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6178 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Cadre général - Normes - Droit de la consommation

Nature : Synthèse
Titre : 6178 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Cadre général - Normes - Droit de la consommation
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6178 (10 juillet 2020)

PROTECTION CONTRE LES DÉSÉQUILIBRES SIGNIFICATIFS DANS LE CODE DE COMMERCE (ART. L. 442-1-I-2° C. COM.)

NOTION DE DÉSÉQUILIBRE SIGNIFICATIF - CADRE GÉNÉRAL DE L’APPRÉCIATION

NORMES DE RÉFÉRENCE - DROIT DE LA CONSOMMATION (ART. L. 212-1 C. CONSOM. - ANCIEN ART. L. 132-1 C. CONSOM.)

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2020)

 

Déséquilibre significatif : notion commune. Sur la condition commune de l’exigence d’un déséquilibre significatif dans l’ancien art. L. 132-1 [212-1] C. consom. et l’art. 442-1-I-2° C. com. (idem pour l’ancien art. L. 442-6-I-2° C. com.), V. la position du Conseil constitutionnel : pour déterminer l’objet de l’interdiction des pratiques commerciales abusives dans les contrats conclus entre un fournisseur et un distributeur, le législateur s’est référé à la notion juridique de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties qui figure à l’[ancien] art. L. 132-1 du code de la consommation reprenant les termes de l’art. 3 de la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 susvisée ; [en] référence à cette notion, dont le contenu est déjà précisé par la jurisprudence, l’infraction est définie dans des conditions qui permettent au juge de se prononcer sans que son interprétation puisse encourir la critique d’arbitraire. Cons. constit., 13 janvier 2011 : Décision QPC n° 2010-85 ; Cerclab n° 3533 ; D. 2011. 415, note Y. Picod ; 450, pan. D. Ferrier et 392, chron. M. Chagny ; JCP G 2011, 274, note D. Mainguy ; Contr. conc. consom. 2011, chron. n° 5, J.-L. Fourgoux, comm. n° 62, obs. N. Mathey et n° 63, obs. M. Malaurie-Vignal, transmis par Cass. com. 15 octobre 2010 : pourvoi n° 10-40039 ; arrêt n° 1137 ; Cerclab n° 2373, sur demande de T. com. Bobigny (8e ch.), 13 juillet 2010 : RG n° 2010F00541 : jugt n° 2010F01051 ; Cerclab n° 4299.

Pour la position de la Cour de cassation, admettant le principe posé par le Conseil constitutionnel, tout en considérant que l’analogie a ses limites, V. résumé ci-dessous : Cass. com., 25 janvier 2017 : pourvoi n° 15-23547 ; arrêt n° 135 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 6707, rejetant le pourvoi contre CA Paris (pôle 5 ch. 4), 1er juillet 2015 : RG n° 13/19251 ; Cerclab n° 5288.

Pour les juges du fond, V. par exemple : la notion de déséquilibre significatif au sens de l’ancien art. L. 442-6 [L. 442-1] C. com., inspirée du droit de la consommation, conduit à sanctionner par la responsabilité de son auteur, le fait pour un opérateur économique d'imposer à un partenaire des conditions commerciales telles que celui-ci ne reçoit qu'une contrepartie dont la valeur est disproportionnée de manière importante à ce qu'il donne. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 23 mai 2013 : RG n° 12/01166 ; Cerclab n° 4605, sur appel de T. com. Lille, 12 janvier 2012 : RG n° 2011/03836 ; Dnd, cassé partiellement sur un autre point par Cass. com., 16 décembre 2014 : pourvoi n° 13-21363 ; arrêt n° 1138 ; Bull. civ. IV, n° 186 ; Cerclab n° 6750. § Il résulte de la décision du 13 janvier 2011 du Conseil constitutionnel que le juge peut s'inspirer de la jurisprudence relative aux clauses abusives pour délimiter les contours de l'infraction de déséquilibre significatif ; l'existence de la notion de « déséquilibre significatif » dans le droit de la consommation permet en effet au juge et aux opérateurs économiques d'avoir un précédent légal facilitant la compréhension du texte. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 1er octobre 2014 : RG n° 13/16336 ; Cerclab n° 5030 ; Juris-Data n° 2014-02355, sur appel de T. com. Evry (3e ch.), 26 juin 2013 : RG n° 2009F00729 ; Dnd. § V. aussi : CA Versailles (14e ch.), 19 novembre 2015 : RG n° 14/07307 ; Cerclab n° 5432 (« elle se prévaut des dispositions de [l’anc.] art. L. 442-6-I-2° C. com. qui institue une protection entre professionnels comparable à celle prévue aux [anciens] art. L. 132-1 s. C. consom. pour les consommateurs »), sur appel de T. com. Nanterre (réf.), 11 septembre 2014 : RG n° 2014R00940 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 11), 24 mai 2019 : RG n° 17/08357 ; arrêt n° 147 ; Cerclab n° 8134 (« notion de déséquilibre significatif, inspirée du droit de la consommation »), sur appel de T. com. Paris, 4 avril 2017 : RG n° 44761 ; Dnd.

Pour la reprise du raisonnement dans le cadre de l’art. 1171 C. civ., V. une décision écartant l’existence d’un déséquilibre significatif dans le cadre de l’anc. art. L. 442-6-I-2° C. com., en renvoyant aux développements précédents écartant ce déséquilibre dans le cadre de l’art. 1171 C. civ. CA Paris (pôle 4 ch. 9), 25 juin 2020 : RG n° 17/16211 ; Cerclab n° 8478 (location financière de site internet pour un disc-jockey professionnel ; les parties ne sont pas des partenaires commerciaux et absence au surplus de déséquilibre significatif), sur appel de TI Lagny-sur-Marne, 7 juillet 2017 : RG n° 11-17-000243 ; Dnd.

Pour la reprise d’un raisonnement similaire pour un autre texte : la notion de « relation commerciale établie » figurant dans les dispositions contestées et déjà utilisée par les articles L. 420-2 et L. 442-6 ancien, du code de commerce, est suffisamment précise. C. constit., 23 mars 2017 : déc. n° 2017-750 DC ; Cerclab n° 6808 (point n° 22).

Limites de la comparaison. La similitude des notions de déséquilibre significatif prévues aux art. L. 132-1, devenu L. 212-1 C. consom. et L. 442-6-I-2° C. com., devenu L. 442-1-I-2° C. com., relevée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-85 QPC du 13 janvier 2011, n’exclut pas qu’il puisse exister entre elles des différences de régime tenant aux objectifs poursuivis par le législateur dans chacun de ces domaines, en particulier quant à la catégorie des personnes qu’il a entendu protéger et à la nature des contrats concernés ; ainsi, l’ancien art. L. 442-6-I-2° précité, qui figure dans le Livre quatrième du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et au Chapitre II du Titre IV, dédié aux pratiques restrictives de concurrence, n’exclut pas, contrairement à l’art. L. 212-1 C. consom., que le déséquilibre significatif puisse résulter d’une inadéquation du prix au bien vendu ; en outre, la cour d’appel a exactement retenu que la loi du 4 août 2008, en exigeant une convention écrite qui indique le barème de prix tel qu’il a été préalablement communiqué par le fournisseur, avec ses conditions générales de vente, a entendu permettre une comparaison entre le prix arrêté par les parties et le tarif initialement proposé par le fournisseur ; qu’il suit de là que l’ancien art. L. 442-6-I-2° [L. 442-1-I-2°] C. com. autorise un contrôle judiciaire du prix, dès lors que celui-ci ne résulte pas d’une libre négociation et caractérise un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. Cass. com., 25 janvier 2017 : pourvoi n° 15-23547 ; arrêt n° 135 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 6707, rejetant le pourvoi contre CA Paris (pôle 5 ch. 4), 1er juillet 2015 : RG n° 13/19251 ; Cerclab n° 5288.

Pour les juges du fond : l'existence de la notion de « déséquilibre significatif » dans le droit de la consommation permet au juge et aux opérateurs économiques d'avoir un précédent légal facilitant la compréhension du texte ; si le juge peut s'inspirer des solutions dégagées sur le fondement de l'ancien art. L. 132-1 [212-1] C. consom. pour interpréter les dispositions de l'anc. art. L. 442-6-I-2° [L. 442-1-I-2°] C. com., il n'en résulte pas que son raisonnement procède par analogie, dès lors que le champ d'application des deux textes est distinct, l'anc. art. L. 442-6 C. com. précité ayant vocation à s'appliquer dans les rapports entre professionnels où les rapports de force sont différents de ceux existants entre professionnels et consommateurs. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 1er octobre 2014 : RG n° 13/16336 ; Cerclab n° 5030 ; Juris-Data n° 2014-023551. § La notion de déséquilibre significatif peut donner lieu à des interprétations multiples, qui ne sauraient se référer aux solutions existantes en matière de droit de la consommation, d'une part parce que les sanctions n'y sont pas les mêmes et, d'autre part, parce que le champ du droit commercial reste, sauf exceptions, celui de l'autonomie de la volonté. T. com. Évry (3e ch.), 6 février 2013 : RG n° 2009F00727 ; Cerclab n° 4352. § Si le juge peut s'inspirer des solutions dégagées sur le fondement de l’[ancien] art. L. 132-1 [212-1] C. consom. pour interpréter les dispositions de l'ancien art. L. 442-6-I-2° [L. 442-1-I-2°] C. com., il ne peut se contenter de raisonner par analogie, dès lors que le champ d'application des deux textes est distinct, l'art. L. 442-6 ayant vocation à s'appliquer dans les rapports entre professionnels où les rapports de force sont différents de ceux existants entre professionnels et consommateurs. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 29 octobre 2014 : RG n° 13/11059 ; Cerclab n° 4985 (arrêt citant comme point de départ de son analyse l’art. R. 132-2-3° C. consom. pour vérifier si la clause litigieuse mise à la charge des victimes est manifestement disproportionnée, compte tenu de la situation particulière des parties, de leurs rapports de force et de leurs obligations réciproques), cassé sur un autre moyen par par Cass. com., 11 mai 2017 : pourvoi n° 14-29717 ; arrêt n° 701 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 6866 (anc. art. L. 442-6-1-2° C. com. inapplicable aux statuts d’un GIE), sur appel de T. com. Paris (8e ch.), 28 mai 2013 : RG n° J2013000004 ; Dnd. § Si la notion de déséquilibre significatif figure à l'ancien art. L. 132-1 [212-1] C. consom., néanmoins le champ d'application des deux textes est distinct, puisque l'anc. art. L. 442-6-I-2° C. com. n'a vocation à s'appliquer que dans les rapports entre professionnels où les rapports de force sont différents de ceux existants entre professionnels et consommateurs. CA Paris (pôle 5 ch. 11), 24 juin 2016 : RG n° 13/20422 ; Cerclab n° 5677 ; Juris-Data n° 2016-015041 (contrat de télésurveillance pour un carrossier ; les décisions de la Commission des clauses abusives, qui au surplus concernent les contrats conclus par les consommateurs, ne s'imposent pas au juge judiciaire), sur appel de T. com. Paris, 12 septembre 2013 : RG n° 2012061972 ; Dnd.

La mise en œuvre de l’ancien art. L. 442-6-I-2° C. com. n'est pas limitée aux seules hypothèses d'application de l’ancien art. L. 132-1 [212-1] C. consom. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 20 novembre 2013 : RG n° 12/04791 ; Cerclab n° 4622 ; Juris-Data n° 2013-026814, pourvoi rejeté par Cass. com., 3 mars 2015 : pourvoi n° 14-10907 ; arrêt n° 239 ; Cerclab n° 5073 (argument non évoqué).

Clauses portant sur l’objet principal. Sur l’approche inversée, à partir du droit de la consommation : rejet de l’argument selon lequel l’ancien art. L. 132-1 al. 7 [L. 212-1 al. 3] C. consom. instituerait un traitement plus sévère pour le consommateur final que pour une entreprise qui peut se prévaloir des dispositions de l'ancien art. L. 442-6-I-2° [L. 442-1-I-2°] C. com., qui ne contient pas une telle limitation, dès lors que ce texte, relatif aux pratiques restrictives de concurrence, ne vient nullement porter atteinte au contrat en sanctionnant le déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties par la nullité d'une partie de ses dispositions, mais permet au partenaire commercial d'une société en position dominante d'engager la responsabilité de cette dernière. CA Paris (pôle 2 ch. 5), 21 novembre 2017 : RG n° 16/18751 ; Cerclab n° 7278 ; Juris-Data n° 2017-024487 (assurance de prévoyance individuelle des salariés), sur appel de TGI Paris, 8 septembre 2016 : RG n° 16/04585 ; Dnd.

Recommandations de la Commission des clauses abusives. Les décisions de la Commission des clauses abusives, qui au surplus concernent les contrats conclus par les consommateurs, ne s'imposent pas au juge judiciaire. CA Paris (pôle 5 ch. 11), 24 juin 2016 : RG n° 13/20422 ; Cerclab n° 5677 ; Juris-Data n° 2016-015041 (contrat de télésurveillance pour un carrossier), sur appel de T. com. Paris, 12 septembre 2013 : RG n° 2012061972 ; Dnd. § Rappr. : une société, ayant conclu un contrat en rapport direct avec son activité, en qualité de professionnel, ne peut se prévaloir, même par analogie, d’une recommandation de la Commission des clauses abusives, laquelle concerne un contrat de télésurveillance conclu entre une société et des particuliers. CA Aix-en-Provence (8e ch. A), 1er mars 2012 : RG n° 10/16492 ; arrêt n° 2012/166 ; Cerclab n° 3690 (recommandation n° 97-01 ; N.B. l’arrêt a écarté l’ancien art. L. 132-1 [212-1] C. consom., en faisant immédiatement cette constatation, puis a estimé, plus loin dans les motifs, que la preuve d’un déséquilibre significatif au sens de l’anc. art. L. 442-6 C. com. n’était pas rapportée), sur appel de T. com. Aix-en-Provence, 21 juin 2010 : RG n° 09/4529 ; Dnd.

Comparaison des actions du Ministre et des associations de consommateurs. Pour une prise de distance : le droit de la consommation n’étant pas applicable, la référence à la jurisprudence rendue dans le cadre de l'action d'associations de consommateurs est inopérante : le fait que les clauses contestées ne soient plus proposées ne saurait faire obstacle au droit que le Ministre tient de l'anc. art. L. 442-6-III [L. 442-4] C. com. de requérir leur disparition définitive. T. com. Évry (3e ch.), 6 février 2013 : RG n° 2009F00727 ; Cerclab n° 4352 (« la cessation des pratiques mentionnées audit article » inclut nécessairement, sauf à perdre tout son sens, l'interdiction de les mettre en œuvre pour l'avenir). § V. aussi : l'action des services de l'État en matière de police économique, ne peut être assimilée à celles des associations de consommateurs qui, ne font que contribuer, aux côtés des pouvoirs publics, au respect des droits des consommateurs, sans en être les garants. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 4 juillet 2013 : RG n° 12/07651 ; Cerclab n° 4619 ; Juris-Data n° 2013-015022, pourvoi rejeté par Cass. com., 29 septembre 2015 : pourvoi n° 13-25043 ; arrêt n° 818 ; Cerclab n° 5324 (problème non examiné).