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CA RIOM (ch. civ. et com.), 2 octobre 1996

Nature : Décision
Titre : CA RIOM (ch. civ. et com.), 2 octobre 1996
Pays : France
Juridiction : Riom (CA), ch. civ. et com.
Demande : 200/96
Décision : 428/96
Date : 2/10/1996
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurisclasseur périodique, édition générale
Décision antérieure : TI VICHY, 26 décembre 1995
Numéro de la décision : 428
Décision antérieure :
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CERCLAB/CRDP – DOCUMENT N° 609

CA RIOM (ch. civ. et com.), 2 octobre 1996 : RG n° 200/96 ; arrêt n° 428/96

Publication : JCP Ed. G 1997. I. 4033, chron. Droit des sûretés, n° 9, obs. Ph. Simler et Ph. Delebecque ; Lamyline

 

Extrait  : « Attendu que le caractère abusif en l'espèce de cette clause, ne saurait résulter d'une application de l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978, inapplicable en l'espèce, les cautions ne pouvant être tenues pour des « consommateurs » ou des non professionnels, alors qu'elles sont associées de la société débitrice principale et qu'elles ont agi dans le cadre de leur activité professionnelle pour assurer le fonctionnement de la société dans laquelle elles avaient leurs intérêts ; Attendu que cette clause n’apportait par ailleurs aucun avantage excessif à telles ou telles cautions par rapport aux autres notamment M. Y. et Madame X. ; que cette clause s’appliquait également aux deux sociétés cautions appelantes ».

 

COUR D’APPEL DE RIOM

CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 2 OCTOBRE 1996

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 200/96. Arrêt n° 428/96.

ARRÊT RENDU LE : DEUX OCTOBRE MIL NEUF CENT QUATRE VINGT SEIZE par la CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de : M. BARDEL, Président, M. DESPIERRES, Conseiller, M. LEGRAS Conseiller ;

En présence de : Mme GOZARD Greffier lors des débats et du prononcé.

Sur APPEL d'une décision rendue le : 26 décembre 1995 [N.B. : minute originale mentionnant par erreur 2 OCTOBRE 1996] par le tribunal d'instance de VICHY.

 

APPELANT :

- SARL BOURBONNAISE DE DISTRIBUTION

Dont le siège social est [adresse], Représentée concluant par Maître TIXIER Avoué, plaidant par la SCP LIENHARD Avocat à STRASBOURG.

- Société BRASSERIE FISCHER

Dont le siège social est [adresse], Représentée concluant par Maître TIXIER Avoué, plaidant par la SCP LIEHNHARD Avocat à STRASBOURG.

 

INTIMÉ :

Madame X.

Domiciliée [adresse] [minute page 2] Représentée concluant par Maître LECOCQ Avoué, plaidant par Maître SIMONIN Avocat à VICHY.

 

Après avoir entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries à l'audience publique du 11 SEPTEMBRE 1996 la Cour a mis l'affaire en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience publique de ce jour.

A cette audience, M. BARDEL Président, a prononcé publiquement l'arrêt suivant :

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 3] EXPOSE DU LITIGE :

Par jugement en date du 26 décembre 1995 auquel la Cour se réfère pour plus ample exposé, le tribunal d'instance de VICHY :

- déclare Madame X. recevable en sa demande.

- condamne la SARL Société BOURBONNAISE de DISTRIBUTION et la BRASSERIE FISCHER à payer chacune à Madame X. la somme de 12.130,89 Francs en principal, avec intérêts au taux légal à compter du 12 octobre 1994.

- condamne la SARL BOURBONNAISE de DISTRIBUTION et la SA FISCHER aux dépens et à payer 1.600 Francs HT en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

 

Par déclaration en date du 9 janvier 1996, la SARL BOURBONNAISE de DISTRIBUTION et la société BRASSERIE FISCHER ont régulièrement interjeté appel de la décision et sollicitent de la Cour qu'elle :

- déclare l'appel de la BRASSERIE FISCHER et de la SARL BOURBONNAISE recevable et bien fondé.

- infirme le jugement rendu par le tribunal d'instance de VICHY le 26 décembre 1995 en ce qu'il condamne la SARL BOURBONNAISE de DISTRIBUTION et la BRASSERIE FISCHER à payer chacune à Madame X. la somme de 12.130,89 Francs en principal, avec intérêts au taux légal à compter du 12 octobre 1994.

- condamne Madame X. aux entiers frais et dépens de l'appel ainsi qu'aux frais et dépens de la procédure devant le tribunal d'instance de VICHY.

- condamne Madame X. à verser aux appelantes un montant de 7.236 TT au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Leurs moyens sont les suivants :

- la renonciation à l'article 2033 du Code Civil suivant l’article 6 du contrat de cautionnement du 5 avril 1993, qui doit être expresse, se trouve contenu: dans ledit contrat.

- la licéité d'une renonciation au recours entre cofidéjusseurs ne peut être mise en doute.

- la renonciation à l'article 2033 du Code Civil [minute page 4] doit être expresse mais ne doit pas nécessairement faire l'objet d'une mention manuscrite par la caution.

- le caractère exprès n'implique aucune forme particulière.

- l'article 6 du contrat du 5 avril 1993 constitue une clause claire et précise, rédigée en caractères lisibles et accessibles.

- les dispositions de l'article 1326 du Code Civil circonscrit au quantum de l'engagement ne s'appliquent pas à la renonciation en cause.

- la clause de renonciation ne contient aucun caractère abusif. La caution ne rentre pas dans la catégorie des consommateurs.

- l'article 6 du contrat du 5 avril 1993 n'est pas léonin.

- cet article 6 contient une clause qui ne présente non plus aucun caractère potestatif.

L'article 6 ne constitue pas juridiquement une condition et opère une renonciation à un droit sans régler les modalités du contrat.

 

Intimé, Madame X. conclut à la confirmation du jugement entrepris et sollicite de la Cour :

- qu'elle condamne solidairement les appelants à verser la somme de 10.000 Francs à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, injustifiée et préjudice financier.

- qu'elle condamne les appelantes sous la même solidarité à verser la somme de 6.000 Francs HT au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Son argumentation en réponse sera synthétisée comme suit :

- la renonciation doit être expresse et les parties doivent avoir de façon explicite et non équivoque, connaissance de la nature et de l'étendue de l'obligation contractée.

- l'article 6 apparaît parmi un ensemble d'autres paragraphes sans être particulièrement détaché ou mentionné dans des caractères différents.

- [minute page 5] la SOGER et les deux appelantes liées par un intérêt économique puissant sont complices dans le but évident d'obtenir plus facilement de non professionnels des sûretés accessoires au contrat principal.

- l'engagement des appelantes est simulé : celles-ci ont mentionné une fausse cause en dissimulant la cause véritable, la sanction en est la nullité de la clause exonératoire.

- la loi du 10 janvier 1978 est applicable à tout contrat, y compris les contrats de prêts, et entre professionnels et non professionnels.

- le fait de se porter caution dans le cadre d'un contrat qui n'entre pas dans ses activités professionnelles relève du champ d'application de la directive du 4 avril 1993 sur les clauses abusives.

- la clause est purement potestative conformément à l'article 1174 du Code Civil.

- la clause est léonine.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIVATION

Attendu que le contrat de cautionnement du 5 avril 1993 porte une clause dactylographiée contenue en son article 6, normalement lisible, ainsi libellée : « Les cautions déclarent renoncer, en cas de pluralité de cautions, à tout bénéfice de discussion et de division, à tout recours et à toute répétition entre cautions, quelle qu'en soit la cause » ;

Attendu que cette disposition conventionnelle constitue une renonciation aux dispositions de l'article 2033 du code Civil relatives au recours d'une caution contre ses cofidéjusseurs ;

Attendu qu'une telle renonciation conventionnelle est licite, cette disposition légale n'étant pas d'ordre public ;

Attendu en effet que la jurisprudence révèle qu'une telle renonciation répond à un objectif concret : elle permet, en effet, d'établir une hiérarchie entre plusieurs cautions ou groupes de cautions, les unes ne devant supporter la dette qu'en cas d'insolvabilité des autres, un tel montage juridique permet de combiner de manière simple et originale les avantages d'une pluralité de [minute page 6] cautions et l'idée de contre garantie ; toutes les cautions en effet, sont tenues solidairement vis à vis des créanciers, mais certaines jouent en même temps le rôle de sous cautions des autres en s'engageant à supporter seules le poids de la dette et en renonçant, par conséquent, à tout recours en contribution contre les autres ;

Attendu qu'il ne résulte pas des dispositions de l'article 1326 du code Civil qu'une telle renonciation doive être manuscrite ; que le formalisme défini par ce texte est circonscrit au quantum de l'engagement ; que cette renonciation ne doit pas nécessairement être rédigée de la main de la caution ;

Attendu que le caractère abusif en l'espèce de cette clause, ne saurait résulter d'une application de l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978, inapplicable en l'espèce, les cautions ne pouvant être tenues pour des « consommateurs » ou des non professionnels, alors qu'elles sont associées de la société débitrice principale et qu'elles ont agi dans le cadre de leur activité professionnelle pour assurer le fonctionnement de la société dans laquelle elles avaient leurs intérêts ;

Attendu que cette clause n’apportait par ailleurs aucun avantage excessif à telles ou telles cautions par rapport aux autres notamment M. Y. et Madame X. ; que cette clause s’appliquait également aux deux sociétés cautions appelantes ;

Attendu que le caractère léonin de cette clause est affirmé, non démontré ; qu'il n'est établi aucun élément d'une telle qualification ;

Attendu que l'affirmation du caractère potestatif de cette clause est à écarter, celle-ci ne constituant pas une condition ; qu'elle ne pose qu'une renonciation à un droit ;

Attendu que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que cette clause est valable, que les cautions qui ont remplies leurs obligations doivent être déboutées de leur recours contre les autres cautions ; que le jugement doit être infirmé ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu à allocation d'indemnité au titre des frais irrépétibles de procédure ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

INFIRME le jugement.

[minute page 7] Et STATUANT A NOUVEAU :

DÉBOUTE Madame X. de l'ensemble de ses demandes.

REJETTE toutes autres demandes.

CONDAMNE Madame X. aux dépens et autorise Maître TIXIER, avoué, à recouvrer directement ceux dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision suffisante.