-Data n° 2004-265769 (agence de voyages ; assurance annulation ; interprétation en faveur du consommateur, par application des art. 1162 C. civ., ancien, pris explicitement dans son sens littéral, et l’ancien art. L. 133-2 C. consom., pour estimer que l’expression « maladie ou accident grave » peut recouvrir une grossesse avec complications) - TI Lyon, 13 septembre 2004 : RG n° 11-03-003586 ; jugt n° 269 ; Cerclab n° 2775 (agence de voyages ; clause d’annulation ; interprétation d’un contrat conclu en 2001 par référence aux anciens art. 1157 [1191 nouveau] et 1162 C. civ.), confirmé sans ce motif par CA Lyon (6e ch. civ.), 2 mars 2006 : RG n° 04/06687 ; Legifrance ; Cerclab n° 1213 - CA Bordeaux (5e ch.), 10 janvier 2006 : RG n° 04/02401 ; Cerclab n° 1033 ; Juris-Data n° 2006-298517 (« faute d’ambiguïté il n’y a donc pas lieu de recourir aux dispositions des art. 1162 C. civ. ancien ou [ancien] L. 133-2 C. consom. ») - CA Versailles (3e ch.), 11 octobre 2007 : RG n° 06/05351 ; arrêt n° 479 ; Cerclab n° 4165 (garantie « décès-invalidité » d’un contrat d’assurance couplé à une carte bancaire ; interprétation d’une clause d’exclusion sous le visa des deux textes, apparemment placés sur un même plan), cassé par Cass. civ. 2e, 22 janvier 2009 : pourvoi n° 07-21698 ; Cerclab n° 2854.
D’autres décisions se référent exclusivement à l’ancien art. 1162 C. civ. V. par exemple : TGI Béthune, 7 février 2006 : RG n° 05/00343 ; jugt n° 79/2006 ; site CCA ; Cerclab n° 4226 (assurance groupe ; interprétation de la clause définissant l’invalidité) - CA Grenoble (1re ch. civ.), 30 octobre 2012 : RG n° 10/05010 ; Cerclab n° 4021 (mandat de vente ; interprétation du contrat visant à préciser les obligations du mandant), sur appel de TI Vienne, 5 novembre 2010 : RG n° 11-09-042 ; Dnd - CA Aix-en-Provence (3e ch. A), 25 juin 2015 : RG n° 13/16299 ; arrêt n° 2015/0240 ; Cerclab n° 5225 (assurance habitation ; interprétation « en tout état de cause » en faveur de l’assuré, sur le fondement unique de l'ancien art. 1162 C. civ.), sur appel de TGI Grasse, 21 juin 2013 : RG n° 11/01993 ; Dnd - CA Toulouse (3e ch.), 15 novembre 2017 : RG n° 15/04862 ; arrêt n° 773/2017 ; Cerclab n° 7128 (vente en l'état futur d'achèvement d’un appartement et d’un emplacement de parking en sous-sol ; la clause sur les reports de délai de livraison doit être interprétée strictement et en faveur de l’acheteur par dérogation à l’ancien art. 1162 C. civ.), sur appel de TGI Toulouse, 1er octobre 2015 : RG n° 12/04118 ; Dnd.
V. même pour un arrêt ajoutant de façon erronée, après avoir jugé les clauses claires, qu’en tout état de cause l’application de l’ancien art. 1162 C. civ. ne pourrait aboutir qu’à une interprétation en faveur de l’assureur qui a souscrit l’obligation, alors que l’ancien art. L. 133-2 C. consom. qui prime ce texte impose la solution inverse. CA Toulouse (2e ch. sect. 2), 23 mai 2006 : RG n° 05/02832 ; Cerclab n° 2524 (assurance habitation).
Articulation entre l’ancien art. L. 133-2 al. 2 [L. 211-1] C. consom. et l’ancien art. 1162 C. civ. [1190]. La situation est-elle différente depuis les réformes du Code civil et du Code de la consommation ? Dans une première approche, l’art. 1190 C. civ. s’est rapproché de l’art. L. 211-1 C. consom. en visant explicitement les contrats d’adhésion : « Dans le doute, le contrat de gré à gré s'interprète contre le créancier et en faveur du débiteur, et le contrat d'adhésion contre celui qui l'a proposé ». Mais les solutions ne sont toujours pas identique, dès lors que le contrat d’adhésion conclu par le consommateur a pu être proposé par un tiers, notamment un mandataire.
B. ARTICULATION DES RÈGLES DE RÉDACTION ET D’INTERPRÉTATION DES CONTRATS DE CONSOMMATION
Articulation des al. 1 et 2 de l’ancien art. L. 133-2 C. consom. L’alinéa premier de l’art. L. 133-2 exigeait que les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non-professionnels soient « présentées et rédigées de façon claire et compréhensible ». Le texte ne précisait pas explicitement la sanction, sauf dans l’alinéa 2 lorsque la défectuosité de rédaction créait un doute, mais cette conséquence n’était pas la seule envisageable et l’alinéa 1 pouvait couvrir des hypothèses plus variées que celles visées par l’al. 2.
Ainsi, une présentation matérielle du contrat illisible, en raison de caractères trop petits, pas assez contrastés, etc., pouvait ne pas répondre aux exigences de l’ancien art. L. 133-2 alinéa 1 C. consom. Dans ce cas, il n’était pas question de doute ou d’ambiguïté et la sanction pouvait être, directement, l’inopposabilité de la clause, ou l’admission de son caractère abusif (V. Cerclab n° 6093). Pour des décisions faisant explicitement ce lien, V. par exemple : selon l’ancien art. L. 133-2 C. consom., les clauses des contrats proposés par des professionnels aux consommateurs et aux non-professionnels devant être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible, il en résulte en l’espèce que les dispositions du tarif d’un contrat de téléphonie quant à la durée du contrat, écrites en caractères minuscules quasiment illisibles, sont inopposables à l’abonné. CA Rennes (1re ch. B), 11 mars 2010 : RG n° 08/08385 ; Cerclab n° 3012 (conditions particulières ne renseignant pas suffisamment sur la durée du contrat), sur appel de TI Paimboeuf, 18 février 2008 : Dnd.
Ensuite, si la clause était confuse ou incompréhensible, l’existence d’un doute était également contestable, et c’était plutôt, là encore, l’inopposabilité ou le caractère abusif.
Enfin, lorsque la clause était rédigée de façon vague, imprécise ou trop générale, la sanction pouvait rester ouverte : soit privilégier une interprétation favorable au consommateur, soit en tirer un argument en faveur de son caractère abusif.
Articulation des al. 1 et 2 de l’art. L. 211-1 C. consom. (ancien art. L. 133-2 C. consom.). Sur ce point, l’ordonnance du 14 mars 2016 n’a fait que transférer les anciens textes et les conclusions précédemment exposées restent valables.
Articulation des anciens art. L. 132-1 et L. 133-2, al. 2 C. consom. L’ancien art. L. 133-2 C. consom. pose, en cas de doute, un principe d’interprétation en faveur du consommateur (sur les principes généraux de ce texte, V. Cerclab n° 6006). Le principe posé par ce texte, situé dans une section autonome intitulée « interprétation et forme des contrats », a une portée générale et peut trouver application même si aucune interprétation de la clause ne peut être déclarée abusive. Lorsque les deux effets sont applicables, leur articulation soulève une difficulté (Cerclab n° 6008).
Les décisions recensées n’adoptent pas une position uniforme. Dans certains cas, elles peuvent se contenter de privilégier l’interprétation la plus favorable au consommateur, en écartant le caractère éventuellement abusif de la clause ou en se dispensant même de son examen (N.B. s’agissant d’une clause concernant la définition de l’objet principal, l’existence d’un doute devrait, en principe, permettre de considérer que l’éviction du contrôle du juge n’est pas applicable). Pour une illustration : jugé qu’en présence d’une clause d’un contrat de prêt, souscrit par un couple, stipulant que la plus élevée des assurances est obligatoire et l’autre facultative, l’imprécision de la clause de résolution du prêt en cas de refus de l’assurance, qui ne précise pas celle qui est visée, n’est pas source de déséquilibre significatif, et qu’elle est seulement de nature à justifier une interprétation de la clause résolutoire, sans que soit remise en cause la stipulation, formulée en des termes clairs, dépourvus d'équivoque, du caractère facultatif de l'assurance souscrite par le mari. CA Aix-en-Provence (ch. 3 - 3), 13 juin 2019 : RG n° 18/13467 ; arrêt n° 2019/277 ; Cerclab n° 7753 (assurance de groupe d’un prêt immobilier souscrit par un couple, avec garantie des risques décès, perte d'autonomie et ITT pour l’épouse, le mari n’étant pas couvert pour l’ITT ; emprunteurs prétendant que cette imprécision rendait les deux assurances obligatoires), sur appel de TGI Aix-en-Provence, 28 juin 2018 : RG n° 16/02680 ; Dnd. § V. aussi : CA Rouen (ch. civ. com.), 2 juin 2020 : RG n° 17/03518 ; Cerclab n° 8430 (contrat de prévoyance santé accident souscrit par un restaurateur ; arrêt écartant implicitement le caractère abusif d’une clause limitant la prise en charge à un an, en cas de pathologies répétitives, en l’interprétant dans un sens étroit ne vidant pas la garantie de sa substance), sur appel de TGI Rouen, 30 mai 2017 : RG n° 15/03856 ; Dnd - CA Rennes (2e ch.), 3 juillet 2020 : RG n° 17/00979 ; arrêt n° 368 ; Cerclab n° 8497 (crédit immobilier ; arrêt écartant l’interprétation de la clause par la banque qui conduirait à la déclarer abusive), sur appel de TGI Quimper, le 24 janvier 2017 : Dnd.
Dans d’autres cas, l’interprétation la moins favorable entraîne l’élimination de la clause, sans que les juges ne s’interrogent sur le caractère abusif de l’interprétation favorable. § V. aussi dans le cas où même l’interprétation favorable est abusive : une cour d’appel doit interpréter la clause dans le sens le plus favorable à l’intéressé, ce qui peut la conduire à en retenir le caractère abusif. Cass. civ. 1re, 2 juillet 2014 : pourvoi n° 13-18708 ; Cerclab n° 4821, rejetant le pourvoi contre CA Nîmes (1re ch. civ. A), 7 mars 2013 : RG n° 12/00899 ; Cerclab n° 4313.
Dans d’autres cas encore, c’est l’interprétation la plus favorable qui entraîne l’élimination de la clause. V. par exemple : CA Paris (pôle 4 ch. 9), 2 juillet 2020 : RG n° 17/16470 ; Cerclab n° 8495 (location de voiture ; la contradiction entre les conditions générales du contrat et les dispositions de la garantie complémentaire doit s’interpréter en faveur du consommateur, ce qui aboutit à rendre abusive la clause excluant la garantie en cas de violation du Code de la route, alors que la garantie stipule que « la protection collision vous permettra de vous protéger en cas d'accident dans lequel votre responsabilité est engagée »), confirmant TI Raincy, 9 mars 2017 : RG n° 11-16-000719 ; Dnd.
Comp. : interprétées dans le sens le plus favorable au consommateur, les stipulations litigieuses ne relèvent pas des dispositions de l’ancien art. L. 132-1 [212-1 nouveau] C. consom. CCA (avis), 14 mars 2013 : avis n° 12-02 ; Cerclab n° 4996 (non-lieu à avis), sur demande de CA Reims, 3 mai 2011 : Dnd.
Articulation des al. 1 et 2 de l’art. L. 211-1 C. consom. Le texte nouveau, art. L. 211-1 C. consom., reprend le contenu de l’art. L. 133-1 et 2 C. consom., mais le titre est différent : « présentation des contrats », ce qui semble plutôt discutable, l’interprétation ne semblant liée que de façon indirecte à l’interprétation. Sur le fond, le texte nouveau n’a pas résolu les problèmes précédemment exposés.